Monter dans l’avion, à
Sydney, signera une transition importante dans ce voyage en
Australie. La descente le long de la côte Est fut plaisante. Les
paysages furent sublimes. Certaines expériences ont été
inoubliables! Mon expérience en Australie va cependant prendre une
toute autre tournure. Je m’apprête à vivre des moments uniques,
dans les lieux irréels, de ce pays aux multiples visages! Je prends
la direction d’Alice Springs, en plein milieu de cette île
continent.
Depuis le ciel, je découvre un
milieu désertique indescriptible. Le sol est simplement constitué
de terres, variant de couleurs, au cours des kilomètres qui
défilent. La sécheresse est sévère, le relief quasi-inexistant,
les cassures dans le sol mesurent plusieurs mètres de largeur sur
des centaines de kilomètres. Pas une âme qui vive ne semble pouvoir
survivre dans ce milieu extrême. Même la moindre herbe ou
végétation n’aurait pas la moindre possibilité de pousser dans
ces conditions. La désolation est totale ! Pourtant le
patchwork de formes diverses, les nuances de couleurs importantes,
observés depuis le ciel, me laisseront sans voix.
En fait, pas totalement sans
voix, car j’entamerais avec ma voisine, une japonaise, une
discussion intéressante. Nous allons échanger sur nos expériences
au pays des kangourous, sur les projets à venir. Mon regard
alternera en permanence à 180°. Bien entendu le contact visuel,
avec mon interlocutrice, est important. Néanmoins, j’aurais aussi
souvent le nez collé au hublot. Je ne me lasserais pas de ce
spectacle que je suis amené à admirer pour la première fois!
Le voyage passe très
rapidement. Les paysages commencent à changer juste avant
l’atterrissage. Nous revoyons finalement un peu de couleurs vertes
sous nos pieds. Des paysages montagneux se dessinent.
Ce voyage en avion aura aussi
été ponctué par un autre fil rouge, qui a mis certains de mes sens
en alerte. Par pudeur concernant mes sentiments envers la gente
féminine, je ne vous ais que rarement parlé de ce genre
d’expériences. Cette rencontre libérera peut être quelque chose
de nouveau.
Plusieurs fois, une demoiselle
semblera vraiment intéressée par la discussion que nous avons avec
Nina, la japonaise. Elle se trouve sur la même rangée que nous, de
l’autre côté du couloir. Elle jette de nombreux coups d’œil
furtifs. Ces lunettes m’empêchent de me faire un avis personnel
précis sur son charme et sa beauté. La question restera entière
pendant tout le trajet. Mais elle dégage quelque chose de puissant.
Elle ne se joindrait pas à la conversation. L’échange restera
purement visuel.
Le trajet en avion touche à sa
fin. L’atterrissage sur le tarmac se passe sans encombre. Une
nouvelle fois, la récupération de mes bagages s’effectuera dans
la foulée. L’allé en bus, depuis l’aéroport, jusqu’au
centre-ville, est gratuit! Quand je monte dans la navette, après
avoir fait des recherches pour les voitures de location, je tombe
nez-à-nez, devinez avec qui ? Cette femme charismatique. Elle
est assise sur une des premières rangées de siège non loin de la
porte avant de ce bus.
Je décide d’engager la
conversation. Elle vient de Belgique. Elle se prénomme Mona. Et elle
a une vingtaine d’année. Elle voyage actuellement avec deux autres
amies; Alison et Julie, qu’elle me présentera. Un très bon
contact se noue directement entre nous. J’aime sa simplicité, sa
douceur, son charme, combinés avec un fort caractère, et l’envie
d’apprendre des autres. La discussion sera passionnante lors de ce
trajet en bus. Nous ne descendrons pas dans la même auberge mais
nous déciderons de nous revoir, tous les 4, le soir même.
La chaleur est accablante mais
l’air ambiant est sec. Je supporte donc très facilement
l’acclimatation à cette nouvelle-contrée. Les affaires à peine
posées dans mon dortoir, je me focalise directement sur l’objectif
suivant. En effet, je ne veux pas passer par un tour organisé pour
découvrir les environs. J’ai donc passé une annonce sur un site
internet, qui se dénomme « Gumtree ». Ce dernier est une
vrai mine d’or pour les australiens et aussi les voyageurs. Il
permet d’acheter du matériel d’occasion, de visualiser certaines
offres de travail, de faire des rencontres, d’offrir ou de demander
du covoiturage. Cela peut être pour des trajets directs d’une
ville à une autre. Ou il est aussi possible de trouver des personnes
avec qui visiter le pays et des lieux en chemin… Deux françaises
m’ont déjà répondues. Je vais donc faire le tour des loueurs de
véhicules pour comparer les prix, voir les véhicules proposés et
estimer, si oui, ou non, notre projet de voyager en indépendant est
viable. Je ne suis pas vraiment satisfait de ce que je trouverais.
Mais une option, à creuser, semble intéressante. J’en
rediscuterais le lendemain, avec Célia et Marion, qui arrivent en
avion depuis Melbourne. Je les chargerais aussi de confirmer les
informations que j’avais obtenues à l’aéroport.
Le soir venu, je rejoins Mona à
son auberge. Les discussions s’enflammeront. L’échange est
agréable. Nous ne prenons cependant pas les mêmes directions. Elles
partent en tour, dès le lendemain, pour trois jours puis elles
s’envoleront vers Cairns. Nous ne nous reverrons donc sûrement
pas. Qui plus est, elle partage sa vie avec quelqu’un. Ce dernier
étant resté en Suisse pour travailler.
Le feeling fut bon. Il est
agréable de se sentir de nouveau vibrer pour quelqu’un. Avoir des
sentiments intenses pour une femme me transcende. Même si le temps
passé ensemble fut court, je sens au fond de moi qu’il ne
s’agissait pas, cette fois-ci, d’une simple attirance physique.
Nous nous quittons en amis. C’est en ami que nous nous tiendrons au
courant concernant la suite de nos péripéties et la possibilité de
nous revoir dans le Sud de l’Australie.
La fin de soirée sera calme.
Comme à mon habitude, moins d’une seconde, après avoir pris la
position allongée sur mon lit, je dors déjà. J’ai l’esprit
libre, libéré de toutes contraintes, et questions, qui ont pu, un
jour, m’enquiquiner l’esprit.
Le lendemain, je pars explorer
la ville d’Alice Springs. Beaucoup d’aborigènes squattent les
parcs, les bancs publics. L’image véhiculée dans le monde
concernant leur mode de vie possède un fondement que je ne peux pas
dénier en faisant le tour de la ville. Beaucoup d’entre-eux ont un
regard vide décrivant une âme chahutée. Ils ne sont pas intégrés
dans cette société qui leur a été imposée. Ils ne trouvent pas
de repères dans ce monde inadapté à leur besoins, à leur culture
qui a été détruite, à leur mode de vie, au plus proche de la
nature. Maintenant c’est seulement dans des livres que l’on peut
découvrir l’histoire aborigène. Et ce n’est malheureusement pas
le peu de réserves, où ils ont été parqués, qui pourront venir
contredire cette version, et la situation actuelle dramatique pour
ces personnes.
Les européens, en colonisant
ces terres, les ont dépossédés de leurs biens, de leur mode de vie
ancestrale. Cela a impliqué une destruction quasi-irrémédiable de
leur culture spécifique, et de leur identité. Les dédommagements
financiers et les aides de l’état à leur encontre, les ont
définitivement plongés dans un état de déchéance généralisé.
Beaucoup d’entre-eux sont devenus alcooliques. Ils sont saouls du
soir au matin, et du matin au soir. De gros problèmes de violences
sont apparus très rapidement dans leur rang. Un raciste bilatéral
choquant entache la majorité des échanges entre les aborigènes,
natifs de ces terres, et les colons européens. Ces derniers se sont
approprié tous les droits et propriétés. Encore maintenant,
certains rapports et échanges ne sont pas dignes de comportements
humains respectueux de son prochain.
L’envie de franchir le pas et
d’aller à leur rencontre sera plus forte que moi. Cela commencera
par un sourire dans la rue, puis par un bonjour qu’ils me
retourneront. La première personne que je vais aborder à un niveau
d’anglais médiocre. Nous engageons tout de même une conversation.
Je n’apprendrais pas grand-chose de ce premier échange. Une
première barrière a néanmoins été franchie.
Cette femme me demandera très
rapidement de l’argent. Je passe finalement mon chemin n’adhérant
pas du tout à ces échanges fondés sur un aspect purement pécunier.
Je conserve néanmoins une
motivation intacte de pouvoir échanger avec l’un d’entre eux.
J’aimerais vraiment avoir leur point de vue sur la situation
actuelle. Quelques minutes plus tard, un contact visuel me permettra
d’interpeller de nouveau une femme aborigène. Son anglais est
beaucoup plus compréhensible. L’échange pendant de longues
minutes ne fera que confirmer ce que j’avais déjà appris.
L’intégration est quasi-nulle, très peu d’entre-eux arrivent ou
veulent avoir un emploi (plus tard lors de mon séjour, je
rencontrerais des aborigènes travaillant en tant que policiers à
Alice Springs, un conducteur de taxi, une ou deux caissières dans
des supermarchés). La modernisation du pays et la prise du pouvoir
par les européens à entraîner un chaos complet. Très peu
d’aborigènes vivent encore un mode de vie qui était le leur dans
des temps maintenant révolus. La plupart ne vivent même pas un mode
de vie choisi délibérément. Même dans les réserves, la
civilisation occidentale est omniprésente. Les jeunes s’habillent
comme les rappeurs américains, casquettes sur le côté, pantalon
large et ils écoutent les mêmes morceaux musicaux. L’obésité en
raison de la restauration rapide, est un problème majeur chez les
jeunes et moins jeunes. Leur patrimoine génétique n’a pas été
préparé à de tels apports caloriques. Ces personnes très affutés,
longilignes et athlétiques ne sont généralement plus que l’ombre
d’elles-mêmes.
L’aspect communautaire, le
partage sont encore des valeurs prônées qu’ils appliquent au
quotidien. L’individualisme, la possession de biens matériels et
technologiques viennent cependant brouillés un équilibre passé
très fragile. Ce dernier était basé sur la collectivité, le
respect de la nature, et de son prochain. Aujourd’hui, les journaux
relatent des agressions, des viols, des accidents perpétrés par les
aborigènes, la plupart du temps contre «les hommes blancs». Ces
événements et leurs récits, d’un point de vue subjectif,
alimentent alors la psychose…
Notre conversation avec
l’aborigène, au coin d’une rue, sera intense. A aucun moment je
ne sentirais une tension, de la rancœur, une incompréhension, ou un
blocage concernant tel ou tel sujet. Cette femme sera très tactile
envers moi. Nous échangerons de multiples sourires! Le temps se
sera envolé. Je suis encore loin d’avoir l’ensemble des éléments
nécessaires pour me forger une opinion ferme et définitive. J’ai
cependant franchi un pas important vers une communauté qui
mériterait meilleure fortune.
