mardi 24 février 2015

La Réunion, une perle verdoyante et volcanique dans l'océan indien!!!

Après moins de deux heures de vol me voici arrivé à ma nouvelle destination. Je foule pour la première fois cette perle naturelle, entre volcans et végétation flamboyante, au beau milieu de l’océan indien. En plein hémisphère sud, à près de 10 000 kilomètres de la métropole, de l’hexagone, je foule, tout de même, de nouveau le sol français. Je viens en effet d’atterrir à la Réunion. De nombreuses personnes m’avaient dit que le contraste serait frappant avec le reste de mon séjour en Afrique. C’est vrai que ce département d’Outre-Mer est très développé, des villes modernes et propres occupent une grande majorité de la côte. C’est le cas surtout de la côte Ouest, Nord-Ouest et Sud-Ouest, qui est la côte dite «sous-le-vent», où le temps est beaucoup plus clément que sur la tumultueuse côte Est; «côte-au-vent». En effet, sur cette dernière les vents violents et les pluies tropicales s’abattent régulièrement. Les nuages formés en plein milieu de l’Océan Indien sont stoppés par les premiers massifs, dont le volcan de la Fournaise, encore très actif de nos jours. De ces entrailles jaillissent encore régulièrement des flots de lave, qui sont si puissants parfois qui s’écoulent tout le long de sa pente et atteignent la mer pour gagner de nouveaux territoires. Je vais explorer ces différents trésors lors des 4 prochaines semaines.
En attendant j’atterris à Saint-Denis, le chef-lieu de ce département et ville principale de l’île. Je prends conscience directement du contraste énorme avec les pays visités antérieurement. Je ne reste pas une seconde de plus que nécessaire dans cette grande ville qui n’a aucun attrait touristique et n’est simplement qu’une grande ville développée.

J’ai rencontré un couple de français très sympathiques au Laos, avec qui j’avais passé une très bonne soirée à Luang Prabang. Avant d’arriver sur l’île, j’avais repris contact avec eux. Géraldine et Thomas ont répondu présents. Ils m’offrent un super accueil en venant me chercher à l’aéroport, et en me proposant de me loger pour quelques jours. Nous prenons la route longeant la côte ouest pour gagner les hauts de Saint-Leu, dans un petit village appelé les Colimaçons, où ils résident depuis plusieurs années. Une personne dans l’avion m’a dit qu’il ne se rappelait plus la dernière fois où il avait eu de la pluie sur la côte Ouest. Pourtant, j’arrive avec un temps très couvert à l’aéroport. Nous avons le droit à quelques gouttes sur le trajet jusqu’à chez eux. Ce n’est pourtant pas la saison des pluies mais le chamboulement climatique à des conséquences partout dans le monde… J’espère que ce n’est pas un mauvais pressage et que j’aurais tout de même du beau temps. Je compte bien passer la majorité de mon temps à l’extérieur en nature. 

D’ailleurs la date de mon arrivée n’est pas anodine. En ce dimanche 26 Octobre 2014, c’est le dernier jour de la Diagonale des Fous, une course qui traverse la Réunion, du Sud-Est au Nord-Ouest. Les participants à l’épreuve principale doivent parcourir près de 200 kilomètres et gravir un dénivelé positif qui cette année frôle les 10 000 mètres.  Le dénivelé négatif est quasiment le même (je ne sais pas si vous réalisez ce que cela représente mais cela signifie escalader dix kilomètres d’ascension soit partir depuis le niveau de la mer escalader le Mont Everest [8808 mètres] et continuer encore plus haut, car cela n’est pas suffisant). Avant mon départ et pendant le périple, surtout quand j’étais au Népal, j’ai eu envie de réaliser cette course. Mais cela demande des mois de préparation, la participation à d’autres événements d’endurance longue distance, l’obtention de points et obtenir la validation de sa participation, qui n’est pas acquise tellement le nombre de coureurs voulant prendre part à cette épreuve de fous est important. Alors que j’aurais pu arriver avant le début de cette course, j’ai décidé d’arriver plutôt à la fin, car je ne voulais vraiment pas me trouver sur place lors de l’événement. Bien m’en a pris pour différentes raisons. En particulier car ils ont eu vraiment mauvais temps, surtout dans les Hauts, en altitude où il n’a pas arrêté de pleuvoir… Une épreuve digne des travaux d’Hercule dans des conditions dantesques, impliquant l’abandon de plus de la moitié des participants! Peut-être un jour je me préparerais pour réaliser cette épreuve mais cela n’est pas encore d’actualité… pourtant ce que je m’apprête à réaliser est tout de même un peu fou aussi… Je ne connais presque personne qui m’aurait suivi dans ce délire que je concocte dès mon arrivée!

Géraldine et Thomas louent une très belle petite maison avec une vue magnifique et imprenable sur la mer. C’est le cas de beaucoup de propriétés, dès qu’on quitte les bords de mer, car on se retrouve directement sur les pentes des cirques entourant les volcans. Ils possèdent, sur leur terrasse, un jacuzzi chauffé. Je ne vais pas me priver de ce confort. Dès mon arrivée, j’y barbote avec un verre à la main, en admirant un coucher de soleil très spécial. Nous passons la soirée entre discussions, avec mes hôtes, puis à une soirée concert en bord de mer, à l’extérieur avec certains de leurs amis. Le séjour commence de la meilleure des façons et ce n’est que le début de moments exceptionnels.
Le lendemain matin, Thomas, partant étudier et travailler dans la ville Le Port, me dépose sur la route des Tamarins (nouvelle autoroute qui part du Nord de Saint-Denis pour rejoindre le Sud et la deuxième ville de l’île Saint-Pierre! Cette voie rapide a permis un peu de désengorger les problèmes de circulation mais les bouchons restent néanmoins très fréquents. Un autre projet de grande ampleur devrait commencer incessamment sous peu pour améliorer encore grandement le trafic).il me laisse au lieu-dit de l’Eperon, où je marche pour rejoindre certaines des plus belles cascades  et bassins de l’île. A l’entrée du sentier, un panneau d’interdiction indique que ces cascades sont fermées au public, par arrêté préfectoral depuis plus de 12 ans. Pourtant, je sais que c’est un des endroits les plus visités de l’île, surtout par des familles entières avec de jeunes enfants! Encore une aberration des lois et de leur mise en pratique.

Alors que je suis seul, je m’enfonce sur le chemin qui longe un canal et des canalisations. J’arrive très rapidement à un super bassin avec une eau d’un bleu magique et une chute d’eau de plus de 20 mètres de haut.  Il s’agit du bassin des aigrettes. Alors qu’il est à peine 7h00, les rayons du soleil ne touchent pas encore le bassin ou la cascade. Seul dans les lieux, je me pose sur des pierres, qui surplombent le bassin. Je commence à feuilleter un livre que Géraldine m’a prêtée. Une heure va s’écouler rapidement. Le soleil pointe ensuite le bout de son nez, sur les hauts des falaises qui entourent cette cascade. Les premières personnes font leur apparition. Un d’entre-eux; un jeune, arrive avec une nouvelle SlackLine qui vient d’acheter et qu’il veut essayer.  Je le rejoins pendant l’installation. Nous discutons. Il fait ces premiers essais et me demande immédiatement si je veux essayer. J’accepte volontiers. Même si nos essais ne sont pas très fructueux, nous aurons tout de même réussi à tenir quelques secondes sur cette ligne, qui surplombe le bassin à plus d’un mètre de hauteur. L’eau, à une dizaine de degré, est prenante mais nous passons un très bon moment. Alors que de plus en plus de personnes arrivent, je décide de continuer mon chemin et d’aller découvrir le deuxième bassin; bassin Malheur. La configuration de ce dernier est totalement différente. C’est le cas par exemple de sa couleur beaucoup plus claire, en raison de sa profondeur. Sur le chemin j’ai découvert auparavant de très beaux points de vue ainsi que quelques tags très bien faits et dessinés par un fameux tagueur. Il fait de l’art à proprement parlé et il est réputé sur l’île. Ce n’est pas un travail simplement fait pour signer sa présence mais de vraies œuvres. Même si je comprends que le style ne plaira pas forcément à tout le monde, j’y suis personnellement sensible, fait assez rare dans ce genre d’expression artistique!

Je ressors par un nouveau sentier qui me fait passer dans un des canaux transportant l’eau de l’est à l’ouest de l’île. En effet, la pluviométrie est très variable. Alors que la côté Est est très arrosée ; comme je l’ai déjà précisé, la côte Ouest manque cruellement d’eau alors que la majorité de la population y vit. Il y a de nombreuses années l’île de la Réunion a été creusée de part-en-part. Des kilomètres de tuyaux et de canaux ont été construits pour transporter un des biens les plus importants pour la vie; l’eau! Il est intéressant, dès ces premiers jours, de voir que cette île possède des climats très variables, parfois seulement à quelques kilomètres de distance, en franchissant une vallée, ou un rempart. Or ces derniers ont une importance capitale sur la végétation, les paysages… Il existe soit disant plus de 100 microclimats différents qui vont de la savane désertique à la forêt tropicale, avec des endroits possédant des records mondiaux de pluviométrie au cours d’une période donnée! Je vais découvrir de nombreux de ces endroits lors des jours à venir.
En attendant, je décide de ne pas visiter le troisième bassin un peu plus intimiste mais plus difficile d’accès. Je me rends sur la côte, dans une des stations balnéaires les plus courus de l’île; Saint-Gilles-Les-Bains. Avant, je longe la côté jusqu’à la plage de Boucan-Canot. Malgré les risques très élevés d’attaque de requins (malheureux record mondial ces dernières années devant l’Australie et l’Afrique du Sud), je peux voir des baigneurs à l’eau, normalement protégé par la barrière de corail et de surfeurs aussi, qui sont, eux, de l’autre côté de la barrière. Des bateaux patrouillent pour essayer de surveiller le mouvement de ces prédateurs et des vigiles surveillent aussi la mer depuis la côte. La vigilance a été renforcée. Le risque, même si présent, n’existe pas partout et cela n’empêche pas de profiter de tous les atouts de l’île. Pourtant cette mauvaise publicité a une très mauvaise influence sur la fréquentation touristique.  Alors que l’île ne vit que de l’industrie de la canne-à-sucre et du tourisme, ce manque à gagner est très important surtout sur une île où le taux de chômage dépasse les 30 pourcents, où beaucoup de personnes vivent encore dans des cabanes en tôle, dans des bidonvilles bien cachés, à l’abri des regards des touristes… Cela ne m’aurait jamais empêché de venir… mais ce n’est pas moi qui fait vraiment marcher les commerces et l’industrie du touriste… ma façon de voyager m’en éloigne le plus possible, par choix et par envie, même si à un moment, je franchirais le pas lorsqu’une amie me rejoindra, mais le temps est encore long avant ce moment!
En ce lundi 27 Octobre, je marche déjà beaucoup, plutôt sur du plat, si l’on compare avec les dénivelés qui m’attendent dans les prochains jours. Accumulant les kilomètres, je m’assure que la forme est là. Je commence aussi à tester l’auto-stop! Cela marche plutôt très bien. Je n’attends pas beaucoup avant d’obtenir un transport de Saint-Gilles-Les-Bains jusqu’aux portes de Saint-Paul. La gorge, que je découvre, à seulement quelques centaines de mètres d’une ville de moyenne importance, est splendide. En quelques minutes, je suis de nouveau plongé dans une nature luxuriante, un silence complet, seulement entrecoupé par les chants des oiseaux. Au fond de cette gorge, un magnifique bassin, d’un vert foncé très lumineux, est une vision unique pour moi, que je n’avais jamais eu l’occasion d’avoir auparavant. Cette île me réserve pourtant encore de nombreuses surprises! Je continue ensuite sur une route qui forme le Tour des roches. J’y découvre de beaux bassins, un étang rempli de végétation et une nature phénoménale. Cette route fait plus de 7 kilomètres. Je peux dire, sans hésiter. J’ai dépassé les 20 kilomètres de marche dans la journée et je ne compte pas m’arrêter en si bon chemin. 

Grâce à 4 personnes qui me prennent en auto-stop, je rentre facilement chez Géraldine et Thomas, avant de passer une très bonne soirée avec eux. Je profite bien entendu encore un peu du jacuzzi. Le lendemain, je ne m’éloigne pas trop de la côte. Je pars découvrir la ville de Saint-Leu, prendre des informations auprès de l’office de tourisme, pour organiser la traversée de l’île, que je m’apprête à faire. Malheureusement, le guide de montagne, que Géraldine m’avait conseillé d’aller voir, vient tout juste de partir en vacances pour un mois. Peu importe, j’obtiens une carte très basique avec les sentiers principaux. Mais je ne me fais pas trop de soucis, car je sais de sources sûres, que les sentiers sont très bien balisés. Mon trajet se dessine déjà. Je m’apprête à vivre quelque chose de très intense et physique…

Même si tout le monde me dit que la spécificité et la beauté de cette île consiste en ces cirques et ces deux pitons, je trouve déjà le littoral magnifique. La côte et la mer sont splendides. Je profite de la journée pour passer du temps à l’admirer, pour me baigner et profiter du soleil qui chauffe cette partie de la côte, alors qu’une grande majorité de l’île semble recouverte par les nuages! Le coucher de soleil est encore magnifique. La soirée, chez mes hôtes, est simple mais agréable. Le voyage continue de s’écouler en tout quiétude. C’est la dernière soirée que je passe avec eux. En effet, un de leur ami, en bord de mer, est parti pour 15 jours en France. Il est toujours bien quand quelqu’un peut garder «la case» (comme on nomme les maisons ici), qu’il y ait toujours une présence, évitant les cambriolages. De plus, sa maison se trouve à Saint-Leu, presqu’en front de mer, près de la plage et de toutes les commodités. Dès le lendemain, je m’y installe pour quelques jours, finalement seulement deux, car il me tarde de commencer le projet, que je rêve de réaliser sur cette île aux multiples visages!
Après avoir emménagé chez leur ami, le lendemain matin, je pars découvrir la côte à l’Est de Saint-Leu. Je commence, en longeant la côte à pied et en découvrant les somptueuse côtes découpées, faites de falaises volcaniques qui se sont façonnées avec le temps, le vent et la force de l’océan qui vient s’écraser en permanence sur ce rocher qui trône seul au beau milieu de cet environnement indomptable. Je découvre tout d’abord le gouffre, puis le souffleur qui est très actif en cette journée, où la marée est forte, et les vagues puissantes. Puis étant pris en stop par un couple d’octogénaires métropolitains, j’atteints directement Saint-Pierre. C’est surprenant de découvrir, en front de mer de cette grande ville, des plages paradisiaques. Les surfeurs jouent avec les éléments, malgré le danger. Les baigneurs profitent de la barrière de corail pour se rassurer. Au détour d’une rue, en regardant la diversité de personnes et de leur faciès, en admirant les différents temples religieux, il est facile de constater la richesse de la population qui compose l’île, le fort métissage venu de tout l’océan indien. Les africains côtoient les indiens, les comoriens, les malgaches mais aussi les chinois, sans oublier les nombreux métropolitains venus s’installer dans ce paradis tropical. Chacun a gardé ces traditions, en ont créés de nouvelles, et ont effectués des métissages intéressants. Les odeurs dans les rues, les étals des boutiques de nourriture, ou les plats dans les assiettes des clients des restaurants, de cette ville, permet déjà d’avoir un aperçu de la diversité culinaire.

