mercredi 20 juin 2012

Myanmar (la Birmanie)

La souffrance, les guerres, les maladies et les famines, la discrimination, les inégalités et les injustices, l’ignorance, l’intolérance, la mort sont certains de mes pires ennemis. Le bonheur, l’insouciance, l’instant présent vécue pleinement, le partage, la réalisation de projets de vie et de rêves sont des valeurs pour lesquelles je me bats depuis des temps immémoriaux, depuis que je suis apparu sur terre. C’est un combat que je ne peux pas mener seul. J’ai besoin que chaque être vivant s’y emploie avec moi 24h/24, 7 jours/7, 365 jours dans l’année…

Il est très dur d’atteindre les objectifs que je me suis fixés malgré un dur labeur à chaque seconde qui s’écoule. Les aspects positifs de l’existence terrestre permettent de conserver l’espoir d’une amélioration prochaine qui tendrait vers la perfection, d’avoir un point de convergence à atteindre, un de celui qui concentre l’attention telle la flamme d’une bougie dans l’obscurité totale. Mon champ d’action est tellement vaste que je me dois, au cours de ce récit, de le réduire drastiquement. J’évoquerais ci-dessous principalement le cas de cet animal que j’ai doté d’une faculté connue sous le nom d’intelligence. Il s’agit, vous l’aurez devinés, car vous lisez ces quelques lignes, de l’espèce à laquelle vous appartenez; l’être humain!

Comment puis-je lutter au quotidien contre l’apathie générale, l’insatisfaction, le mécontentement permanent, la non-reconnaissance de la chance dont peuvent jouir beaucoup d’entre-eux, quand très souvent, trop souvent, la nature humaine, négativement parlant, prend le dessus? J’aime à penser, au quotidien, même si cela reste une utopie sur la planète terre, qu’un jour chaque être humain pourra jouir pleinement de ce que j’ai à lui offrir! J’ai décidé de ne jamais relâcher mes efforts, de lutter contre les maux de la société, restant convaincu que le bonheur universel est atteignable pour le commun des mortels.

Je suis la Vie, sa personnification et le narrateur omniscient de ce récit.

J’ai en ma possession la plus belle des créations, un extraordinaire mais fragile équilibre avec la nature et l’environnement dans lequel j’évolue. Ceci me demande de travailler sans relâche, d’aller au-delà des frustrations de ne pas pouvoir toujours donner à tous ce qu’ils désirent. Je dois finalement laisser le libre arbitre à chaque animal, chaque individu pour qu’il puisse effectuer ces propres choix, voler de ces propres ailes. Je laisse à la planète terre la possibilité d’effectuer une sélection naturelle, à la génétique de créer chaque individu tel une entité unique… Chaque être vivant, plus spécifiquement lors de ce récit chaque personne, chaque individu est une partie de moi-même et interagie avec le reste de l’ensemble immatériel que je suis. Je ne suis finalement rien d’autres que quelques milliards de petites entités influençant une suite d’événements, bâtissant le passé, le présent et le futur. Il m’est donc impossible de vous conter mon histoire dans sa globalité et de la résumé par écrit. Restons pragmatiques et essayons de singulariser un peu la suite de ces lignes que vous vous apprêtez à lire.

Rien de tel qu’un exemple pour expliciter mes propos. Rien de plus facile que le suivi du quotidien d’un être humain pour que je prenne forme à chaque pulsation de son cœur, à chaque événement de sa vie. Au hasard, parmi plus de 6 milliards d’être-vivant sur la planète terre, je vais concentrer mon attention sur un petit homme qui interagie autant que faire se peut avec moi. L’instant présent vécu est capital ! Laissons-nous alors naviguer à un moment précis de son existence.

08h08, vendredi matin, 27 Avril 2012. Quelque part sur ce petit bout de planète, un avion atterrit sans fracas sur le tarmac d’un aéroport! Latitude: 16°48’ Nord, Longitude : 96°09’ Est. Nous nous trouvons à Yangon en Birmanie (Myanmar). Un jeune français, tout juste âgée de la trentaine, vient découvrir ce pays préservé jusqu’alors de la société de consommation à outrance, mais à quel prix ?
 La dictature imposée depuis 1962 par le général Ne Win puis par la junte militaire a plongé le pays sous le joug d’un embargo économique, financier et diplomatique, contrôlé par les plus grandes puissances mondiales. C’est pourquoi le pays a été tenu à l’écart de la globalisation internationale. L’élection de 1989 qui a vu émergé un partie d’opposition; la Ligue Nationale pour la Démocratie, ne sera qu’un feu de paille ne menant nullement à la démocratie. Son leader charismatique Aung San Suu Kyi, fille du général Bogyoke Aung San (homme populaire ayant activement participé à l’indépendance du pays en 1948. Il a été assassiné en 1947, un an avant l’officialisation de cette délivrance du joug du colonisateur anglo-saxon!), passera la plupart de sa vie en prison ou affiliée à domicile…
Les événements récents laissent entrevoir une sortie de l’impasse dans laquelle est plongé le pays. Les habitants ont été longtemps sous le contrôle d’un pouvoir militaire dictatorial puissant. J’ai essayé de leur fournir les meilleures conditions de vie possible, l’espoir d’un futur meilleur et prospère où chacun aurait des droits, acquis depuis longtemps par leurs semblables dans la majorité des pays à travers la planète. Malheureusement une petite minorité, tenant les rênes du pouvoir, en a décidé autrement. La soif de contrôle de son prochain, la soif d’argent et de domination ont été plus forts que tout. Ils ont pris le pas sur le respect d’autrui, sur les libertés de chacun. Ils ont gelés l’entre-aide et l’aide à son prochain. Ils ont empêchés tout à chacun de faire leurs propres choix, et de jouir comme ils le désirent, de leur existence et de ce que je peux leur offrir de mieux.

L’ouverture du pays et de ces frontières vers l’extérieur, le souffle démocratique s’intensifiant, l’espoir renaît dans les rangs de la population birmane. Les projets et rêves d’un nouveau pays resurgissent. Le temps est venu pour Matthieu de partir à la rencontre de ce peuple, et de ces minorités. Ces personnes, qui ont soufferts pendant des décennies, conservent un sens inné de l’accueil et de la bonne humeur. Malgré les blessures, les birmans sont fières de leur patrie et désirent que le touriste puisse partager ce ressentie, directement se sentir à son aise dans cette nouvelle contrée traversée…
Je m’efforce à croire qu’un des éléments les plus importants sur terre, pour qu’une vie en harmonie se développe et soit possible, est l’échange cordial avec ces semblables. Ce périple sur ces terres sera assurément réussi pour Matthieu si une communication appropriée et intéressante se développe naturellement et autant que faire se peut. Cela commence dans la cabine de l’avion, où un lien se noue entre Sergueï, russe vivant à Moscou, et ce jeune français. Ils partagent les frais du taxi avec 4 autres voyageurs pour se rendre de l’aéroport au centre-ville de la mégalopole la plus importante de ce pays, porte d’entrée pour les étrangers; Yangon ! Le séjour n’a pas encore vraiment commencé et déjà l’aspect relationnel va prendre le pas sur tout le reste…

Dans un pays ne possédant pas de distributeurs automatiques de billets, où l’utilisation de chèques de voyages n’est pas possible, l’aspect financier n’est tout de même pas à négliger. Tout voyageur se rendant sur ces terres doit disposer, en cash, d’une somme suffisante, lui permettant de subvenir à ces besoins pour la durée de son séjour. Le vol d’autrui ne faisant pas partie du vocabulaire birman il est plus aisé, pour toute personne foulant ces terres, d’envisager sereinement son voyage. 

A l’aéroport, un touriste, en partance, désire échanger de l’argent birman à un taux intéressant. Après quelques vérifications d’usage lors de ces transactions, ils procéderont à l’échange qui se révélera intéressant pour les 2 parties. Evoquons, une bonne fois pour toute, les aspects financiers! Le Kyat, monnaie locale, et le dollar sont les deux monnaies utilisés et utiles dans ce pays… Pour les touristes, le transport et le logement sont payables en dollars, tous les autres achats avec les locaux s’effectueront en Kyat.

Fort de son succès touristique de ces dernières années, d’une capacité d’accueil trop faibles, les prix pour les touristes dans le pays, fixés principalement par le gouvernement, se sont envolés en ce qui concerne les transports et le logement. Cette destination est donc actuellement plus chère que ces voisines des pays d’Asie du Sud-Est. Mais est-ce là l’essentiel? Pour Matthieu, la priorité n’est pas là, des solutions sont toujours envisageables et le plus important reste bien entendu l’instant vécu, la découverte de cultures variées, les nouvelles expériences et l’échange avec son prochain.
Les commentaires enthousiastes et élogieux de 100% des personnes, ayant foulé ce territoire et que Matthieu avait pu croiser au cours de ces péripéties, l’ont convaincu de choisir, coûte que coûte et maintenant, cette destination. L’unanimité des avis et opinions concernant une destination de voyage est un fait tellement rare qu’il est important de le souligner.
Laissons-nous alors entraîner dans le tourbillon d’aventures qui prend forme, doucement, dès les premiers instants… Après avoir répondu aux besoins basiques et vitaux de l’être humain (étancher sa soif, remplir son estomac, et éventuellement trouver un logement), Sergueï et Matthieu partent à la découverte de cette première étape qui s’étale devant leurs yeux! Déambulé dans les rues de Yangon permet instantanément aux deux hommes de comprendre qu’ici le développement économique, social, touristique n’est pas le même que dans les pays voisins d’Asie du Sud-Est. Il est aisé de voir que le pays s’ouvre tout juste et à petits pas vers le monde extérieur. Tourné vers le futur et la modernité, cette ville, la plus importante du pays, reste néanmoins encore bloquée dans un passé dictatorial non révolu.
Le statut de cette ville démontre à lui seul l’importance des idéologies religieuses, des croyances, et superstitions. En effet, Yangon n’est plus la capitale du pays, depuis 2005, simplement car l’astrologue du général Than Shwe, au pouvoir, a suggéré que pour un avenir prospère pour le pays, la capitale devait être délocalisée à Nay Pyi Taw, plus au Nord, sur une petite colline alors quasiment inhabitée. Ce fut le cas nombre de fois par le passé pour les anciennes citées royales qui furent elles-aussi rebâties sur un autre site (changement environ tous les deux-trois ans parfois seulement de quelques dizaines de kilomètres). Mais d’un point de vue actuel, ce changement est dénué de sens. La ville ultra-moderne, ces bureaux flambants neufs, ces édifices religieux imposants et son périphérique à 4 voies, qui ont été construits, sont quasiment désert de population.