Le temps est venu de continuer
mon chemin afin de rencontrer les personnes qui seront peut-être mes
futurs compagnons de voyage. Je vais faire dans la même journée
connaissance de Marion et Célia, les deux françaises, puis dans la
soirée d’Elise et Kelly, les deux américaines, qui m’ont
contactée dans la matinée. Une vision du périple et des envies
similaires ponctuent nos premières discussions. Cela inaugure de
beaux jours à venir pour la visite, à notre rythme, de ce fameux
centre australien désertique, lieu sacré pour les natifs
aborigènes.
Le matin du jeudi, 15 Novembre
2012, nous récupérons notre véhicule de location à l’aéroport.
Il s’agit d’une voiture, 4 roues motrices, Toyota, flambant
neuve. Nous passerons dans une grande surface K-mart pour acheter une
tente, un matelas, une glacière, et le nécessaire de vaisselles
pour subvenir à nos besoins pendant ce séjour improvisé. Le
deuxième stop nous conduira à une grande surface, dénommée Coles.
Nous achèterons les provisions pour les prochains jours. Dans le
désert beaucoup d’aliments sont proscrits, surtout quand vous ne
possédez pas de frigo mais seulement une simple glacière basique !
Nous prendrons donc que de la nourriture qui se conserve, même à de
hautes températures. Parmi ces derniers, je peux citer, de nombreux
légumes, pour faire des salades avec du thon, mais aussi des fruits,
beaucoup de pain, et des accompagnements salés ou sucrés, à étaler
sur ces tranches sans goût, des céréales, du lait pasteurisé
longue conservation, et quelques extra à manger sans délais!
Fin paré pour survivre dans ces
milieux inhospitaliers, nous nous lançons sur les routes pour
effectuer les 500 kilomètres reliant Alice Springs au Parc national
Ayers Rock. Nous ne croiserons que très peu de véhicules et d’âmes
vivantes dans ce milieu aride. Les heures s’écoulent, la
température augmente au cours de la matinée. La climatisation dans
notre 4x4 sera un luxe non négligeable. Le premier arrêt sera pour
déjeuner. C’est sur une aire de repos, déserte de monde,
constitué de sable rouge, que nous stoppons notre course vers ce
fameux rocher emblème du pays. Les seuls bruits, venant rompre un
silence morbide, sont ces oiseaux de malheur et le vent en rafale. Ce
dernier joue avec les feuilles de quelques d’arbres pouvant
s’acclimater dans ces zones planétaires peu adapté à l’accueil
de la vie, sous quelque forme que ce soit. Tandis que, tout de noir
vêtu, les corbeaux assoiffés, coassent continuellement.
Le deuxième arrêt sera à une
station essence. Comme partout dans l’Outback (régions à
l’intérieur des terres australiennes où la densité de population
au kilomètre carré est minime. Elle réduite à un nombre à un
chiffre. Les conditions climatiques sont extrêmes), ces stations
essences, disséminées le long des axes principaux goudronnés, sont
des arrêts quasi-obligatoires pour chaque âme humaine qui emprunte
ces routes. Le plein refait, une glace, à 6 dollars achetée, pour
Marion et Elise, nous reprenons la route. Quelques centaines de
mètres plus loin, nous quittons l’axe principal qui traverse, en
son centre, le pays du Nord au Sud. Adélaïde est encore à quelques
milliers de kilomètres au Sud. Nous tournons vers l’Ouest, vers le
soleil couchant, pour atteindre la majeure attraction de ce périple.
Le soleil descendant vers l’horizon, nous montrera le chemin.
Nous atteignons l’entrée du
Parc national Uluru-Kata Tjuta plus d’une heure avant la tombée de
la nuit. Nous pénétrons dans la propriété traditionnelle des
tribus aborigènes Pitjantjatjara and Yankuntjatjara, qui se dénomme
eux-mêmes sous le nom générique d’Anangu. Cas malheureusement
assez rare de nos jours, ce parc national est encore la propriété
des aborigènes, qui le gère, avec l’aide et la collaboration, de
l’organisme gouvernemental en charge du patrimoine naturel
australien. La région entière est fascinante en raison de sa
signification culturelle majeure. Je me plonge pleinement dans cette
atmosphère particulière au caractère puissant.
Après quelques kilomètres, à
vitesse réduite, nous faisons finalement face à Ayers Rock, l’un
des cailloux les plus fameux du monde. Aucune photo ou description,
même la plus détaillé possible, ne pourra vous retranscrire
l’émotion ressentie et la grandeur multidimensionnelle de cette
formation rocheuse. La seule solution pour comprendre le moment vécu
et, pour tout à chacun, de s’y rendre un jour ou l’autre.
Quelques chiffres me permettront tout de même de visualiser
ultérieurement cette masse qui nous fait face. Même quand les
souvenirs frais se faneront, les chiffres resteront. Uluru fait 3,6
kilomètres de long et il atteint une hauteur de 348 mètres (867
mètres au-dessus du niveau de la mer), avec comme point de référence
le sol sableux qui l’entoure. Il est fascinant de savoir que plus
de deux tiers de son volume ne sont pas visible à l’œil nu mais
enfouis sous terre. Les explications géologiques vérifiées
existent pour expliquer sa présence. La formation de cet emblème
national, s’est produite au cours de millions d’années précédant
l’apparition de l’être humain sur terre. Une des premières
questions qu’une majorité de touristes se pose reste, tout de
même, comment ce bloc est apparu au milieu d’une région plate
sans quasiment aucun autre relief. La vénération d’un tel site
par les aborigènes primitifs, sans connaissances géologiques
spécifiques, prend alors tout son sens.
Le temps se couvre, des nuages
gris menaçant occupent très largement le ciel. La couleur du rocher
revêt généralement une couleur flamboyante avec les derniers
rayons du soleil couchant. Nous ne pourrons pas admirer cet effet
particulier en cette première soirée.
Néanmoins, nous allons être
les acteurs d’un phénomène naturel rendant ce lieu d’un
mysticisme sans borne. Une tempête de sable avance rapidement vers
nous. En quelques secondes, le rocher disparait presque entièrement
à nos yeux. Nous ne serons que très peu atteint par cette tempête
qui reste à distance raisonnable du parking où nous nous trouvons.
Beaucoup d’interprétations hasardeuses pourraient être
développées autour de cet événement. Pour moi la nature nous
montre sa toute puissance et confirme, s’il en était besoin,
pourquoi les aborigènes vouent un culte sans borne à ce rocher.
La nuit tombant, nous devons
quitter le parc. Nous roulerons plusieurs dizaines de kilomètres,
revenant sur nos pas, pour trouver un campement improvisé au bord de
la route. Les filles monteront, en duo et par pays, leur tente
respective. J’ai pour ma part choisi de dormir dans la voiture. La
nuit passera très vite, en une seule traite. Je suis en charge du
réveil de tous, avant 5h00, dans le but d’aller admirer le lever
du soleil depuis un autre point de vue sur Uluru. L’endroit est
idéal pour cet instant spécifique de la journée. L’affluence
s’en fait ressentir. Tous les cars de touristes arrivent en même
temps que nous. Une masse humaine gigantesque, la plus dense à des
milliers de kilomètres à la ronde, afflue vers le même point
géographique. Je ne suis vraiment pas fan d’un bain de foule dans
cet endroit. Surtout qu’à ce moment de la journée, je profite,
habituellement, de la nature, seul. Heureusement, les groupes sont
bien disciplinés. Ils restent tous agglutinés sur les balustrades,
en bois, mise à leur disposition. Avançant sur les chemins qui
mènent vers Ayers Rock, je trouverais avec Marion et Célia un
endroit relativement calme. Les nuages sont présents avant le lever
du soleil. Ils n’empêcheront néanmoins pas les rayons du soleil
de percer et d’atteindre la surface de la roche pour lui donner une
couleur particulière, qui magnifie encore un peu plus, la beauté de
ce site naturel.
L’avantage d’être en
indépendant va alors prendre tout son sens à mes yeux. Nous avons
le temps que nous voulons pour visiter, contempler les endroits et
même revenir sur nos pas, si c’est ce que nous désirons. Après
un petit-déjeuner copieux, nous entreprenons la marche de 10
kilomètres à la base d’Uluru. Nous découvrirons de magnifiques
passages, des endroits sacrés, des peintures, des bassins d’eau,
et des abrasions géologiques, des plus surprenantes durant ce tour.
Nous passerons aussi devant le
chemin fermé pour atteindre le sommet. La fermeture est due, en ce
jour particulier, à la prévision de température pouvant atteindre
plus de 36°C dans l’après-midi. Peu importe, même si j’avais
eu l’autorisation et la possibilité de grimper au sommet je ne
l’aurais pas fait. En effet, les aborigènes considèrent cet
endroit comme sacré. Ils n’ont jamais et, ils ne graviront jamais
les parois glissantes de ce rocher au pouvoir naturel immense à
leurs yeux. Des panneaux précisent tout cela. La demande est
clairement exprimé de ne pas entreprendre cette montée au sommet
par respect de la culture aborigène. L’industrie du tourisme et,
des touristes sans respect, sont les raisons d’un paroxysme qui n’a
pas conduit à la simple fermeture de l’accès et à la suppression
de la rampe vers le point culminant de la région. Est-ce que les
catholiques accepteraient que des touristes grimpent sur une croix ou
au sommet de la flèche d’une église? Accepteraient-ils que
perchés, ils fassent les zouaves pour se faire prendre en photo?
Qu’en serait-il des Musulmans si quelqu’un s’amuserait sur le
toit d’une leur mosquée, ou ferais des graffitis sur le mur des
lamentations?... Les exemples sont infinis. Beaucoup trop de
personnes, dans la société moderne, oublient que la plus importante
religion, devrait être, et rester, le respect de «notre terre
nourricière» et le respect de son prochain. L’application d’une
symbiose avec la nature, pour former cet équilibre nécessaire et
fragile que l’être humain met à mal, devrait rester dans tous les
esprits.
De notre côté, nous
terminerons notre ballade autour de cette merveille. Nous allons nous
plonger encore un peu plus dans l’histoire de la région en
visitant le centre culturel. Beaucoup d’informations et
d’explications sont données sur les conditions de vie dans le
passé des aborigènes, sur leurs croyances et la relation importante
avec la Terre mère. Il est aussi possible de découvrir l’art
aborigène actuel consistant surtout en des peintures. Revêtant
beaucoup de sens, des rappels de leur mode de vie et des événements
qui s’y déroulent, je ne suis néanmoins pas vraiment sensible à
cet art très particulier. Exception faite de quelques toiles qui
attireront mon regard instantanément.