Je ne m’attarde pas plus que cela dans cette ville que je visiterais en fin d’après-midi. Je file directement vers un bassin qui relie une des belles ravines et l’océan. Puis j’enchaîne directement en me rendant dans la petite localité de Grands-bois, où la simplicité règne, où les enfants, jouant dans un bassin, qui est relié à l’océan, mettent un peu de gaîté, ou un couple de retraité donnant à manger à des oiseaux parachèveront le tableau idyllique et pacifique. Continuant de marché vers l’est, j’atteins les falaises rougeâtres qui dominent  Grand Anse. Après une ballade sur ces sentiers, je descendrais jusqu’à une superbe plage bordée par des palmiers… Petits et grands jouent, discutent, boivent, jouent de la musique. Cela donne encore une atmosphère très particulière qui ne me laisse pas indifférent. Je profite alors des lieux et du grand soleil avant de regagner Saint-Leu en faisant  du stop. Encore une fois cela se passe très bien. Je fais des rencontres très intéressantes, des personnes aux histoires complétement différentes. Je m’arrête à Saint-Pierre, où je découvre certains des bâtiments principaux et les maisons typiques de l’île dans les bas.  La première soirée, en bord de mer, me permet encore d’assister à un coucher de soleil très différent. J’en profite pour faire ce que je veux sur internet et prendre le temps de cuisiner un peu.
D’ailleurs, en ce 30 octobre 2014, je n’ai rien prévu de spécial, si ce n’est de préparer le grand départ du lendemain. En effet après un temps plutôt mauvais dans les hauts, les derniers jours, cela semble vouloir s’améliorer Je ne veux pas manquer la fenêtre de beau temps indispensable pour une expérience réussie. J’ai décidé de voyager d’une façon très particulière. Cela demande de préparer mon sac en fonction et de m’assurer d’avoir le nécessaire. Cela commence par de la cuisine et le fait de me prépare des petits plats pour les premiers jours. Je prépare des rations de riz, des œufs durs, des pâtes en salade, je cuis des légumes et des pommes de terre. Je fais les provisions pour compléter l’ensemble les rations de noix, de bananes séchées et autres soupes que j’avais déjà achetés à Madagascar. J’en profite pour aller courir sur le bord de plage le matin, aller admirer les surfeurs et m’assoir  en fin de journée sur le sable qui s’est réchauffé dans la journée et va me servir de nid douillet pour admirer encore un moment particulier, un spectacle que nous offre mère nature en mettant fin à une nouvelle journée… Géraldine qui a été malade depuis les deux derniers jours vient tout de même me rendre visite et m’assurer que tout va bien. Nous passons une soirée tranquille autour d’une bière.
C’est parti pour une nouvelle aventure! En ce vendredi 31 Octobre, je passe deux heures sur les routes, le pouce levé, et dans les voitures des personnes m’ayant pris en auto-stop. Par ce biais, j’atteins le lieu-dit de Basse Vallée, départ du sentier de randonnée du GR2 mais aussi de la Diagonale des Fous. La plupart des randonneurs partent depuis l’autre côté, principalement pour des raisons d’organisation concernant le logement, mais aussi pour finir par un des «must» de la Réunion. Plusieurs raisons me donnent envie de commencer par ce bout. Je me trouve donc au Sud-Est, à l’altitude zéro, en bord de mer. Je m’apprête à passer de longues journées de marche, seul, sur un des plus fameux sentiers de randonnées français. J’ai décidé de partir en complète autonomie pour la nourriture, l’eau, le logement. Je ferais des journées beaucoup plus longues que ce qui est recommandé. Je vais surtout en faire beaucoup plus que ce que les personnes participants à la Diagonale des Fous n’en font pendant l’épreuve. Heureusement je me donne un peu plus de temps qu’eux car je pars avec un léger désavantage, mon sac est plein. Il pèse 23,425 kilogrammes (pesé chez le boucher jusqu’à côté de la petite surface commerciale, où j’ai acheté les deux dernières bouteilles d’eau). Je pars, entre autre, avec 6 litres d’eau! Je ne suis pas sûr d’en trouver sur mon chemin pendant les deux premiers jours. Je consomme beaucoup du liquide le plus précieux de notre chère planète terre, quand je fais de tels efforts. Puis je commence l’ascension sous le soleil. Je passe à travers des forêts luxuriantes, des sentiers botaniques très intéressants. La végétation change très régulièrement au cours des premières centaines de mètres d’ascension. Les vues sur la mer sont très agréables. Puis le temps se couvre rapidement.  Je fais la rencontre des premiers randonneurs, un couple d’espagnol qui vient de finir la traversée en 12 jours. Ils ont trouvés cela très dur. Ils n’ont pas eu les meilleures conditions climatiques; beaucoup de pluies, entre-autre le week-end précédent, lors de l’épreuve de la Diagonale des Fous. Ils ont rarement eu une bonne visibilité… Cela va m’être confirmé ensuite par un Sud-Coréen qui lui aussi finie la traversée. Il est un peu débité par le temps surtout que nous venons d’essuyer une grosse averse. En effet, je le rencontre une heure et demie après le premier couple. Il n’a pas arrêté de pleuvoir dans cet intervalle. Je suis détrempé mais heureusement tous les éléments qui craignent (vêtements, sac-de-couchage, nourritures) sont protégés dans des sacs étanches, ou dans des Tupperware. Cela  n’aide pas à avoir le plus grand des morals mais j’espère être plus chanceux que les personnes que je viens de croiser. Cela va se vérifier les heures suivantes… En attendant, cela confirme que les personnes effectuant cette traversée le font dans l’autre sens, qu’ils prennent beaucoup de temps et dorment en très grande majorité dans les gîtes, avec la nourriture fournie (ce fut le cas des trois personnes).  Je ne reverrais pas ensuite de personnes faisant la traversée, pendant plusieurs jours, confirmant aussi les dire de beaucoup, comme quoi peu de personnes entreprennent cette épreuve physique et ne le font souvent que par brides. Après de nombreuses heures de marche, un effort intense, surtout en raison de la charge que je porte sur le dos, qui représente plus d’une tiers de ma masse corporelle, j’ai besoin de reposer mes jambes et de m’assoir quelques secondes.
Quand j’arrive au piton du bois vert, le temps est brumeux et une pluie fine s’abat sur moi.  Je ne peux pas profiter du paysage des monticules noirs de roches volcaniques très spécifiques à cet endroit. En fait ce n’est pas tout à fait vrai, car tout juste après les avoir passés, j’ai le droit à une belle première éclaircie. Je prends pleinement conscience alors de la beauté des lieux entre laves, landes et forêts de petits bosquets. Quelques fleurs complètent le tableau. N’ayant pas plus que cela étudié la topologie du parcours, les étapes et ce que je vais découvrir chaque jour, je n’ai pas pris conscience du lieu où je viens d’arriver. L’altitude et l’effort constant depuis plus de 7h00 ne m’aide pas aussi à analyser la situation avec le plus de clairvoyance possible. Mais cela me réserve de belles surprises. En effet, je marche encore une demi-heure et j’atteins un lieu, où je n’ai pas le choix que de suivre le sentier et de tourner à gauche, où je souhaite me rendre, ou à droite pour redescendre dans la vallée. Devant moi se dresse un trou béant, une falaise de plus de 60 mètres, qui me séparent d’un endroit, que je devine à peine au début, car ces lieux sont toujours remplis par les nuages. Je devine néanmoins une terre vierge de végétation. Je continue donc sur la gauche, vers l’ouest et l’intérieur des terres. A plusieurs reprises, j’atteints des points de vue qui bordent cette falaise très spéciale. Puis petite à petit les nuages vont se dégager, laissant apparaître les paysages lunaires volcaniques. Je me trouve sur ce qui est  appelé les remparts du très actif volcan de la Fournaise. Je vois tout d’abord des petites cheminées d’où on jaillit les dernières coulées. Puis le temps se dégageant complétement, me permettant d’admirer le Piton de la Fournaise, juste avant le coucher du soleil. Je n’atteints pas, en cette journée, le gîte du volcan mais de toute façon ce n’était pas mon idée. Je monte ma tente sur ces roches volcaniques, autant que possible à l’abri du vent. La nuit tombe très vite. Je me retrouve seul, dans ces paysages très particuliers, sans un bruit. Je viens d’effectuer plus de 20 kilomètres incluant surtout 2560 mètres de dénivelé positif et environ 310 mètres de dénivelé négatif, lors de cette première journée avec la charge maximum sur mon dos. Cela me met tout de suite dans l’ambiance. Je mange un peu et décide de ne pas tarder à me coucher. 
Je m’endors sans demander mon reste et bien m’en a pris! En effet, la nuit sera agitée. Très vite la brume s’installe de nouveau. Le vent reprend de plus belle. La pluie ne va pas cesser jusqu’à l’aube. Heureusement cette dernière n’est pas torrentielle. Ma tente, qui n’est plus imperméable et ne possède pas de doublure, laisse par endroit passer le fluide H20 qui forme de petites mares à l’intérieur. Je dispose mes affaires, mon tapis de sol, et moi-même dans mon sac de couchage le mieux possible, je fais des plis à des endroits stratégiques sur le sol de ma tente pour éviter la propagation de l’eau et éviter les dégâts. Heureusement, je n’en arriverais pas à devoir écoper. Je somnole plutôt que vraiment dormir, et par intermittence. Je n’ai aucun problème pourtant à me lever avant que le réveil sonne. La pluie a plus ou moins cessé quand je sors à l’extérieur, même si la brume est encore omniprésente. Je plie et range mon sac en essayant de séparer ce que j’ai pu séparer de l’humidité ou non. Les sacs imperméables que je possède sont très précieux lors de cette traversée.
La nature m’offre ensuite un spectacle magique. Elle est assez clémente avec moi. Cela commence par un magnifique lever de soleil dans la brume et des couleurs incroyables. Puis la brume se dissipe, laissant apparaître certains paysages volcaniques exceptionnels, parfois entourés d’un magnifique arc-en-ciel.  La brume enveloppe toujours les hauteurs et les environs d’où je me trouve. Après un bref passage au gîte du volcan, je continue ma marche vers le piton de la Fournaise, pour en faire son ascension. Arrivant  au niveau de la descente, la brume se dissipe laissant apparaître de nouveau le piton et ce paysage lunaire qui se trouve à sa base. Moment intense, où j’ai l’impression que Dame nature vient d’effectuer cela pour moi. Je descends alors le rempart, travers la plaine volcanique où les roches se sont figées, avec différentes formes, en fonction de la température et autres conditions climatiques et où je distincte très bien différentes coulées. Je commence ensuite l’ascension à proprement dit du Piton. Même si des nuages se trouvent encore un peu partout autour de ce dernier, le Piton de la Fournaise est dégagé. C’est le cas pendant toute la montée, jusqu’à ce que 15 minutes avant le sommet, un voile nuageux vienne de nouveau tout recouvrir. Je pense alors que la chance a tournée, que je ne verrais pas le sommet comme je le souhaite. Arrivée au sommet, la visibilité est quasi-néant, seulement de quelques mètres. Mais quelques minutes d’attentes suffiront pour que le sommet se découvre de nouveau, puis il en sera de même au niveau du cratère, laissant apparaître de splendides couleurs, ainsi que des fumerolles au fond de ce dernier. Nous n’avons pas la vue dégagée à 360°, nous ne voyons pas la mer, mais cela ne m’empêche aucunement de profiter des lieux. La lave qui a refroidit a formé de nombreuses formations géologiques et des matériaux totalement différents qui revêtent parfois des couleurs chatoyantes.
J’entreprends ensuite la descente sous le soleil. Je profite de la magie de ce lieu unique. Je fais sécher toutes mes affaires, au niveau du rempart, avec vue sur le piton pendant que je déguste mon déjeuner. La journée de marche ne fait que commencer. Après avoir rangé toutes mes affaires qui ont maintenant séchées, je reprends ma marche en avant. J’accumule les kilomètres sur une surface un peu plus plane, si l’on considère les dénivelés qui se présentent souvent aux randonneurs dans «Les hauts» de la Réunion. Je passe dans la plaine des sables réputée pour ces différentes couleurs qui magnifient le paysage. Au bout de cette dernière, j’arrive dans un endroit très particulier. En effet, après avoir traversé une plaine quasi-déserte, en bas de falaises formant un deuxième rempart, plus ancien, je me retrouve sur quelques mètres de largueur dans une petite forêt. L’importance de l’eau pour la vie, pour que la nature s’épanouisse, prend alors tout son sens. Un petit cours d’eau s’écoule en bas de ce contrefort. Il a permis à une végétation plus importante de prendre vie. J’escalade ensuite ce rempart. J’atteins un lieu beaucoup plus verdoyant où la pluviométrie doit être excessivement supérieure à celle que l’on peut trouver dans d’autres endroits de l’île. Je peux y admirer de nombreuses fleurs et une végétation encore différente de ce que j’ai pu observer la veille et le matin même.
Je plante ma tente sur une pelouse parfaite au milieu de beaux arbres. Il ne pleut pas durant la nuit mais le froid et l’humidité sont si présents que je vais avoir du mal à me réchauffer dans mon duvet qui est normalement d’une utilisation confortable pour une température de 15°C. Heureusement que j’ai un sac-à-viande polaire complémentaire qui me donne un peu plus de chaleur, et me permettra de passer une nuit très correcte. Au matin, juste avant le lever de soleil, je replis ma tente qui est détrempée. Malgré que je sois trempé immédiatement par le seul fait de marcher dans l’herbe, la vue sur le piton des neiges, avec le soleil se levant, me réchauffe instantanément tout du moins mentalement parlant. Il est 5h30 et me voilà parti pour une journée de folie, car j’ai décidé de faire un détour qui n’est pas anodin.
Pour l’instant je poursuis mon chemin pour descendre vers la plaine des Cafres. Je passe à travers des forêts de petits arbustes. Le chemin est parfois très mal indiqué et très boueux avec les pluies des derniers jours. C’est un vrai parcours du combattant pour commencer la journée. Puis j’atteins finalement cette plaine qui est un vrai retour dans le monde des humains. Je ne croise pas beaucoup de monde, mais les fermes sont présentes partout, quelques voitures passent à côté de moi. En effet, je trouve cela trop mal fait. Alors qu’il y aurait eu largement de la place pour faire un sentier pédestre sur la terre, pas trop loin de la route, sans trop empiéter sur les propriétés agricoles, le chemin de randonnée GR2 passe sur la route sur plusieurs kilomètres, au moins 5. Cela casse la magie de ce sentier pendant ce début de journée mais je vais très vite de nouveau me déconnecter de cette réalité, où l’humain empiète toujours un peu plus sur les lieux de nature originelle.  
Après avoir quitté la route, j’entreprends un détour qui ajoute quelques kilomètres de plus à mon parcours mais surtout un dénivelé très important. J’ai vu une photo d’une cascade qui se trouve dans ces lieux. Je veux pouvoir l’admirer de mes propres yeux. Une spécificité aussi de cet endroit est qu’il n’est accessible qu’à pied et qu’aucune route n’y conduit. J’avais donc vraiment envie de découvrir cet endroit, qui me semble être un havre de paix. Normalement la descente demande environ 2h30. Je descends en trottinant et je mets à peine un peu plus d’une heure. Les paysages verdoyants sont splendides. Le chemin passe à travers des forêts d’arbres gigantesques. La descente est vertigineuse et demande parfois de passer par des échelles de quelques mètres, afin d’atteindre le niveau inférieur et continuer mon chemin. Je zigzague entre les rochers et les racines des arbres. Le chemin passe de temps en temps sur un pan d’un gros rocher. Parfois la forêt d’épaissie un peu et me laisse entrevoir de superbes falaises montagneuses.