Revenons donc dans le feu de l’action, dans cette ville chaotique mais vibrante, dans le cœur économique de ce pays qui ne demande qu’à se développer. Yangon est dépourvu de magasins de souvenirs pour touristes, de grand centre commercial pour effectuer ces emplettes, faire son shopping. Cette ville cosmopolite, aux bâtiments d’habitats et/ou coloniaux vieillissants, possède un charme qu’il est nécessaire d’apprivoiser. La sympathie des habitants, l’intérêt pour les touristes, l’envie d’apprendre des autres vont grandement faciliter et simplifier l’adaptation de Sergueï et Matthieu avec cette nouvelle culture. Dans les stands de rue pour la nourriture, ou d’échoppes pour la vente d’objets diverses, les discussions s’animent. Les voyageurs et les locaux tentent d’apprendre les uns des autres malgré les difficultés à parfois se faire comprendre pour des raisons linguistiques principalement.
Billets de train en poche pour la prochaine destination, dès le lendemain matin, les 2 compères qui se découvrent au fur et à mesure des discussions et des expériences, décident d’aller découvrir le cœur religieux et spirituel de ce pays, le symbole de l’identité Bimane. Vielle de 2500 ans, la pagode Shwedagon est une des plus impressionnantes de toute l’Asie du Sud-Est. Les habitants de la Birmanie, très majoritairement bouddhistes, essaient coûte que coûte de se rendre au minimum une fois au cours de leur vie dans ce haut lieu de pèlerinage.
Construit sur une colline, à quelques kilomètres au Nord du centre-ville, le Stupa, haut de 98 mètres, renferme des reliques sacrées dont 8 cheveux du Bouddha. Il serait recouvert de plusieurs tonnes de feuilles d’or et son sommet, observable avec des jumelles, renferme plus de 5000 diamants et 2000 autres pierres précieuses. Il est aussi visible depuis quasiment toute la ville et il est  entouré d’une multitude de temples, de représentation de Bouddhas…
 Le gigantisme et les superlatifs associés à ces édifices sont incontestables, la beauté des lieux ne peut aucunement être remise en cause. Mais Matthieu ne tient pas particulièrement à retenir cet aspect matérialiste qui va, pour lui, à l’encontre de ce que prône la philosophie de vie Bouddhiste. L’exposition d’une telle richesse est un peu démesurée dans un pays où la population « ne roule pas sur l’or » mais elle se justifie pleinement par le fait qu’elle provient de dons pécunier totalement libres fait par la population elle-même ou par de généreux donateurs fortunés. Le plus important restera néanmoins tous les moments de vie qui s’offriront à Sergueï et Matthieu dans ce lieu unique. Ils vont savoir les saisir à leur manière. En tant que spectateurs ils assisteront à la représentation d’une ferveur sans bornes de la population pour ce culte. Des novices en habits traditionnels viennent prêter serment. Accompagnés de leur famille, ils procèdent à un véritable défilé orchestré par des règles ancestrales. Les croyants viennent se recueillir devant les différentes représentations du Bouddha. Ils participent aussi à l’entretien des lieux leur permettant, selon leur croyance, d’améliorer leur karma tel une Béa (bonne action) pour les catholiques.
L’idée de s’y rendre en fin d’après-midi participera amplement à la beauté de l’instant vécu. En effet, le parvis de pierre n’est plus aussi brulant pour des nu-pieds obligatoire dans l’enceinte de ces temples. De plus le soleil, revêtant des couleurs orangées puis rougeâtres, va sublimer les édifices dorés. La nuit tombée, le magnifique éclairage complétera un spectacle inoubliable sous le son des cloches et des prières. La première approche de ce pays montre la ferveur religieuse qui règne dans ce pays et la discipline à laquelle les birmans sont très attachés.  
Revenant dans le centre-ville, c’est dans un stand de rue que Sergueï et Matthieu vont généreusement se voir offrir des cigares et du thé en entamant une discussion avec un local.  Ils dégusteront leur premier plat de pâtes. Simple, efficace et copieux, ils rentreront repus à leur auberge de jeunesse. Pour être plus précis, ils en prendront la direction. En effet, hasard de la vie ou plutôt coïncidence, Sergueï croise une Israélienne qu’il avait rencontré 6 mois plus tôt lors d’un autre cours voyage de 3 semaines au Laos. Ils n’avaient pas gardé contact, elle a continué son périple au long cours de plus de 11 mois et leurs chemins devaient se recroiser à cet instant précis dans les rues de Yangon. Les contacts renoués, un échange intéressant se met en place rapidement. Des bières en poche, l’israélienne et sa meilleure amie, Sergueï et Matthieu décideront de gagner le toit de l’hôtel pour refaire le monde lors de discussions partant tous azimuts. Le couple d’allemand, ayant partagé le taxi depuis l’aéroport le matin même, se joindra à eux. Je peux lire dans les yeux de tous le plaisir d’échanger concernant leur passion commune du voyage. Le sourire qui se lit sur leur visage en dit long sur le bien-être palpable qui règne lors de cette soirée. Les rires qui se détachent  parfois dans l’atmosphère ne font que confirmer cet état de fait. Ce ne sera que tard dans la nuit que chacun regagnera finalement son lit.

Le réveil sera un instrument indispensable et utile en ce samedi matin. Les 2 voyageurs ne louperont pas le départ de leur train à 7h15. Ils partent en direction du Sud-est pour atteindre la ville de Kyaiktiyo (ou Golden Rock = rocher en or).
 Le moyen de transport utilisé est apprécié par Sergueï et Matthieu pour plusieurs raisons qui me tiennent à cœur. En effet, dans le train la vie locale, le partage, l’échange sont omniprésents… Les déplacements sont assez aisés, les personnes sont souvent disposés face à face en Asie. Etant un des moyens les moins chers de se déplacer, il est emprunté par de nombreux locaux…
 Après une certaine timidité ambiante due à la proximité d’étrangers, la curiosité prend très rapidement le dessus et une communication se met en place. Les locaux n’hésite pas à questionner ces deux touristes venus découvrir leur pays même si ce n’est parfois qu’en bafouillant quelques mots d’un anglais approximatif. Les arrêts dans les gares ne sont qu’un ingrédient supplémentaire participant à l’échange avec les birmans venus vendre des fruits, gâteaux, sandwichs, arachides, boissons… La traversée de paysages grandioses, d’endroits insolites, de champs en pleine campagne où les fermiers s’affairent sera la cerise sur le gâteau de ce voyage en train.
 5h00 plus tard, voici les deux nouveaux compères de voyages arrivaient dans la ville, but de cette première étape. Mais le site à visiter, le Mont de Kyaiktiyo, se trouve en réalité à 24km de là, près de la ville de Kinpun. C’est sur le toit d’un camion aménagé pour le transport en commun, que les deux hommes profitent d’une vue imprenable sur la nature environnante et atteigne finalement le lieu où ils passeront la nuit.
Dans la vie de voyageurs, il faut savoir saisir les opportunités qui sont offertes. Le logement leur tombe dans les bras, à l’arrivée dans la ville. Des rabatteurs se livrent à un combat rude mais fairplay pour promouvoir leur logement. Une fois les prix descendus en raison de la faible fréquentation en cette saison, ils ne leur restent plus qu’à découvrir leur logement temporaire. Je me plais à les voir immédiatement échangés avec des couples franco-russe et d’allemands qui sont installés à la terrasse de l’hôtel. Beaucoup d’informations sont échangés avec ces personnes en fin de périple de plus de 3 semaines, ici à Myanmar. Des astuces, des informations pratiques, des contacts pour de futures destinations sont prises.

Pour assouvir un plaisir pour les sens, ainsi qu’un besoin vital pour l’organisme, ils prennent la direction d’un restaurant aux couleurs locales. Matthieu va y déguster un nouveau mets qu’il appréciera énormément. La salade de tomate que l’on vient de lui servir ne ressemble à rien à ce qu’il avait déjà eu l’occasion de goûter dans son existence. L’intensité des saveurs des tomates, le mélange avec des oignions, une sauce salade exquise mais surtout l’ajout de morceaux de cacahuètes en font un plat unique. Ils se régaleront aussi avec les plats principaux à base de riz et légumes.

Le ventre plein, ils peuvent alors partir vers les sommets environnants, où se trouve un des plus énigmatiques et intriguant site en Birmanie, le rocher d’or qui défie la gravité! Légendes et croyances en accord avec la nature sont des éléments qui ponctuent l’existence de l’être humain et sont toutes les deux parties prenantes au rocher d’or à Kyaiktiyo…
 La légende veut qu’un cheveu du Bouddha, sauvé des flots, fût transporté par bateau. Ce bateau se serait alors transformé en rocher reposant en un équilibre instable. Mais ni la gravité, ni quelques séismes ayant sévis dans la région n’ont eu raison de ce dernier qui trône toujours au beau milieu de ces paysages d’où il est visible à plusieurs centaines de mètres. Les bouddhistes ont transformé ce lieu en un lieu de culte où de nombreux miracles se sont d’ores et déjà produits. Un stupa renfermant le fameux cheveu a été déposé sur le dessus du rocher culminant alors à plus de 5 mètres de hauteur. Le rocher est recouvert d’une couche de feuilles d’or que les pèlerins continuent de déposer quotidiennement…
C’est moins un site touristique qu’un lieu où les croyants viennent pour se recueillir, demander la réalisation de leurs vœux et croire en un possible miracle qui les sortirait d’une situation inespérée… Voir et découvrir ce lieu, spirituellement important pour les Birmans, restera un moment spécial dans le périple de ces voyageurs. La nuit tombant, ils prennent le chemin-retour pour regagner leurs pénates. Ils passeront une très bonne soirée animée avec les deux couples, rencontrés antérieurement, autour d’un bon verre… L’alcool n’étant pas une obligation pour partager un bon moment, Matthieu dégustera deux bons jus de fruit et shakes à l’ananas et à la mangue.

Dès le lendemain matin, Sergueï et Matthieu prennent le bus en direction de Mawlamyine. Cette ville, troisième du pays pour sa population, est le point le plus au Sud que les touristes, voyageant sur le territoire, ont le droit d’atteindre (certains touristes présent en Thaïlande passe la frontière à Ranong pour se rende à Kawthoung, ville frontière la plus au Sud de Myanmar. Mais ils sont cantonnés dans la ville et ces environs et cela leur permet simplement de renouveler leur visa en Thaïlande pour obtenir 15 jours de plus). Une surprise attend les deux compères dans le bus. Les deux israéliennes sont là et ils partageront le trajet ensemble. Cela sera la dernière fois qu’ils se verront, prenant par la suite des chemins différents et décidant de ne pas rester dans le même hôtel en arrivant dans la ville. Mais, à cet instant, l’histoire n’est pas encore écrite tel quel! Laissons nous guider par la suite chronologique des événements.

