mardi 17 janvier 2012

Inde du Nord

La route à travers l’Inde, 1 mois et demie de plus, promet encore de belles découvertes, rencontres, de nouveaux paysages, de nouvelles expériences… Je suis vraiment content de quitter Delhi le soir même où Anne-Sophie a pris son avion pour retourner en France. Je repars sur les routes en solo. Au cours de l’après-midi, avant de prendre le bus, l’agitation ambiante de la capitale aura tout de même le mérite de continuer à me divertir. Cela me replonge instantanément dans un mode spécifique du voyageur où tous mes sens sont en éveil prêt à ressentir de nouvelles sensations.



Avant les 14h00 de trajet, je fais connaissance d’un indien et d’une australienne avec qui les discussions iront bon train sur nos différents pays, sociétés,… Nous voyagerons dans un bus très confortable aux côtés de moines bouddhistes tibétains! En effet, je me rends à Dharamsala, ou plus exactement à Mc Leod Ganj, lieu de résidence du quatorzième Dalaï-Lama (Tenzin Gyatso; incarnation d’Avalokitesvara, le bodhisattva de la compassion), de nombreux tibétains, et le siège du gouvernement tibétain en exil.  
Un droit d’asile a été accordé par l’Inde en 1959, pour tous les tibétains fuyant les persécutions exécutées par l’armée de libération du peuple chinois, entrée 10 ans auparavant à Lhassa pour «libérer le Tibet».
Après mon séjour au Tibet, je désirais particulièrement me rendre en ce lieu pour me faire ma propre opinion et observer des différences notables. J’aspirais aussi à revivre l’incroyable spiritualité dégagée dans et autour des monastères bouddhistes. Ici en Inde, les tibétains possèdent la liberté d’expression et de mouvement qui n’est pas encore d’actualité sur leur terre natale et cela fait assurément une indéniable différence.
La localisation de ce village en montagne sera l’occasion d’un moment ressourçant au calme en pleine nature. Dans toute la ville, les drapeaux du Tibet (interdit dans cette même région) flottent dans les airs. Partout, il est possible de voir des insignes pour promouvoir un Tibet libre: «Free Tibet»! La visite du complexe du Tsuglagkhang (Photang où résidence officielle du Dalaï-Lama, le Namgyal Gompa (monastère), et le musée du Tibet) me plonge de nouveau dans cette atmosphère incroyable créée par une pratique religieuse fascinante.
Je vais avoir accès à un vrai point de vue tibétain sur la situation dans leur région, sur le passé tragique lors de l’invasion chinoise, sur l’exode forcé et sur leur désir d’un futur radieux loin de ce contrôle par une puissance oppressante. Le musée du Tibet résume parfaitement ces différents aspects. Les discussions avec les moines affineront mes connaissances sur leur perception.



Pour les tibétains en exil, le Tsuglagkhang équivaut au temple du Jokhang à Lhassa (voir mon récit sur le Tibet pour obtention d’informations complémentaires et comprendre la ferveur engendrée). Ce temple de Mc Leod Ganj contient une statue dorée sacrée du Bouddha Sakyamuni. Il est consacré à Avalokitesvara et la statue, le représentant, renferme des reliques sauvées du Jokhang. Ce temple possède enfin une statue de Padmasambhava; érudit indien qui introduisit le bouddhisme au Tibet!
Un des symboles le plus fort de la liberté des tibétains et de la possibilité de pratiquer librement leur religion, d’afficher la photo du Dalaï-Lama dans tous les temples ainsi que dans de nombreux lieux public, en plus du drapeau tibétain flottant librement.
Je vais faire de nombreuses rencontres, toutes plus intéressantes les unes que les autres. Je ferais parfois la connaissance de personnes loufoques et exubérantes. C’est le cas d’une jeune allemande reconverti au bouddhiste, d’une kiné française qui veut approfondir ces connaissances de la médecine ancestrale tibétaine, cette dernière ayant déjà passée 2 ans et demi en Inde, d’un couple d’hollandais devenus très proche des moines du Tsechokling Gompa et s’apprêtant à effectuer un séminaire d’enseignement au côté du Dalaï-Lama. L’apothéose restera un retraité français vivant auprès d’une «montagne sacrée» au Sud de l’Inde depuis plus de 10 ans. Il va me conter, pendant toute une soirée, ces théories passionnantes, même si vraiment lugubres, sur le monde actuel qui est en souffrance. Ces explications concernant les vents astrales, qui se préparent à changer la face du monde selon la prédiction des Mayas fin 2012, restent peu concrètes à mes yeux.
Toutes ces rencontres me permettent de constater que de nombreuses personnes pratiquent leur croyance avec une puissante ferveur au quotidien. Un matin, avant de partir trekker dans les alentours (Bhagsu, et sa cascade, Dharamkot, le lac sacré de Dal), je me rends dans la salle de prière du monastère Tsechokling Gompa pour profiter des prières des moines Gelugpa. Un sentiment de relative plénitude envahie mon esprit, je me sens libéré de certains poids…
Assis en tailleur pendant plus d’une heure, je me trouve confronté à un moment de doute lorsque je me relève pour quitter les lieux. Je suis incapable de ressentir quoique ce soit avec ma jambe gauche. A cet instant, je ne suis pas capable de vous dire si mon pied touche le sol, s’il est posé à plat, sur la plante du pied ou sur le côté. Je ne suis pas capable de le contrôler. Il serait normal que vous soyez convaincu qu’une certaine folie m’envahie. D’autres me raisonneraient immédiatement en me disant qu’il s’agit d’un simple endolorissement dû à la position inhabituelle. Quoi qu’il en soit, ce n’était pas un simple fourmillement mais cette perte de contrôle s’estompe petit à petit alors que je marche, tant bien que mal, vers la sortie.
Mon esprit scientifique et cartésien reprend très vite le dessus. Mais j’aime aussi interpréter ce fait comme un signe que je n’ai pas encore trouvé l’équilibre entre mon esprit, mon cœur et mon corps. Toute croyance n’est-elle pas bonne si elle permet de parfaire la connaissance de soi-même, de rechercher une amélioration permanente et qu’elle n’est pas destructive dans tous les sens du terme pour autrui et soi-même? J’en suis pour ma part convaincu et c’est pourquoi j’intègre tous les éléments et connaissances acquises et vécues au cours de ce périple pour me forger, grandir et évoluer.
Ayant retrouvé toutes sensibilités tactiles de ma jambe, je pars gambader dans les montagnes environnantes et profiter un maximum de mes 5 sens dont je jouis pleinement.
Après ce séjour relaxant en montagne, il est temps de me diriger vers l’Ouest à Amritsar, cœur du Sikhisme. Je vais y découvrir une nouvelle religion et une effervescence hors du commun. Le seul bus reliant directement Dharamsala à Amritsar part à 5h00 du matin. Je me lève donc à 3h30 pour rallier Dharamsala depuis Mc Leod Gang à 4h00. A cet instant, le pire aurait pu se produire. Je me demande encore comment j’ai pu sortir indemne de l’événement qui s’apprête à se produire!