Arrivant finalement à Grand Bassin, je découvre un petit village tranquille et serein, constitué de quelques maisons typiques très fleuries et entourés de jardins, de potagers et d’arbres fruitiers. Beaucoup de maisons d’hôte accueillent les visiteurs, qui sont descendus par le même chemin que moi, ou plus souvent depuis Bois-Court; petit village sur les bords de la plaine des Cafres. Après avoir passé quelques minutes dans ce village quasi-désert, je continue ma descente vers la cascade que je voulais absolument pouvoir admirer de mes propres yeux. La vue est splendide sur tout le chemin, mais l’arrivée sur la cascade du voile de la mariée est particulièrement magnifique. En ce dimanche 2 Novembre, de nombreuses personnes sont tranquillement assisses au bord du bassin. Ce dernier se trouve dans la continuité de cette chute d’eau et du pic conique qui la domine. Elles sont venues passer la journée, pique-niquer et profiter d’un moment tranquille. La vision que j’ai pendant quelques dizaines de minutes me satisfait pleinement. J’ai quelques très bonnes connexions avec des locaux réunionnais et leurs convives métropolitains venus, pour leur rendre visite, pendant quelques jours. Une d’entre-elles me propose de me prendre en photo, un d’entre-eux me propose de me donner un peu de nourriture. Puis je décide de rebrousser chemin et reprendre  le cours de ma traversée sur le GR2. En ce début d’après-midi, l’effort va être conséquent. Je viens de descendre plus de 1200 mètres de dénivelés, que je m’apprête à gravir de nouveau. Le fait de reprendre le même chemin en sens inverse ne me dérange aucunement, même si dans ma vie personnelle, je n’aime pas regarder en arrière. En montagne, en randonnée, la situation est différente car tu ne vois pas les choses avec la même perspective et tu découvres toujours de nouvelles choses… 
Je passe un très bon moment mais quand j’arrive à 16h00, de nouveau sur le GR2, au niveau du piton bleu, je suis fatigué. Je marche depuis 5h30 du matin, quasiment non-stop! Et  j’accumule plus de trois jours avec de longues heures de marche, portant toujours plus de 20 kilogrammes sur le dos. Mais je sais pourquoi je portais cette charge. J’ai apprécié pouvoir manger des fruits et des légumes, des plats un peu plus élaborés, avoir assez d’eau. J’ai adoré avoir un bout de gâteau de chocolat, ou un carré de chocolat noir, ce qui ne sera plus le cas les jours suivants. Mon sac-à-dos commencent à s’alléger surtout, qu’à partir de cet endroit de l’île je devrais être capable de trouver de l’eau potable, un peu partout et que je ne vais alors plus que porter que trois, ou maximum quatre litres d’eau.

Malgré la fatigue et le besoin de prendre une pause, je n’ai pas atteints l’endroit où je voulais me rendre. Je veux me trouver le plus proche possible du gîte de la Caverne Dufour, pour entreprendre l’ascension du Piton des Neiges, dès le lendemain, pour admirer le lever de soleil, au point culminant de l’île. Mais sur la carte peu détaillée que j’ai, ils indiquent plus de 3h30 de marche encore à effectuer, il est plus de 16h30 maintenant et la tombée de la nuit approche à grand pas. A ce moment un réunionnais, qui s’entraîne pour effectuer des trais longues distances arrivent du cirque de Cilaos. Il va finir sa journée quelques minutes plus tard. Il me donne quelques idées de la topologie, du très long trajet qui m’attend, du fait que le terrain n’est pas dans les meilleures conditions possibles. Il m’alerte surtout sur le fait que certains passages sont dangereux, avec un chemin peu large et quelques échelles à franchir. Il me dit que je dois vraiment essayer de les passer avant que la nuit tombe, que je dois faire attention car le terrain est humide et que ça glisse. Finalement ils m’indiquent deux endroits stratégiques sur le trajet, mais après ces fameuses échelles, soi-disant pour lui à plus de  2h00 de marche, où je pourrais m’installer pour la nuit, sûrement après avoir marché pendant longtemps dans le noir.

Prenant en considération toutes ces données, j’aurais pu penser à reconsidérer mon projet pour les prochaines journées. Mais je ne me vois pas faire une journée avec seulement quelques heures de marche pour attendre le lendemain, la possibilité de voir le coucher du soleil et pour sûr le lever du soleil depuis le Piton des Neiges. N’étant pas du genre à abandonner comme cela, la mission qui m’attend va me donner des ailes. Je décide non seulement de continuer pour aller le plus loin possible mais aussi de m’assurer du succès de la fin d’étape que je m’apprête à effectuer, en continuant cette fin de journée en courant le plus longtemps possible et le plus rapidement possible. Me voilà parti pour quelques heures de folie. Malgré le poids de mon sac-à-dos, très rapidement, l’endorphine libérée par l’effort et le fait que je sois totalement près psychologiquement pour cette épreuve physique, supprime la moindre douleur physique et me pousse à aller plus loin. Malgré l’humidité et les nuages, qui sont apparus dans cette partie de l’île en cette fin de journée, je suis totalement en sueur. Je coure sur un terrain boueux, évitant les rochers et les racines glissantes qui sortent de terre, risquant de tomber à chaque pas. Je ne vois pas passer le temps. Très rapidement j’atteins trois échelles que je passe sans encombre. Le chemin est assez étroit mais rien que je puisse considérer comme dangereux. Cela fait moins d’une heure que je coure. Je pense être encore très loin de ce lieu de tous les dangers. Mais quand j’utilise mon imagination, j’ai toujours tendance à voir les choses  de façon beaucoup plus extrêmes que ce que pourrait être la réalité, pour la majorité des personnes. En effet, après avoir couru pendant plus d’une demi-heure, et avoir en face de moi quelques indications de direction, je prends conscience que j’ai déjà franchi ce potentiel danger et que si je continue comme cela je pourrais arriver à l’endroit désirer même avant la nuit. Je ne relâche pas mon effort. Je passe très vite devant la caverne, dont il m’avait parlé, et qui me semble un très bel endroit, mais beaucoup trop humide pour la nuit. Je pousse un peu plus loin. J’arrive dans un endroit magique à ce moment de la journée; un endroit qui s’appelle «la Mare». Les derniers rayons du soleil, avant de disparaître à l’horizon, touchent encore le sommet du Piton des Neiges. Ce dernier reflète sur cette surface plane aquatique, qui s’évapore, et crée une brume magnifiant le moment. Après avoir profité de ce spectacle, seul, au milieu de nulle part, après avoir vu le ciel s’enflammer et devenir violet, je monte ma tente quelques dizaine de mètres plus loin.
La nuit est courte. En effet, je me couche peut-être à 21h00, après avoir mangé, mais je viens de mettre le réveil à 2h00 du matin. La nuit sera un peu fraîche mais je dors à point fermé et me réveille, quelques minutes avant que le réveil ne sonne. Ouvrant la fermeture de ma tente, je peux constater que le temps est toujours au beau fixe et que les étoiles rayonnent dans le ciel. Après avoir rangé mes affaires, plié ma tente, je prends la direction du gite de la caverne Dufour. Je mets moins d’une heure pour l’atteindre dans le noir. Je vis un moment d’exception lors de ce trajet, dont je suis persuadé que je serais le seul à prendre à cette heure matinal et même avant que le soleil se lève car le gîte le plus près se trouve à des heures de marche. Quoi qu’il en soit, dans la vallée se trouve un petit village. A travers les arbres en bord de falaise, je peux observer quelques lumières de logement mais surtout un cœur géant lumineux m’apparaît!!! Sûrement un design créé par la main de l’homme. Mais en cette matinée, seul au milieu de la nature, dans un silence complet, j’ai vraiment le sentiment que cet objet lumineux met destiné! «Est-ce un signe?» (Les fans de Gad Elmaleh comprendront, pourtant en cette matinée, cela ne me dérangerait pas d’être la personne un peu innocente, qui voit des coïncidences et des signes partout même quand il n’y en a pas… et ne suffit-il pas d’y croire pour que cela devienne réalité?...)
Quoi qu’il en soit, ce début de matinée promet de belles choses. Cela se confirme très vite. Alors que des personnes se préparent à effectuer l’ascension, lampe frontale allumée, je passe devant le gîte sans faire d’arrêts. J’entreprends directement l’ascension jusqu’au sommet du Piton des Neiges, qui culminent à 3071 mètres. Malgré un effort important et une ascension de plus de 600 mètres de dénivelés positifs, je grimpe à mon rythme. Je rattrape assez rapidement des personnes qui se trouvaient devant moi, et n’ayant qu’un petit sac d’appoint. Un peu plus d’une heure, après avoir dépassé le refuge, j’atteins le sommet. J’y rejoins deux personnes qui y ont passé la nuit, protégé par des murs de pierres. La nuit est encore totale, il fait frais, voir froid car on supporte très bien la polaire, les gants et le bonnet. Mais à plus de 3000 mètres d’altitude, sans vent, les conditions sont idylliques… 5h00 arrive très vite et les personnes se présentent au sommet. La lumière commence doucement à apparaître. Des couleurs changeantes embellissent alors le ciel. A 5h45, le soleil fait son apparition! Le moment est très particulier, malgré le fait qu’il y ait un peu trop de monde! Mais vu que le sommet est très large, nous trouvons tous un endroit au calme. J’ai la chance aussi de passer un moment d’exception avec des personnes très agréables, rencontrées au sommet. Elles m’offrent le thé et du chocolat. Cela ajoute une petite touche particulière à ce moment en altitude. Nous sommes très chanceux car il n’y a aucun nuage sur l’île. Seuls quelques-uns sont présents, très loin, à l’horizon. Nous pouvons donc découvrir l’île avec une vue à 360°. Au loin, nous voyons le volcan de la Fournaise qui domine l’Est de l’île. Nous avons de très belles vues sur les trois cirques de Mafate, Cilaos et Salazie, sur les différents remparts, et sur l’océan. Sur ce dernier, à l’ouest, se dessine l’ombre du piton. A chaque seconde, les couleurs, la luminosité, la limite entre ombre et lumière dans les cirques changent! Je reste plus de 3h00 au sommet. Je me retrouve rapidement quasiment tout seul car de nombreuses personnes ont déjà entrepris la descente vers le gîte. Je ne comprends pas vraiment pourquoi les personnes sont si pressées, surtout qu’au dire d’une habituée de l’ascension, nous avons vraiment des conditions exceptionnelles (temps dégagé, pas de vent), comme elle n’a jamais eu lors des 15 premières ascensions, qu’elle avait déjà entreprise avec succès. Mais cela m’importe peu, bien au contraire, je suis très heureux d’avoir la vue pour moi seul et un silence reposant! Alors que 09h00 s’approche à grand pas, je décide finalement d’entreprendre aussi la descente vers le gîte en trottinant, sautant de pierre en pierre. Le soleil est radieux. Il a rapidement réchauffé l’atmosphère.
Peu de temps après, je suis de nouveau au gîte, où beaucoup de monde prend le temps de petit-déjeuner, préparer leur sac pour reprendre leur marche en avant. Je discute un peu avec les personnes rencontrées au sommet, puis je décide de continuer la descente vers le Cirque de Cilaos, toujours avec un rythme soutenu. Et me voilà parti pour plus de 1000 mètres de dénivelés négatif à descendre d’une traite… Au cours du trajet, il y a de superbes vues sur le cirque que je surplombe. Je passe aussi à travers une forêt assez dense.