Un tas de pierres retiendra
particulièrement mon attention. Il s'agit des «Sorry Rocks» (ou
pierres des excuses). Sceptique ou non concernant la véracité de
l'histoire, que je m'apprête à vous raconter, je suis sur qu'elle
ne pourra pas vous laisser indifférent. Ces pierres ont été
renvoyées, sur leur terre d'origine, après avoir été extraites et
emmenées à l'étranger par des touristes, des visiteurs. Ces
dernières ont été accompagnées d'une lettre pour s'excuser du vol
commis et perpétré sur ces terres sacrées (Ces lettres sont
actuellement placardées sur les murs entourant ce tas de pierres
conséquent). Les personnes, qui en souvenir, avaient décidés de
ramener une pierre de cet emblème national australien, ont été
atteints par une malédiction... Ils ont été personnellement
touchés par un événement dramatique, néfaste dans leur vie, non
prévisible et sans aucun avertissement... Quand se ne fut pas eux,
ca a été un de leurs proches, voire leur famille entière, qui ont
vécus un calvaire ayant des conséquences irréparables. Des années
après les premières visites, les premières extractions des pierres
de leurs terres, et les premiers incidents, des investigations ont
été produites. Un lien a été établie mettant en évidence que
toutes les personnes touchées par un malheur totalement imprévu,
avaient en leur possession une de ces pierres... Une légende est
donc nait de ces événements. Apparemment le fait de rendre les
pierres, au lieu sacré auxquelles elles appartenaient, aurait calmé
les esprits spoliés... Même si vous ne croyez pas à ces
superstitions, et que vous êtes un collectionneur de roches ou de
sable, prendriez-vous le risque de subtiliser une partie de ces
terres pour les ramener, à votre domicile?
Après une fin d’après-midi
tranquille au camping où nous avons réservé un emplacement, nous
retournons admirer le coucher de soleil sur Uluru. Le ciel bleu est
au rendez-vous. Nous allons donc assister à un tout autre spectacle
que la veille. Les couleurs orange-rougeâtres, pris par le soleil
couchant, vont enflammer le rocher. Le côté éphémère de ce
moment restera un nouvel instant magique de ce Vol Libre.
Ayers Rock n’est pas la seule
beauté de ce centre rouge. Nous pourrons le constater le lendemain
matin, une nouvelle fois au lever de soleil, à 35 kilomètres de là.
Devant nous, les 36 dômes rocheux des Kata Tjuta (« Many
Heads » ou nombreuses têtes) vont progressivement se laisser
découvrir. Les détails et leur forme géométrique particulière
apparaissent au fur-et-à-mesure que les rayons du soleil illuminent
la nature environnante. Cette dernière se réveille doucement, avec
pour révélateur le chant des oiseaux qui reprennent. La marche
dans la vallée des vents à travers ces dômes sacrés constituera
un autre bon moment de ce début de voyage réussi au centre de la
terre… insulaire australienne! Le contact avec les éléments
naturels, la visualisation de la faune et la flore de la région sont
une nouvelle fois au centre du plaisir quotidiennement ressenti
depuis mon arrivée sur cette île continent.
Pendant les heures chaudes du
milieu de journée, nous reprendrons la route dans notre véhicule
climatisé pour nous rendre à notre prochaine destination. Nous
traversons encore des paysages esseulés constitué de terre
rougeâtre et de tronc d’arbres carbonisés sans feuilles. Tout se
passe sans accrocs, excepté pour Marion, qui lors d’un
ravitaillement d’essence, va oublier son sac au pied d’une table
où elle jouait avec un perroquet. Elle ne prendra conscience de cet
oubli que lors de l’arrivée à proximité de Kings Canyon où nous
nous rendons. Avec Célia, elles referont demi-tour en espérant
qu’une personne honnête est trouvé ce dernier. Son sac contient
tous les documents importants nécessaires au voyage; passeport,
permis de conduire, carte de crédit… Elle dispose aussi d’une
somme non négligeable d’argent en liquide. C’est la tête
complétement défaite que nous la retrouverons à son retour. Le sac
à était voler avec l’argent et la carte de crédit. Ils
retrouveront finalement le passeport et le permis de conduire
international dans les toilettes des femmes! Elle a de quoi être en
colère et démoralisée. Elle entreprendra les démarches
nécessaires dans ce genre de situation, à commencer par
l’opposition sur sa carte bancaire. Plutôt du genre à oublier de
nombreuses choses, elle aura cette fois-ci oublié ce qui ne fallait
pas au mauvaise endroit. Nous sommes un peu démunis pour la
soutenir. Nous ne pouvons que compatir. Je comprends parfaitement sa
détresse. Elle montrera tout de même, dans cette épreuve, un
positivisme impressionnant, trouvant des solutions au problème de la
carte bleue, et surtout constatant que son voyage peut continuer en
raison du passeport retrouver (visite de la Thaïlande à suivre avec
son petit ami).
Une fois encore la soirée sera
calme. Une fois encore, je réveillerais les filles avant le lever du
jour. Pour le troisième jour d’affilé, nous allons pouvoir
admirer le lever de soleil dans un cadre exceptionnel. Notre groupe
est très efficace. Tout le monde est près en temps est en heure
pour arriver à destination à point nommé. Un road trip qu’avec
des femmes n’était pas, dans mon esprit, forcément gagné
d’avance. Et non ce n’est pas du machisme, ni une généralité
sur des différences entre sexe, mais juste quelques expériences
passées qui se rappellent, dans ce cas-là, à mon bon souvenir. Mes
malgré les différences, le mixte de cultures, chacun y met du sien
pour trouver un équilibre proche de la perfection. Je n’oublie pas
non plus tous les bons moments que nous allons passer ensemble, les
discussions intéressantes. Un fait est indéniable dans ce genre
d’expérience; vivre 24h00/24 dans ces conditions, permet
d’apprendre à connaître les autres très rapidement. Et j’espère
avoir la chance de garder contact avec ces 4 femmes très
intéressantes.
Nous allons assister depuis la
crête surplombant Kings Canyon à un nouveau départ de journée
ensoleillée. A vivre, et à revivre, tout simplement! La ballade
autour de ce canyon sera, sans aucun doute, la plus belle de ces 6
jours. La variation des altitudes, les paysages découpés, les
formations géologiques (anciennes dunes, mer asséchée, dômes, des
bassins d’eau …) à ce point de rencontre de trois formes de
paysages majeurs, sont responsable de la beauté des lieux.
Après un plongeon dans la
piscine, un petit déjeuner tardif, nous attaquons une partie
intéressante de cette boucle pour revenir à Alice Springs. Nous
allons empruntés des routes non-goudronnées où règnent la
poussière et les crevasses. Nous allons enfin pouvoir utiliser les
pleines capacités du véhicule. J’aurais conduit la quasi-totalité
du temps au cours de ces 6 jours. Célia me demandera tout de même
de prendre un peu le volant, sur cette portion, pour s’essayer à
l’utilisation d’un véhicule à 4 roues motrices, plutôt
indispensable sur ces terrains hasardeux. Nous croiserons des
chameaux sauvages introduits dans le pays il y a plusieurs dizaines
d’années. Les véhicules croisées, ou qui nous dépasseront, nous
laisserons simplement le souvenir d’une traîné de poussière
diminuant sensiblement notre visibilité. La voiture fonctionnera
parfaitement. Nous sortons progressivement des paysages arides pour
atteindre les paysages de montagnes du parc national West McDonnell
Ranges. Nous passerons les deux prochains jours, sur un rythme plus
relax à découvrir les petits bijoux de cet endroit (point d’eau,
paysage verdoyant même si encore très sec, gorge multiples,
nombreux animaux dont de petits wallabies peuplant cette région).
Marion et Célia ont un avion de programmé. Il est alors temps de
rejoindre la civilisation, et la ville d’Alice Springs. Toujours
étonnant de regagner une ville après avoir passé de nombreux jours
en pleine nature. Il y a du pour et du contre. Je ne verrais que les
aspects positifs, sachant que très rapidement je devrais être de
nouveau sur les routes.
Nos routes se séparent. Célia
et Marion s’envolent vers Cairns, Elise veux partir à Sydney et
Kelly descendra vers Melbourne. De mon côté, c’est la montée
vers le Nord qui est envisagée. Je ne sais pas encore par quel
moyen, ni quand.
Alice Springs est réputée pour
être une ville intéressante afin de trouver un emploi temporaire,
bien payé. Faisant le tour de la ville, je trouverais une agence qui
recrute dans le bâtiment l’entretien de la voie publique et des
parcs nationaux. Je commencerais les démarches avec eux et
j’obtiendrais un rendez-vous pour du travail. Par leur
intermédiaire, je suis aussi contacté par une usine de fabrication
de pain. Après 10 minutes d’entretien, j’ai le job en poche. Je
peux commencer le jour suivant.
Je déclinerais l’offre. En
effet, je me devais d’être honnête. Il cherchait quelqu’un pour
4 à 5 mois minimum alors que je prévoyais de n’en travailler pas
plus d’un. Être large au niveau budget, et voyager à bas prix, à
un gros avantage pour moi lors de ce voyage. Je me permettrais de
décliner par la suite l’entretien à l’agence et un entretien
pour travailler le soir chez Mac Donald. Il ne faut pas exagérer non
plus. Je ne suis pas client de ce genre d’endroit que je trouve
insipide et dont la nourriture est sans goût. Je ne vais pas
commencer à servir, à des personnes, une nourriture qui me répugne
quasiment. Je m’étais inscrit par pur intéressement afin de
pouvoir cumuler deux travails en même temps, dans le but de faire un
nombre conséquent d’heures, sur une courte période, pour repartir
de plus belle. Je ne ferais rien de cela. Je garde en tête pour un
peu plus tard des expériences professionnelles et de vie de voyageur
en sac-à-dos en Australie, que j’aimerais expérimenter sur une
très courte période.
A défaut, je vais trouver un
moyen extraordinaire de voyager gratuitement vers la destination
suivante. Que dis-je, je vais même me faire payer! Et non, vous ne
rêvez pas, il ne s’agit pas du Monde des Bisounours dans lequel
j’aurais pu me perdre depuis le temps que je vis ce rêve éveillé.
Il s’agit du monde de la relocalisation de véhicules pour une
compagnie de location. En effet, selon les demandes des clients, ces
agences ont besoin d’avoir le nombre de véhicules correspondant,
ou supérieur, à la demande. Ils organisent alors régulièrement
des rapatriements de véhicules d’un site à un autre, d’une
ville à une autre. Des particuliers peuvent alors louer le véhicule
pour un nombre de jours donnés pour un dollars symbolique. Ils n’y
a plus alors que la consommation de carburant à payer et la
contrainte de rendre le véhicule à une date donnée. Parfois ces
agences, comme celle d’Apollo, pour qui je vais relocaliser le
véhicule participe un peu aux frais d’essences. Tout le monde y
est gagnant. Le loueur n’a pas besoin de payer une personne pour
bouger son véhicule Le voyageur atteint sa destination pour un prix
défiant toute concurrence. Je vais tomber dans un cas encore un
petit plus particulier, où le parc de véhicules disponibles à
Darwin est inférieur, en nombre, à la demande, par divers clients,
pour les jours à venir. Ils ont donc besoin de faire parvenir un
véhicule en urgence à destination. Saisissant l’occasion, je me
retrouve dans une situation où ils me paient la totalité des frais
de carburants, plus un petit pécule supplémentaire de 100 $
australiens. Cette opportunité ne se refuge pas.