A 3h45, je me trouve sur la place principale que plusieurs personnes m’ont indiquée comme le lieu pour prendre le bus. Des chauffeurs de taxi y stationnent. Dans le but de me vendre leur service, ils ne m’indiqueront pas que l’endroit requis pour pouvoir prendre le bus attendu n’est pas celui-ci. Une dame, prenant un de ces taxis, me donnera cette information alors que sonne les coups de 4h00. Je cours donc vers le bas de la route. J’aperçois le bus stationné en bord de route. Les portes sur la gauche se trouvent en bord de ravin. Je vois le conducteur fermé la porte arrière. Je me dirige donc rapidement vers la porte avant en longeant bus. La route abîmée par des pluies torrentielles ne forme pas une chaussée goudronnée rectiligne. Le noir est quasi complet. La route est seulement éclairée par une faible lumière provenant du bus. Je me trouve dans un état encore pseudo endormi. Dans la précipitation, je ne devine pas le danger qui me guette. Arrivé à mi- longueur du bus, marchant tout droit, je fais un pas dans le vide! Je n’ai pas le temps de comprendre ou de réaliser ce qui m’arrive.



Il est trop tard! Je chute le long du ravin chargé de mes 2 sacs. Je rebondis sur la roche plusieurs fois et je terminerais ma course une quinzaine de mètres plus bas. Qu’elles vont être les conséquences? Suis-je capable de sentir et ressentir quelque chose? Il me faut que quelques secondes pour recouvrir mes esprits. Aussi surprenant que ce soit, je ne ressens aucune douleur bloquante et importante, rien qui semble vraiment alarmant. Je crie alors pour que le conducteur m’entende. Je remonte tant bien que mal cette pente rocheuse et arrive à m’assoir dans le car. Je me tire miraculeusement de cet événement qui aurait pu signer la fin de ce rêve en cours. Seul la frayeur et l’absolu non contrôle, des égratignements, un peu de sang sur les différents membres, de la terre partout, un gros hématome au-dessus du genou droit et mon petit sac déchiré, seront les séquelles de cette péripétie. Je m’estime vraiment heureux que mon Vol Libre autour du Monde ne prenne pas fin dans ces hauteurs de l’Inde du Nord.



Je rejoins Amritsar sans encombre. Je vais découvrir et résider dans un lieu unique, lieu le plus saint pour les sikhs: le temple d’or! Ce temple d’or le Hari Mandir Sahib est recouvert de plus de 750 Kg d’or. Son dôme représente une fleur de lotus renversé symbole de l’idéal Sikh d’une vie pure à mener. Il trône au centre d’un bassin sacré, l’Amrit Sarovar qui a donné son nom à la ville.
Avant de rejoindre ce havre de paix, inspirant la sérénité, je dois me frayer un chemin depuis la gare routière dans une effervescence de bazars gigantesques où la vie, les ventes mais aussi les déchets pullulent. Après une bonne marche, aidé par de nombreux indiens m’indiquant la direction à suivre, je me retrouve devant ce sanctuaire impressionnant. Je logerais, à l’intérieur de l’enceinte du temple, dans un dortoir gratuit réservé aux touristes. Je vais encore une fois faire de nombreuses rencontres intéressantes: un couple d’argentin et un couple russe, une chilienne et un Singapourien…Mais il n’y aura pas que des touristes comme je le décris un peu plus tard au cours de mon récit de ce séjour spécial.