C’est une sensation étrange de retrouver une grande ville développée au milieu de ce cirque. Je n’aurais pas l’occasion de l’expérimenter mais, depuis le bord de la mer, pour se rendre à Cilaos, il faut emprunter une petite route de montagne avec  plusieurs centaines de virage, impliquant parfois le croisement périlleux avec un bus. En revanche dans ce cirque, je constate une nouvelle fois, que cette traversée de l’île, par le GR2, a vraiment été très mal pensée, ou plutôt que l’extension des structures humaines n’a pas été pensée pour les randonneurs. Arrivant à Cilaos, je n’ai pas d’autre choix que de passer par une petite route de montagne, marché sur le macadam, où à chaque virage, surtout quand les voitures se croisent, j’ai un risque important de me faire percuter par un véhicule. Aucun chemin de randonnée n’est disponible sur plus de 500 mètres… Je suis très content de pouvoir regagner très vite la forêt et découvrir de très beaux endroits, encore préservés, dans ce cirque!

Après avoir fait un arrêt aux thermes pour recharger les batteries de mon appareil photographique, je continue mon chemin pour atteindre la cascade de bras rouge. Il y a peu d’eau à cette période de l’année, me permettant de marcher sur les pierres du lit de la rivière et de pouvoir admirer cette cascade qui tombe quelques dizaines de mètres plus bas. Après avoir profité des lieux pendant quelques minutes, je commence à grimper de nouveau le long des remparts de ce cirque. Cette fois-ci, je me rends vers le fameux col du Taïbit, qui relie ce cirque à celui de Mafate.  J’entreprends la montée. Une fois de plus, le temps se couvre, en cette fin d’après-midi. Cela n’a pas vraiment d’importance à cet instant précis, car j’entre dans la forêt et je peux tout de même admirer de beaux paysages en contre-bas. Je stoppe mon effort alors que la nuit ne va pas tarder à tomber. Il est 18h30! Je viens de marcher presque 15h00, avec seulement quelques pauses, parcouru plus de 40 kilomètres, et effectué un dénivelé positif de plus de 1500 mètres, et un dénivelé négatif de plus de 2100 mètres. Je trouve un emplacement à peu près plat, sur le bord du chemin, en pleine forêt. C’est un des seuls endroits, depuis plusieurs heures d’ascension, où il n’y a aucun risque de tomber 100 mètres plus bas, comme ce fut le cas pour d’autres emplacements précédent. Je trouve du bois sec. J’allume un feu après avoir arrangé mon campement. Je cuisine, notamment des nouilles lyophilisées. Je mange les derniers fruits frais et je commence le rationnement des fruits secs et des noix. Une nouvelle fois, je ne tarde pas à me coucher après le repas, car la fatigue se fait sentir.
Le lendemain, j’émerge une nouvelle fois en même temps que le soleil. Il fait grand beau temps sur Cilaos. Je trouve un point de vue parfait pour en admirer ces beautés. Les fleurs et les fruits, qui jonchent le sol de cette forêt, sont aussi splendides… Un éboulement a eu lieu ce qui a entraîné cette année, la déviation du parcours de la Diagonale des Fous. Passant à son niveau, je ne trouve rien d’inquiétant car le site a bien été protégé. En m’aidant du fil de survie, je passe sans encombre et atteint quelques minutes plus tard le col du Taïbit. Je quitte alors le cirque de Cilaos et découvre pour la première fois, de près, le cirque de Mafate (le plus réputé). En effet ces paysages sont extrêmes, splendides. Le temps est beaucoup plus clément, beaucoup plus sec que ces deux homonymes, qui se trouvent plus au Nord et à l’Est. Et surtout, il n’y a aucun accès par route, mais seulement à pied et par hélicoptère. Cela assure une tranquillité relative. Le matin, néanmoins, le balai des hélicoptères peut-être impressionnant et bruyant.  Ce cirque garde le reste du temps son cachet d’endroit hors du temps, de notre monde moderne, où le bruit, l’image numérique, et le fourmillement humain sont incessants. Après avoir admiré la vue depuis le col, j’entame la descente jusqu’au premier village typique de ce cirque; Marla. C’est la deuxième fois que je vais croiser quelques personnes (une petite dizaine) qui font aussi la traversée, mais la version officielle, dans le sens conseillé, et en dormant en refuge. Puis arrivant à Marla, j’y découvre pour la première les cases typiques réunionnaises des Hauts. Faites de bois et assez colorées, elles possèdent un vrai charme, surtout dans ce cadre de montagne. Je fais seulement le plein d’eau sur place et repars pour découvrir les beautés de ce cirque.
En raison des précipitations beaucoup plus faibles et de son caractère plus récent, le cirque e Mafate et beaucoup plus aride et possède beaucoup moins de végétations, surtout dans cette partie Est. Je dis souvent que je m’estime être la personne la plus chanceuse du Monde, surtout depuis que je voyage. Un autre exemple se présente alors à moi. Ayant repris la marche depuis 30 minutes, après avoir quitté Marla, Je vois les nuages s’accumuler sur les sommets, surtout et aussi au niveau du col de Taïbit. Quelques minutes plus tard, alors que je suis à plusieurs kilomètres, je reçois quelques gouttes, portées par le vent, de pluies torrentielles qui s’abattent sur le cirque de Cilaos et le col du Taïbit. Si j’étais resté à Cilaos la veille, si je n’avais pas commencé si tôt, si je ne maintenais pas un rythme soutenu, je serais à l’heure qu’il est totalement trempé. A la place, je suis toujours sous le soleil, 24h00 magiques à venir ne font que commencer.

Continuant de découvrir Mafate, après avoir longé le cours d’eau qui descend dans ces profondeurs, j’arrive rapidement au site «Trois roches». Il doit son nom à trois gros rochers imposants qui se trouve le long du cours d’eau. Ce dernier avec un faible débit et une hauteur minimum laisse apparaître de magnifiques pierres polis au cours des derniers siècles. Mais le plus impressionnant est la cassure, qui intervient en plein de ce cours d’eau. Ce dernier se transforme alors une magnifique chute d’eau à plusieurs ramifications qui s’écoulent, une centaine de mètres plus bas, dans le début d’une gorge étroite, mais qui ne peut pas laisser indifférent. Compliqué de voir ce qui se trouve dans cette gorge et au fond, sans prendre un minimum de risque et se rapprocher très dangereusement des bords lisses et glissant  qui invitent à une chute directe tout en bas… Je trouve néanmoins quelques points e vue un peu moins kamikaze, permettant tout de même de se rendre compte de la hauteur vertigineuse et de la mort assurée qui attend la personne qui ferait un faux pas…

Beaucoup trop de personnes se trouvent au niveau des trois roches, à l’écart de la chute d’eau,  pour tremper les pieds, se reposer, déjeuner, prendre le temps. Je ne suis pas encore devenu insociable, loin de moi l’idée. Je dis bonjour à toutes les personnes que je croise et parfois discute pendant de longues minutes. Mais pour le déjeuner, j’ai envie d’être tranquille et de profiter du calme de l’endroit. Je m’éloigne donc de l’agitation, admire la gorge au fond de la vallée depuis plusieurs points de vue. Puis je trouve un très bel endroit pour pique-niquer, près d’un petit cours d’eau qui s’écoule rapidement vers les profondeurs de ce cirque. La végétation y est flamboyante. Cela est moins le cas concernant le choix pour m’alimenter. J’ai mangé la totalité de mes rations de nourritures fraîches. Il ne me reste plus que des pâtes lyophilisées, des soupes, des fruits secs. Je déguste et profiter de chaque bouchée de ces produits, aussi simples soient-ils, en admirant le paysage exceptionnel et en écoutant le chant des oiseaux. Je discute avec des randonneurs qui passent à mes côtés. D’ailleurs un couple de quinquagénaires trouvera sûrement l’idée de cet endroit pour déjeuner très bien car je les retrouverais quelques minutes plus tard, à seulement une centaine de mètre, toujours au bord de ce petit ruisseau.
Sur le chemin pour me rendre dans le village suivant, je peux admirer quelques beautés de la faune et la flore de la Réunion. Marcher dans cet endroit de rêve  est un pur bonheur. Cette longue journée est, qui plus est, loin d’être achevée. Après avoir passé le village de roche plate, je continue pendant une vingtaine de minute. Puis j’arrive au niveau de la faille du Maïdo. Le fait de sortir du site de Mafate pour admirer la vue depuis les hauts de ces remparts n’est pas au programme du GR2. Cela va très largement augmenter les kilomètres, les dénivelés négatifs et positifs mais tout le monde me dit que c’est un des plus beaux endroits de l’île, un de plus, avec le grand Bénare qui est dans sa continuité! Je ne sais pas si j’aurais l’occasion de revenir lors de mon séjour, si je ne le fait pas maintenant. J’aime les challenges et celui-ci en est un de plus! Ce détour va aussi et grandement participer à ces 24h00 d’exceptions et de magie. 

La brèche de Maïdo est une ascension quasiment verticale de 950 mètres de dénivelé positif après avoir descendu 110 mètres. Au début de l’ascension, j’ai toujours le soleil qui illumine mon visage, blondie mes cheveux longs qui flottent dans le vent à l’aide de la brise. Mais la présence des nuages au-dessus de Mafate est de plus en plus forte. La chaleur n’a rien d’exceptionnel mais je sue néanmoins lors de cette montée, prends un réel plaisir dans l’effort, en solitaire, dans ce cadre naturel unique. Au niveau d’un point de vue, alors que j’ai largement dépassé la moitié de l’ascension, je vois les nuages jouer avec les cimes et les sommets environnants. Ils se déplacent très rapidement, refaçonnent le paysage à chaque instant. Ce qui est génial c’est qu’ils ne sont pas venus au niveau de la brèche mais joue sur la face très raide du reste du rempart, plus à l’Est.

Après être arrivée en haut, au niveau des remparts, il me reste encore plus de 20 minutes pour atteindre le point de vue, et le Maïdo à proprement dit. Pour être honnête, cette dernière ascension d’environ 150 mètres de dénivelé et d’une vingtaine de minutes va me paraître assez longue. En effet quand tu penses être arrivé et que tu relâches ton effort, après une journée complète de marche, il n’est pas évident de repartir. Mais j’arrive en haut sans problème. A cette heure tardive, je ne croise que 2 couples, sur un des points de vue les plus populaires de l’île, car accessible en voiture. Le premier part rapidement. Nous nous retrouvons alors plus qu’à trois. Du côté de la côte, et de l’Ouest, les nuages montent et cela ne laisse pas présager un beau coucher de soleil. Je dors sur place donc, quoi qu’il en soit, je reste. Mais ce jeune couple va bien faire d’atteindre un peu. Tout d’un coup, les nuages redescendent en altitude. Nous assistons à un coucher de soleil splendide dans les nuages. Nous ne savons plus où donner de la tête. Tout d’abord tourné vers l’Ouest et le soleil, où ce dernier illumine d’une couleur changeante les nuages, nous pouvons aussi nous tourner diamétralement à l’opposée, où le ciel prend une couleur rose puis ensuite violette qui magnifie ce paysage de montagne avec gros nuages blancs. Même sur les côtés, la zone de transition revêt un aspect unique. Cela ne dure que quelques minutes, mais je garderais longtemps ce souvenir en mémoire. 

Une nouvelle fois, je monte ma tente, en ayant le sentiment d’être seul au monde. Mais je suis, cette fois-ci, dans un endroit qui a la marque des êtres humains avec  ce point de vue sécurisé par des barrières en bois. Cela ne change pas trop ce que je vis dans ma tente en cette soirée qui est beaucoup plus fraîche que les dernières. Je ne le réalise pas encore mais c’est en fait beaucoup plus humide. La nature me joue un tour et, pour cette raison, je ne dors pas très bien. En effet, le froid combiné à l’humidité, crée une condensation très importante sur la tente, l’eau ruisselle. Je ne peux pas lutter contre cette sensation qui envahie mon corps, qui me glace et me réveil régulièrement. Je somnole  et essaie de me rendormir une énième fois, quand mon réveil sonne. Il est 3h00 du matin, il fait noir et humide. Quand j’ouvre la tente, la couverture nuageuse est très basse et l’humidité dans l’atmosphère est partout. Je veux voir le lever de soleil depuis le meilleur point de vue qui se trouve à un peu plus de 10 kilomètres de distance, avec un dénivelé positif de 700 mètres. Pendant quelques secondes, j’ai du mal à trouver la motivation pour me lever, «plier bagages» et partir à l’ascension du Mont Bénare. Une fois encore, la persévérance va payer!