Toute seconde qui s’écoule, quel que soit le lieu, et le moment, offre une possibilité d’inattendu, d’événements impromptus et spontanés. Dans le bus, un spectacle impressionnant s’offre aux yeux des voyageurs. Des moines, demandant l’aumône et des offrandes, tels que de la nourriture, longent le bord de route. Spectacle commun dans  toute l’Asie du Sud-est bouddhiste, celui-ci se caractérisera par la quantité d’individus impliqués dans cette longue procession. Des centaines et centaines de moines, que dis-je, des milliers déambulent en file indienne revêtus de leur toge orangé-rougeâtre. Part très importante de la vie du pays, le bouddhisme et ces moines, qui y adhérent, auront une place très importante tout au long du périple de ce jeune homme.
L’arrivée à Mawlamyine se passe sans encombre. Après avoir fait le tour des 2 hôtels centraux destinés aux touristes, les filles choisiront le deuxième visité, tandis que les garçons resteront cantonnés sur le premier qui leur permettra par la même occasion de prendre un bateau privé (le service public ne fonctionnant plus sur cette route) jusqu’à leur prochaine destination; Hpa-an. Le séjour effectué dans la ville sera très agréable avec une population accueillante, des quartiers animés, une ville entourée d’eau.
 Elle est dominé par un temple bouddhiste et son stupa qui ont fière allure et permettent un magnifique point de vue sur toute la ville et le détroit du fleuve Thanlwin. Comme Yangon, Mawlamyine reste que très peu développé malgré que ce soit une des villes les plus imposantes de la Birmanie. Elle a l’allure d’une bourgade des années 1960 en France, prête à exploser, à se moderniser, à rentrer finalement dans le nouveau millénaire avec un boom économique promis par l’évolution de la situation du pays. Le repas, cuit au feu de bois et pris dans la rue sur des petits tabourets, contribue au folklore de l’expérience birmane pour ces deux acolytes. Ça représente par la même occasion une part de vie de la population locale au quotidien.
L’échange avec les locaux restera limité en raison de la barrière de la langue. Cela fait partie de la vie des voyageurs! Matthieu aimant particulièrement jouer à ce jeu subtil, il a appris les basiques de leur langue. Ceci permet d’établir le premier contact, de partager un petit quelque chose avec la population. Par la suite, le langage des signes, un sourire, des gestes permettront aux uns et aux autres de se faire comprendre et d’établir cette communication, même primitive, primordiale entre être humain. La journée sur place se volatise à une vitesse supersonique, les deux hommes étant pris dans l’engrenage de chaque seconde qui s’écoule… Mais chaque instant sera vécu pleinement et exploitée à son maximum.
Le lendemain matin, Sergueï et Matthieu se joignent à un groupe de 5 autres voyageurs pour louer ce bateau privé. Ils se rendent à Hpa-an, à 4h00 de là, en traversant des paysages grandioses et préservés de toute pollution urbaine. Les principales marques humaines, décelées lors de ce périple, seront religieuses et bouddhistes avec des Stupas dominant les collines environnantes.  L’ambiance est détendue sur le bateau, les discussions fusent entre jeunes voyageurs européens provenant de différents horizons et n’ayant pas les mêmes expériences de voyage en cours, passés et probablement à venir…
Une fois installé, la logistique gérée pour les jours à venir, Matthieu se sent le besoin de se défouler, de découvrir les environs en sportif. Louant un vélo, il va parcourir seul plus de 100 kms à travers les champs de riz et de cannes à sucres qui se trouvent au pied de hauts pics abruptes. La vue depuis leurs sommets est exceptionnelle.
 Les temples sur leurs parois, dans les grottes à leur base sont d’un intérêt majeur pour les visites. C’est par exemple le cas de la « Saddar Cave », porte des enfers, qui est remplie d’iconographie de bouddhas. Par une chambre sombre de plusieurs centaines de mètres, Matthieu va se faufiler dans le noir à l’aide de sa lampe frontale pour atteindre un lac intérieur, touché par la lumière du jour, qui est sublime!
 Rentré bien après le coucher de soleil à son hôtel, Matthieu, sans lumière sur sa bicyclette, se fera ramener par des conducteurs de scooters, qui amicalement, lui éclaireront la route et attendrons patiemment derrière lui. L’entre-aide est ici omniprésente et cela remplie le jeune homme de joie. Revigoré, qui plus est, par la sécrétion d’endorphines produite lors de l’effort intense, Matthieu a une pêche d’enfer avant d’attaquer cette nouvelle soirée sur ces terres birmanes.
Dès 20h00, un groupe de 6 Backpacker partent dîner dans un restaurant local où ils dégusteront différents curry avec du riz, des légumes et quelques sucreries en dessert. Rentrant à l’hôtel, la fin de soirée se passera pour certains d’entre-eux dont Matthieu sur le balcon de l’hôtel. Des discussions interminables sur des sujets variés de la vie de voyageur, de géopolitique mondiale, du pays où ils sont originaires ou de la prochaine destination, se mettent en place et dureront jusqu’à tard dans la nuit.

Le rythme est assez dense en ce début de séjour. Sergueï ayant moins de temps que Matthieu pour la visite de ce pays, ils décident de continuer ensemble non d’une façon effrénée mais en ne se reposant pas sur leurs lauriers! Tôt le matin, ils prennent le bus en direction de Bago, à 80 kms au Nord de Yangon et à l’intersection des routes pour revenir sur leur pas, ou s’aventurer encore plus haut dans ces terres encore traumatisées par les dizaines d’années de dictature, non révolues encore de nos jours. Bago, ville de 200 000 habitants et le monde des Bouddhas, le lieu où les sites religieux sont légions et monumentaux.
  Avec Jolls, une anglaise rencontrée dans le bus, ils décident de partager, à trois, un « Tuk­-tuk » pour visiter les différents sites éparpillés un peu partout. Ce moyen de transport leur permet de se déplacer rapidement, d’avoir un pseudo guide leur fournissant un topo succinct sur chaque site et leur évitant, par la même occasion, de payer les 10$ exigés pour l’entrée sur les sites majeurs. Faire travailler la population locale est souvent un bon moyen de ne pas payer directement la junte militaire encore au pouvoir mais plutôt  de distribuer les richesses à des personnes qui en ont besoin pour vivre et nourrir leur famille.
La Shwemawdaw Paya visité (Stupas 14 mètres plus haut que son homonyme de Yangon), l’image du Bouddha réincarné et allongé de 55 mètres de long (9 mètres de plus que le très fameux Bouddha de Wat Pho à Bangkok) admiré et admirable en raison de ces parures splendides, les 3 jeunes gens vont arpenter tous les autres temples et monuments comportant des milliers de Bouddhas en position d’enseignement, de méditation, de mort ou réincarnation après l’atteinte du Nirvana… Parmi ces monuments, le temple au serpent sacré; un python, ou le monument aux quatre Bouddhas, haut de 10 mètres, et faisant face aux quatre points cardinaux, seront certains des pics de cet après-midi, passés cheveux au vent dans le véhicule les acheminant entre deux visites.

Le temps est venu, maintenant pour les 3, et non seulement 2 voyageurs réunis de rejoindre la station de bus, à partir de laquelle ils partiront de nuit pour se rendre à Kalaw.  Un trajet de 10h00 sur une route très moderne se déroulera agréablement. Le stop dans la seule air d’autoroute moderne permettra à Matthieu de recharger les batteries et de s’endormir paisiblement bercé par le calme de ce moyen de transport et de la digestion qui commence à faire effet.

Les rues de Kalaw sont sombres et désertes quand ils l’atteignent au milieu de la nuit. Un hôtel recommandé par d’autres touristes leur ouvrira ces portes. Ils vont pouvoir finir leur nuit dans des chambres en bois grand confort avant d’attaquer dès le lendemain matin le pourquoi de leur venue dans ces lieux. En effet, c’est ici le départ pour des randonnées dans les alentours de la ville durant 1 ou plusieurs jours pour admirer les paysages agricoles, les collines où poussent thé, tabac… et rentrer en contact avec les minorités locales dénommées Palaung, Pa-O, Intha ou encore villages Shan. 
Jolls, Sergueï et Matthieu vont avoir le temps de profiter de cette opportunité, de vivre au plus près de la réalité quotidienne de ces populations lors d’un trek de 3 jours partant de Kalaw pour rejoindre un des lieux touristiques les plus fameux du pays: le lac Inlé! Un quatrième larron, Jean, français de son état, va se joindre à eux.  Accompagnés par un guide expérimenté, ils prennent, dès 9h00, la direction d’un chemin de terre rouge pour s’enfoncer dans la nature peu dense de ces paysages vallonnés. La marche en direction de l’Est et du lac va être propice à beaucoup de découvertes.

A peine sorti des limites de la ville que déjà la nature et son hymne céleste appellent les randonneurs à la quiétude, la relaxation, la mise en action des 5 sens qu’ils doivent aiguiser pour mieux percevoir ce qui s’offre à eux… La vue est la première touchée grâce aux sublimes couleurs des paysages, de la flore mais aussi de la faune tel de magnifiques papillons multicolores. L’ouïe est mise à contribution avec le bruit des oiseaux, du vent dans les arbres. L’odorat permet immédiatement de faire la différence entre différentes plantes, de prévenir de certains dangers ou d’entrevoir un bon repas préparé dans les cuisines de ces logements sommaires. Le toucher prend une part majeur dans cette sorte de voyage et le goût sera mis à contribution pour profiter des plaisirs de la table locale, du thé offert au passage des villages ou des baies déguster le long du chemin.
Apercevoir les villageois travailler à flanc de collines pour récolter les feuilles de thé, voir les fermiers cultiver leur terre pour y faire pousser du riz mais aussi du tabac, ou toutes sortes de légumes, croiser des vendeurs, des travailleurs se déplaçant à pied à travers la montagne, toutes ces rencontres ou seulement salutations seront monnaie courante et ponctueront agréablement la randonnée.
Un contact particulier et intense va se nouer entre ces touristes et les enfants des différents villages. D’abord surpris par la visite de ces êtres humains à la peau pâle, ils joueront ensuite volontiers avec ces étrangers traversant leurs terres et celles de leurs ancêtres. Un moment inoubliable se déroulera dans un monastère où les moines étant tous partis à la rencontre d’autres moines dans un village voisin ont laissé à leur merci de jeunes novices, âgés entre 6 et 13 ans. Ces enfants sont livrés à  eux-mêmes pendant plusieurs jours. Ils jouent au ballon dans le sous-sol du monastère, les plus âgés fument le tabac avec une sorte de pipe… Ils doivent se débrouiller seuls mais conserve leur âme d’enfant et aime particulièrement quand les voyageurs commencerons à jouer avec eux à la balançoire, au ballon, quand ils prendront des photos d’eux ou les laisseront faire des photos artistiques à leur manière.
Rencontres après rencontres, paysages changeant parfois au passage d’une colline, d’un obstacle naturel, l’équipe de randonneur a effectuée plus de 25 kms dans la journée. Après une pause dans une petite station de train local, ils effectueront une dernière demi-heure de marche.
 Ils trouveront l’hospitalité chez l’habitant d’un petit village Shan. Les présentations faites, les quartiers pour la nuit pris, il ne restera plus qu’à ceux qui le désirent de se laver à l’aide de seau d’eau puisé dans le puits familial. Le repas sera succulent. A base de riz, ce dernier comprendra une multitude de légumes frais, du tofu, des petits beignets craquants et du thé. Dormir à même le sol constitué de lattes de bambous sera heureusement un problème pour personne. Une couverture déposée sur le sol, une pour se recouvrir, plus le luxe d’un oreiller, formeront le rudimentaire mais efficace lit proposé à chacun.