Comme tout pèlerin, je dois me rendre pieds nus dans l’enceinte du temple. Avant d’entamer la visite du site, je me rends au Guru-Ka-Langeo pour me rassasier. Il s’agit d’un réfectoire gratuit présent dans tous les temples sikhs.
Il fonctionne grâce à de nombreux volontaires préparant les aliments, s’occupant des gigantesques cuisines avec entre autre une machine spéciale à chapatis (Cette dernière produit des milliers de cette nourriture de base par jour: Mr Chapatis va se régaler! Petit clin d’œil à qui de droit), distribuant la nourriture, faisant la vaisselle,…
En moyenne 60000 à 80000 repas végétariens sont servis par jour aux pèlerins venant prier dans ces lieux saints. L’expérience est saisissante! Un flot de personne commence à boire le thé avant de se munir de du fameux plat métallique, qui a donné son nom au thali, pour se rendre dans un des deux étages formant le réfectoire. Chaque personne s’assoit en tailleur sur le sol à la suite les uns des autres. Les bénévoles commencent alors la distribution des dhals (à base de lentilles ou de pois), chutney, chapatis, riz au curry ou rice pudding (riz au lait) à la noix de coco. Ils repassent dans les rangs plusieurs fois pour un repas à volonté. Ce réfectoire symbolise pour les Sikhs l’unité entre les peuples, les différentes religions et croyances.



Je décide le lendemain d’aider ces bénévoles. L’expérience est intéressante car de nombreuses personnes sont surprises de se faire servir par un étranger. J’en ressortirais comblé et plus proche de cette religion. Je prendrais part successivement à l’épluchage des pois et à la distribution des chapatis.



Mais l’instant présent, lors de cette première journée est consacré tout d’abord à la visite de ce site resplendissant avec son temple d’or trônant au centre du lac sacré, à la vision de certains pèlerins venant se purifier, et au tour complet de l’enceinte faite de bâtiments en marbre blanc dominés par des tours de guet, 2 tours de l’horloge, l’Akal Takhat où le livre sacré est rapporté tous les soirs lors d’une cérémonie bien orchestrée. L’original du Guru Granth Sahib, livre sacré des sikhs contenant les écritures des gourous, est en effet présenté toute la journée aux pèlerins dans le temple d’or auquel les pèlerins accèdent par une passerelle.
 Ils effectuent une procession autour de ce dernier accompagnés par le chant des prêtres qui psalmodient. Ces chants sont retransmis dans l’ensemble du sanctuaire participant à l’atmosphère spécifique et relaxante régnant sur l’allée de marbre qui entoure le bassin. L’arpenter à différents moments de la journée (aube, milieu de la journée, crépuscule et nuit) me permettra de saisir de nombreux effets de lumière et une vision globale des moments de vie qui s’y déroulent. 




Des milliers de pèlerins dorment dans les dortoirs ou à la belle étoile sur le parvis des bâtiments entourant le temple. D’imposantes couvertures uniformisées leur sont prêtées par l’organisation démentielle qui satellite autour de ce temple. Ces mêmes bénévoles réalisent un travail dantesques plusieurs fois par jour pour maintenir le site dans un état de propreté exemplaire. Avez-vous déjà pensés à aller aux toilettes pieds nus? Me concernant, cela ne m’était jamais venu à l’esprit et encore moins en Inde. Pourtant je prendrais facilement le pli des pèlerins qui le font sans hésiter. L’ambiance est vraiment agréable et je passerais plusieurs fois de longues minutes à discuter avec différents groupes de personnes plus ou moins jeunes.