J’ai tout d’abord un peu de mal à trouver le chemin qui longe le rempart pour se rendre au sommet de ce mont. Je perds un peu de temps. Une fois trouvé, le suivre est assez évident, même dans le brouillard, car il y a des points blancs sur les rochers tous les 2 ou 3 mètres. Ce dernier ne reste de plus qu’une vingtaine de minute avant de se dissiper totalement. Je peux alors admirer la lune qui n’est plus complétement ronde, car la pleine lune était deux jours auparavant, mais presque. Sa luminosité me suffit pour avancer. Le chemin n’est pas des plus agréables. Il est jonché de petites pierres. Au milieu de cette nuit, jongler et zigzaguer entre-elles, avoir mes chevilles qui se bloquent ou se tordent un peu, n’est pas vraiment quelque chose qui me plait et me réjouit. Ensuite parfois, alors qu’il avait été si facile de suivre le chemin, je m’égare, sans en connaître la raison, et il est plus compliqué qu’il ne semble alors pour retrouver mon chemin. Je ne fais pas de grands écarts et j’avance à un rythme soutenu mais je trouve le chemin un peu long. Heureusement la beauté du moment m’aide à continuer à avancer. Le coucher de lune est splendide. Elle revêt une couleur qui devient de plus en plus orangé, avant de disparaître dans les nuages, juste au-dessus de la mer, juste avant l’horizon! Incroyable! Ce moment est encore un peu plus particulier à mes yeux, car je pense que très peu de personnes auront eu la chance de voir cela. L’exclusivité, pour moi, en nature, apporte encore un cachet plus important!
Il est 4h30, le lever de soleil commence dans à peine une heure. J’ai en visu le sommet du Mont Bénare. Le jeune homme du couple, avec qui j’ai partagé le coucher du soleil, la veille, au Maïdo, m’a dit qu’il avait juste mis un peu plus d’une heure pour arriver au sommet. J’avais eu du mal à le croire et j’ai bien fait de prendre une grosses marche d’erreur. Le temps passe très vite, la quantité de rochers pour me barrer la route ne diminue pas et le sommet semble toujours si loin. J’ai pris mon temps pour admirer la lune et son coucher, essayer d’en tirer des clichés corrects, m’approcher du ravin, de ce précipice impressionnant le long du rempart du cirque de Mafate, et retrouver parfois mon chemin dans ces paysages, qui semblent si similaire, dans toutes les directions, quand tu t’égares. Un peu de fatigue m’a peut-être aussi fait diminuer le rythme de ma marche. Quand je commence à voir les premières lueurs du soleil apparaitre, je suis frustré et j’ai peur de ne pas arriver au sommet à l’heure, pour voir le soleil pointé son premier rayon à travers l’atmosphère. Je me mets à trottiner  et ne relâche pas l’effort pendant une demi-heure. J’arrive au sommet exténué, mais tellement heureux. Cela va se jouer à quelques minutes près. Je suis seul, frigorifié, sentant le poids de la fatigue. Je me couvre immédiatement après avoir sué. Aujourd’hui le vent est fort et glacial. Le bonnet, les gants et les trois couches de vêtements, pas vraiment techniques, ne me suffisent pas. Mais je me pose, tout de même, près de cette grande croix blanche de plus d’un mètre qui culmine au sommet du mont Bénare, scellé sur un de ces rochers.

Le premier rayon illumine le ciel à l’est du Piton des neiges que j’admire presqu’en premier plan, seulement séparé de mon point de vue par les cirques de Cilaos et de Mafate. L’endroit est sublime, les quelques nuages de basse altitude ne gâchent en rien la vue qui s’offre à moi. Et c’est sûrement mon esprit d’aventurier, le fait que j’aurais rêvé d’être un des premiers explorateurs de notre planète, mais le fait d’être seul, embellie encore plus le paysage et l’instant vécu. Pour être complétement exact, j’aurais aimé partagé ce moment avec une, ou quelques personnes, tels mes parents, mon frère ou ma sœur, mon meilleur ami, ou mon âme sœur… Et oui, nous aurions pu en profiter pleinement, même dans le silence! Et ce souvenir incroyable, aurait alors pris plus de sens et serait resté en vie à jamais car, à chaque instant, nous aurions pu nous le remémorer en partageant nos récits. En ce jour ce n’est pas le cas, j’espère que le plus tôt possible de tels moments existeront. En attendant, de nombreuses images resteront gravées dans ma mémoire pendant des années et des années… Les paysages, les ombres et la lumière ne font que changer au cours des heures suivantes, où je passe à admirer les lieux et surtout la vue unique surplombant les cirques. Les rayons du soleil et le thé que je bois bouillant, après avoir fait chauffer l’eau, à l’abri du vent, m’ont réchauffé. La fatigue s’est totalement évaporée  en profitant de l’instant présent. Après avoir été à gauche et à droite, être descendu pour voir d’autres points de vue vers le cirque de Cilaos, puis celui de Mafate, je récupère mon gros sac-à-dos. 9h00 vient de sonner. Un premier couple arrive au sommet. Il est temps pour moi de rebrousser chemin vers le Maïdo.

Pour être honnête, la descente n’est pas plus agréable que la montée. C’est génial de pouvoir longer le rempart de Mafate et d’en admirer ces moindres recoins avec de la hauteur. Mais le fait de manquer de glisser sur chaque pierre, ou de se tordre la cheville, est assez pénible. Sentiments partagés entre beautés des paysages et un long trajet dans des conditions peu agréables. J’arrive finalement au Maïdo alors que les nuages et la brume ont totalement bouchés la vue. Les personnes qui arrivent encore à cette heure tardive de la matinée ne verront rien. J’entends une dame se plaindre que les conditions sont horribles et que cela ne reflète pas ce qu’on lui a vendu comme image de l’île. Je me retiendrais de faire le moindre commentaire, mais elle a été mal renseignée car tout le monde m’a toujours dit qu’il fallait être aux principaux points de vue toujours le plus tôt possible, au moment du lever de soleil, pour augmenter ces chances de voir quelque chose… Cela s’explique aisément, climatiquement parlant, avec ces montagnes qui atteignent plus de 3000 mètres et qui sont les premiers éléments bloquants des nuages, qui arrivent de l’océan Indien. J’apprécie, de mon côté, la douce température, pour m’allonger sur l’herbe et faire une sieste revigorante d’une trentaine de minutes. Depuis le thé pris ce matin, je n’ai plus d’eau du tout. Heureusement une personne généreuse en voiture me laisse un litre d’eau après que je lui en ai fait la demande. C’est la seule fois, où je ne bois pas à ma soif et cela s’est déjà fait ressentir et aura un impact encore plus important en fin de journée. Lors de tels efforts, le corps a besoin d’un maximum d’eau. Je suis régulièrement à 4 litres ou plus, et je ne pense pas que ce soit exagérer, surtout pour mon métabolisme.

Entreprenant la descente vers le cirque de Mafate, j’ai le droit à quelques moments d’exceptions. Les quelques gouttes d’eau au départ de la faille, ne sont là que pour me rafraîchir. Mais j’ai le sentiment d’aller dans un monde parallèle; ma cité perdue. Quand à travers le brouillard, surgit, en contre-bas, un des pics illuminés par le soleil, qui perce par un endroit que je ne peux pas, où je me trouve. Je ne sais pas si je décris assez bien cet instant, ou si la photo peut vous donner la moindre idée de l’instant vécu, mais je pense quoi qu’il en soit que c’est très réducteur de ce que j’expérimente. Une fois de plus, je me sens en vie, en ayant l’opportunité d’admirer de telles beautés. De retour dans Mafate, je continue à avancer et m’enfoncer encore un peu plus profondément dans ces méandres. Je passe l’ilet-des-orangers et continue de descendre. Dans cet étroit passage, entre ravins, crevasses, cours d’eau et flancs abruptes de pics volcaniques, les lieux pour camper sont quasi-inexistants. Les derniers hectomètres ne sont pas faciles. Mes genoux, surtout le gauche, me font mal. L’intensité et la répétitivité de l’effort, le dénivelé négative que je viens d’effectuer entraînant des descentes traumatisantes pour les articulations, puis le poids supplémentaire que je transporte, en sont les causes majeures. La douleur devient tellement forte que j’ai du mal à effectuer les derniers pas. Sans être alarmiste, j’ai tout de même quelques doutes, ou quelques interrogations pour le déroulement et la suite de l’aventure.

En contre-bas de l’ilet-des-lataniers, je trouve une petite plate-forme, une petite place avec des bancs, qui sera parfaite pour la nuit. J’attends que la nuit tombe pour monter ma tente et être sûr que personne ne me verra, supprimant ainsi le risque que l’on m’interdise d’y passer la nuit. Je fais surtout de nombreux étirements. J’essaie un maximum de reposer mes jambes, muscles et articulations. Après avoir mangé, je m’endors très rapidement. Dans un environnement très sec et assez chaud, je passe une bonne nuit, en continue. Cette dernière est réparatrice. Mes articulations tiennent le coup et la douleur a même quasiment disparue au réveil. Je n’étais pas loin de frôler avec mes limites la veille. Je ne vais pas me ménager pourtant encore dans cette nouvelle journée mais les ressentis physiques seront tout autre. Comme quoi dans ce genre de défi, le sommeil, l’eau et la gestion de l’effort, sont cruciaux.  
Je navigue dans Mafate. Après l’ilet-des-lataniers, je passe à Grand Place, ilet-à-bourse, ilet-à-malheur, et Aurère. Ces deux derniers sont deux petits villages très fleuris dans un environnement paradisiaque. Si je reviens un jour à la Réunion, j’aimerais y passer quelques jours pour m’y reposer, prendre le temps de me laisser vivre, de profiter du soleil, des paysages et peut-être faire de petites randonnées. Mais pour l’instant j’ai un défi personnel à relever et j’en tiens le bon bout. Au niveau d’Aurère, je sors de la trajectoire du GR2, pour deux raisons. La première est pour utiliser le sentier Augustave que Géraldine m’a très fortement conseillée, le considérant, de son point de vue comme un des plus beaux, voir le plus beau. Ensuite le fait d’emprunter ce chemin va me faire entrer dans le troisième cirque, celui de Salazie, qu’évite normalement le sentier  «le plus couru de l’île», et effectuer une montée assez exceptionnelle par la suite. 

Le sentier Augustave suit des canalisations d’eau pour approvisionner les villages du bas de Mafate, mais surtout une gorge où la verdure est omniprésente, où les vues donnent différentes perspectives sur le plus fameux cirque de l’île. En montant, je rejoins le lit de la rivière. Le soleil est resplendissant. Je suis une nouvelle fois seul. J’en profite pour me baigner, me laver, et laver mes affaires que je n’avais pas encore passées à l’eau et au savon biodégradable. Petit moment de relaxation qui est plaisant. Néanmoins, j’aurais bien voulu aussi le partager avec quelqu’un. Sachant que l’étape de la journée me réserve encore de nombreux kilomètres, je ne m’éternise pas!  Au niveau du ruisseau, j’admire de près la végétation luxuriante, des fleurs que je n’avais jamais observées auparavant, et des plantes qui grappillent toujours un peu du terrain, sur le chemin. Puis, j’atteints le cirque de Salazie. Même s’il y a encore du soleil, quand j’arrive au niveau de la route menant au col du Bélier, cela ne va pas durer longtemps. Je dois entreprendre ensuite la descente jusqu’à un village de ce cirque. Suivant le sentier de randonnée du GR1, je suis persuadé que je vais retrouver très rapidement un chemin de terre. Une fois encore ma déception est grande. Je dois marcher en bord de route, quand ce n’est pas sur le bitume sur toute la distance, soit plus de 10 kilomètres. Je suis maintenant dans la grisaille. Sur le chemin, je discute avec quelques locaux sympathiques, dont un monsieur âgé qui me donne quelques conseils. Après avoir finalement passé Grand Îlet, avoir vu son église typique ainsi que ces maisons traditionnelles, je me dirige vers le départ de la montée que j’effectuerais le lendemain matin. Je confirme auprès de deux jeunes que je suis dans la bonne direction. Il me dise que «oui». Ils me donnent une estimation de distance. Il me demande aussi où je pense dormir. Quand je leur réponds que j’ai l’intention de camper, ils me disent de se méfier car, selon leurs dires, des événements pas très heureux se sont déjà passés dans les environs pour les touristes pas assez précautionneux. Je les écoute, j’ai bien compris le message mais cela ne m’inquiète pas plus que cela. Je marche encore 30 minutes avant d’arriver au point de départ de cette montée. Je la passe et regarde où je pourrais poser la tente au niveau de l’aire de pique-nique, en bas, au bord de la route. Sûrement que les mots de ces jeunes résonnent encore dans ma tête, et que la partie inconsciente de cette dernière se pose des questions. Je décide alors d’aller voir comment est le début de la montée de ce kilomètre verticale (ce n’est pas de l’escalade mais cette ascension est si raide que le kilométrage est maintenant calculé à la verticale et non, à l’horizontale, comme pour tous les autres trajets habituels que nous calculons normalement). Une voiture ralentit en me voyant. Je trouve le comportement des jeunes à l’intérieur suspect. Je ne peux pas vous dire pourquoi et comment exactement, mais j’utilise simplement mon instinct à cet instant. C’est maintenant une certitude, je n’ai plus envie de dormir sur l’herbe en borde de route. J’attends que la voiture continue finalement son chemin et disparaît  après le virage pour me rendre au début de la randonnée et m’engouffrer dans le chemin. Il s’agit d’un sentier très étroit qui prend rapidement de la hauteur. Il n’y aucun endroit assez large et plat pour planter ma tente. Mais je trouve un endroit où je peux étaler mon matelas et passer la nuit à la belle étoile. La nuit risque d’être un peu fraîche. Mais je peux apercevoir des étoiles. La pluie ne semble pas être prévue pour les prochaines heures. De plus, je me sentirais beaucoup plus serein dans ces lieux. Je n’hésite alors pas une seconde. Je déplie mon tapis de sol, installe le duvet, commence à faire chauffer de l’eau pour les pâtes et la soupe. Après avoir mangé, enveloppé dans mon duvet, le bonnet sur la tête et un foulard au cou pour garder la chaleur corporelle, je m’endors sans problème. Encore une fois j’ai parcouru presque 40 kilomètres dans la journée, avec un dénivelé positif de plus de 1300 mètres, environ le même chiffre que pour le dénivelé négatif. 
Je me réveille une ou deux fois dans la nuit. Je peux constater que le ciel n’est toujours pas prêt de me tomber sur ma tête, que quelques étoiles scintillent toujours dans le ciel, même si les nuages sont de plus en plus présents. Encore une fois, j’ai envie de me trouver au niveau du plus beau point de vue pour voir le lever de soleil. A 3h30, me voilà déjà prêt à gravir ces 1000 mètres d’altitude. Le chemin est parfois périlleux car étroit, avec un grand vide d’un côté, parfois des échelles assez hautes et longues à franchir. Finalement les premières gouttes me tombent dessus et la pluie s’intensifie rapidement. Heureusement, cela ne dure pas très longtemps. La météorologie est très changeante. Ça sera une nouvelle fois dans le bon sens pour moi. La pluie s’est arrêtée. Je ne suis pas détrempé et cela n’a pas rendu le sentier impraticable. Je franchis rapidement les «+500 mètres»… La lumière du jour apparaît alors que je suis encore en pleine ascension. Mais je trouve plusieurs points de vue pour profiter des changements. La couverture nuageuse est trop importante pour avoir un lever de soleil à proprement dit, que je peux visualiser directement. En revanche, cela donne un ciel unique qui semble sortir d’un film de science-fiction.