Une bonne et courte nuit plus tard, les jeunes gens se lèvent au moment où le soleil fait son apparition. Petit déjeuner pris, il est déjà temps de dire au revoir à ces chaleureux villageois qui ont pris soin d’eux au cours des 14 dernières heures. Cette deuxième journée, dans la continuité de la première, se déroulera sous le soleil, dans la bonne humeur et au milieu d’une nature assez sèche et aride mais riche à la fois. Riche de terres fertiles qui renaîtront totalement pendant la saison des pluies, et de ressources naturelles abondantes pas encore vraiment exploité pour le meilleur, et la sauvegarde autant que faire se peut de la planète terre, dont les êtres humains ne prennent pas toujours vraiment soin…

Les kilomètres défilent sous les pieds des marcheurs. Les langues se délient, les sujets évoqués sont nombreux. Un sujet qui retiendra en particulier mon attention est l’échange qui va naître entre les 4 voyageurs et leur guide concernant la situation du pays, le passé et les événements récents qui surgissent telle une vraie bouffée d’oxygène et une lueur d’espoir pour les générations à venir. Le guide se confie sans retenue se sachant en sécurité, ici, au beau milieu de la nature. Comme tous les habitants déjà rencontré, il éprouve un profond respect pour Aung San Suu Kyi et son père Bogyoke Aung San, perçus comme des héros national, qui mèneront le pays à la démocratie et à la liberté de tous grâce à leurs actions passés, présentes et futures…
Depuis moins d’un an seulement, les personnes peuvent un plus facilement exprimer leur position, montrer leur attachement à la famille Aung San en placardant des posters d’eux partout. Ils peuvent enfin fustiger le pouvoir en place concernant ce contrôle puissant et dictatorial imposé à chacun depuis des années. Ce guide sera le premier, mais certainement pas le dernier, avec qui Matthieu pourra assouvir sa soif de connaissances concernant la vie de ce pays traversé. Qui plus est, il aura cette discussion avec un des points de vue les plus intéressants, celui d’une personne y vivant au quotidien depuis sa naissance.
Les moines ne sont pas les derniers à se battre contre le régime. Ce dernier les ayant persécuté et mal traité, il a assez évident de comprendre leur prise de position. 18h00, la nuit tombant, après un magnifique coucher de soleil, les 5 randonneurs atteignent un temple bouddhiste où ils vont être accueillis à bras ouverts. Une soirée simple s’organisera alors entre prise de l’apéro constitué d’une bonne bière et de simples biscuits, d’une douche, d’un bon repas et de jeux autour d’un feu. La fatigue se fait très vite sentir pour beaucoup d’entre-eux qui n’éprouveront aucun problème pour s’endormir et  retrouver les bras de Morphée dans le pays des rêves.
En démarrant ce troisième jour, le but du périple est à porter de pas. Encore quelques heures de marche et ils atteindront les rivages du plus fameux lac de Myanmar. Les paysages sont changeants avant d’aborder la descente dans la cuvette contenant le lac. La végétation se raréfie encore un peu plus, laissant de plus en plus apparaître la terre ocre, plongeant aussi les marcheurs sous un soleil de plomb et rendant l’effort physique un peu plus intense. Les villages défilent, les communautés ne sont pas les mêmes et elles n’ont pas exactement les mêmes coutumes mais de nombreuses similitudes, concernant les habitudes de vie, sont facilement décelables.
Après 5h00 de marche rapide, et après l’avoir aperçu sur les hauteurs des collines environnantes, le lac Inlé s’étend devant leur pied. La traversée du Sud au Nord de ce dernier pour atteindre la ville de Nyaungshwe montrera, à tous, que cette étendue d’eau est une bénédiction pour la Vie que je suis…  L’eau, élément indispensable pour le développement et la survie de tout être vivant, est ici une ressource omniprésente dont l’accès est aisé. La population est donc majoritairement regroupée sur ces bords et développe de nombreuses activités liées à cette étendue bleuté où se reflètent les collines qui l’entourent. La culture de jardins flottants procure de nombreuses tomates au goût exquis mais aussi d’autres légumes, s’adaptant facilement à ce milieu naturel, tel que les concombres.
L’image des pêcheurs sur leur petite barque a fait le tour du monde. En effet, au cours de la pêche, ils utilisent leurs mains pour positionner le filet dans l’eau puis le remonter petit à petit. Pendant ce temps, ils doivent continuer à se mouvoir et ils utilisent un pied pour ramer créant alors une chorégraphie unique en son genre. Le casier long en bambous est une autre technique ancestrale très particulière et intéressante à comprendre. Il permet de récolter le poisson qui sera dégusté sur les tables de toute la région dans la soirée ou dès le lendemain. Le bateau est un moyen de transport exploité et optimisé. Ce milieu propice attire aussi les artisans qui développent leurs arts. De petits marchés s’organisent tous les jours dans les villes jouxtant le rivage.
La ballade mémorable se finit dans le centre de Nyaungshwe après avoir emprunté pendant un cours instant la rivière qui se jette dans le lac. Cette ville est un vrai carrefour d’échange, de troque, de ventes et de commerces pour les marchandises produites dans le secteur et celles qui vont servir à la consommation des habitants des alentours. Le manège de bateaux, de voitures, de marchandises chargées et déchargées, est impressionnant. Il n’est alors pas étonnant de voir un nombre de magasins fleurissant, de la rapidité à laquelle les banques poussent, comme des champignons en pleine saison humide, et de considérer cette ville comme un point névralgique d’échanges entre le lac et le reste du pays. Fascinant de voir comment l’être humain peut orchestrer son organisation pour atteindre des buts financiers au détriment, bien trop souvent, de la partie humaine et des conditions d’existence d’une personne ou de son groupe d’appartenance.
L’aspect de compétition entre groupes, communautés sera présenté de manière ludique et spontanée à Matthieu et ces acolytes, lors de défilés de la pleine lune du mois de Mai… Ces derniers sont finalement un show mettant aux prises les différents villages et permettant, en se rendant au temple, d’exprimer le talent artistique et chorégraphique de chaque entité. Le vainqueur sera le plus inventif et original, celui qui sera mettre en avant sa foi et sa joie de vivre à travers les costumes, les danses et les chants…
L’envie de marcher en pleine nature à la rencontre de peuples minoritaires des montagnes environnantes n’a pas encore été encore assez assouvie pour Sergueï et Matthieu. L’opportunité de découvrir cette région se fera avec un guide, Dandé, que l’on leur avait chaudement recommandé auparavant. Jolls se joindra à eux. Une fois la première rencontre effectuée, l’itinéraire dessiné et l’accord financier trouvé, ils ne leur restent plus pour tous qu’à entrevoir le début de ce périple dès le lendemain matin et cela pour deux jours complets! La promesse d’un moment fort se présente devant eux mais l’instant vécu sera-t-il à la hauteur des espérances? Des envies simples étant entrevues et souhaitées, le dénouement et les souvenirs associés devraient correspondre parfaitement à l’idée que s’en font les trois acolytes qui se connaissent à cet instant de mieux en mieux! Mais sais-t-on jamais, un événement impromptu pourrait toujours venir gâcher la fête? C’est, quoi qu’il en soit, très confiant et avec le sourire que Jolls, Sergueï et Matthieu attaquent avec entrain cette randonnée!
Dandé est un guide passionnant, qui connaît très bien la région et donnent de nombreuses explications sur la nature, la faune et la flore, les activités humaines qui se déroulent dans les environs et son point de vue sur un pays dont il est fougueusement amoureux! L’intérêt d’avoir un guide prend alors un certain sens et un sens certain. Les événements à venir ne feront que confirmer cette donnée. En effet, l’échange verbal avec les locaux ne se fera quasiment qu’à travers lui pour le trio infernal. Cela commencera dès le midi où ils dégusteront une soupe de légumes et de pâtes… Le repas sera aussi constitué d’un mixte composé de fleurs de bananiers et d’oignons conservé dans les feuilles de bananiers et en dessert de tendres gâteaux sucrés à la coco.  Les femmes Pa-O qui les ont accueillis  portent le vêtement traditionnel et fument du tabac depuis très jeune. Elles ne comprennent pas un mot d’anglais et possède seulement les bases de la langue birmane. En effet, elles parlent un dialecte bien spécial que Dandé maîtrise partiellement.
Après un bon moment en leur compagnie, il est temps pour la fine équipe de reprendre la route dans le but d’atteindre un festival musical qui se déroule dans la montagne pour la pleine lune de Mai. Tout le monde est excité à l’idée de vivre un de ces moments de vie particuliers en altitude, où la vie rude et sommaire quotidienne est alors totalement effacée pour laisser place à un moment de partage intense. La bonne ambiance devrait alors atteindre son apogée quand les musiciens, chanteurs, et danseurs accompagneront un moment de partage autour d’un bon plat, d’un verre d’alcool local et de cigares. Quelques centaines de mètres plus loin, les randonneurs vont très vite déchanter quand intervient un changement de temps soudain et brutal.

Un vent violent fait instantanément son apparition, les nuages menaçant apparaissent au Sud sur les flancs de collines. Fait impressionnant, Matthieu va soudain relever qu’il entend la pluie arrivée avant même de la voir… Les trombes d’eau qui tombent sur les hauteurs sont tellement puissantes que le bruit de la pluie s’abattant sur le sol résonne dans la vallée encaissée. Trop tard pour faire demi-tour et retourner au village déjà touché par ce déluge. Décidant d’avancer rapidement pour espérer passer entre les gouttes, le groupe se fera rattraper très vite. La pseudo-protection sous un arbre va se révéler très rapidement inefficace. En quelques secondes, ils se retrouvent mouillés de la tête au pied. Les k-ways ou poncho perdent très vite leur étanchéité. Une décision doit rapidement être prise. Le village n’étant pas très loin derrière eux, ils décident finalement de rebrousser chemin.
La force de la nature ne peut pas être remise en question à cet instant. Les chemins se  sont transformés en ruisseaux puissants qui dévalent la pente de manière fulgurante. Les randonneurs doivent suivre ces litres d’eau se déversant vers la vallée et pénétrant péniblement dans le sol en raison de sa dureté et son aridité en cette fin de saison sèche. Chaque pas doit être mesuré pour éviter de glisser, de se blesser ou de se mettre dans une situation inconfortable.