Le temps consacré à Amritsar va aussi me permettre d’aller voir un spectacle, digne d’un match de football entre 2 équipes nationales, rivales depuis la nuit des temps, et dont la confrontation serait légendaire. Avez-vous la moindre idée de ce que pourrait être cet événement spécifique? Je ne me rends pas dans un stade, ni à un événement culturel de type commun en Europe, ni à une manifestation politique, sportive ou artistique… Je préfère tuer le suspens directement pensant que vous ne pourrez jamais deviner à moins de vous y être déjà rendu.
Je prends un minibus rempli d’Indiens pour me rendre à 30 kilomètre à l’Est d’Amritsar. Je me retrouve dans des gradins de patriotes indiens rendant un fervent honneur à leur nation. De l’autre côté, les Pakistanais en font de même. Je suis en effet à la frontière de ces deux pays à Wallah Tigri.
Au moment du coucher du soleil, un cérémoniel bien orchestré s’y déroule pour la fermeture de la frontière et l’abaissement des drapeaux. Cette cérémonie va se dérouler sous les encouragements, la ferveur et les applaudissements des individus scandant «Vive le Pakistan», «Vive l’Inde».
Le défilé des soldats, revêtant l’habit colonial avec un chapeau surplombé d’une crête et exagérant leurs mouvements, tient à la fois d’une cérémonie comique et d’un show d’une incroyable coopération (passé tumultueux et tensions actuelles entre les deux pays).
 Je n’en garderais pas un souvenir impérissable et je ne le classerais pas dans les incontournables lors d’un voyage en Inde. Mais ce spectacle particulier fut assez divertissant pour être satisfait de m’y être rendu. J’y aurais passé un agréable moment.
La prochaine destination est déjà à l’ordre du Jour. Il s’agit de Varanasi, sur les rives du Gange, fleuve le plus sacré de l’hindouisme. Les 24h00 prévisionnelles de train vont, une fois n’est pas coutume, me concernant, être chaotiques. Ça sera ma vraie première expérience de la difficulté légendaire de se mouvoir en transport en commun sur le territoire indien. J’obtiens premièrement un billet avec couchette mais seulement sur liste d’attente ne m’assurant pas que je puisse obtenir le droit de monter dans le train si les places ne se libère pas. Le jour même, je me rendrais, à la gare, dans le bureau dédié à l’obtention de quotas spéciaux. Ils m’accorderont une place et un numéro dans un wagon couchette. Ensuite, le train aura déjà 8h00 de retard en raison soit disant du brouillard qui sévit dans le Nord Est du pays. Il ne partira qu’à 2h00 du matin après déjà avoir été replanifié à 0h40. Enfin, en raison de la brume réellement présente sur notre cap, le train prendra 5h00 de retard en plus pour arriver au final une demi-journée plus tard que le prévisionnel. Pour être honnête, le dernier décalage n’est pas pour me déplaire car il nous fait arriver à 7h00 du matin et non en pleine nuit. Comme pour tout trajet de plus de 24h00, j’ai l’impression qu’une journée a été supprimée du calendrier de l’année en cours. Mais comme d’habitude aussi, lors de ces longs trajets, je n’ai pas vu mon temps s’écouler car je suis toujours occupé à faire quelque chose; lire, écrire, discuter avec les locaux, écouter de la musique, manger ou dormir.
Me voici maintenant arrivé dans le cœur spirituel de l’hindouisme ainsi que dans l’une des plus anciennes cités constamment habitée au monde; Varanasi (ou Bénarès). La ville est chaotique et bigarrée. Elle est plongée dans un épais brouillard très humide. Les croyances hindouistes et leurs manifestations sont omniprésentes. Mais c’est le cas aussi de nombreuses autres religions qui possèdent leur temple et leurs pratiquants.
Après avoir demandé maintes et maintes fois mon chemin, je trouverais l’hôtel où je désirais me rendre dans un dédale de toutes petites rues biscornues, s’entrecoupant dans tous les sens, et formant un vrai labyrinthe. Cet hôtel se trouve à proximité du ghat de Manikarnika, principal ghat de crémation de la ville (Les ghats sont ici de longs escaliers disparates s’élançant sur la rive Ouest du fleuve). Le caractère saint et si spécial de la ville est créé par plusieurs manifestations, rituels liés à l’hindouisme. Des milliers, ou plutôt millions, de pèlerins viennent se plonger dans le Gange pour se laver de leur péché, pour purifier leur corps et leur âme. De nombreux prêtres prêchent la bonne parole et loue leur service pour aider les fidèles à atteindre l’état de purification souhaité.
Le plus impressionnant, et qui prendrait les tripes de n’importe quelle personne qui possède un peu de sensibilité, reste tout de même la crémation d’un proche effectuée par une famille. Selon les croyances hindoues passer de vie à trépas dans cette ville et surtout effectuer la crémation d’un défunt sur les rives du Gange, avant d’y disséminer les cendres, lui permettrait d’atteindre le Moksha, où libération du cycle des réincarnations. Cette croyance implique que des moments intimes de la vie et de la mort se produisent au visu de toutes personnes passant dans ces lieux. Je ne peux même pas imaginer, en tant qu’européen, que les derniers moments de recueillement auprès du corps d’un proche se déroulent dans de telles conditions. Le choc visuel et psychique n’en est que plus fort et total.



Même si rien ne remplacera l’instant vécu à Varanasi, je vais essayer, en tant que lecteur, que vous puissiez vous imaginer, dubitatifs, devant les bords du Gange, ou sur une barque défilant devant la vielle ville et ces ghats successifs, regardant ces instants de vie si particuliers. Par la description à venir, aussi précise que possible, j’espère que vous arriverez à vous y transporter. Vous comprendrez aisément que, par respect des personnes en deuil et du défunt, je n’ai pas pris de photos de ces instants de vie, au plus proche des crémations, qui se déroulaient devant mes yeux.



Tout commence par une procession funéraire consistant à emmener le corps, sur le lieu où sera effectuée la cérémonie. Le corps est posé sur un brancard de bambous. Il est recouvert d’un linteau rouge pour les femmes et blanc pour les homes. Le premier élément perturbant réside dans le fait que le visage et les membres du défunt ne sont pas toujours recouverts. C’est généralement un choix des membres de la famille pour qu’ils puissent, une dernière fois, rendre hommage au proche décédé. L’arrivée au ghat de crémation doit avoir lieu, si possible, entre 5 et 7h00 après le décès. De nombreuses règles régissent ce processus de crémation dans le monde hindous. Cette première règle est établie logiquement quand on connait la difficulté de conservation d’un corps inerte en raison des températures élevées qui règnent une bonne partie de l’année dans le pays et des manques de moyens. En haut de ghat de crémation s’entassent des piles de bois gigantesques continuellement alimentées par des bateaux déchargeant cette marchandise. C’est une vrai économie macabre et loin d’être la seule autour de ce procédé. Le bûché est préparé avec environ 630 Kg de bois pour assurer la consumation complète du corps. La totalité des bûches seront pesées et un prix sera déterminé selon la quantité exacte et la nature du bois choisi.
Le corps est tout d’abord nettoyé et purifié en le plongeant dans le Gange. Puis le corps est déposé sur le bûché qui a été empilé par la famille gérant ce ghat. L’empilement a lieu à trois endroits différents selon s’il s’agit d’une famille riche (plate-forme surélevée), de la classe moyenne (sur la terre au bord du fleuve), ou de famille pauvre (sur le parterre où dorment les chiens). De multiples photos sont prises par la famille pour prouver la mort de leur proche auprès des assurances et en raison des démarches administratives. Le bûché est finalisé en recouvrant la totalité du corps.