Je m’apprête donc, un peu
plus vite que prévu, à traverser le désert d’Alice Springs à
Darwin. Le fait d’avoir trouvé cette relocation va me permettre de
réaliser ce périple en solitaire. Je savoure, rien qu’à l’idée,
de me retrouver seul pendant deux jours et demi sur des routes, au
beau milieu de nulle part. Le lendemain matin, une fois les
paperasseries effectuées, je m’élance pour plus de 1700
kilomètres en solo. Je suis tout excité par cette aventure qui
s’ouvre à moi. C’est avec le grand sourire que je prends la
route. Je fonce vers le Nord. J’effectue mon premier arrêt devant
un panneau en bord de route indiquant le Tropique du Capricorne.
Cette ligne virtuelle est comme le tropique du cancer dans
l’hémisphère Nord délimitant la zone proche de l’équateur et
celle proche, dans ce cas, du pôle Sud. Une photo incontournable
sera une nouvelle dédicace pour Antho qui se trouvait exactement au
même endroit, il y a quelques années de cela.
e ne m’attarde pas trop
longtemps. Je reprends la route sur un rythme endiablé de musique
que j’affectionne particulièrement. Je ne verrais que très peu de
véhicules. Je vais tout de même faire face aux premiers «Road
trains» que je suis amené à voir. Ces fameux camions puissants
traversent l’Outback dans tous les sens et toutes les directions.
Ils transportent jusqu’à 3 ou 4 remorques. Ils peuvent atteindre
54 mètres de long. Le temps est révolu où les plus impressionnants
d’entre-eux pouvaient être suivi par plus de 10 remorques. Ils
n’ont cependant pas perdu de leur superbe et ils font pétiller mes
yeux de petit garçon, que je suis resté.
J’emprunte en ce moment
l’autoroute Stuart dénommée «Explorer Highway». J’imagine, un
peu difficilement, comment des explorateurs, ont pu s’élancer dans
ces contrées inhospitalières, à cheval ou autre attelage, afin
d’atteindre l’autre côté du pays. L’atteinte d’un lieu, où
quelqu’un s’était déjà implanté, devait vraiment être vécu
comme une délivrance, comme une certitude de trouver de l’eau, de
la nourriture et de quoi repartir pour des centaines de kilomètres.
De mon point de vue, je suis déjà heureux d’atteindre la première
station. Elle est tenue par un vieux australien. Le vent balaie le
sable rouge en rafale. Le bruit grinçant d’un portique métallique
pris au vent est le seul son audible qui me parviendra pendant de
longues secondes aux oreilles. Quelques bâtiments aux alentours sont
à l’abandon. Des carcasses de voitures et de camions rouillent
sous le soleil du dessert.
Je me dirige alors vers le seul
bâtiment viable qui possède encore un toit. Il regroupe un bar, un
restaurant, un hôtel. Le responsable s’occupe aussi de la vielle
pompe à essence, qui délivre ce liquide si précieux dans les
parages. Sur le chemin, j’apercevrais des aborigènes assis sur des
sièges à l’ombre. Pénétrant dans la pièce principale,
j’apercevrais au comptoir le propriétaire des lieux, vêtu d’un
chapeau de cow-boys. Les murs sont couverts de lettres et mots
laissés par les clients, de chapeaux et d’objets divers et variés
qui donnent une atmosphère spéciale et typique, à cet endroit, au
milieu de nul part. Deux clients, un eurasiens et un aborigène,
accoudés au comptoir, sirotent tranquillement une bière. Un
aborigène fera son entrée pour acheter du tabac. Les relations
semblent saines, amicales et pacifiques entre les différents
protagonistes de la scène qui se déroule sous mes yeux. Cela me
réjouit!
L’essence payée, la «pause
pipi» effectuée, je peux reprendre de plus belle ma course folle
vers le Nord. Les paysages sont assez monotones, désertiques avec
peu de végétation. Il est tout de même fascinant de détecter
certaines nuances lors d’un changement de relief, lors du passage à
travers des paysages un peu vallonnés. J’arriverais aussi une
centaine de kilomètres plus loin dans une réserve naturelle. Elle
se dénomme «Devils Marbles», et elle est constituée de rochers
aux formes impressionnantes.
e prends un plaisir intense lors
de ce temps passé, seul, aux commandes de ce véhicule, agréable à
conduire. Je vais assister à de magnifiques levers et couchers de
soleil. Je traverserais des endroits dignes de paysage lunaire,
d’autres dignes d’une désolation sans borne, où le soleil
brulerait toute forme de vie, qui essaierait de survivre sur place.
Je vais aussi subir le contrôle de police le plus hurluberlu de ma
jeune existence. Au milieu de nulle part, en plein désert, quatre
policiers ont totalement barrés la route. Ils procèdent à un
contrôle systématique des papiers et relève aussi, pour tous, le
taux d’alcoolémie. Ceci ne sera pour moi qu’une formalité. Mais
j’en garderais un souvenir impérissable. Je vais être confronté
aussi à plusieurs tornades lors de ce périple. De faible puissance,
elle soulève tout de même une masse de poussières et de particules
impressionnante. Ce sont de phénomènes qui ne sont pas visible dans
beaucoup de partie du globe surtout à la fréquence où je vais
pouvoir les observer. Une nouvelle fois, je me retrouve devant un
phénomène naturel fascinant que je peux observer de mes propres
yeux pour la première fois.
Le reste du trajet sera
agrémenté par quelques stops pour découvrir les centres
d’intérêts, parsemés le long de la route. Je m’arrête, par
exemple à Tenant Creek, pour y visiter l’habitat qui contenait le
télégraphe. Ce fut vraiment intéressant, surtout de nos jours, de
comprendre la limitation des moyens de communication, il y a de cela
seulement quelques dizaines d’années. Je vais aussi prendre, sur
quelques kilomètres une route non goudronnée, menant en plein
centre du dessert. Il est intéressant de se retrouver au milieu de
nulle part, sans signe de vie, avec des panneaux vous indiquant que
le prochain lieu pour se ravitailler se trouve à plus de 500 kms de
là!
Reprenant la route le deuxième
matin, je vais être l’observateur passif d’un carnage
incroyable. Passif, car je ne peux rien faire pour changer la
situation, mais actif tout de même dans le jeu d’éviter les
carcasses qui jonchent la route. Les kangourous, et même des vaches,
attirés par la lumière des phares se sont fait tuer! Les camions,
élancées à toute vitesse, roulant de nuit, et armés de protection
métallique en guise de parechoc avant, sont des armes dévastatrices,
et sans pitié. Les animaux effrayés passent sous les roues de ces
mastodontes, ou se trouvent éjecter sur le bord de la chaussée.
C’est un festin pour un nombre incalculable de corbeaux, d’aigles
et autres rapaces s’attaquant à la viande fraîche. Ils s’envolent
dès qu’un véhicule se rapproche dangereusement. Puis ils se
rabattent aussi vite que possible sur leur repas, afin d’en
arracher, aux autres, les meilleurs morceaux. La loi de la nature, la
loi du plus fort, s’appliquent une fois de plus dans ces contrées
sauvages et désertiques. Mais l’intervention humaine et son impact
sur son environnement sont une nouvelle fois beaucoup trop prononcée.
C’est le jeu! Même si cela est un spectacle macabre et
affligeant, qui me déplait, les kangourous, sans prédateurs, sur le
territoire, ne sont pas une espèce menacée… Malheureusement ce
n’est pas le cas pour beaucoup d’autres animaux qui sont tués
sur les routes australiennes. Je manquerais, de peu, par deux fois en
matinée, d’heurter deux kangourous qui vont se jeter sous mes
roues. Par chance, cela ne se produira pas…
lus je me rapproche de mon point
d’arrivée, plus la végétation reprend ces droits. A Matarenka,
capitale du «Never Never» (que l’on peut traduire par «Jamais
dire Jamais»), je me rends dans des sources d’eau chaude naturelle
au milieu d’une végétation subtropicale. Il y règne une humidité
infernale. De multiples animaux, tels les chauves-souris, y ont
trouvés un habitat parfait. Les termites sont aussi à la fête.
Leurs nids sont géants, de couleurs et de formes variés tout au
long de la route…
Le plaisir fut complet tout au
long de ce voyage en solitaire. J’ai aimé me retrouver seul face à
ces éléments naturels particuliers. Je suis néanmoins heureux
d’atteindre Darwin après ce long trajet. La nécessité de rester
concentrer, à chaque seconde, sur des routes interminables, en
lignes droites, n’a pas été de tout repos. Je vais retourner à
la civilisation, pour quelques jours, après cet intermède
inoubliable, dans ce voyage au long cours.
Darwin sera-t-elle ou non une
étape prolongée de ce voyage? Je n’en ai pas la moindre idée
quand j’entre dans ces faubourgs le 23 Novembre, en milieu
d’après-midi. La seule chose de prévu est l’endroit où je vais
rester pendant les premiers jours. J’expérimente une nouvelle fois
le Couchsurfing, en dormant chez l’habitant. Cette expérience sera
agréable et me permettra de rencontrer une nouvelle fois des
personnes intéressantes. Néanmoins, après un tour rapide de la
ville, et le constat, que la saison humide arrive à grand pas, je
déciderais de trouver au plus vite un moyen de continuer ma route.
Je veux me diriger vers cette fameuse côte sauvage et désertique de
l’ouest australien. Le taux d’humidité et les températures
grimpent en flèche à cette période de l’année. L’option de
descendre vers le Sud, où commence l’été, me semble
définitivement la meilleure. Je vais très vite rentrer en contact
avec une personne qui a les mêmes projets que moi. Elle s’appelle
Alexandra. Elle est Allemande et elle à 32 ans. Après fixé un
rendez-vous, nous nous rencontrerons sur la place d’un marché.
Elle est accompagnée d’une amie australienne, Jade, originaire de
Melbourne, mais qui travail en tant qu’infirmière, ici, dans le
Nord, depuis quelques mois. Nous discutons d’abord de nos projets,
de l’idée du voyage en road trip, et de comment nous envisageons
ce dernier. Nous parlons de ce que nous aimerions voir, à quel
rythme nous souhaitons voyager, et par quel mode! Sur toutes les
grandes lignes, nos envies se rejoignent. Nous décidons donc de
tenter l’aventure ensemble et de partir quelques jours après.
Nous passerons finalement tout
le week-end ensemble sur Darwin. Nous commencerons par une visite du
centre-ville, suivi par un verre en terrasse. C’est à cet endroit,
que Chris, l’amie de Jade nous rejoindra. Ensemble, nous irons nous
promener sur les bords de mer pour y admirer le coucher de soleil.