Après une descente de 15 minutes, les randonneurs atteignent détrempés la maison qui venait de quitter quelques minutes auparavant sous un grand soleil. Ils se retrouvent tous autour du feu, pour se réchauffer, tenter tant bien que mal de faire sécher les vêtements, et boire une boisson chaude. Cet épisode pluvieux va durer encore plus d’une heure avant progressivement de baisser en intensité puis de se stopper définitivement. Il est temps de renfiler les vêtements encore humide et de continué la route. Le détour pour se rendre au festival n’a plus lieu d’être. Celui-ci a dû être écourté car les lieux ne permettaient pas décemment de continuer la fête en raison de l’absence de bâtiments pour se protéger. Ils prennent donc la décision collégiale de prendre le chemin le plus court pour se rendre au monastère où ils ont prévu de dormir le soir. Ils vont croiser sur leur route des villageois redescendant vers leur demeure après avoir quitté le lieu de festivité. La déception ne pas participer à cette célébration peut se sentir dans les rangs des voyageurs. Mais je leur réserve une petite surprise à laquelle ils n’auraient même plus osé croire. L’instant de vie qu’ils s’apprêtent à vivre, à pour moi, pas de prix et je sais que ce jeune français et ces acolytes partagent entièrement mon avis. A l’arrivée dans un village, une musique forte et rythmée s’entend à des centaines de mètres. Elle provient d’une grande maison en bout de village. Aussitôt, Matthieu s’empresse de demander à Dandé s’il est possible d’aller voir d’un peu plus près ce qu’il se passe.

Ils sont accueillis les bras ouverts par des personnes redescendus des montagnes où se déroulaient les festivités. Ces dernières, n’ayant pas envie d’écourter trop rapidement la fête, se sont réunies dans ces lieux. Des musiciens jouent tambour battant!  Certains birmans plus ou moins alcoolisés dansent dans un rythme endiablé. La plupart, cependant, profite du spectacle et, du son entraînant, en sirotant, autour du feu, de l’alcool de riz, en fumant le cigare ou en dégustant des délicieux mets préparés par la femme de maison. L’intégration pour les voyageurs est immédiate. Ils se voient proposer tout ce qui est disponible. Un échange, ponctué de sourires et fous-rires, va rapidement prendre place. Le temps de la traduction par Dandé laissera parfois les uns ou les autres dans l’expectative mais la compréhension entre ces étrangers va rapidement créer un lien fort. Le temps s’écoule sans qu’aucun d’entre-eux ne s’en aperçoivent. La nuit tombant rapidement, il est temps pour chacun de penser à regagner le lieu où il créchera le soir. Les « au revoir » sont interminables et les maîtres des lieux convieront leurs nouveaux amis à revenir très rapidement pour rester un temps indéfini.  C’est avec un grand sourire aux lèvres que les randonneurs rejoignent alors le temple bouddhiste qui les hébergera pour la nuit. Ils continueront la fête ensemble jusqu’au bout de la nuit, dînant puis jouant à des jeux diverses.
La nuit aura été courte. Ils doivent pourtant continuer leur chemin et avancer dans ces sentiers qui surplombent le lac Inlé. La vue est belle sur la vallée au fond duquel le lac se dresse majestueusement. Le contact avec les minorités sera là encore le fil conducteur de cette journée de randonnée qui se terminera après le retour à Nyaungshwe.
 Ce trek restera à jamais gravé dans la mémoire de Matthieu, en raison principalement, de la connexion et l’échange qui a eu lieu avec les minorités locales et les moines.

Jolls, Sergueï et Matthieu vont ensemble, et pour la dernière fois, poursuive leur route ensemble. C’est à Hsipaw qui veulent se rendre pour profiter de la quiétude de ce paysage vallonné et  riche en beaux milieux naturels. La remonté vers le Nord depuis le lac implique cependant le franchissement de moyennes montagnes. Le trajet en bus de nuit ne sera pas de tout repos. Regarder à travers la fenêtre implique obligatoirement de se faire des frayeurs, quand, sans rambardes de sécurité, le bus frôle le précipice qui se finit quelques centaines de mètres plus bas. La Vie que j’aime donner à tout à chacun, et voir se développer, pourrait alors disparaître brusquement, rattrapé par la Mort qui les attend à chaque tournant.  Je préférerais que pour tous ces passagers, la vie se déroule logiquement jusqu’au vieillissement normal de l’être vivant, de ces cellules impliquant alors sa disparition. Leur vie dépend alors du bon entretien du véhicule et de l’attention porté par le conducteur au relief.

Ce n’est pas à la pause repas que Matthieu trouvera du répit face à cette problématique d’équilibre instable. Mais plus encore, il sera de nouveau confronté à cette limite entre la vie dont il jouît, et dont il veut profiter encore longtemps, et la mort qui peut surgir de nulle part. Dans les toilettes, il se retrouve nez à nez avec un énorme scorpion venimeux noir. Battant retraire calmement et sans mouvements brusques, il viendra de passer une nouvelle épreuve que je lui ai mis sur son chemin. L’instant de palpitation intense de son cœur passé, le souvenir de cette rencontre impromptue restera une nouvelle belle image de ce séjour.

L’arrivée à 4h00 du matin à Hsipaw n’est pas des plus confortables. Après un échec pour trouver une chambre, dans une auberge qu’un touriste leur avait conseillé, ils choisiront finalement de se rendre dans la plus fameuse auberge pour touristes avec sac à dos. Une fois installé en ce début de matinée, la fin de nuit dans un lit, ne sera pas de trop pour reposer les corps fatigués par ces derniers jours et par le trajet mouvementé.

Réveil en douceur avec prise d’un petit-déjeuner copieux effectué, ils vont prendre connaissance d’une carte de la région pour partir randonnée dans les environs une grosse demi-journée. Il est aisé pour tout visiteur de sortir de cette ville moyenne et de directement se retrouver en pleine campagne dans un milieu rural peu développé. Les environs de la ville, plaines au milieu de paysages vallonnés, vont réserver quelques belles surprises aux trois voyageurs. Matthieu est ravi de pouvoir continuer ce périple au milieu de la population rurale locale et de vraiment vivre au plus près d’eux. Ressentir un contact qui se noue très facilement et qui est agréable, ne serait-ce que par un simple sourire, permet aux trois voyageurs de se sentir à l’aise et d’essayer encore plus de se rapproche de leurs égaux.
Au cours de cette journée, ils se verront offrir de la pastèque par une paysanne, à l’abri du soleil, sous un toit de paille et assis sur un sol en bambou lui servant de maison. Ils dégusteront une soupe spécifique de la région dans une toute petite échoppe vendant le strict minimum. Ils échangeront avec les paysans un bonjour, un sourire, une poignée de main. Ils les regarderont travailler leur terre, avec les bœufs tirant des instruments aratoires, ou travailler différents matériaux tel que le bois ou le métal. Toutes ces activités et ces moments de vie leur permettent de prendre un peu plus conscience du niveau de développement du pays et comment les gens vivent, ou souvent survivent,  grâce à ces activités agricoles et manuelles. D’un point de vue nature, ils ne seront pas en reste avec de magnifiques chutes d’eau, un ciel un peu voilé mais laissant parfois percer des rayons du soleil de manière artistique proposant alors un paysage tel un tableau de grand peintre.
Finalement en fin d’après-midi, le super point de vue sur la vallée depuis un temple à flanc de colline, leur permettra d’assister à un coucher de soleil somptueux. Le repas dans un restaurant local, la préparation de la journée du lendemain, et les discussions à cœur ouvert avec de nombreux voyageurs, sur la terrasse de l’hôtel, compléteront une journée à rallonge qui aura duré plus de 19h00.
Pourtant, et comme depuis le début de ce périple, Matthieu est étonné par la vitesse à laquelle le temps s’écoule, par le fait que les jours défilent toujours plus vite. Le fait de profiter de chaque seconde ne fait que renforcer cette impression. La sensation d’accélération continuelle et exponentielle du temps depuis son enfance n’est pas pour lui déplaire car il est conscient que cela signifie qu’il est toujours dans le centre de l’action, qu’il a choisi, et qui lui convient. Il sait aussi que le bien-être accroît ce sentiment et que certains des projets qui sont présent à son esprit, comme la construction d’une famille avec la femme de sa vie, devrait définitivement sceller le fait d’être pris dans une spirale infernale où la maîtrise du temps, de son temps ne peut simplement pas être décemment envisageable.

La fatigue prenant un par un les voyageurs, la terrasse se vide petit à petit, et chacun gagne son lit… La plupart d’entre-eux vont rêver en combinant leur expérience personnelle et les événements qui viennent de se dérouler ces dernières 24h00.

Jolls, Sergueï et Matthieu s’apprêtent le lendemain à vivre le dernier jour de ce périple ensemble. Jolls et Sergueï vont par la suite continuer leur route pour atteindre Mandalay puis Bagan. Matthieu, ayant plus de temps devant lui, a décidé d’explorer plus profondément les alentours de cette région relaxante et riche en enseignement concernant les conditions de vie des habitants de Myanmar.

Il leur reste encore néanmoins une journée pour partage de bons moments. Ayant réussi à réunir un nombre suffisant de touristes, ils partent sur une pirogue motorisée pour remonter vers les deux affluents de la rivière qui traverse Hsipaw. Par ce biais, ils vont découvrir un peu plus l’arrière-pays de la région et aller à la rencontre de minorités vivant en quasi autarcie et très peu habitué au contact avec l’homme blanc…
L’échange, qui va avoir lieu, vaut le coup d’œil depuis les hauteurs où je me trouve. Chacun va différemment vivre l’expérience de ces rencontres incongrues. Chaque personnalité des individus en contact, voyageurs ou locaux, jouera un rôle prédominant et aboutira à un contact plus ou moins fort, à un échange plus ou moins important, à une réponse appropriée et plus ou moins sociable de l’autre partie impliquée. La première personne croisée sera une vielle dame, habitant une cabane sommaire au milieu de ces champs, cultivés à présent par son fils. Elle est toute heureuse de faire la connaissance de ces étrangers et d’avoir un peu de visite. Elle prendra un par un les voyageurs dans ces bras et les suivra pendant plusieurs centaines de mètres à travers champs avant de rebrousser chemin.