Il est important de signaler que depuis le début de ce processus seuls des hommes sont présents. Plusieurs raisons justifient cet aspect misogyne pour une cérémonie de fin de vie. La première raison est une croyance hindoue selon laquelle l’âme ne peut pas s’envoler en paix si des personnes pleurent pendant la crémation de son corps. Les femmes étant plus sujettes à s’émouvoir et à laisser couler des larmes, l’interdiction d’assister à la cérémonie éviterait à une âme contrariée de ne pas pouvoir se libérer. Mais cette absence a surtout une raison historique. En effet, autrefois, lorsqu’un mari décédé, la veuve épleurée était jetée vive dans les flammes du bûché de ce dernier. Lorsque cette tradition fut abolie, des femmes ont continuées par tradition à s’immoler d’elle-même. Les femmes se retrouvent donc, entre-elles, à la maison du défunt, pour différentes cérémonies en l’honneur de la personne décédée.
Les hommes sont donc tous réunis devant la dépouille, encerclée de bois et prête à s’embraser. Un des hommes, le plus proche du défunt, a suivi auparavant une cérémonie bien particulière de préparation pour aider l’âme du défunt à partir dans les meilleures conditions. Par marque de respect, il est vêtu tout de blanc. Il a auparavant procédé à une coupe intégrale de ces cheveux, barbe et moustache qui symbolise son deuil. Cette personne tournera 5 fois autour du bûché avant de l’enflammer. Le brasier va en moyenne se consumer pendant plus de 3h00 réduisant en cendres le corps.
Des détails, non négligeables mais surtout austère et glauques, vont vous permettre de comprendre pourquoi je ne peux rester que dubitatif devant les évènements qui se déroulent en face de moi. Premièrement l’intimité est nulle et non avenue. Les corps sont présentés à la ghat et sont «traités» au fur et à mesure que le flot d’arrivée le dicte. A Manikarnika Ghat, un maximum de 300 crémations peut avoir lieu par jour. Les bûché sont à peine espacés d’un ou deux mètres. La fumée et la cendre s’envolent en tournoyant dans le ciel et retombent aussi bien dans le Gange, que sur la ville, et sur les personnes qui assistent à la cérémonie. De plus, ces crémations se déroulent aux yeux de tous plus ou moins averti et respectueux des pratiques effectuées. Par exemple des touristes n’hésitent pas à prendre des photos avant d’être réprimandés. De jeunes indiens viennent récupérer tous les objets de valeurs et ce qui pourra être revendu ultérieurement alors que le processus de crémation n’est pas fini. Les indiens de Varanasi habitués à ce cérémonial ne prennent même plus garde à ce qui se passe. Les vaches sacrés, cochons et chiens, entre-autres, sont aussi de la partie dévorant les colliers de fleur qui décorent le défunt, les offrandes faites au Gange…
Un autre aspect important de ce processus va encore plus me laisser pantois. Cette crémation a pour but de purifier le corps afin que son âme soit libérée. Différentes personnes sont déjà considérées comme pure en raison de la vie qu’elles avaient. Pour ces dernières les corps seront lestés avec des pierres avant d’être directement jetés dans le Gange. 6 cas particuliers sont inclus dans ce cas spécifique. Il s’agit des femmes enceintes, des enfants de moins de 9 ans, des personnes mortes en raison d’une morsure de serpent, un individu souffrant de maladie particulières, d’une personne ne possédant ni pieds ni mains, et un individu dont le caractère religieux est évident et sans contestation possible.



Mais continuons dans le caractère incompréhensif de ce rituel hindou. En effet, toutes les cendres de tous les corps qui ont subis une crémation sont réunies, par la suite, en un seul et même tas, avant ultérieurement d’être tamisées pour trouver les objets de valeurs restants (leur revente servira à aider les plus pauvres à payer le bûché du défunt) puis jetées dans le Gange. Je serais curieux de connaître le sentiment et les impressions qui vous envahissent après l’évocation de ce moment de crémation à Varanasi (Bénarès). Pour ma part, je suis resté bouche béante et j’essaie encore de comprendre comment cette réalité est ancrée dans une culture, et comment des personnes l’envisagent naturellement tous les jours sans se poser de questions.
En revanche, cela ne change pas mon désir d’être incinéré lorsque mon heure viendra. J’espère simplement que la cérémonie se déroulera selon un processus plus occidental, dans l’intimité et seulement avec les proches. Je préfère aussi voir mes cendres répandues à l’air libre sur des hauteurs montagneuses où des falaises longeant la mer. Je n’ai pas besoin de me libérer de quelque chose en particulier mais seulement de retourner dans la nature d’où nous provenons tous.
Mais revenons à notre propos du jour. Ces corps et ces cendres sont donnés au Gange. Ce fleuve sacré est l’un des plus vastes du continent, et il reste indomptable avec des crues immenses. Selon les croyances bien enracinées des hindous, avec qui j’ai discuté, le Gange possède toujours une eau pure et il est capable d’intégrer tout ce que l’on peut lui donner (activités de crémation, eaux usées, produits pour laver le linge sur ces bords, détritus qui jonchent ce dernier). Ce n’est évidemment pas l’avis d’organismes sanitaires qui considère son insalubrité comme difficilement résorbable et le Gange comme un des fleuves les plus pollués de la planète.