Puis Jade nous embarquera dans une soirée où elle avait été
conviée. Nous nous retrouvons qu’avec des Australiens. C’est à
leur façon que j’expérimenterais le barbecue du samedi soir,
accompagné bien entendu de nombreuses bières. Je trouve cela de
plus en plus intéressant d’analyser les similitudes des
comportements des personnes. Malgré les différences culturelles
très marquées, un être humain occidental est fondamentalement le
même. Le reste du week-end s’envolera à toute vitesse!
Mardi 27 Novembre, lorsque le
soleil est au zénith, sera le départ pour un nouveau Road Trip.
Celui-ci sera sûrement le plus important que je n’ai jamais fait
de toute ma vie. Cela concernera le temps passés sur les routes avec
le même véhicule et les mêmes personnes. Mais ça sera aussi le
cas concernant les kilomètres parcourus. Le nombre prévisionnel
approximatif oscille entre 9000 et 14000 kilomètres… Seules mes
prochaines aventures seront confirmées ou non si ce projet arrivera
à son terme. Le côté humain et relationnel pourrait être cause
d’échec ou d’abandon de cet objectif. Les aspects mécaniques
seront à prendre en compte aussi. En effet, nous nous lançons dans
l’aventure, à travers des contrées sauvages désertiques, avec
une vielle Mitsubishi Magna Executive, construite en 1989. Alexandra
a acheté cette dernière il y a plus d’un an et elle a déjà fait
de nombreux kilomètres avec. De couleur beige délavée, elle ne
paie vraiment pas de mine, surtout vu de l’extérieur. Néanmoins,
elle semble avoir été très bien entretenue. Encore une fois, je me
retrouve embarquée dans une aventure, qui risque de tenir beaucoup
de promesses et amenée beaucoup de surprises!
Nous prenons la route, seulement
à deux, pour rejoindre notre première étape. Nous comptons bien
trouver d’autres équipiers, en route, pour partager l’aventure.
Il est prévu de retrouver une femme avec son chien, 3 jours plus
tard. Nous filons en attendant vers le Sud pour rejoindre la seule
route goudronnée, à cette latitude, qui nous mènera vers l’Ouest.
120 kilomètres après le départ, nous voici déjà au premier lieu
que nous souhaitions explorer. Il s’agit du Litchfield National
Park. Moins fameux que son voisin Kakadu National Park (endroit où a
été tourné Crocodiles Dundee), il est cependant beaucoup plus
facile d’accès et va nous réserver de très belles surprises. Ce
parc contient d’extraordinaires plateaux de roches sableuses
délimités par de magnifiques falaises, créant des chutes d’eau
qui en ont fait sa réputation. Nous allons découvrir pendant plus
d’une journée, les charmes de ce lieu. Nous ferons de petites
marches pour atteindre des lieux paradisiaques. Nous nous baignerons
dans une eau limpide, dans des trous d’eau, s’étant formés au
pied des cascades. Un aspect, non négligeable, dans partie nord de
l’Australie, est que ces trous sont sécurisés et qu’ils ne sont
pas, ou plus, les lieux d’habitat des crocodiles qui pullulent
dans les «Billabongs » (retenues d’eau) de la région. Nous
aurons aussi un bon aperçu de la faune et la flore, qui vivent dans
ces milieux tropicaux humides.
Le point d’orque de cette
première étape sera le trajet pour quitter le parc en retournant
vers l’Est, puis continuer plus bas vers le Sud. Le temps est
menaçant en cette fin de deuxième journée. Nous décidons de
quitter le parc sans faire la dernière ballade prévue, avant le
coucher du soleil. Ce choix fut le bon! D’énormes nuages gris nous
font maintenant face. Les températures élevées et les conditions
climatiques spécifiques de la région, créent un phénomène
naturel qui va déchirer le ciel, grâce à des centaines d’arcs
électriques. Les éclairs monopolisent le ciel aussi bien à la
verticale qu’à l’horizontal. Les grondements de l’orage
amplifient le caractère lugubre de la scène à laquelle nous
assistons. Très vite, de lourdes averses s’abattent devant nous,
rendant la visibilité limitée. Dans le même temps, derrière nous,
à l’Ouest, le temps est dégagé! Le soleil se couchant, des
couleurs flamboyantes, dans le ciel, apparaissent. Je fais face à un
des plus beaux couchers de soleil que je n’ai jamais été amené
à voir. Le contraste entre le paysage à l’arrière du véhicule
et celui nous faisant face, est indescriptible! Je ne sais pas si
nous quittons le paradis pour nous rendre en enfer mais c’est
vraiment le sentiment que ce tableau naturel me laisse imaginer à
cet instant. Roulant à vitesse réduite, dans cette veille
Mitsubishi, nous sommes maintenant englouties par les trompes d’eau
qui font presque totalement disparaître les paysages autour de nous.
Nous nous arrêterons sur une
aire de repos pour y passer la nuit. Aucun raison de sortir les
tentes, nous dormirons dans la voiture. La place est confortable. Le
fait de pouvoir rabattre les sièges avant, au même niveau que la
banquette arrière, forme un matelas assez long pour dormir
correctement. Le road trip est vraiment lancé. Les premières
impressions sont bonnes.
Nous n’allons pas avaler
beaucoup de kilomètres avant d’arriver à la prochaine
destination. Il s’agit de la ville Katherine, où je suis déjà
passé lors de mon ascension depuis Alice Springs. Ville de petite
importance, pour les standards européens, elle fait figure d’un
des regroupements majeurs de population sur ce territoire Nord
Australien. C’est un nœud routier qui va nous permettre de prendre
la route en direction de la côte Ouest. Nous avons cependant
quelques petites choses à faire, et lieux à visiter, avant de
continuer notre chemin! En premier lieu, nous commencerons par
visiter le Parc National de Nitmiluk et ces fameuses gorges. Elles
nous dévoilerons, lors de promenades de plusieurs heures, leurs
beautés cachées! Nous aurons aussi le plaisir d’avoir la
compagnie d’une famille de kangourous pour partager notre
pique-nique. Peu farouche, ils se laisseront approcher de très près
et nous pourrons même leur donner à manger.
Après avoir organisé la suite
de notre périple en ville, après avoir fait les provisions
d’énergie pour la voiture et ces occupants, nous nous apprêtons à
retrouver cette femme avec son chien. Mais un message de sa part, à
la dernière minute, nous signalera qu’elle a trouvé une autre
solution, une autre personne avec qui voyager. Elle ne nous rejoindra
donc pas dans l’aventure. Nous sommes totalement désappointés
mais nous ne pouvons malheureusement pas faire grand-chose à ce
revirement de situation et d’avis. C’est un des désavantages de
l’organisation de voyage sur internet avec des inconnus, jamais
rencontrés auparavant. Nous chercherons en ville pour voir si
certaines personnes seraient intéressées. Ne trouvant personne nous
décidons de continuer le périple à deux, au moins pour les jours à
venir!
Nous empruntons maintenant la
Victoria Highway en direction de l’Ouest! Alexandra, pourtant la
propriétaire du véhicule n’est pas une grande adepte de la
conduite. Elle préfère sans hésitation être passagère. Je vais
donc avoir l’opportunité d’avaler les kilomètres à travers ces
paysages magnifiques. Il y a un élément de l’Outback, que
j’apprécie énormément. Ce fut déjà le cas lors de mon
expérience, en solo, entre Alice Springs et Darwin. Lors des rares
fois, où nous croiserons un véhicule, le conducteur fait un signe
de la main pour saluer la personne rencontrée en chemin. Je
répondrais bien sûr avec grand plaisir les premières fois. Je
serais souvent à l’initiative de ce salut, toutes les fois
suivantes, où je serais amené à croiser quelqu’un.
Nous allons faire beaucoup de
kilomètres en peu de jours. Nous prenons cependant le temps de nous
arrêter en route pour voir les différents points d’intérêts qui
se présentent à nous. Le premier jour nous ferons quelques marches
agréables dans le «Gregory National Park». Nous grimperons en haut
des falaises délimitant la limite entre la vallée, creusée par le
lie de la rivière Victoria, que nous suivrons sur de nombreux
kilomètres, et les hauts plateaux la surplombant. Il est intéressant
de se trouver dans cette zone frontière entre une zone tropicale
humide et le début des régions semi-arides. Après le déjeuner, je
partirais seul marcher sous une chaleur de plomb pour découvrir les
peintures rupestres laissés par une ancienne tribu aborigène. Cette
dernière, ayant occupée ces lieux, pendant plusieurs centaines
d’années, les considérait comme sacrés. Alexandra restera elle
se reposer à l’ombre d’un des seuls arbres présents dans les
environs.
Nous pourrons constater, en
route, la présence de nombreuses carcasses de voitures laissées à
l’abandon. La raison est simple. Le coût d’une prise en charge,
ou d’un remorquage, dans ces contrées perdues, est incroyablement
élevé. Suite à un accident, ou une panne irréparable, le véhicule
est donc laissé sur place, après l’avoir désossé autant que
faire se peut. Rien de très glamour, un rappel à la prudence, et
une fois de plus, la confirmation que partout sur cette planète, et
particulièrement dans ces environnement hostile, la loi de la nature
est, et sera, toujours la plus forte.
Une fois de plus nous
assisterons en fin d’après-midi, à un magnifique coucher de
soleil aux couleurs de cartes postales. Juste avant ce dernier, nous
nous serons arrêtés pour la nuit sur une aire de repos. Cette
dernière, au milieu de la terre battue, possède déjà de
«luxueuses» toilettes et un réservoir d’eau. Nous y
rencontrerons, Tony, un retraité australien de plus de 60 ans, qui
habite à Katherine. Aimant la vie simple dans le bush et fuyant
aussi sa femme qui lui interdit maintenant tout excès, il était
parti pour quelques jours jusqu’à Kununura dans la région du
«Western Australia». Il nous offrira des bières. Il appréciera
grandement notre compagnie pour la soirée. Vraiment agréable, une
nouvelle fois de pouvoir partager avec un local, un moment de vie
unique dans son pays.
Continuant notre route, le
lendemain, nous nous arrêterons au parc National de «Keep River».
Nous aurons l’occasion d’y admirer des formations rocheuses
sableuses époustouflantes et surtout une activité importante de la
faune, prédominée par la présence de nombreux oiseaux et reptiles,
tel que les lézards à collerette. Nous allons pouvoir admirer les
premiers Baobabs. Ces arbres magnifiques, à l’allure et aux
dimensions très spécifiques, nous indiqueront notre arrivée à
l’Ouest de l’Australie. Le changement d’état sera marqué
aussi par un arrêt à la frontière. En effet, le contrôle douanier
est strict pour rentrer dans cette nouvelle région. Il est
strictement interdit d’y introduire des légumes et des fruits,
des plantes, des fleurs, des graines, du miel, des animaux et
organismes vivants. Le but est d’éliminer le risque des maladies
et d’interdire l’accès aux animaux non natifs, ayant provoqués
déjà de grands ravages par le passé, dans cet environnement stable
mais très fragile. L’isolement, grâce à l’aspect insulaire de
ce pays, l’a très longuement privée de tout contact avec des
éléments extérieurs. La nature n’a donc pas été préparée à
l’introduction de certains d’entre-eux, pouvant venir détruire
l’équilibre précaire construit au cours de milliers d’années.