La solitude n’est pas un état de fait que je choisis pour un individu. Certains décident de s’y plonger, par eux-mêmes, pour se protéger, pour instaurer une certaine léthargie et ne pas avoir à se confronter à l’autre et à sa propre image que l’on peut lui renvoyer. Pour d’autres, comme pour cette vielle femme birmane se sont les événements passés, les épreuves que j’ai provoqués, non par choix mais par nature, telle sa naissance sur ces terres peu peuplées ou la mort de son mari, qui en sont à l’origine.  La justification du non-contrôle de ma personne sur ces faits est la symbiose avec la nature. Je me dois de respecter le vieillissement des cellules vivantes et l’unicité de chaque individu ce qui crée obligatoirement des inégalités flagrantes.

Cette dame arrive néanmoins à prendre plaisir par l’intermédiaire de choses très simples et d’un contact même très bref avec son prochain. Elle aura revêtit son plus belle apparat, quand ils redescendront à travers ces champs, en direction de la rivière. Cet événement se déroulera plus de 2h00 après leur premier passage en sens inverse et après avoir visité un temple bouddhiste à quelques encablures de là.

Ce temple bouddhiste fut une vraie bouffée d’oxygène pour tous les voyageurs. Une connivence jouissive humainement et expérimentalement parlant allé se nouer avec les moines et encore plus avec les jeunes novices ouverts d’esprit et très joueurs! Le premier contact fut discret, avec une certaine retenue et une timidité non caché face à ces étrangers. Puis très vite, après quelques échanges, rires et fous-rires vont prendre le dessus. Ils joueront avec les crayons et dessin à colorier apporter par un italien. Ils se cacheront pour instaurer un échange différent avec les jeunes blancs. Ils offriront le thé et des fruits à tous, en guise de bienvenu et comme reconnaissance du partage des biens! Ils joueront tous ensemble avec un rien, sans matériels sophistiqués, mais en retireront une grande satisfaction mutuelle. Les voyageurs assisterons finalement à la prière au Bouddha avant le repas pris au plus tard à 11h30 (les moines bouddhistes birmans ne mangent pas après 12h00 et cela jusqu’au lendemain matin comme tous les bouddhistes d’Asie appartenant «au petit véhicule»). 
De retour sur le bateau, ils remonteront en amont du fleuve pour atteindre les deux confluents. C’est un agréable endroit avec de nombreuses baignoires naturelles créées par d’imposants rochers. Dans ces lieux, la relaxation est de mise, les forts courants d’eau qui déboulent dans les goulots d’étranglement permettront tout de même de mettre en peu d’ambiance dans les rangs de ces compagnons d’un jour. L’âge de chacun n’a alors plus aucune importance…
Le temps est déjà venu de redescendre le cours d’eau dans cette embarcation simple mais beaucoup plus sûr que d’autres moyens de locomotion croisés sur la rivière. En effet, ces voyageurs peuvent se considérer sur une embarcation insubmersible s’ils la comparent avec les radeaux constitués de quelques bambous accrochés par trois bouts de cordes que manœuvrent certains birmans.

Avant le retour en ville, « le tour » propose un arrêt dans un village Shan. Cette visite sera l’occasion pour tous d’observer les habitations typiques, de croiser certains villageois en habit traditionnel, et d’assister à une sépulture! La tristesse ne faisant pas partie des célébrations funéraires bouddhistes, quel que soit la cause du décès où l’âge du défunt, c’est une vraie fête qui est organisée. C’est un hommage à la personne qui vient de quitter son enveloppe corporelle terrestre, un moment de recueillement. C’est l’occasion de se retrouver, de partager un bon repas et de resouder, encore un peu plus, les liens existant entre chaque individus…
La mort n’est pas mon pire ennemie comme beaucoup d’être humain peuvent le penser. Il est mon plus fort allié, un moyen de jouir de moi encore plus intensément. Je suis alors, pour ces personnes, trop courtes pour qu’ils ne fassent pas, ce qui est en leur pouvoir, pour exalter chaque instant où nous formons, ensemble et par symbiose, un tout inséparable.

Chaque jour, les hommes me prouvent et me rappellent qu’ils ne m’envisagent pas tous de la même manière, qu’ils n’ont pas les mêmes attentes vis-à-vis de moi. Je suis unique mais pas dans le sens d’une seule et même entité mais plutôt par le fait que je sois différent pour tous. Leurs choix, aussi minimes qu’ils soient, me modèleront au grès du temps qui s’écoule. Je peux et dois être remis en cause en permanence. Les contraintes imposées par l’extérieur pouvant toujours se substituer à une décision personnelle et finalement me faire disparaître pour me remplacer par mon successeur la Mort!

C’est plein de vie, le cœur battant que Matthieu et ces compagnons regagneront Hsipaw bien décidés à poursuivre leurs aventures sur les routes birmanes. C’est toujours avec cette sensation de chance immense du voyageur que Matthieu accueillera avec un grand sourire les trombes d’eau qui s’abattent sur la ville alors qu’ils viennent tout juste de s’attabler pour déjeuner. La fin de journée se passera en douceur. La dernière soirée ensemble pour Jolls, Sergueï et Matthieu  sera aussi simple que les autres qu’ils auront passées ensemble auparavant. Autour d’un bon repas et d’un verre de vin, ils célébreront leur rencontre et ce bout de chemin partagé.  Ce 9 Juin 2012, Sergueï se réveil à 5h00 pour prendre son bus. Matthieu complétera son réveil de façon tonique en le secouant, le réveillant de nouveau et plusieurs fois de suite pour l’aider à se lever. En effet, Sergueï replongeant immédiatement dans un sommeil profond, n’aurait sinon jamais été prêt à temps et il aurait raté l’heure de départ.
Seul, Matthieu a décidé de laisser son gros sac à dos dans la pièce de rangement de l’hôtel et de partir randonner dans les environs. Il désire s’immerger encore plus dans la culture et la vie des habitants du pays. Bien lui en a pris, Il va alors vivre de nouveau une expérience unique, sans aucune mesure avec les moments déjà vécu avec les autres voyageurs. Ayant pris quelques indications auprès de l’hôtel, il prend la direction d’un village dénommé Pankam. En chemin, il passera devant plusieurs monastères et s’amusera comme un fou avec de jeunes novices qui sont avant tout des enfants très joueurs.
Puis il traversera de petits villages de paysans, admirera les fermiers au travail, jouera avec des enfants qui le salut le long de la route, rentre en contact avec des adultes surpris de voir un étranger seul.
Après 4h00 de marche à suivre le ruisseau, Matthieu est au milieu des champs quand le temps change brusquement. Le vent, inexistant jusqu’à présent, souffle maintenant en rafale. Des nuages  gris menaçant surgissent de derrière les montagnes. Grâce aux dernières expériences vécues, Matthieu sait que la pluie n’est pas loin et que les prochaines minutes risquent d’être cruciales s’il ne veut pas se retrouver détremper. En pleine nature, la recherche d’un abri ne sera pas la mission la plus simple à laquelle il aura été confronté. Suivant son instinct, il prend un petit chemin bifurquant du sentier principal et il aperçoit finalement au loin un toit de bambous.
Arrivé devant cette maison, seule une petite fille se trouve à l’intérieur. Elle n’est pas très farouche mais garde une distance de protection entre elle et cet étranger qui lui fait face. Matthieu fait le premier pas et il essai tant bien que mal d’instaurer un échange. Avec seulement quelques mots en commun dans une même langue, ils vont réussir à se comprendre. Matthieu peut alors rentrer dans la cabane avant que la pluie ne s’abatte en déluge. Sa sœur jumelle et sa maman les ont rejoints dans la maison de fortune. Etonné, un peu gêné, elles accueilleront tout de même cet homme sans se poser de questions et en affichant un sourire de circonstances. Matthieu va passer un moment exquis avec les deux petites filles qui ne demanderont qu’à jouer avec lui.
 Ils seront finalement rejoints par le père et la grande-sœur qui travaillaient sur leurs terres et sont maintenant détrempés. Une fois changé, le feu de bois allumé, les protections installées afin que l’eau ne pénètre pas trop dans la maison, Matthieu se verra proposer un bon thé chaud et un cigare. A l’extérieur, le temps ne s’améliore pas pourtant le fait d’être bloqué ici n’est pas pour déplaire au voyageur qui vie un moment sans égal.
Puis petit à petit la pluie diminue en intensité, les grondements du tonnerre disparaissent, le vent s’estompe, et le ciel s’éclaircit pour déjà laisser apparaître quelques rayons de soleil. Matthieu les remercie de leur hospitalité. Il les salut par un dernier sourire qui en dit long sur la gratitude qu’il désire exprimer et sur ce sentiment de bien-être qui l’habite. Encore quelques heures de marche afin d’atteindre ce village de Pankam pour y passer la nuit. La terre rouge au sol est maintenant ultra-collante et elle vient s’agglutiner sous la semelle des deux chaussures de Matthieu. Il ne lui reste plus que régulièrement à libérer ces chaussures de l’emprise d’un poids conséquent. Rencontrant une villageoise, parlant anglais, il s’assurera de la direction à prendre, obtiendra des informations sur la distance encore à parcourir, et où il sera possible de passer la nuit dans le village. 
1h00 plus tard, il arrive à l’entrée du village où un villageois qui tient « une chambre d’hôte » dans sa maison vient à sa rencontre. Il a déjà été prévenu de son arrivée et il lui offre l’hospitalité. A peine installé, Matthieu se voit déjà proposer à manger, à boire. Les habitants viennent à sa rencontre lorsqu’il arpente les chemins à travers le village. Il va découvrir les activités des récoltants de feuilles de thé qui préparent ces dernières avant de les vendre. Puis il va aller successivement chez le frère, les parents, puis le meilleur ami de ce villageois l’hébergeant ! A chaque nouvelle rencontre, il est accueilli comme un membre à part entière de la famille et on lui propose plus de nourritures qu’il ne peut en accepter. Alors que la soirée est déjà bien entamée, ils rentreront finalement. Ils finiront cette dernière en regardant le film « the Lady » de Luc Besson qui retrace la vie d’Aung San Suu Kyi. Le visionnage de ce film, sur la personne vivante la plus vénérée du pays, complétera un tableau parfait de ce pays au grand cœur et aux habitants qui chérissent leur pays. Ils le transmettent parfaitement aux touristes grâce à un accueil entaché d’aucunes mauvaises surprises mais simplement d’instants conviviaux. 
Le petit-déjeuner du lendemain sera encore très copieux  et c’est rassasié que Matthieu attaque tambour battant cette deuxième journée de randonnée sous le soleil. Il se promène à travers les plantations de thé, il « se perd », comme désiré, au milieu de cette nature attractive. La journée s’écoulera très vite, telle l’eau du ruisseau qui serpente la vallée. Ce ruisseau permet à Matthieu d’obtenir une source infinie pour capter ce liquide indispensable à la vie et encore plus à celui d’un randonneur! La nuit tombe alors que les rencontres avec d’autres humains ne se sont fait que rare. C’est dans un abri de fortune que Matthieu passera la nuit. Il réalise ainsi un nouveau souhait de vivre au plus près des terres birmanes et à l’écoute de la nature environnante (oiseaux, criquets, vent dans les feuilles, insectes s’invitant dans sa demeure d’un soir).
 Le retour, dans la vallée de Hsipaw, le lendemain, est beaucoup plus direct et rapide car en descente. Matthieu atteint un monastère en fin de matinée et il se verra offrir le couvert. La faim au ventre, il se régalera de plats aux goûts exquis et partagera cette expérience avec quatre voyageuses! De retour à la civilisation urbaine, il reprendra une place à l’hôtel et il organisera la suite de son voyage après avoir profité d’une bonne douche avec eau chaude.
Le départ de bonne heure le lendemain matin ne sera pas pour déplaire à Matthieu. Il finira, dans le bus, une nuit écourtée. Il arrive avant midi à Mandalay, seconde ville de la Birmanie pour sa population (950 000 habitants). Tout autour de cette ville se trouvent les anciennes capitales royales qui ont été déplacées régulièrement jusqu’à la dernière en date dans la région, qui se trouve en pleine milieu du centre de Mandalay. C’est une grande ville en plein expansion, d’une beauté douteuse si l’on se cantonne à la première image laissée lors de l’arrivée mais, qui va néanmoins, ouvrir la porte de certains de ces secrets au jeune homme. Le fait d’avoir trouvé un hôtel agréable près d’un grand marché et d’un temple sera un avantage non dédaignable pour profiter de la vie locale. Arpenter ces deux lieux lui permettra de se familiariser encore un peu plus, si besoin était, avec les habitudes des birmans.
S’éloignant par la suite de son lieu de résidence, il se rend à Mahamuni Paya où se trouve l’image de Bouddha la plus vénérée du pays. Les pèlerins y  viennent si nombreux que la statue est recouverte de plus de 2 cm de feuilles d’or et qu’en permanence des fidèles prient à ces côtés. Matthieu continuera ensuite sa visite de la ville en admirant l’élégant monastère tout en Tek de Shwe In Bin Kyaung.
Puis, Matthieu finira une journée bien chargée par l’ascension de la colline de Mandalay grâce à un chemin ponctué de lieu de prière et d’échoppes de commerçants. Elle est surplombée à son sommet, à 230 mètres au-dessus de la vallée, par un temple. La vue permet d’admirer à des kilomètres à la ronde. Un des moments journaliers privilégiés de la vie de Matthieu, le coucher de soleil, se déroulera dans des conditions incroyables depuis ces hauteurs.
 La journée du  lendemain permettra à Matthieu, un retour en arrière dans l’histoire avec la visite d’Amarapura, citée de l’immortalité, qui possède le plus long pont en tek du monde (1,2 km). Cette ville est aussi passionnante en raison de son village pittoresque et de ces temples aux moines accueillants. Les collines de Sagaing permettront à Matthieu de s’émerveiller différemment, quand du sommet, il pourra admirer plus de 500 Stupas et monastères recouvrant toutes les collines environnantes.
 Le séjour aura été court dans cette ville mais largement suffisant pour profiter de ce que la ville pouvait lui offrir touristiquement parlant. Il est important de mentionner qu’en dehors de ces visites, la vie de voyageur continue et qu’elle foisonne de moments inoubliables. Elle implique de belles rencontres, la dégustation de plats et boissons régionaux, le fait de se déplacer sur le toit du transport en commun et de revenir dans la benne d’un camion….
Cette étape fut intéressante pour s’immerger dans la vie urbaine actuelle des birmans mais c’est le passé du pays qui appel et qui attire à cet instant le jeune homme. Il s’empresse donc de prendre, le dimanche, un des 2 seuls bateaux de personnes, par semaine, qui se rend depuis Mandalay à  Bagan sur l’Ayeyarwady.