Le Gange et ces abords sont, quoi qu’il en soit, le centre de la vie de cette ville ancestrale. Les promenades en le longeant me permettent de voir de nombreux gourous exercés leur travail pour aider les pèlerins à se repentir, des jeunes joués aux cerfs-volants ou au criquet, des peintre et artistes en pleines activités, des vendeurs de souvenirs ou qui possède une étale de nourritures nous sollicitant, des animaux se promenant en liberté….
Le séjour dans cette ville restera mémorable! Je suis néanmoins heureux de m’éloigner de cet endroit chaotique et spirituellement touchant et conservant un aspect insaisissable. Je suis aussi pressé de quitter cette brume ambiante et cette humidité persistante, même si cela contribue à la magie du site, pour retrouver le soleil et la chaleur.



Je me rends dans la campagne indienne au centre du pays pour admirer des vestiges magnifiques et très bien conservés créés par les religions indo-aryennes et Jaïns révolues. Il s’agit de la ville de Kajuharo et de ces temples comptant parmi les chefs d’œuvres architecturaux mondiaux de l’art religieux (plus précisément dans ce cas de la dynastie de Chandela).
Cet état de fait réside entre autre dans leurs statuaires admirablement sculptées dans la pierre. Certaines sculptures en ont fait sa renommée.
Il s’agit de nombreux corps féminin et aussi de postures érotiques. L’architecture de ces temples est vraiment spécifique donnant le sentiment de se retrouver face à une chaîne de montagne dont le point culminant est la flèche verticale se dirigeant vers le ciel. Ces bâtiments ne possèdent aucun ciment pour maintenir les pierres et consiste à un simple enchevêtrement qui résiste parfaitement au temps qui passe.
Des frises entières de sculptures plus ou moins grandes recouvrent les édifices. Ces sculptures sont d’une finesse incroyable et la position très étudiée des corps et objets nous laissent facilement concevoir que ces derniers sont en mouvement.
Ces statues représentent des dieux, des déesses, des animaux réels ou mythologiques, mais aussi des aspects de la vie de la vie de tous les jours; guerriers, musiciens, femmes s’occupant des tâches qui leur incombent, couple en plein acte sexuel. Ces statues avaient un but décoratif mais aussi protecteur pour ces temples.
Cette visite dans une petite ville calme et tranquille va prendre une tournure passionnante et unique. J’ai, effectivement, rencontré un néerlandais, Roy, dans le train pour atteindre Kajuharo. Nous avons décidés de partager une chambre et de faire un bout de chemin ensemble! Nous ferons les visites des temples et explorerons ce petit village.
Louant des vélos, nous nous enfonçons dans la campagne alentour. Dans un des villages de fermiers, qui ne parlent pas anglais, nous faisons la connaissance de Diru, jeune fermier. Ce dernier, lui, parle très bien cette langue universelle permettant de communiquer avec autrui dans le monde entier, et ouvrant des portes insoupçonnées vers des univers magiques à travers notre planète terre. Nous allons faire amplement sa connaissance, nous découvrirons son univers lors de discussions qui commenceront en haut d’une des collines environnantes. Le courant passe tellement bien qu’il nous propose en fin de matinée de venir nous installer chez lui pour connaître «la réelle vie à l’Indienne». Nous acceptons sans hésiter.
Je vais passer avec Roy, Diru et sa famille 3 jours magiques. Il viendra, tout d’abord, nous chercher un par un pour nous emmener en moto dans sa ferme. Nous faisons la plus ample connaissance de sa famille avec laquelle il vit, de son univers, de ces terres et de ces bestiaux.


Puis il nous emmènera dans son village où les personnes ne parlant pas anglais sont très étonnées de nous voir. Mais, pourtant, elles nous accueillent chaleureusement, avec un grand sourire et l’envie de nous montrer leur lieu de vie et leur famille qui l’occupe. Nous ne pourrons pas nous arrêter dans chaque demeure mais le cœur y est vraiment. Dans les cours de chaque maison visitée, derrière chaque mur de façade donnant sur les petites ruelles, nous découvrirons une véritable vie bien en place (préparation des plats, la récolte qui sèche au soleil, différents travaux effectués, des enfants qui jouent avec un bout de pneu ou quelques roupies en guise de billes…).
Certaines jeunes enfants sont même un peu effrayées lorsqu’ils nous voient pour la première fois. A l’extérieur de la ville, sur un chantier de construction, je serais grandement surpris de voir une majorité de femmes. Cela s’explique par le fait que les femmes, en campagne, n’ont pas eu la chance de continuer les études et que la société, la culture, les empêchent de travailler pour un métier qui implique un relationnel trop important avec autrui. Néanmoins dans la société actuelle, il n’est pas possible qu’elles restent au foyer comme autrefois, et elles doivent aider à subvenir aux besoins de la famille et donc elles se doivent de trouver une activité rémunérée.
Dans cette région qui peut s’avérer très désertique, nous constaterons encore plus qu’ailleurs l’importance de l’eau. De très larges puits (dizaine de mètres de diamètres) sont présents dans chaque ferme. Toutes personnes du village se retrouvent à la rivière pour se laver, nettoyer le linge ou simplement se relaxer en se baignant dans de l’eau fraîche. Le puits servant à puiser l’eau, utilisée quotidiennement, est perpétuellement occupé par des allées et venues de femmes portant sur leur tête des jars qu’elles remplissent plusieurs fois au cours de la journée. L’alcool est très peu présent dans les campagnes indiennes. En revanche, les hommes fument beaucoup de cigarettes artisanales et 100% naturelles, la pipe, ou de l’herbe fraîchement découpée. Nous allons, tout au long de ce séjour, prendre part aux activités de la ferme, nous reposer dans une cabane faite de bois et de branchages, faire de nombreux feu, matin et soir, pour nous réchauffer et profiter de l’ambiance spéciale créée par les flammes. Nous allons déguster une cuisine succulente, préparé au feu de bois, par la maman et la sœur de Diru. Les plats sont élaborés à partir de la nourriture typique: les chapatis, les duris, le thé, le lait de Buffalo, les différents chutneys (sauces épicées indiennes), la préparation de mangue épicée, des mets à base de légumes du jardin (pomme de terre, haricots verts, pois chiches…)… C’est un régal pour les papilles.
L’aspect indéniablement paisible des lieux et l’atmosphère simple, faite de partages, sont ressourçant. Les conditions de vie de ces indiens sont, selon moi, mille fois plus plaisante ici dans des maisons décentes au milieu de la nature plutôt qu’entasser dans des bidonvilles, dans l’espoir un jour de peut-être faire fortune en milieu urbain. Je décide, après cette prolongation improvisée de 2 jours à Bennigange, auprès de Kajuharo, de continuer mon périple vers ma nouvelle destination. Roy a décidé de rester pour une durée indéterminée. Je serais bien resté quelques jours de plus mais je ne peux pas passer à côté de la possibilité d’assister à un mariage indien dans la banlieue de Mumbay (Bombay).