Quelques minutes plus tard, j’atteins la fin du parcours du kilomètre verticale. Le ciel s’est nettement dégagé. Je peux alors découvrir le cirque de Salazie et ces environs, ces paysages très verts et vallonnés. Puis j’assiste à des phénomènes météorologiques impressionnants sur Salazie, qui est reconnu pour être un endroit très pluvieux. J’ai une partie de l’explication en direct. Premièrement, le réchauffement de l’atmosphère avec l’arrivée du soleil entraîne l’évaporation de l’eau sous forme de gaz, qui s’envole dans l’atmosphère, formant un petit voile brumeux. Différents flux de vent, venant de multiples directions, s’entrechoquent au-dessus de ce cirque dans son atmosphère. Très rapidement cela emmène des brides de nuages qui se regroupent pour former des  systèmes dépressionnaires encore plus imposants, déjà près à déverser de nouvelles pluies sur la région. Les mouvements d’air sont sensationnels à observer. Je peux facilement observer ces phénomènes d’une ampleur exceptionnelle dans cet endroit particulier de l’île. Très vite, en altitude, le ciel se recouvre, les couleurs changent. Je décide de ne pas perdre trop de temps pour rejoindre un autre des plus beaux points de vue de l’île! Après être passé devant une belle grotte, qui m’aurait donné envie de rester camper pour la nuit, après avoir rejoint le chemin principal, je marche pendant un peu plus de 30 minutes pour rejoindre le lieu-dit de la Roche Ecrite. Ce lieu, en bord de falaise, offre un point de vue superbe sur le cirque de Salazie qui est maintenant dans les nuages, les sommets les plus hauts de ce côté de l’île, dont le Piton des Neiges, aussi coiffé par de gros nuages blancs. Mais nous avons aussi une vue imprenable sur le cirque de Mafate, ce dernier étant totalement dégagé, et les bords de mer de l’ouest de l’île, eux aussi totalement dégagé.  Cela permet de prendre pleinement conscience des microclimats et clairement comprendre la diversité des végétations présentent dans l’île! Ce facteur se cumule bien entendu à de grandes variations d’altitude!
Après avoir passé quelques minutes à ce sommet, profité de la luminosité et du soleil qui éclaire encore les lieux, je décide de continuer mon chemin. Je rejoins rapidement le gîte des Chicots. Après avoir fait le plein d’eau, je continue la descente et le retour à la civilisation. En effet, j’entame la dernière étape de la traversée, avant de rejoindre le chef-lieu de l’île. Le temps s’est maintenant totalement couvert. Je traverse encore de nouveaux paysages, avec une végétation très différente, de ce que j’avais vu jusqu’à présent… Mes sentiments sont mitigés et partagés tout au long de cette descente… En effet, je serais bien resté en plein nature, seul, profitant de la beauté des lieux. Mais par la même occasion, je suis ravi d’accomplir cette magnifique traversée en autonomie et de la réaliser en un beau temps… De plus, quand je commence à voir Saint-Denis, qui pourrait me faire peur avec toutes ces constructions, j’ai la chance d’admirer un bord de mer d’un bleu particulièrement resplendissant, éclairé par le soleil. Et puis je viens de réussir un objectif un peu fou. En 8 jours, je viens de réaliser un parcours de plus de 280 kilomètres dans ces montagnes et ces cirques au centre de l’île de la Réunion.

En cumulé, je viens d’effectuer en dénivelé positif de 13690 mètres… Cela correspond, en partant du niveau de la mer, à l’ascension du plus haut sommet du monde, le Mont Everest (8848 mètres), enchainé directement avec le Mont Blanc (4810 mètres), auquel on ajoute 32 mètres! Chacun pourra imaginer ce qui veut pour ces mètres supplémentaires. Mais j’ai envie d’imaginer et de croire en un rêve onirique, que j’aurais réussi à m’envoler à la fin de ces ascensions pour atteindre un point de vue différent, matérialiser mon Vol Libre autour du Monde! Concernant le dénivelé négatif, les chiffres parlent aussi d’eux même. Le plus grand abysse jamais recensé sur la planète terre est la Fosse des Mariannes qui s’enfoncent à 11 kilomètres (11000 mètres) sous le niveau de la mer. Or, je viens de réaliser un dénivelé négatif de 13360 mètres. Si j’étais, encore une fois, partie au niveau de la mer, je serais descendu dans les profondeurs de cette fosse, puis j’aurais dû continuer en creusant sur plus de 2360 mètres dans la croûte terrestre…  Je ne viens pas de réaliser ce projet telle une compétition avec un autre, ou pour prouver quelque chose à quelqu’un. Ce fut un challenge que j’ai choisi pour mon propre plaisir, car j’aime réaliser de tels objectifs, les mener à bien et continuer dans la même dynamique…
Quoi qu’il en soit, le sentiment est très étrange quand je rejoins l’ONF de la Providence, point de départ ou d’arrivée de la traversée par le GR2. Ce coin de verdure conduit directement en plein centre-ville, dans un flux de circulation incessante et de citadins se rendant ici et là à pied. Le vacarme engendré par tous ces flux, ces nuances sonores sont un peu dur à accepter au départ. Mais je ne fais qu’un passage éclair dans cette ville.

A une station essence, je trouve une personne  qui va me déposer en sortie de la ville, au niveau du croisement pour me rendre dans la ville de «La Bretagne». Cette dernière se trouve dans les hauteurs de Saint-Denis. Après avoir été longtemps un simple bourg paysan avec ces champs de Cannes-à-Sucre, c’est maintenant une ville, peuplée, et qui a été englobé dans l’agglomération de Saint-Denis. Mais je veux y découvrir une des plus belles cascades de l’île. Une deuxième personne me prend en stop. Je suis très chanceux que ce monsieur s’arrête pour moi. En effet, il se rend exactement où je veux rendre et surtout il connait le lieu-dit. Le départ de cette cascade se trouve entre deux habitations, près d’un lavoir! Seules les personnes, connaissant le lieu exact, peuvent vous indiquer le départ de cette randonnée splendide. Après avoir franchi la première barrière, je trouve un lieu, près du flanc de la falaise, où planter ma tante. Le contraste est saisissant entre les paysages sauvages qui se trouvent derrière et que je découvrirais plus en profondeur, dès le lendemain matin et les lumières de la ville qui illumine toute la vallée qui se présente à moi. Voici la première étape de mon tour de l’île. En effet, après cette traversée je n’ai pas voulu rentrer directement chez mes amis et me retrouver coincé d’un côté de l’île que j’ai déjà visitée. Etant de l’autre côté, je vais prendre le temps de rentre chez eux, pendant plusieurs jours, en explorant différents lieux réputés.
Il pleut une bonne partie de la nuit. Heureusement ces intempéries ne sont pas très violentes. Je réussis, plus ou moins, à rester au sec. Le lendemain matin, la pluie a cessé. Je peux plier ma tente, même si elle est mouillée, et partir à la découverte de cette ravine, qui doit me conduire à cette magnifique cascade du chaudron. Très vite, je m’éloigne des dernières habitations. Je me retrouve en pleine nature, dans un milieu verdoyant, très humide. Après plus d’une heure de marche, le long d’une canalisation, en empruntant parfois des passerelles rouillées tombant en ruine, je me rapproche de la cascade que je commence à apercevoir. Je sors alors mon appareil photo. Je prends alors conscience que la batterie, qui fonctionne correctement, est vide, et que la deuxième c’est encore une fois déchargée toute seule dans la pochette (c’est la deuxième fois que cela m’arrive depuis le début de la traversée). Or j’aimerais avoir la chance de pouvoir immortaliser les lieux. Je prends donc la décision radicale de faire demi-tour, de courir jusqu’aux premières habitations, de trouver un endroit pour recharger, au moins une d’entre-elle, avant de revenir sur les lieux.

La matinée, qui avait commencée tôt, va finalement passer très vite. Une dame, discutant sur le pas de sa porte avec une voisine, m’ouvre sans problème sa porte. Pendant que la batterie recharge, nous échangeons sur la vision qu’elle a de son île, des évolutions qui ont transformées cette dernière les années passées, sur la vie au quotidien… Elle m’offre généreusement à boire et à manger. Nous passons un moment très agréable. Je la remercie chaleureusement, après plus d’une demi-heure, puis je repars de nouveau vers cette fameuse cascade. Je ne me lasse pas de ces paysages que j’admire à chaque fois différemment. Même quand je repasse au même endroit, je les regarde avec un autre point de vue. Après une nouvelle heure passée dans cette ravine, me voilà de nouveau, près de la cascade du Chaudron. Un premier basin est visible, en contre-bas, avec une petite cascade. La couleur de l’eau est d’un bleu resplendissant.  Puis je rejoins l’attraction majeure des lieux; deux bassins, qui sont logés en fond de cette gorge, avec un aplomb rocheux de plus de 100 mètres. Malgré la magie des lieux, un doute plane pour moi! Rien ne le laisse présager  ce qui va se passe lors de mon arrivée. Je commence à observer ces beautés naturelles. Mais cette cascade et son bassin sont classés comme des lieux très dangereux, surtout après que des pluies soient intervenues.

Je ne reste pas seul très longtemps. Un couple me rejoint. Il s’agit d’un local qui habite ce coin de l’île, et d’une française de métropole, venue ici pour étudier la faune. Nous entamons très rapidement une discussion sur le lieu, son histoire, sa beauté et sa dangerosité. En effet, l’homme a toujours habité tout proche… Or une falaise abrupte fait partie du paysage. Elle entoure ce petit bassin d’un bleu hypnotisant. Il me dit que les éboulements sont fréquents et que de graves accidents se sont déjà produits. Alors que c’était le calme plat depuis mon arrivée, nous allons assister aux premières chutes de petites pierres. C’est impressionnant de voir la vitesse que peuvent prendre de si petits projectiles, de voir les ondes dans l’eau après le choc, et d’entendre le bruit qui résonne et donne écho partout dans cette chapelle naturelle.  Nous nous disons que cela rend l’endroit encore plus magique! Que la beauté alliée au danger nous fait prendre conscience de la petitesse de l’homme face à la nature, de l’incroyable pouvoir de cette dernière, et du fait que nous devons la respecter et vivre en symbiose avec elle. Il se met finalement à l’eau et fait le tour du bassin. Bien lui en a pris de rester assez proches des bords. Tout d’un coup, je crie «Attention, ça tombe!» Un énorme objet non identifié arrive à vive allure vers le sol avant de s’écraser en plein milieu du lac dans un bruit d’étonnant, créant une onde marine sans précédent, qui rompt la torpeur de l’eau en sa surface. Il s’agit d’une énorme racine d’arbre morte qui vient de se détacher de la falaise, en raison d’un glissement de terrain. Ces mouvements sont quasi-quotidiens dans ces lieux en raison de l’érosion des sols, à proximité de la falaise. Ces derniers sont amplifiés le jour de pluie avec un alourdissement du terrain et un mouvement qui pousse le tout dans la pente, encore un peu plus proche du précipice, avant que la gravité achève et finalise le processus… Puis une pluie de petits projectiles amplifie le phénomène et, pendant quelques instants, m’a fait craindre le pire pour cette personne se trouvant à découvert et vulnérable dans l’eau. Mais, même à l’écart de la paroi et de la falaise, le danger est présent! De petites pierres percutent les gros rochers en contre-bas, rebondissent et s’éclatent en mille morceaux, avant de finir à nos pieds. Ce n’est pas seulement la température très fraîche de l’eau qui me refroidit pour aller me baigner! Mais l’environnement est vraiment hostile et dangereux. Je me rapproche tout de même du bord en maillot de bain et me plonge quelques minutes dans cette eau limpide.
Après ce bel instant passé sur place et ces quelques frayeurs, je décide de rebrousser chemin pour reprendre ma marche en avant (et oui, même si ces termes impliquent l’inverse et son contraire, ils ne sont pas incompatibles dans cette situation).  Sur le trajet pour sortir de la ravine, j’entends de nouvelles déflagrations sourdes et inquiétantes. Un pan de falaise a encore du se décrocher. J’espère simplement que le couple, encore présent sur place, n’est pas en danger. Je croise ensuite quelques groupes voulant se rendre à la cascade du chaudron. Il est en mon devoir de les mettre au courant des risques encourus et de la situation, même si je ne cherche pas à les alarmer. En sortant du sentier, je trouve assez rapidement une personne qui me prend en auto-stop et me dépose pas très loin de la prochaine destination désirée.

Je pars sur la côte Nord de l’île, en direction de l’Est. Sur la RN2, nous passons rapidement la sortie de Sainte-Marie. Puis cette dame me dépose à Sainte-Suzanne. De là, je retrouve une autre voiture pour me conduire dans les terres, vers le petit village de Bagatelle. Exprès pour moi, il fait un détour et continuer quelques kilomètres plus loin que son habitation que nous venons de dépasser. Il me dépose près de la rivière Sainte-Suzanne, aux abords d’un petit chemin, qui part pour rejoindre des bassins très connus dans la région car très facile d’accès. Je peux y admirer les bassins Bœuf, Nicole et Girondin. Ces bassins sont assez beaux même si pas aussi impressionnants que le précédent visité! Le niveau très bas de l’eau, le fait qu’elle ne s’écoule pas vraiment dans beaucoup d’endroits et stagne, font que le milieu n’est pas propice à la baignade et la couleur de l’eau un peu perturbée par les algues et le terrain l’entourant. Je me promène le long de la rivière, fait une petite sieste près d’un bassin mais je ne m’éternise pas non plus.
Revenant à Sainte Suzanne, je décide de me promener au bord de la mer, d’admirer le phare qui surplombe des plages de galets, puis je continue à pied vers une cascade, qui se trouve à quelques kilomètres de là. Après plusieurs dizaines de minutes de marche, après avoir mangé de délicieux litchis, cueillis en bord de route, après avoir obtenu l’aval des propriétaires de l’arbre, j’atteins une des cascades les plus visités de l’île. Il s’agit de la cascade Niagara, qui s’écoule dans un site grandiose entre champs de cannes et gerbes de bambous. Son nom lui a été donnée en raison d’un débit très important et du fait qu’elle forme un vrai mur d’eau, mais seulement quand son débit est important en saison des pluies. En cette fin de saison sèche, l’image n’est pas la même. En effet, un peu d’eau ruisselle seulement sur les rochers totalement dénudés. Le site reste joli et de nombreuses personnes, en ce week-end de Novembre, sont venues se relaxer dans ces lieux. Mais à cette époque de l’année, je pense qu’il y a des lieux beaucoup plus impressionnants, où je vais vouloir passer un peu plus de temps.