Le départ est à 5h30 du matin. Ne voulant pas avoir de contrainte et/ou payer un prix exorbitant pour le taxi, Matthieu marchera 1h00 en pleine nuit depuis son hôtel pour rejoindre l’embarcadère. Il arrivera largement en avance, s’achètera deux ou trois gourmandises sur une étale de rue et rejoindra le pont supérieur du bateau ou des sièges ont été installés pour les touristes (par obligation, les non-birmans payent 10 fois le prix des locaux). Il retrouve alors Karine, une française, aperçue à Hsipaw.
Ils vont alors commencer à faire plus ample connaissance. Ils échangent sur divers sujets de la notion commune que je suis; la Vie! Ils vont échanger sur  ma nature et mon essence, pris cette fois-ci, dans le sens du vécu de l’un et de l’autre, pour savoir d’où ils viennent ? que font-ils là ?… Notion indéfinissable, je suis néanmoins intuitive. La discussion prend alors tournure de débat animé entre deux personnes qui s’intéressent aux expériences de l’autre et à ces choix personnels. En résumé, ceux sont les questions basiques qui seront abordées à cet instant et qui permettront une première approche pour faciliter la compréhension de l’autre et réagir de façon approprié… Pendant tout le trajet, ils vont petit à petit former une certaine connivence. Ils vont aussi énormément interagir avec les quelques autres étrangers présents à bord et surtout ils observeront ou participeront aux événements engendrés par la population locale. 
Le trajet est magnifique! Quittant la vie urbaine, passant aux abords de Sagaing, ils rejoignent très rapidement des paysages dénués d’habitations.
Les arrêts sur le rivage sablonneux de l’Ayeyarwady donnent le sentiment de débarquer des personnes et du matériel au milieu de nulle part. Pourtant les villageois sont bien présents pour acheminer hommes et marchandises et pour essayer de vendre des produits locaux tels que des fruits, des légumes, du poisson, de la friture... Les villages se trouvent plus loin pour ne pas subir la montée des eaux impressionnantes lors de la saison des pluies, qui balaierait en quelques secondes des habitats construits en plusieurs semaines. Ce moyen de transport est des plus plaisants pour des raisons diverses et variées. Il est possible de se déplacer sur un bateau et non pas de rester coller dans un fauteuil comme c’est le cas dans un bus. Les contacts et les interactions entre les personnes sont beaucoup plus aisés, le relationnel est mis en avant.  C’est un moyen de locomotion fluide, sans sensation de se faire bousculer de part et d’autres, sans la frayeur de ne pas franchir un virage ou de se planter dans le véhicule qui arrive en pleine face en doublant n’importe comment. Enfin les paysages traversés sont exceptionnels avec un mélange de couleurs (bleue, jaune, vert, marron…), de formes, d’odeurs. La relative lenteur laisse un temps certains pour que les voyageurs puissent s’inspirer de l’ambiance et de l’atmosphère. 
Les longues heures de trajets passent relativement vite. Ce n’est pas l’arrêt technique, de plus d’une heure, en raison d’un gros orage qui s’annonce, qui viendra miner le moral des voyageurs, ou du peu de locaux encore présents en cette fin de trajet. Après plus de 14h00 à bord, les voilà arrivaient à destination. Ils se retrouvent enfin devant Bagan, surnommé le cœur historique de la Birmanie.