Avant cela, pour le réveillon et le jour de Noël, je vais m’offrir un merveilleux cadeau: un safari dans le parc national de Bandhavgarh. Le but premier est d’aller à la rencontre du plus fameux félin d’Asie; le Tigre du Bengale… Etant actuellement en mode backpacker et voyageur, sous des températures de 30° en journée, je ne réaliserais pas vraiment que je vais être loin de mes proches lors de ces 24 et 25 décembre 2011. Toutes mes pensées s’envolent vers Angers pour me joindre à eux lors de ces fêtes familiales qui ont toujours eu un sens et une importance majeurs pour nous.



Mais Ce cadeau de noël sera-t-il au rendez-vous? Il est important de mentionner les efforts fournis pour réaliser ce nouveau rêve. Cela ne sera déjà pas si aisé d’atteindre en train (train bondé en seconde classe sans réservation) et en Bus Tala, aux portes du parc national. Il sera encore moins facile de trouver de touristes avec qui partager les frais pour la location d’une jeep, du payement de l’entrée dans le parc, et les services d’un guide obligatoire (prix fixes pour un safari et qui est bien sûr plus important pour les touristes étrangers). Après avoir été, dès 5h30 du matin, au guichet du parc pour me joindre à une jeep et être rentré bredouille, je vais parcourir les hôtels une bonne partie de la matinée dans le but de trouver d’autres touristes étrangers. Ces derniers doivent bien sûr voyager en indépendant et ne pas faire partie d’un groupe possédant un package tout compris. Une seule rencontre, avec Meaghan, une américaine, me donnera un peu d’espoir.
Ce n’est alors sûrement pas qu’une légende que tous les étrangers occidentaux se dirigent vers Goa, la catholique et la fêtarde, pour les fêtes de fin d’année. Cette recherche intensive m’aura au moins permis de rencontrer, un indien de 26 ans, Uday en vacances chez sa famille. Nous passerons 2h00 le matin ensemble dans la ferme de sa famille. Il m’invitera spontanément, avant que je parte à la quête de nouvelles personnes pour un safari dans l’après-midi, à me joindre à sa famille. Sans hésiter, je quitte mon hôtel pour me joindre à eux et passer un Noël encore un peu plus spécial. Uday et sa famille m’offrent donc l’hospitalité, le couvert et surtout le partage de la vie d’une famille indienne pendant 36h00. Je vis majoritairement seul ce voyage autour du monde mais l’ouverture de plus en plus accentué vers les autres et surtout les locaux m’ouvre des opportunités d’instants de vie hors du commun!Mais revenons à la réalisation de l’objectif premier, encore en suspens, de ma présence dans ces lieux! Comme convenu, nous nous rendons avec Meaghan, à 13h00, au guichet des entrées dans le parc dans l’espoir de trouver minimum 2 personnes pour se joindre à nous. Après 40 minutes d’attente ce que nous espérions va se produire; 2 autres touristes se présentent à nous et ils nous demandent spontanément si nous désirons partager une jeep. L’accord est immédiat, les frais partagés, nous voici déjà, à l’aise, à 4 pour 6 places à l’arrière de la jeep, prêt à partir, pendant 3h00, à la rencontre de la faune de ce parc et surtout de sa mascotte emblématique.
Au cours de la première heure, nous observerons de nombreux animaux: un renard, des sangliers, de nombreuses biches et cerfs, des singes langur, une multitude d’oiseaux plus ou moins colorés et impressionnants (rapaces, échassiers, oiseaux tropicaux…). Le cadre est idyllique faite de haute végétation, de forêts tropicales et de nombreux points d’eau.
L’excitation monte, pour chaque occupant de la jeep, quand un gardien de la réserve nous indique l’endroit où un de ces collègues vient d’apercevoir un tigre mâle. Nous filons à toute vitesse dans la direction indiquée avec l’espoir grandissant de l’apercevoir! La tension est à son comble quand, après avoir vu des empreintes fraîches sur le sol, nous entendons de manière très distinct son rugissement.
Nous allons tourner de longues minutes autour de la zone de dense végétation. Au tournant d’un virage, mes palpitations sont au summum. A 50 mètres, le fauve traverse le chemin de terre. Le conducteur fonce dans sa direction pour que nous puissions au moins l’apercevoir d’un peu plus près. Là, le miracle se produit. Il s’est arrêté à la lisière des arbres et il se tient à peine à 5 mètres de nous. Il restera plusieurs minutes interminables, et si courtes à la fois, à nos côtés. Il est attentif au moindre bruit, se déplaçant et tournoyant de gauche à droite. C’est incroyable de constater sa stature, la force qu’il dégage et l’aspect majestueux sans égal.
Il n’y a aucune comparaison possible avec le même animal en captivité. Pour moi, il s’agit finalement de deux animaux totalement différents et il m’est très facile de le constater à cet instant. L’animal captif semble avoir perdu son âme, il se meut sans but, la cage étant son univers bien trop étroit! Son regard n’exprime plus rien de bestiale. En revanche, l’animal qui se tient devant nous possède un regard et des yeux qui inspirent un profond respect et même une crainte tangible. Pouvoir l’admirer dans de telles conditions est un cadeau de noël inespéré.
De plus, nous sommes la seule jeep, présente dans les parages, à assister au spectacle. Les autres arriveront bien trop tard! Même après qu’il se soit en aller dans la végétation, le spectacle ne sera pas totalement terminé. En effet, nous essayons de le suivre d’un peu plus loin quand nous apercevons un troupeau de biches. Le tigre est en chasse et son attention depuis tout à l’heure porter sur ces futures proies. Nous ne connaîtrons pas le dénouement mais il très intéressant de le voir se faufiler à travers la flore avec une agilité et une vitesse déconcertante dans le but d’optimiser ces chances de rentrer avec un copieux festin. Continuons notre parcours dans le parc, nous allons voir deux bisons d’Inde venir s’abreuvoir dans une petite retenue d’eau, nous apercevrons une tigresse d’assez loin, et de nombreux autres animaux… La chance qui nous suit va nous mener au clou du spectacle. En effet, quelques minutes avant de devoir sortir de la réserve, nous allons avoir la chance de nous trouver nez à nez avec un léopard, animal très craintif qui se laisse encore moins observer que son homologue fauve, le tigre!
Le cadeau de Noël est complet. Tout le monde rentrera combler de cette expérience unique. Même les locaux n’en reviendront pas lorsque je leur présenterais plus tard l’ensemble des photos… Je serais très vite surnommé «Lucky man» (l’homme chanceux) qui, en un et un seul safari, a pu admirer une grande panoplie, et la plus magique partie, de ce parc national de Bandhavgarh. Je m’endors paisiblement tel un bébé dont les rêves sont agrémentés de ces animaux légendaires.