La fin d’après-midi approche et j’ai une idée bien précise d’où je voudrais camper et passer la nuit. Je suis pris en auto-stop par une personne qui a déjà beaucoup utilisé ce moyen de locomotion. Il fait un grand détour pour me rapprocher de ma destination finale. Il me paie une bière avant de me déposer dans un village à l’abord de la Nationale. Puis je marche quelques kilomètres avant d’arriver au magnifique bassin de la Paix. Je ne sais pas si beaucoup de personnes se sont rendus dans ce lieu en ce samedi mais, à presque 18h00, je suis seul! Je trouve un très bon endroit pour planter ma tente, pour manger certaines des dernières denrées alimentaires que je transporte depuis le début, et m’endormir au milieu d’un silence complet, seulement interrompu par les bruits des feuilles qui frémissent par l’action du vent et les oiseaux qui sifflotent…  Je m’endors instantanément.
Je me réveille une nouvelle fois avant que la lumière fasse son apparition. Avec un ciel bleu splendide et le soleil qui s’élève de plus en plus, les couleurs sont changeantes. Je plonge dans l’eau fraîche et reste pendant plusieurs heures sur place. A 8h30, je décide de quitter les lieux pour me rendre vers un deuxième bassin, censé être sublime aussi. Sur le chemin, je vois des locaux, en groupe, venus faire du canyoning. Plus loin, je trouve un très beau caméléon. Je prends cela comme un vrai cadeau de la nature, car j’adore cet animal. Je trouve qu’il possède un petit quelque chose qui le rend unique. Je prends le temps de l’observer, avant d’atteindre le bassin de la Mer! Une nouvelle fois, ce lieu est paradisiaque! Les formations géologiques, en forme d’orgue avec des tubes hexagonaux, les deux chutes d’eau qui scintillent grâce aux rayons du soleil, la quiétude et l’absence de bruits, participent à l’embellir. Je plonge une nouvelle fois dans l’eau. Je profite de la chaleur qui augmente pour sécher sur un rocher au milieu du bassin! Je ne vais pas non plus me reposer sur mes lauriers. Je sais aussi qu’en ce dimanche, en fin de matinée, beaucoup de personnes vont venir profiter de ces bassins. 
Je continue de marcher avec tout mon barda qui est maintenant beaucoup plus légé. Mais j’accumule tout de même les kilomètres parcourus à pied. Rejoignant une route qui monte vers les hauteurs de l’île, je cherche à être pris en stop. Après avoir marché plusieurs kilomètres, avoir vu des voitures pleines passées, un monsieur s’arrête à mes côtés. Il habite le village d’Abondance les Hauts mais il va me déposer un peu plus loin! Nous sillonnons une route tortueuse et boisée. La vallée de Takamaka est exceptionnelle pour son aspect tropical verdoyant mais aussi et surtout pour sa pluviométrie. Des records du monde de chutes d’eau sur plusieurs heures ou plusieurs jours y sont souvent enregistrés. Je pense, en cette fin de matinée, m’estimer chanceux d’avoir un temps sec, quelques belles éclaircies même qui transpercent la brume qui stagne sur les sommets de cette vallée. Un couple, qui a pris la succession du monsieur, pour mon trajet en auto-stop, s’arrête au niveau du cul-de-sac, sur la plateforme du barrage hydroélectrique, qui se trouve en contre-bas. L’homme a su exploiter cette force naturelle et en tirer le meilleur profit. Et sincèrement, même si ce n’est pas la plus belle chose qui existe, les lieux n’ont pas été trop dénaturés. Les sentiers de randonnées sont interdits par arrêter préfectoraux, mais tout le monde les emprunte. Je descends à la cascade du barrage. Le chemin est tout d’abord large, puis il s’étrécit et descend en forte pente. Ici l’eau est omniprésente, elle ruisselle le long de la roche, forme des cascades plus ou moins importantes et participent à une humidité ambiante, mais pas plus désagréable que cela au vu de la configuration des lieux! Le chemin est parfois très glissant. Il serait facile de faire une chute sur les pierres humides, ou sur les racines qui barrent le chemin. Je prends un malin plaisir à éviter ces obstacles, à sauter à droite et à gauche, à doubler le peu de personnes qui se sont aventurées aussi bas. Après quelques minutes de descente, après avoir rejoint le barrage, puis longé le bord de la rivière en sautant d’un gros rocher à un autre, j’arrive à proximité d’une magnifique cascade. A cet endroit, je décide de me poser quelques secondes pour admirer le paysage…

L’arrivée d’un groupe de jeune, que j’avais doublé dans la descente me fait reprendre le chemin inverse. Puis mon parcours entre marche à pied et auto-stop reprend tout de suite de plus belle. Un jeune couple d’Allemand, en vacances sur l’île, me redescend jusqu’au niveau de la mer. Je continue alors ma visite dans le sens des aiguilles d’une montre. Je ne fais que passer dans la ville assez importante de Saint-Benoit, qui est déserte, en ce dimanche début d’après-midi. De plus, les intérêts des sites historiques et naturels y sont très limités. A la sortie de la ville, je trouve facilement une personne qui peut me déposer dans la ville suivante, à Saint-Anne. Cette petite ville est beaucoup plus intéressante. Son église possède un style architectural très spécial. Sa couleur, ces ornements et ces multiples motifs sculptés, lui confèrent un caractère unique, que je prends le temps de regarder un peu plus en détail. Puis je me dirige vers le «Bassin Bleu», qui est très connu dans cette partie de l’île. Il s’agit d’un lac d’un beau bleu, présent juste en bord de mer. En ce dimanche après-midi, des centaines de familles, d’amis, de jeunes et moins jeunes sont réunis autour de ce bassin et profite aussi de sa fraîcheur. Je fais le tour. Je suis interpellé par plusieurs familles. Une d’entre-elles me voyant avec mon gros sac-à-dos et seul, commence à me poser des questions, puis m’invite à me joindre à eux. Nous allons discuter pendant un long moment. Ils m’offrent une bière puis une spécialité de l’île, que la femme a cuisinée pendant de longues heures, avant ce week-end en famille. Encore une fois, l’accueil des locaux est impressionnant. Je suis ravi de pouvoir un peu expérimenter leur mode de vie même si ce n’est que pour plusieurs dizaines de minutes. Une chose est sûre, je ne pourrais pas rester là pour la nuit. Je décide donc de rejoindre la prochaine ville, qui est aussi le point de départ d’une randonnée de 3h00.
Encore une fois, je trouve assez facilement quelqu’un pour m’y déposer. Il me laisse même exactement à l’endroit où je désirais me rendre, c’est-à-dire le port de Sainte-Rose, qui soit dit en passant est vraiment un très jolie endroit avec quelques belles embarcations. Je commence alors à longer le littoral. J’y découvre encore une nature et une végétation différente de tout ce que j’avais pu voir jusqu’à maintenant. Fleurs, arbres, insectes me donnent des distractions sans fin! Deux jeunes garçons en vélo vont m’accompagner pendant un petit bout de chemin, me questionnant.  Je me ferais un réel plaisir de leur répondre. Une de leur principale préoccupation concerne le fait que je fasse cela pour le plaisir, que je suis seul, et que je porte ce sac-à-dos depuis de nombreux jours.  Il était persuadé que je faisais pour la télévision. C’est intéressant d’avoir la perception d’enfants sur un tel projet et de se rendre compte que cela dépasse l’entendement pour beaucoup de monde. Cela ne nous empêche pas bien au contraire de passer un bon moment. Une nouvelle fois, cet échange, vraiment simple, illumine ma journée et me fait un bien fou. J’aime parfois la solitude, mais j’ai tellement besoin des autres et de l’interaction avec autrui, avec mon prochain. Après les avoir quittés, je continue de marcher. Je trouve une très belle prairie de verdure, en bord d’océan. Depuis les rochers volcaniques, j’assiste à un très beau coucher de soleil. Cela fait du bien de déchausser et de laisser mes pieds à l’air libre!

Même si je n’ai jamais eu trop de doutes, je suis très agréablement surpris de la réaction de mon corps pendant cet effort prolongé. Aucune ampoule, aucune douleur si ce n’est la petite alerte le soir, où mes genoux m’ont demandés de faire une pause pour la nuit. Et depuis, je suis reparti, je marche beaucoup et je me sens en pleine forme. Alors que la nuit tombe, je vais vraiment manger les dernières denrées à ma disposition dans mon sac; une soupe, quelques noix de cajou, et des litchis que j’ai trouvés, une nouvelle fois sur le bord de la route. Au passage, je n’en ai jamais mangé d’aussi gros, sucré et avec de si petit noyaux pour tous. Je me régale avant de très rapidement trouver le sommeil. Depuis le début les soirées sont courtes. Mais 8h00 de sommeil ce n’est pas de trop après des journées de marche aussi longues…
D’ailleurs cela ne rate pas, je me lève une nouvelle fois avant le lever du soleil que je vais pouvoir admirer sur la mer. Je continuer à longer la côte Est, vers le Sud. Très vite, je peux admirer le piton de la Fournaise, en fond, l’océan Indien et les roches volcaniques noires en premier plan. Puis très rapidement, j’atteins le lieu-dit de l’Anse des Cascades. C’est un nouvel très bel endroit aménagé en bord de mer. Il y a du avoir foule pendant le week-end mais le lieu est maintenant désert. Je me pose un peu au bord de l’eau, admire les quelques cascades qui coulent le long des roches verticales. Puis je décide de continuer mon chemin. Peu de personnes circulent de ce côté de l’île. Qui plus est, je rentre dans une zone non habitable, appelé le «Grand brûlé»! Il s’agit d’une bande de plus de 20 kilomètres qui regroupent toutes les dernières petites et grandes coulées du piton de la Fournaise. Les plus impressionnantes ont atteints la mer et parfois agrandies l’île de plusieurs centaines de mètres carrés. L’endroit est très spécial! J’adorerais être à ces abords quand le volcan se réveillera (d’ailleurs c’est un peu frustrant alors que j’écris ce récit avec beaucoup de retard. Le 4 février 2015, le volcan c’est de nouveau réveillé. Et le spectacle devait être magique. C’est vrai que j’ai déjà eu l’opportunité de voir ce phénomène de très proche en Papouasie Nouvelle-Guinée, mais tout de même… Bref, en Novembre, il y aura eu des secousses, des prémisses mais rien  de concrets… Et puis, restons positif! Cela me permet de visiter le site du Grand Brûlé ou de remonter sur le piton de la Fournaise, sans craindre pour ma vie, ce qui est plutôt positif!)! Je vais donc visiter différentes coulées qui ont eu lieu à la fin du 20ième et début du 21ième siècle. Intéressant de voir les différentes phases de reconstructions végétales, les différents aspects qu’a pris la roche volcanique selon les endroits d’où elle a jaillie, la température de fusion, les matériaux géologiques impliqués… Je ne suis pas un grand spécialiste de tous ces phénomènes, mais mes humbles connaissances me permettent tout de même d’apprécier ces beautés, je pense, à leur juste valeur. Je passe plusieurs heures sur place, avant de rejoindre la pointe du Tremblet, le premier village après les coulées. Ce village a d’ailleurs été fortement menacé lors de l’une d’entre-elles qui a eu lieu quelques années auparavant.
Comme à mon habitude, j’ai récolté quelques précieuses informations avant de partir, pour essayer de ne pas passer à côté de sites spéciaux par exemple. Dans ce cas, les informations que j’ai obtenues, vont être d’une grande utilité. Je veux faire la visite d’un tunnel de lave. Si possible j’aimerais éviter de passer par les services d’un guide et partir avec un grand groupe dans ces lieux uniques. Je sais qu’il existe un tunnel qui démarre près du bord de la route. Le fait de connaître le nom du court d’eau qui s’écoule à côté me permet de repérer les lieux. Je trouve assez facilement, le petit chemin bien caché qui mène à ce véritable trésor géologique. J’entre dans la coulée de lave. Je ne respecte alors pas du tout les règles de prudence et de bon sens en spéléologie. Je pars seul avec ma frontale pour découvrir ces lieux inédits. Cela ajoute un peu de piment à un moment d’excitation déjà très fort. La beauté des lieux est sans nom. Le visuel offert me permet de beaucoup mieux comprendre un phénomène très particulier. Certains anciens éboulements embellissent encore plus les lieux! Les racines s’y infiltrent et donnent d’autres couleurs que celles des roches. Je m’enfonce sur plusieurs kilomètres. Plusieurs boyaux prennent parfois des directions différentes. Je retiens toujours un détail particulier, qui m’aidera à sortir sans encombre de ce dédale sous-terrain. D’ailleurs, je décide finalement de faire demi-tour pour retrouver l’air libre et la civilisation. Je viens de vivre encore un de ces moments uniques que peu de personnes auront la chance de connaître… Mais cette chance, je la provoque, je la saisie. Je prends certaines risques mesurés, mais risques quand même. D’ailleurs même si cela ne m’a pas angoissé pendant tout le temps sous terre, je suis tout de même content de regagné l’extérieur et de m’enlever une certaine épée de Damoclès d’au-dessus de la tête! 
Encore une fois l’auto-stop est pour moi un moyen parfait de me déplacer.  Je fais de belles rencontres. J’arrive toujours à me rendre où je le désire. J’atteints donc directement le Puits Arabe, qui correspond à une ancienne coulée avec des formes géométriques très particulières et encore un très bel endroit en bord de mer. Il y a ensuite certains autres endroits du Sud-Est de l’île, «la côte sauvage» que j’ai envie de découvrir. Mais une amie me rejoint pour quelques jours à la fin de mon séjour. Nous allons séjourner dans les environs et je désire garder quelques surprises pour les derniers jours partagés.
   