Droit d’entrée de 10$ payé pour rentrer sur le site, Matthieu et Karine décident de chercher ensemble un logement et de parcourir, à partir du lendemain, ce site majeur en Asie. Installés dans leur hôtel, le repas pris, la soirée ne sera pas longue et ils s’endormiront rapidement afin d’être en forme pour le lendemain. Ils décident de parcourir le site à vélo malgré une chaleur accablante qui s’abat sur la région. Ce choix fut le bon car ils pourront naviguer au grès de leur envie, ne pas être ralentie par la lenteur des carrioles poussé par les chevaux et décider au fur et à mesure de l’itinéraire qu’ils emprunteront. Très vite, ils vont pouvoir prendre conscience de l’ampleur de ce site historique. Le début de ce projet est né sous le règne du roi Anawrahta à partir de 1044. Unifiant le pays, il embrase le bouddhisme Theravada dans son royaume et décide de la construction du premier temple à Bagan, le grand Shwezigon. La mort de ce puissant souverain reste encore un mystère, mais sa dynastie va rester maîtresse de ces contrées pendant plus de 2 siècles permettant l’expansion exceptionnelle de ce site historique unique en son genre. La banqueroute de la citée lors de la mauvaise gestion des comptes du roi Narathihapati en 1287 va conduire à la perte de la citée lors de l’attaque de Kublai Khan. Elle conservera néanmoins de sa superbe pendant les siècles suivants. Seul le terrible tremblement de terre de 1975 (6,5 sur l’échelle de Richter) va endommager très gravement la plupart des édifices.
Malgré cela, le spectacle, qui va s’offrir aux yeux des voyageurs, reste spectaculaire. Après avoir visité à pied plusieurs stupas, plus ou moins modernes, plus ou moins bien restaurés, et avec des ornements plus ou moins beau, Karine et Matthieu vont prendre de la hauteur sur l’un d’entre-eux… Ils restent tous les deux bouche-bée et ébahis pendant de longues secondes. Devant eux s’étale un paysage assez aride, mélangeant sable et terre rouge, une végétation peu dense mais qui apporte une touche de verdure magnifiant ce paysage.
La beauté du site réside, finalement et réellement dans ce cas, par l’apport de la patte humaine avec les plus de 4000 temples qui ont pris racine sur ces terres et jaillissent de tous les côtés, avec toutes sortes de tailles et de formes possibles. Tous les types stupas et de temples qu’ils savaient construire à l’époque sont représentés dans un espace confiné de quelques kilomètres carrés. Essayer un peu d’imaginer tous les cathédrales et églises médiévales de l’Europe réunis sur un terrain grand comme 200 terrains de football, que vous aillez plusieurs promontoires où vous pouvez toutes les admirer en un seul coup d’œil et vous ne serez pas loin du spectacle auquel assiste alors Karine et Matthieu à cet instant précis. Localisé complétement au Nord de ce site historique, ils n’ont pas encore eu l’opportunité d’observer la plus belle vision possible de ces lieux. Gagnant la plaine centrale pour le coucher de soleil, ils pourront admirer, depuis les hauteurs de la Shwesandaw Paya, et à 360°, des temples à perte de vue. Seul le moment vécu sur place permet de comprendre et de ressentir totalement la magnificence de ce site. Il permet aussi de comprendre comment, parfois, en harmonie avec la nature, les constructions humaines, peuvent venir embellir le paysage.
Pendant les trois jours sur place, à bicyclette, ils vont parcourir du Nord au Sud, et d’Ouest en Est,  du lever du soleil à 5h30 jusqu’au coucher du soleil à 19H15, un nombre incalculable de temples présentant chacun leurs spécificités, possédant ou non un point de vue imprenable sur la région de plaines qui l’entoure. A chaque temple, ils seront une nouvelle fois émerveillés en raison de petites touches spécifiques et de l’instant unique vécu.
 Ils ne vont pas se lasser de parcourir pendant de longues heures ces chemins parfois délicats, sous une chaleur accablante, qui transforme parfois l’air en un gaz difficilement respirable, brûlant presque la gorge et la bouche à chaque respiration. Heureusement, pendant les trois jours, un vent plus frais va assez régulièrement faire son apparition, permettant à Karine et Matthieu de profiter d’une bouffée d’oxygène pseudo fraîche. Ils en prendront encore plein les yeux dans ce décor venu d’un autre monde et qui les transporte très loin de la réalité de la vie de tous les jours. Chaque petit détail comptera.
Ce n’est pas la crevaison multiple sur les deux vélos, à l’autre bout du site, lors de la dernière journée,  alors qu’ils traversaient à travers champs pour rejoindre un autre temple somptueux, qui va attaquer leur moral. Le retour éreintant en sueur passé, ils en garderont un souvenir inoubliable.
Le séjour en compagnie l’un de l’autre sera un vrai plaisir partagé. Il est facile de se rendre compte qu’ils partagent beaucoup de choses en commun, comme des valeurs sociales et de vie. Chaque instant doit, pour eux, être vécu à fond et partagé avec une ou des personnes qui en valent le coup. C’est intéressant de voir qu’il n’y a pas de questions à se poser et qu’ils sont faits pour s’entendre. Ils garderont contact après ce petit bout de chemin ensemble et s’ils le désirent tous les deux, si la vie leur permet, une grande amitié pourrait naître de cette rencontre à l’autre bout du monde.
Matthieu doit reprendre la route et retourner à Yangon où un avion l’attend dans moins de 48h00 pour s’envoler vers Bangkok. Voyageant en bus de nuit, Matthieu arrivera tôt le matin à Yangon ou plutôt à sa station nationale de bus. Il partagera un taxi avec une allemande pour rejoindre le centre-ville à 45 minutes de là. Elle va lui fournir de bons tuyaux et lui simplifier la vie pour cette fin de périple. En effet, Matthieu décollant le lendemain matin très tôt, il n’a pas envie de payer une nuit d’hôtel pour s’y reposer seulement quelques heures et devoir ensuite payer plein pot un taxi dans la nuit pour l’emmener aux aurores à l’aéroport. Dans l’hôtel que cette allemande va prendre, il trouvera un endroit pour entreposer son sac, on lui offrira, malgré qu’il ne soit pas de l’hôtel un petit-déjeuner. Il prendra ce dernier en compagnie de cette voyageuse rencontrée quelques minutes auparavant. Finalement il pourra aussi prendre la navette qui part pour l’aéroport à 16h30. Obtenant gratuitement tous ces services, Matthieu est gagnant sur tous les points de vue. Du moins au premier abord car  Il s’apprête à se mettre dans une situation un peu compliqué, mais ça, il ne le sait pas encore. Il Profite donc de la journée pour visiter des lieux qu’il n’avait pas vus lors de son premier séjour. Les 10h00 disponibles dans Yangon s’écoulent sans coup férir.
Revenu à l’hôtel, il prend la navette se rendant à l’aéroport et qui arrive une 1h00 plus tard devant le hall central. Il s’installe tranquillement à l’intérieur et vaque à des occupations qu’il n’avait pas pris le temps de faire pendant son séjour: rédaction du texte qui publiera sur son blog par la suite, lecture d’un guide touristique pour la suite du voyage, et d’un livre sur l’Inde,  « White Tiger »!  Le hall, plein à 18h00, se vide très rapidement au cours des deux heures suivantes. Puis avant le décollage du dernier avion de la journée à 20h45, l’endroit est quasiment désert. N’étant pas dans un aéroport international, tel que Bangkok, ouvert 24h/24, Matthieu se doute qu’il pourrait bien fermer ces portes après une certaine heure. Il obtient très vite la confirmation auprès du poste de sécurité. On lui indique qu’il n’aura pas le droit de rester dans l’enceinte de l’aéroport. Celui-ci fermant à 22h00, Matthieu ne peut pas y rester.

Sans stress, il prend alors ces sacs et se dirige vers l’extérieur afin de trouver un endroit où manger pour pas cher avec les derniers billets en poche. Faisant le tour des popotes, il ne trouve rien qui rentrerait dans le budget fixé. Ne se démontant pas, il continue un peu plus loin et tombe dans une petite échoppe où malgré la sobriété des lieux, les prix restent néanmoins chers. Un policier entend alors l’échange qui a lieu entre Matthieu et le restaurateur. Il cerne très vite la situation et, là, l’improbable va se produire.

Le policier prend les choses en main, commande à sa place et lui demande de venir s’assoir à sa table. Face à un membre des forces de l’ordre en charge de maintenir la sécurité, Matthieu ne fanfaronne pas et sans que quelque chose se trame. Dans un pays tel que celui-ci, où la démocratie est encore un bien grand mot, et l’abus de pouvoir légion, il se pose la question de savoir à quel sauce il va être mangé. L’interrogatoire commence. Il lui pose des questions sur son séjour, son nom et prénom, pourquoi il se trouve ici à cette heure tardive, quand est-ce qu’est son avion, où il compte passer la nuit… Finalement, il lui demande son passeport pour relever des informations tel que le numéro de ce dernier, vérifier le visa birman et prendre sa référence… Naturellement, une certaine pression se fait sentir sur les épaules de Matthieu qui attend de savoir quel sera le dénouement de cette histoire.

Les événements à venir sont irréels. Il n’aurait même pas pu imaginer cela dans ces rêves les plus fous. Le policier comprend très bien la situation. Il va tout simplement l’aider car il se doit, selon ces dires, de prendre soin des touristes, qui comme lui se retrouve, dans cette situation. Il lui dit qu’il a payé le repas pour lui. Il va faire venir un taxi pour l’emmener dans un bar local ouvert 24h/24 et situé en dehors de la zone restrictive autour de l’aéroport et interdite à toute personne pendant les heures de fermetures de l’aéroport (c’est-à-dire de 23h00 à 5h00 du matin). La gêne est maintenant présente  pour Matthieu. Le fait de se retrouver dans cette situation n’était pas par obligation, ou parce qu’il n’avait pas les moyen de se payer un hôtel mais seulement par choix. Il essaie de faire comprendre au policier qu’il peut faire le nécessaire pour pendre une autre décision. Mais il ne veut pas non plus complétement retourné sa chemise pour ne pas froisser l’homme en face de lui et conserver le même fil conducteur. Ensuite, il continue à croire que l’expérience pourrait, si elle se passe bien, être un moment de vie qui restera à jamais gravé dans sa mémoire.

Le policier doit se rendre à une réunion d’équipe pour faire le point de la journée. Il précise à Matthieu qu’ils se reverront sûrement le lendemain matin avant son vol. Un doute plane alors encore concernant une possible difficulté avant le départ. Le repas terminé, le restaurateur appel un taxi qui va l’emmener dans le bar choisi par le policier. Avec tous ces sacs, Matthieu s’apprête à passer, les 7 prochaines heures, attablé sur une petite chaise en plastique devant une petite échoppe qui donne sur la route principale aux abords de l’aéroport. Il va voir défiler des locaux étonnés de sa présence, ici, en plein milieu de la nuit. De nombreux chauffeurs routiers s’arrêteront pour se restaurer et boire une boisson fraîche. Un homme lui posera des questions. On lui confirmera plus tard que cette personne fait partie des renseignements généraux et il venait s’assurer que tout allait bien et que Mattieu se trouvait là par choix. Petit à petit tous les petits commerces ferment.  Très vite, seule la lumière de ce petit bouiboui miteux continuera d’éclairer cette nuit sombre du 18 Mai 2012.

Malgré la situation qui pourrait paraître  peu confortable, Matthieu vit là encore des moments tels qui les recherchent. Au plus près de la population, il va observer, pendant ces heures, la vie de l’ombre de certains travailleurs. Aucun autre touriste, ou quasiment, et que très peu de locaux n’auront un jour la chance d’observer cela. Après s’être vu offrir du thé, du riz, avoir vu la préparation du petit-déjeuner et acheter un beignet, 5h00 a sonné. Il peut donc prendre tranquillement la direction de l’aéroport. Premier sur place, il attendra plus de 15 minutes avant que les premiers touristes arrivent, que les portes s’ouvrent et qu’il réintègre définitivement le flux normal d’un voyageur lambda.

Vol confirmé, carton d’embarquement en poche et bagages enregistrés, il ne reverra même pas ce policier d’une grande bonté et d’une aide précieuse, qu’il aurait voulu de nouveau remercier. Installé dans l’avion, prêt à décoller, Matthieu est heureux car il  retourne de nouveau en Thaïlande, cette fois-ci pour y explorer le Sud. Il y rejoint, dès le lendemain, un couple d’amis.

Il comprend qu’une nouvelle page de sa vie, de cette vie de voyageur vient de se tourner.
Il est temps pour moi de retourner à ma place, de m’éclipser. J’écris ces dernières lignes en tant que narrateur de ce récit puis je laisserais à Matthieu le soin de reprendre l’écriture de son aventure, l’écriture de son destin qu’il a en main.

J’espère que le suivi de cet individu, la lecture de ce récit, vous aura tout du moins divertie, et peut être, qui sait, ouvert les yeux sur un aspect de votre vie que vous aimeriez reprendre en main, sur un changement que vous souhaiteriez mettre en place dans les prochains jours, semaines… J’espère surtout que vous ne me chercherez jamais. Mais je souhaite de tout cœur que vous ne fassiez qu’un avec moi pour jouir, à votre convenance, de chaque seconde qui s’écoule. J’espère voir des sourires radieux sur vos visages au quotidien. Je souhaite que vous échangiez et partagiez avec votre prochain. Je désire que vous soyez heureux. J’espère que naturellement  vous ne vous poserez pas de questions sur comment y arriver et que vous saisiraient  toutes les opportunités possible et inimaginable de nager dans le bonheur.

Je serais là, tapi dans l’ombre! Je ne serais jamais très loin car présent à chaque acte de cet individu que l’on vient de suivre, à chacun de vos actes et des actions de toutes les molécules vivantes qui vous entourent…