Ayant été prévenus par les panneaux et d’autres personnes
croisées sur le chemin, nous ne serons pas surpris par ces
prérogatives lors du changement d’état. Nous passerons le
contrôle sans encombre.
Arrivés à Kununura, nous n’y
passerons que quelques heures en milieu de journée pour prendre des
informations, faire quelques courses et visiter les deux ou trois
endroits intéressants en bordure de cette ville. Nous aurons aussi
la confirmation que les endroits les plus magnifiques des Kimberley,
principalement accessible en 4 roues motrices, sont tous fermés
pendant plusieurs mois. Les risques d’inondations impromptues en
sont la cause majeure. Nous allons pouvoir tout de même découvrir
quelques beautés de la nature le long de la route goudronnée, la
seule dans les environs, menant à la côte Ouest Australienne.
Malgré les distances parcourues le temps passé dans la voiture, je
ne me lasse pas de conduire, bien au contraire. Assez régulièrement,
le paysage change. Parfois ce sont d’insignifiants détails, telle
la hauteur ou la couleur de l’herbe. Parfois, nous faisons face
aussi à de grands changements, après avoir traversé un milieu
aride sec, où très peu de vie survie. C’est le cas, par exemple,
avec l’apparition d’arbres, de végétations plus luxuriantes, de
cours d’eau, de reliefs vallonnés ou rocheux. Au milieu des
plaines arides, nous pourrons de nouveau admirer de petites tornades
balayant dans le ciel de la terre noirâtre. Le «Geiki Gorge
National Park» sera l’occasion d’admirer les vestiges de
falaises qui, autrefois, surplombées la mer intérieure. La première
nuit passée dans ce nouvel état, sera éclairée, et embellie, par
la pleine lune, mettant en valeur un ciel très particulier, en
raison de nuages formant une dentelle blanche.
es discussions avec Alexandra
ont été intéressantes et animées tout au long du trajet. J’ai
très vite réalisé que nous étions très différent et que cette
rencontre ne serait pas la plus incroyable que j’aurais été amené
à faire sur les routes déjà parcourues. Néanmoins, notre
cohabitation lors de ce voyage se passe sans encombre. C’est
intéressant de voir que malgré de grandes différences, il est
possible d’apprendre de l’autre et d’en retirer de bonnes
expériences. Nos chemins ne se sépareront pas encore à cet
instant, où nous atteignons Broome, et la côte Ouest de cette île
australienne.
Nous allons y rencontrer Gabor,
un autre allemand. Il a 32 ans. Un bon feeling s’installe
immédiatement. Nous formons, à nous trois, une équipe de
backpacker de trentenaire. C’est quelque chose d’assez rare de
nos jours, surtout en Australie, où la moyenne d’âge doit
environner les 20 ans. Cela ne sera pas pour nous déplaire. Le
partage lors de ce périple, la faculté d’adaptation, les sujets
de discussions et les centres d’intérêts s’en feront ressentir.
Nous commencerons par profiter de l’ambiance plaisante dans cette
ville, où les racines d’une contré reculée, non pas disparues,
malgré l’apport d’un peu de confort et de modernité, dû au
tourisme qui s’y est développé. Nous visiterons les fabriques et
magasins de perles, mondialement connus en raison d’un export
massif de ces joyaux nacrés. Nous profiterons pendant tout une
journée de la magnifique plage «Cable Beach». Nous nous rendrons
sur les falaises rouges de «Gantheaume Point», 7 kilomètres au Sud
de la ville, pour y admirer les empreintes laissés par des
dinosaures. Nous assisterons aussi à un magnifique coucher de soleil
sur la mer. Les premières journées sur la côte Ouest augurent de
très bonnes choses pour la suite.
Le 3 décembre, nous sommes
finalement prêts pour prendre la route et entamer notre descente
vers le sud. Après avoir longés pendant des dizaines de kilomètres
la plage «Eighty Miles Beach», nous nous enfonçons dans les
terres. Nous partons découvrir une des attractions les plus
impressionnantes de la côte Ouest. Il s’agit de l’épique Parc
National Karijini. Ces gorges profondes, ces chutes d’eau
spectaculaires, ces trous d’eau sortis d’une autre dimension vont
surpasser de très loin ce que j’avais pu imaginer. Les couleurs
de la roche, de l’eau, la multitude de fleurs et d’animaux, que
nous pourrons y admirer, seront gravés, à jamais. Une image marquée
sur la pupille de nos yeux est enregistrée pour de longues années
dans notre mémoire. Une autre expérience restera aussi pour
longtemps dans l’esprit d’Alexandra. Nous en entendrons parler
encore de nombreux jours après avoir quittés les lieux. En effet,
nous effectuerons plus de 100 kilomètres sur des routes de terre
entachées de gros sillons et quelques trous d’eau imposants. Les
vibrations sont énormes dans la voiture. Nous sommes secoués à
chaque seconde. Les nerfs d’Alexandra seront mis à rude épreuve.
Heureusement la beauté des sites, nos ballades pour y découvrir les
lieux et les bons moments lors des repas, par exemple, feront un peu
retombé la pression de son côté. Pour ma part, j’aurais grand
plaisir à conduire tout le trajet sur ces chemins. Je ne vous
cacherais pas que je croiserais tout de même les doigts en espérant
que nous nous en sortions sans encombre. Le plus gros cataclysme ne
viendra, heureusement et finalement pas, d’éléments mécaniques
de la voiture, qui aurait pu tomber en morceaux, mais d’un énorme
orage qui éclatera lors d’une des soirées passées dans le parc.
Celui-ci sera accompagné d’énormes nuages gris, déchirés par
des éclairs spectaculaires venant illuminer l’obscurité ambiante.
Nous aurons eu par chance le temps de finir de manger à l’extérieur
avant de se réfugier dans la voiture et les tentes. La nuit se
passera sans encombre, malgré les fortes pluies qui sévissent à
l’extérieur. Le lendemain matin, le calme sera revenu et le soleil
percera de nouveau les nuages. Nous continuerons donc à découvrir
les lieux, à marcher au fond des gorges ou sur les hauteurs des
falaises les délimitant, et à nous baigner dans les trous d’eau
multiples.
En fin de journée nous
reprendrons la route. Encore quelques kilomètres de chemins
non-goudronnées et nous retrouvons finalement des routes
praticables, où Alexandra retrouvera une certaine sérénité. Ça
sera intéressant de voir tout au long du trajet, le stress que
génère, pour elle, l’entretien de sa voiture. Niveaux d’huile
et du liquide de refroidissement seront effectués tous les jours. Le
moindre bruit suspect sera source d’inquiétudes. Je ne moque pas
mais trouve cela un peu exagéré. Pour sa défense, elle avait déjà
vécu plusieurs problèmes avec sa voiture. Je dois surtout être
conscient que cela nous permettra d’arriver à notre destination
finale sans encombre, malgré les régions arides traversées, et la
vétusté apparente de ce véhicule.
Je vais adorer les zones
désertiques traversées pour rejoindre, pour la deuxième fois, la
côte Ouest australienne, et ne pas la quitter pendant des milliers
de kilomètres jusqu’au cap le plus au Sud. Les paysages traversés
pour atteindre Exmouth sont composés de désert de sables rouges, où
seuls quelques arbrisseaux asséchés par le soleil de plomb et
balayés par des vents violents tiennent debout. Aucun bruit, aucune
habitation à des centaines de kilomètres à la ronde.
Nous ne retrouvons signe de vie
humaine seulement quand nous atteindrons notre ville de destination.
Une fois encore, notre passage en ville sera bref, dans le but de se
ravitailler, de prendre une douche dans des conditions décentes, de
collecter quelques renseignements avant de repartir en pleine nature.
Nous allons nous installer, pour quelques jours, à quelques
kilomètres de là, dans le parc national de Cape Range. Là encore,
la nature y est magnifiée. Nous partageons ces paysages paisibles
avec les kangourous, émus, wallabies, araignées, lézards, et
nombreux oiseaux.
La végétation peu haute, ces
gorges, le sable blanc en ont font sa beauté. Mais la réputation de
cet endroit est née de la proximité de l’océan et de la
combinaison avec le Parc marin «Ningaloo Reef». En effet, ces
falaises, ces dunes ou plages de sable blanc se jettent dans les eaux
cristallines de l’Océan Indien. A quelques mètres du rivage, des
coraux magnifiques et divers sont le refuge et l’habitat d’une
faune importante. Grâce à des masques et tubas, nous allons partir
découvrir, plusieurs fois par jour, pendant de longues heures ces
merveilles. Je vais voir, lors de ces plongées, de multiples
poissons multicolores, mais aussi des tortues, des raies, des petits
requins de récif, et d’autres spécimens aux allures de films
d’horreur. Nous nous installerons à «Lake Side» pour y camper et
profiter des sites de plongées à proximité. Nous assisterons
tous les soirs à de magnifiques coucher de soleil sur la mer. Le
premier gardera pourtant un goût particulier. Il fait partie de
certains des plus beaux couchers de soleil que je n’ai jamais été
amené à voir sur l’horizon. Les nuages présents seront captés
des couleurs flamboyantes. Ces dernières se rapprochent au plus près
du rouge vif puis du violet, avec le soleil se rapprochant du niveau
de la mer puis disparaissant totalement à l’horizon. Le spectacle
sera à admirer à 360°, avec un arc-en-ciel sublime, présent
au-dessus des terres. Beaucoup de pensées s’envoleront alors vers
des proches et des personnes qui ont comptées dans ma vie et qui
auraient aimé, je suis sûr, partager ces moments. Nous plongerons
durant le séjour à «Oyster Stacks», ainsi qu’à «Turquoise
Bay». Cette dernière n’est pas seulement splendide d’un point
de vue sous-marin. Ces plages et ces eaux sont d’une beauté sans
nom. Il faut s’y rendre, pour ne pas croire que ces endroits
n’existent que dans l’imaginaire de films de science-fiction.
Après avoir exploré le Nord de
ce parc marin de Ningaloo, nous nous rendrons à quelques 200
kilomètres de là, pour y découvrir le sud. De nombreuses autres
surprises nous attendent à Coral Bay. Petite bourgade au milieu du
désert, cette ville ne doit son existence qu’à l’afflux de
touristes venus découvrir ce petit paradis sur terre. Les plages y
sont sublimes, les couleurs de l’eau incroyables, et encore une
fois l’activité sous-marine va être au rendez-vous.