J’ai prévenu Géraldine de la fin de mon expérience sur les routes de la Réunion. Je sais déjà que le propriétaire de la maison, qu’on m’avait prêtée, vient de revenir. Je dois alors trouver un autre logement. Un ami d’Angers; Marc, m’a donné l’adresse d’un couple de retraité, très sympathique, avec qui je suis déjà rentré en contact. Je rentre en premier lieu chez Géraldine et Thomas pour les retrouver. Ils ne sont pas présents chez eux mais, comme d’habitude, tout est ouvert. Je me permets alors de prendre une douche et de profiter du Jacuzzi d’extérieur, un verre à la main! Cela fait du bien un peu de confort superflus après une telle expérience.

N’ayant pas reçu de nouvelles de sa part depuis le début de ma traversée, je reste un peu dans l’expectative. Je décide donc de tenter ma chance en redescendant à Saint-Leu, chez son ami. Une nouvelle fois, je trouve porte close. J’essaie de trouver une nouvelle personne pour me prêter son portable afin que je la contacte. Nous entrons finalement en contact. Elle me rejoint, au même moment, où arrive le propriétaire de la maison, chez qui j’ai logé. Nous passons le début de soirée ensemble, à boire un verre, raconter nos différentes aventures, pendant que j’organise aussi la suite de mon séjour. Il fait nuit sur la Réunion. Heureusement, cela ne pose aucun problème à Josiane et son mari Michel (Jojo et Mimi) de m’accueillir le soir-même. Après avoir restitué ce que j’avais emprunté, refait mon sac, Géraldine me conduit chez eux; à l’Etang-Salé. J’y passe une très belle première soirée! Je retrouve un confort certains. Je suis en très bonne compagnie et les petits rhums arrangés que nous dégustons avant de manger un bon repas, complète le tableau idyllique. J’entame un moment complétement différent de ce séjour sur l’île. Néanmoins, ce dernier va aussi être très sympathique et formateur. 
Je passe une petite semaine chez Jojo et Mimi. Je  prends le temps de vivre en leur compagnie. Je fais la connaissance de Martine, une amie de France, rencontrée en voyage, qui est venu passer plusieurs semaines chez eux. Je fais la connaissance aussi de Sandrine, leur fille, qui habite dans la même rue. Elle vit avec ces deux enfants Clément et Ambre. Elle est malheureusement en intense de divorce mais semble plutôt bien le vivre. Ces enfants sont très proches de leurs grands-parents. Ils aiment passer du temps en leur compagnie. Depuis chez eux, il est très facile de rejoindre un parc, un parcours de santé, et de nombreux chemins de randonnées, qui montent dans «les Hauts», ou partent vers la Mer! Je les emprunte de nombreuses fois, en courant ou en vélo. Je profite du beau temps, parfois seul. Mais je passe surtout beaucoup de temps avec ces personnes adorables. Nous faisons les courses ensemble, allons sur le marché, passons à la boulangerie, où Josiane à travailler et passons de longues minutes à discuter avec les patrons et les employés. Nous cuisinons ensemble, dégustons de vrais bons plats, souvent accompagnés d’un apéritif, le soir assurément mais aussi et parfois le midi. Les rhums arrangés qu’ils font eux-mêmes et qui sont disposés dans de grands bocaux en verre, dans la cuisine, me font toujours de l’œil.  Je vais goûter, et siroter de nouveau les différentes saveurs qu’ils me proposent : Coco, fruit de la passion, vanille, ananas,… J’aime particulièrement le rhum comme boisson. J’en savoure chaque gorgée, à chaque dégustation. Mais je ne fais pas la bouche fine, quand un soir, Martine nous offre, à tous, une bouteille de champagne. Nous régalons aussi quand le 13 Novembre, nous fêtons l’anniversaire de Clément en dégustant de bons moelleux aux chocolats blancs ou noirs, préparés par Sandrine. Le temps s’écoule à grande vitesse. Très vite, lundi 17 Novembre 2014 est déjà arrivé. C’est le jour, où je quitte l’Etang-Salé, après avoir remercié très chaleureusement ce couple génialissime pour leur accueil.
Je rejoins Saint Joseph, en auto-stop, où nous avons réservés, une chambre d’hôte avec une amie qui arrive de France. Il s’agit de Lucile. Je l’ai rencontré lors de mon séjour en Malaisie, sur les splendides îles Perhentians.  Nous avons gardés contact. Nous nous sommes revus, lors de mon retour surprise en France, et nous voilà maintenant de nouveau réuni. Elle arrive tout juste et va passer plus de 3 semaines sur place. Elle vient rejoindre des amis métropolitains qui sont déjà sur l’île, depuis 15 jours, en vacances, et rendre visite à des amis de promotion de son école d’infirmière, qui ceux sont depuis installés à la Réunion. Nous ne passerons que trois jours ensemble, avant que je m’envole pour une nouvelle destination, où d’autres belles retrouvailles sont prévues. En attendant, nous avons prévus de nous retrouver avec Lucile, directement à la maison d’hôte. J’y arrive en fin d’après-midi. Lucile m’y rejoint un peu plus tard. Nous ne restons pas longtemps dans ce gîte. Le couple d’amis de Lucile; Céline et Damien, passent nous prendre avec leur voiture de location. Nous trouverons des plats emportés dans une petite gargote. Puis nous regagnons la chambre chez l’habitant, qu’ils ont loués dans Saint Joseph, alors que de notre côté, nous nous trouvons dans les hauts, à quelques kilomètres de là! Lors de cette première soirée, nous passons un bon moment, faisons plus amples connaissances et établissons le programme pour les trois jours à venir.

Nous allons visiter certaines parties de l’île que je connais déjà. Mais je suis ravi de partager ces moments avec 3 autres personnes. Je vais avoir le sentiment de redécouvrir certaines des lieux les plus mythiques de l’île. Chaque jour est différent et la nature est très changeante à l’Est.  Nous commençons par nous rendre au niveau de l’Anse des Cascades, après avoir dépassé le Grand Brûlé. Les ballades dans ces lieux, ou un peu plus tard sur les coulées de lave, se révèlent agréables et toujours très instructives pour moi. La beauté de la nature, le fait qu’elle soit en perpétuelle mouvement, sont mise en avant sur cette partie de l’île toujours en extension. Leur ayant parlé du tunnel de lave, que j’avais visité quelques jours auparavant, ils ont vraiment envie de s’y rende! ils ne sont pas mécontent non plus que je puisse leur servir de guide. Damien me fait l’aveu qu’il n’y serait jamais allé seul, mais qu’il est impatient de découvrir cet endroit. Nous passons un très bon moment dans ce tunnel. Même si Lucile n’est pas la plus à l’aise et qu’elle ne se sent pas totalement dans son élément, elle est heureuse de découvrir ce tunnel. Nous n’explorons pas ce tunnel dans ces moindres recoins. Nous irons beaucoup moins loin, que je n’avais pu y aller seul.
Nous découvrons ensuite différents coin de la côte sauvage que je n’avais pas encore admirés. Sortant à plusieurs reprises de la route principale, qui fait le tour de l’île, nous nous rendons successivement au port du Tremblet, à la Pointe de la Table, aux Puits des Anglais, aux Puits des Français, et au Cap Méchant. Les points de vue sur l’océan, qui vient s’écraser sur les falaises, sont indescriptibles. A l’un d’entre-eux, nous pique-niquons. En fin d’après-midi, nous regagnons le gîte de Céline et Damien. Nous profitons du fait qu’ils soient seuls et nous utilisons la piscine et le jacuzzi en admirant un magnifique coucher de soleil. Nous ne nous éternisons pas car le réveil, le lendemain matin, est prévu à 2h00!
Après une courte nuit, nous prenons en effet la route qui monte pendant de longs kilomètres, pour atteindre le rempart du Piton de la Fournaise. Nous y arrivons avant que la clarté du jour ne commence à apparaître. Nous entamons une sieste réparatrice, ou devrais-je dire plutôt «préparatrice», dans ce cas bien précis. 30 minutes plus tard, nous entamons le chemin qui conduit au volcan. Encore une fois, je retourne dans un lieu que j’ai visité il y a seulement un peu plus de 15 jours. Mais je redécouvre ce lieu avec un changement des conditions climatiques, de la météorologie, des nuances, des couleurs, de la luminosité! Une fois encore nous en prenons pleins les yeux, pendant cette promenade de plus de 5h00. Lucile, Céline, et Damien sont ravis de découvrir ce piton. Ils s’émerveillent devant la beauté et la puissance de la nature. Nous passons du temps au niveau du cône volcanique, alors que le soleil éclaire le sol, entre deux nuages. Nous ne descendons pas par le même chemin, mais contournons tout le cône par un ancien chemin de sentier, fermé depuis quelques années.

Je pense que ma façon d’écrire vous permet déjà de l’apercevoir depuis le début de mon voyage. Mais je m’extasie devant la beauté de la nature et ce qu’elle nous apporte. Lors de cette randonnée, j’en prends, une nouvelle fois, pleins les yeux et cela me comble. Après avoir commencés à revenir sur nos pas, avoir traversés la pleine des sables en voiture, nous trouvons un lieu fort sympathique pour pique-niquer. Assis sur l’herbe, nous dégustons nos sandwichs, puis nous ferons une nouvelle sieste, à l’ombre des arbres.  Alors que nous retournons dans un brouillard épais en entamant la descente, nous nous arrêtons à la maison du Volcan, qui se trouve sur la route. Nous passons plusieurs heures, dans ce musée, avec de nombreuses animations et de très belles informations sur les volcans de l’île, mais aussi sur ce phénomène planétaire qui se retrouve dans de nombreuses parties du monde. L’enrichissement culturel est important. Nous ressortons avec pleins de nouvelles connaissances qui nous permettent de mieux comprendre la formation de l’île et ces phénomènes géologiques… Puis nous finirons la journée en beauté, dans la piscine naturelle de Manapany, alors qu’un soleil radieux est présent sur la côte.  C’est un vrai bonheur de se baigner en toute sécurité dans un tel lieu, avec la vue sur l’océan indien, dont les vagues passent régulièrement au-dessus du rempart rocailleux, pour finir dans ce bassin. Une nouvelle fois la soirée est simple mais des plus agréables, partagé autour d’un apéritif et de plats à emporter que nous sommes allés chercher.

Une journée de plus qui vient de se terminer sur cette île splendide. Une fois de plus, je n’ai pas vu le temps passer! Mon séjour se termine à la Réunion. Dans un peu plus de 24h00, je m’envolerais pour découvrir une autre île de l’archipel des Mascareignes et cela en très bonne compagnie.
En attendant, en cette matinée du jeudi 20 Novembre, nous partons explorer une partie de l’île que je ne connais pas encore, dont on m’a dit beaucoup de bien. Nous remontons la ravine où s’écoule la rivière Langevin. Nous admirons en premier lieu le bassin des hirondelles. Nous montons ensuite directement à la cascade Grand Galet, sans aucun doute, une des plus belles de l’île avec ces multiples chutes, sa largeur totale et le cadre dans lequel elle se trouve. Quand nous arrivons, un très grand groupe pratiquant le  canyoning, descend à la tyrolienne dans ce bassin. Nous attendrons patiemment, qu’ils quittent les lieux, pour retrouver la quiétude associée à cette cascade et pleinement profiter du cadre. En attendant, nous passons un moment assez drôle à regarder ces novices, essayer de se dépatouiller avec leur combinaison et casque, attaché à ce câble. Après être resté longtemps auprès de cette cascade, avoir visités le petit village typique, au nom homonyme, nous redescendons,  en aval, pour découvrir la cascade du Trou Noir. Malgré une eau avoisinant je pense les 12°C, nous nous jetons à l’eau et profitons du cadre. Nous déjeunons encore dans un cadre paradisiaque avant de reprendre la route en direction de l’Ouest.

Alors qu’ils partent visiter le site de Grand Anse, ils me laissent sur la route principale, équipé de tout mon barda. L’avion ne part que le lendemain matin, mais beaucoup trop tôt, pour que je puisse dormir autre part sur l’île. J’ai donc décidé de m’y rendre en auto-stop dans l’après-midi et de passer la nuit sur place.  J’ai vraiment beaucoup de chance concernant le trajet pour rejoindre l’aéroport. Une première dame, très sympathique soit disant passant, me conduit directement à saint Leu. Puis dès le deuxième conducteur, je tombe sur un français travaillant en ce moment à Mayotte, et en vacances pour la première fois à la Réunion. Il va chercher son amie, arrivant de métropole, à l’aéroport! Très rapidement, je me retrouve donc directement sur place, après avoir passé un bon moment avec des personnes charmantes. L’auto-stop c’est vraiment un art de vivre et un très bon moyen de rencontrer des individus géniaux…
Dans l’aéroport, je profite de l’électricité et de l’internet gratuit et illimité, pour communiquer avec mes amis, traiter les photos que je viens de prendre et essayer de rattraper un peu l’énorme retard concernant l’écriture de mon blog. Alors que tout ferme à 23H00, je me vois ordonner, par un agent de sécurité, de quitter l’intérieur des locaux. Depuis quelques temps, il n’est plus possible de rester à l’intérieur de l’aéroport la nuit, après la mise en place des dispositifs Vigipirate. Avec un jeune officier de Marine, nous nous retrouvons ainsi à passer la nuit devant les portes vitrées de l’aéroport. Nous échangeons sur pleins de sujets, ils me montrent des photos de certains lieux, où il s’est rendu en mission. Il y a tellement de merveilles à découvrir dans ce monde que je ne suis pas prêt de m’arrêter même si très rapidement d’autres priorités prendront le dessus… Quoi qu’il en soit, malgré le fait que je m’endorme dehors, sur mon petit matelas en mousse, que je transporte au-dessus de mon sac-à-dos, j’ai encore et toujours des rêves pleins la tête. Et demain de belles retrouvailles s’annoncent! Je n’oublie pas d’où je viens et à qui je dois ces opportunités, même si à un moment je me suis créer cette chance, seul, d’être où je suis actuellement! Les rêves sont faits pour être vécus. C’est encore mieux quand ils sont partagés avec des personnes, qui seront toujours dans mon cœur! La prochaine étape promet d’être belle aussi!