Une fois n’est pas coutume,
nous choisirons le confort d’un camping. Ce fut un peu par
obligation de mon point de vue, car le camping sauvage est ici
interdit. Ce ne fut pas vraiment l’idée de Gabor qui fut vraiment
heureux de retrouver un peu de confort (douche chaude, frigo,
connexion internet et téléphonique possibles….)! Une fois encore,
avec Gabor, nous ne venons pas des mêmes origines, nous n’avons
pas les mêmes besoins en voyage ou dans la vie de tous les jours.
Pourtant lors de ce voyage, grâce à de petits compromis, nous
trouverons un équilibre nous permettant à tous de passer un
agréable séjour, de passer du temps ensemble, de beaucoup échanger
mais aussi parfois de prendre du temps pour soi.
J’aime l’histoire de Gabor.
Venu en Australie, il y a trois ans avec son frère, il est revenu y
vivre, voici maintenant un an et demi. Il est technicien dentaire. Il
travaille avec un cabinet de dentistes à Sydney. Au cours de notre
voyage ensemble, et après un entretien à Perth, il décidera d’y
passer les derniers mois de son séjour à venir, dans un nouveau
cabinet. Le but étant de pouvoir sûrement mieux exprimer son talent
et ces qualités de reproduction de dents, pour créer l’harmonie
souhaitée dans la bouche du patient traité. Puis il repartira en
Allemagne, si ces plans ne se sont pas modifiés d’ici là, pour
essayer d’y construire une vie stable. En attendant, il réalise un
rêve qu’il aurait dû partager. Son frère s’est suicidé peu de
temps après le retour de leur premier voyage sur place. Ils avaient
eu ensemble l’envie d’y revenir sur du plus long terme. Ce fut
malheureusement en période de deuil qu’il dû prendre la décision
ou non de revenir. C’est en partie pour honorer la mémoire de son
frère et ne pas rester dans cet environnement malsain, en Allemagne,
qui est revenu sur ces terres. J’ai beaucoup de respect pour lui et
ce qu’il a accompli. Cela me ramène un peu à des éléments de
mon passé. Peut-être, prendrais-je, un jour, le temps de revenir
sur ces événements pour vous les faire partager ?! Je suis
maintenant loin de cela, sur les routes de mon rêve éveillé, en
plein Vol Libre. Même si tout est lié, chaque événement ayant une
incidence sur le suivant, je vis le jour présent au maximum. Carpe
Diem est le maître mot.
D’ailleurs c’est dans les
eaux du parc marin de Ningaloo que je vais trouver mon bonheur à
Coral Bay. Parti seul dès l’aube, je vais d’abord découvrir des
champs gigantesques de coraux. Ils sont malheureusement pour la
plupart mort mais leurs formes, rappelant des fleurs, des
illustrations de monde imaginaire, m’envouteront. La ballade,
pendant de longues minutes, suivant à la trace plusieurs raies
restera un bon souvenir. Mais le point d’orgue de ces premières
plongées matinales restera la rencontre avec ce requin. Sa forme
énorme se dessinera dans les fonds-marins. Il se trouve à environ
cinq mètres de profondeur. Il est paisiblement posé sur le sol à
la base des coraux. Je m’approcherais avec précaution à seulement
quelques centimètres de son corps. Il mesure plus de 3 mètres de
long. Je replongerais à plusieurs reprises. Je garderais toujours un
œil vigilant sur lui, quand je reprendrais de l’air à la surface,
grâce à mon tuba. Quand je replongerais pour la troisième, il
réagira soudainement. Mon cœur s’emballera instantanément. Je ne
percevrais cependant aucune agressivité. Je serais seulement en
mesure de le voir s’éloigner gracieusement grâce à un mouvement
oscillant, typique des requins. Je viens une nouvelle fois de
réaliser un rêve. Le point positif, c’est que la liste est encore
longue, infini… Et des rêves réalisés ne signifient pas que la
magie est cassée, et que le mythe, à mes yeux, ne leur survivra
pas. L’attraction est telle que je revivrais avec autant
d’intensité l’instant que je viens de vivre quand cela se
reproduira de nouveau.
Je rejoindrais un peu plus tard
les autres au camping. Ils viennent seulement d’émerger d’un
profond sommeil. Nous prendrons le petit-déjeuner ensemble, puis
nous retournerons sur le rivage de cet océan sublime. Ils voudront
simplement profiter de la plage et d’un peu de plongée avec masque
et tuba. J’ai entendu pour ma part parler d’un autre point
d’intérêt un peu plus loin. Je m’y rendrais en logeant la plage
vers le Nord pendant plus d’une demi-heure. Arrivant à «Skeleton
Bay», je ne pourrais que vérifier les dires, du peu de touristes,
au courant de ce lieu très spécial. Dans des eaux peu profondes, je
suis tout d’abord entouré de raies pastenagues. Je m’avancerais
prudemment pour être sûr de ne pas marcher malencontreusement sur
l’une d’entre-elles. Je réussirais sans trop de mal l’exercice,
aidé par les raies, fuyant à mon approche. Elles s’éloignent à
toute vitesse, telles des torpilles élancées sous l’eau avant de
ralentir leur course quelques mètres plus loin. Cela formera comme
un feu d’artifice sous-marin, avec des explosions provenant de tous
les côtés.
Continuant mon chemin, j’aurais
l’occasion de m’amuser avec un bébé raie Manta, qui se trouvait
à quelques centimètres du rivage. M’avançant dans l’eau,
celui-ci effectuera tout d’abord des cercles complets autour de
moi, avant de prendre le large. Finalement j’avance encore un peu
plus vers le Nord pour atteindre le lieu décrit précédemment par
les personnes rencontrées. A quelques mètres du rivage, des
dizaines d’ailerons, plus d’une trentaine, zigzaguent dans tous
les sens. Il s’agit des ailerons des petits requins de coraux à
pointe noire et à pointe blanche. Je resterais, tout d’abord, sur
la plage. Puis je franchirais tout de même le pas quelques minutes
plus tard. Les requins tournoieront autour de moi. J’essaierais
tout de même de garder de l’espace vierge de requins, entre moi et
la plage. Quand certains fonceront droit sur moi, je bâterais
retraite, les effrayant, bien souvent, avant que j’aie à regagner
le bord. Seul face à la nature, j’ai encore l’impression de
rêver. Seules les vidéos prisent avec ma caméra Gopro me
permettront à jamais de me replonger dans ces souvenirs, quand ils
se seront, petit à petit, effacés au cours des années. D’ailleurs
la distraction engendrée par cette dernière m’aura parfois valu
une montée d’adrénaline puissante. Ce fut le cas quand un requin,
que je n’avais pas en visu, se sera retrouvé à quelques coups de
nageoires de mes jambes… Je rejoindrais ensuite les autres toujours
affalés sur la plage, plongés dans leur lecture et l’obtention
d’un teint plus mat.
Nous reprendrons la route dans
la soirée, sur la route «North West Coastal Highway». Nous
descendons toujours plus au Sud. Nous continuons de découvrir les
richesses de cette région de l’ouest australien; les beautés des
paysages, les routes désertes et leurs longues lignes droites. Nous
passerons, dans le sens opposé de celui franchi lors mon trip en
solo, le Tropique du Capricorne. Alexandra et Gabor ne connaissaient
pas la signification de ce dernier et sa représentation. Je leur
donnerais les explications lors de notre arrêt, au niveau du panneau
qui le signale. Certaines portions de la route goudronnée, semblant
des plus normales en première apparence, sont marquées comme des
potentiels aéroports d’urgence. Nous croiserons aussi de nombreux
et gigantesques camions, qui transportent parfois des maisons
préfabriquées entières ou de gros engins de travaux. Ces derniers
sont destinés pour l’industrie principale dans le pays;
l’industrie minière. La densité des mines est importante dans cet
état. Elles génèrent des mannes d’argents miranbolesques qui
maintiennent l’économie du pays à flot. Les australiens ne s’en
rendent pas compte, mais si actuellement, ils ont un des meilleurs
niveaux de vie dans le monde, c’est grâce à ces revenus
démentiels de sources naturelles qu’ils exploitent. Elles ne sont
malheureusement pas, pour eux, inépuisables.
Nous traverserons de nouveau des
paysages désertiques infiniment grands. Ils sont toujours un peu
différents de leurs prédécesseurs, que nous avons pu admirer sur
la route, et de ceux à venir. Nous faisons de multiples arrêts sur
la route pour y admirer les paysages, s’imprégner simplement de
l’atmosphère, y sentir la chaleur, ressentir le vent, et ouvrir
nos oreilles, en grand, à l’affut du moindre bruit, qui viendra
rompre le silence envahissant dans ces lieux. Après avoir effectué
de nouveau plusieurs centaines de kilomètres nous prendrons la
direction de «Shark Bay». Inscrit au patrimoine mondiale de
l’UNESCO, cet ensemble contient plus de 1500 kilomètres de côtes,
dispatchées entre deux péninsules s’élançant en pleine mer et
de nombreuses îles. C’est un des habitats marins et biologiques
les plus riches de la région. Sa beauté naturelle mixte des eaux
bleues turquoise, des plages de sable blanc ou de coquillages, et des
falaises rouges flamboyantes accueillant, avec parcimonie, des petits
arbustes esseulés.
Nous nous arrêterons au début
de la péninsule que nous allons explorer, pour y découvrir un
endroit exceptionnel. Il s’agit de «Hamelin Pool», réserve
marine, contenant les plus fameuses colonies de Stromatolithes au
monde. Dans ces lieux, nous nous plongeons dans des temps
immémoriaux, bien avant l’arrivée de l’être humain. C’était
lors des débuts de la vie sur la planète terre. Pendant plusieurs
Milliards d’années, ces microbes; cyanobactéries unicellulaires,
furent les seuls organismes vivants, la seule forme de vie. En
consumant le dioxyde de carbone, et en relâchant l’oxygène, ils
ont fortement contribué à la création de l’atmosphère terrestre
et donc à l’apparition, et à l’émergence d’autres formes de
vie sur terre, tels que les plantes et les animaux. Un ponton a été
installé sur place pour pouvoir les admirer, les surplomber, et
surtout éviter de détruire ces organismes extrêmement fragiles. Il
est intéressant d’observer les bulles formées par ces derniers en
libérant l’oxygène. Ils ont aussi une forme, en raison de l’amas
de milliers d’organismes entre-eux, très ressemblante à celle
d’une pierre spongieuse.
Je continue de vivre ce projet
un maximum dans le moment présent. Mais la nature, en Australie, me
ramène toujours, tôt ou tard, à un passé lointain où existait
déjà ces terres. Des temps où l’être humain n’était pas
encore dans les plans de fabrication de l’écosystème pour son
projet de peuplement, par la faune, de ces espaces terrestres
vierges.
Après avoir profité des lieux,
nous reprendrons la route pour nous rapprocher de la destination, où
nous souhaitons nous rendre le lendemain. Après avoir profité d’une
plage constituée simplement, et presque seulement, de millions de
coquillages blancs, après avoir admirer certains endroits où la
biodiversité est abondante, nous trouverons un lieu en pleine nature
pour installer notre campement. Nous serons seulement à dix mètres
de la mer, protégés par une dune de sable. Personne en visu,
personnes à part nous à plusieurs dizaines de kilomètre à vol
d’oiseau. Comme ce fut le cas les jours précédents, Gabor et
moi-même monteront nos tentes respectives. Alexandra continuera de
dormir dans sa voiture. Le dîner préparait et dégustait, nous
regagnerons rapidement nos lits respectifs.
Nous avons mis le réveil assez
tôt, en ce mercredi 12 décembre. Je n’aurais pas, comme à mon
habitude, deux heures à vaquer à des occupations en solo
(promenade, lecture, utilisation de mon ordinateur) avant que mes
deux compagnons se réveillent. Nous ne voulons, en effet, pas
manquer, le spectacle, à heure fixe, qui a lieu tous les jours à
Monkey Mia. Petit-déjeuner pris, tentes rangées, nous reprenons la
route en direction du lieu-dit. Cet endroit est un lieu touristique
incontournable prévu lors d’un voyage sur la côte ouest
australienne. Cela va se ressentir énormément sur l’atmosphère
véhiculée autour de cet événement. Après avoir payé le droit
d’entrée, nous nous dirigeons sur la plage où nous devrions
pouvoir admirer ce cétacé qui fait rêver une majorité des
personnes, petits ou grands. Sur le ponton menant à la plage, une
marée humaine est agglutinée. Je n’ai jamais encore vu une telle
concentration de touristes en Australie, exception faite du lever de
soleil à Uluru. Il va être pourtant, pour moi, très simple de
faire attraction de cette foule lorsque le moment tant attendu
arrivera.
Un premier montre tout d’abord
sa nageoire dorsale, puis le bout de son nez. Il s’agit de Nicky,
une femelle, la plus célèbre des dauphins du groupe et celle qui a
la longévité la plus importante à Monkey Mia. Elle est accompagnée
d’un nouveau-né de quelques semaines, le deuxième qu’elle a
réussi à garder en vie. Puis le reste du groupe arrivera au
compte-goutte. Parmi eux, il y aura la présence d’une autre mère
avec son enfant.
Je reste comme un enfant devant
ce spectacle. Le fait d’avoir déjà été en présence de ces
animaux ne change en rien à la magie. Les dauphins sont des animaux
très beaux et qui possèdent un contact avec l’être humain très
agréable, amical. Ces dauphins sauvages viennent librement pour
interagir avec nous sur ces plages. Cela fait plus de 40 ans que ce
groupe de dauphins vient quotidiennement sur ces rivages. La relation
a été néanmoins établie et entretenue grâce à l’appât de la
nourriture. Des volontaires nourrissent 6 d’entre-eux, toujours les
mêmes. Le but est de ne pas les rendre dépendant à la nourriture
donnée. C’est pourquoi, cela ne représente que moins de un
cinquième de leur besoin quotidien. Il est interdit pour les
spectateurs de venir caresser les dauphins ou de se baigner avec eux.
C’est spécifiquement le cas dans la configuration actuelle où
deux nouveaux nés sont présents dans leur rang. Après dix minutes,
il est aussi indispensable pour les dauphins de reprendre le large,
et surtout pour les mères d’allaiter leurs petits (pendant les
premiers mois, une mère allaite son petit environ toutes les dix
minutes pendant une bonne partie de la journée). Les dauphins
prennent un réel plaisir à jouer avec les humains. «Des sourires»
sur leur visage me confirmeront ces allégations. Ils reviendront
deux nouvelles fois dans la matinée. Le nombre de touristes,
décroissant à chaque fois, me permettra de l’apprécier toujours
un peu plus. Je serais même désigner la troisième fois pour donner
un poisson à l’un de ces dauphins. Je garde ce nouveau souvenir à
jamais gravé dans ma mémoire. Je renouvellerais l’expérience une
nouvelle fois, dès que possible. J’ai eu la chance de côtoyer de
nombreux dauphins, la première fois en France, puis au Brésil, à
Cuba, au Sri Lanka, au Cambodge, en Thaïlande, en Papouasie
Nouvelle-Guinée… Chaque souvenir, chacune de mes rencontres avec
eux, reste et restera à jamais mémorable, unique et toujours aussi
intense. Je ne pourrais pas en retenir un en particulier. Même si la
fois où je me suis fait transporté, à Cuba, sur le museau de deux
d’entre-eux restera sans aucune commune mesure. C’est des
souvenirs pleins la tête et un sourire d’enfant gâté, aux
lèvres, que je quitte Monkey Mia avec les autres en fin de journée.
Entre-temps, nous aurons appréciés les joies de la plage, d’une
eau bleue turquoise et des beaux paysages de terres rougeâtres.
Le road trip est toujours une
source de nouvelles expériences et de surprises… La nature nous en
réservera encore quelques belles sur la route quand nous
continuerons toujours plus au Sud. Nous pourrons admirer une famille
d’Emus qui se promènent alors sur le bord de la route. Nous nous
arrêterons à la « Shell Beach» couverte de millions, voire
de milliards, de coquillages blancs uniformes… Nous trouverons un
endroit sur la plage, à 10 mètre de l’eau, quelques heures plus
tard, pour y planter le campement et y passer la nuit.
Nous continuons notre descente
de cette magnifique et sauvage côte ouest australienne. Ce voyage
est un vrai hymne à la nature. Nous avons la chance, jour après
jour, de découvrir de nouvelles merveilles. Les environs de Kalbarri
et ces parcs nationaux ne feront que confirmer cette tendance;
toujours différents mais toujours aussi spectaculaires. L’intérieur
des terres est ici constitué de gorges spectaculaires. La végétation
y est abondante et de nombreux animaux y trouvent un habitat parfait.
La roche a créée des arches naturelles et des fenêtres qui donnent
un cachet particulier aux endroits visités. Les points de vue sont
tous plus spectaculaires les uns que les autres. Et les bords de mer
ne seront pas en reste avec de magnifiques falaises et des plages de
sable blanc désertiques, permettant à chacun de se baigner dans une
eau d’une couleur limpide toujours aussi sublime. Nous nous
n’attarderons pas longuement à cet endroit. Nous décidons de
continuer notre route après une simple journée de visite. En
chemin, nous effectuerons un détour pour observer un étrange
phénomène dû à la composition minérale des roches constituant le
sol. Un lac revêt un reflet rose prononcé, créant un effet visuel
peu commun et que je n’avais jamais pu observer auparavant. Encore
des surprises et de l’étonnement sur les routes en raison d’une
nature qui possède des richesses infinies.
Nous tracerons notre route. Les
kilomètres défilent. Nous nous n’attarderons pas vraiment à
Geraldton, petite ville, capitale du centre-ouest. Nous ferons
quelques arrêts, en bord mer, dans des petites criques pour faire
une promenade, ou sur une plage pour pique-niquer et profiter autant
que possible des cadres paradisiaques proposés. Nous avons trouvés
notre rythme avec Alexandra et Gabor. Ce dernier semble convenir à
tout le monde. Chacun s’y retrouve et réalise ce qui avait
souhaité entreprendre avant de commencer ce voyage. Bientôt plus de
3500 kilomètres vécus à trois sur les routes.
Nous arrivons à une des
dernières étapes de cette nouvelle partie de périple. Sur le lac
Thetis, nous serons en mesure de voir une nouvelle fois des
stromatolithes dans un cadre bucolique. Mais le meilleur reste à
venir. Je vais, encore une fois, en perdre mon latin. Je n’ai plus
assez de superlatif, vocabulairement parlant, dans la bannette de ma
langue maternelle, pour réussir à vous exprimer mes sentiments et
mes ressentis. Dans le parc national de Nambung, les paysages
semblent sortis d’un film de science-fiction. Ces paysages
lunaires, à la couleur dorée, sont constitués de milliers de
piliers de roche calcaire disséminés un peu partout. Ces derniers
pouvant atteindre plus de 5 mètres de hauteur. Le «Pinnacles
Desert» est le résultat de millions d’années d’érosion. Une
des explications les plus vraisemblables, toujours controversé par
d’autres théories, serait que des coquillages, prisonniers dans un
sol riche en calcaire, aurait modifié la composition du sol. Au fil
du temps, en raison de pluies acides, l’érosion aurait rongée les
collines calcaires, sans pouvoir détériorer certaines parties de ce
sol, chimiquement modifié par des coquillages. D’autres
explications impliqueraient aussi des modifications de la roche en
raison de plantes et de leurs racines. Le mystère reste entier et
cela n’enlève, à mes yeux, aucun charme à l’endroit visité,
bien au contraire. Après l’avoir visité et parcouru toute
l’après-midi, nous déciderons d’y rester pour pouvoir y admirer
le coucher de soleil! Ce sera quasiment en solitaire que nous vivrons
un nouvel instant magique en pleine nature.
Tout est parfait dans le
meilleur du monde. Je continue de flotter tranquillement sur mon
petit nuage. Pourtant lors de ce coucher de soleil, une douleur au
poignet droit vient rompre cet équilibre. La douleur n’est pas
insoutenable mais elle va augmenter graduellement au cours de la
nuit. Je ne dis rien à mes compagnons de voyage, décidant
d’attendre pour voir ce qu’il va se passer. Je ne me vais pas
vraiment de sang noir car je n’ai aucun autre symptôme qui
pourrait indiquer un empoissonnement. Pas de signe de fièvre, pas de
nausée ou de de vertiges. Tout semble aller pour le mieux malgré ce
poignet qui me dérange beaucoup. Je n’ai pas forcément envie de
retourner chez le docteur, ou à l’hôpital. Une fois pendant ce
séjour en Australie, fut plus que suffisant pour moi. Je suivrais
l’évolution de cet abcès de très près et je prendrais les
décisions qui s’imposent le moment venu…
Repartant le lendemain de ce
désert féérique, nous filons, directement 250 kilomètres au Sud,
dans une des plus grandes villes d’Australie, la capitale de
l’ouest australien; Perth. Si quelque chose devait arriver, je
pourrais directement me rendre auprès de services compétents, qui
me prendraient en charge et m’aideraient à soigner ce nouvel abcès
qui forme maintenant une boule rouge de plus de deux centimètres de
diamètre.
Perth est une bonne transition,
une continuité dans la découverte de l’ouest australien et déjà
un premier pas dans la partie Sud de ce pays. Je ne sais pas encore
avec qui, et comment, je vais continuer mon voyage. Aucune idée
encore de ce que me réserve dame nature pour les jours à venir et à
quelle sauce, elle va me dévorer. Les fêtes de fin d’années
approchent à grand pas. Je ne sais pas pourquoi, je pense que je
vais être alors gâté d’une façon très particulière. Le fait
de passer Noël et le jour de l’An au soleil, en pleine été, ne
sera pas le seul paramètre exotique…