Ce séjour dans ce petit village au centre de l’Inde fut très agréable. Il est cependant temps de continuer ma route et de rejoindre la côte ouest et plus précisément, pour commencer, Mumbay (Bombay). La folle vie à l’indienne va très rapidement me rattraper et cela dès l’utilisation de ces moyens de transport. En effet, en pleine période de vacances, je n’ai pas pu réserver de place dans les wagons couchettes pour me rendre à ma prochaine destination. Voulant absolument me trouver à Bombay pour le début des festivités du mariage, je décide de prendre un billet «second class», sans réservation. Dans ces wagons montent autant de personnes qu’il est possible d’en faire tenir un volume donné. Les indiens se tiennent débout dès la porte d’entrée. Il est donc très difficile de se frayer un chemin simplement pour rentrer à l’intérieur, surtout quand on chargé avec deux sacs. Après avoir pu me glisser à l’intérieur du wagon, il me reste encore 16h00 de temps à écouler pour arriver à la destination finale.
Ces 16h00 se transformeront finalement en 22h00 avec les retards accumulés. Ces dernières ne seront pas toujours des plus agréables mais elles seront une belle peinture de ce que peut vivre un indien moyen.
Le wagon se remplie et se désemplie au grès des arrêts dans les différentes gares. Assis sur mon sac pendant 5h00, j’ai réservé une place assise, dès ma montée dans le train, en négociant avec une personne présente à mes côtés qui en détenait une et qu’il allait la laisser vacante quelques heures plus tard. De nombreux vendeurs de nourriture dont les chai-wallahs (vendeurs de thés) enjambent les passagers dans le couloir pour vendre leurs mets. Je vais faire de nombreuses rencontres, prendre part à quelques discussions, me voir offrir de la nourriture typique indienne par des passagers. Je suis aussi bien entouré de femmes en habit traditionnel, que de familles complètes, des jeunes branchés passant leur trajet sur leur portable et écoutant de la musique, mais aussi des personnes dont la pauvreté se devine facilement. La soirée passant, le train se désemplie tant bien que mal pour nous laisser un peu plus de place. Je dormirais dans le couloir sur une couverture partagé par un monsieur très sympathique. Ce voyage n’aura pas été de tout repos mais culturellement passionnant.



Le fait de devoir prendre le train local pour me rendre dans le centre de Bombay complétera définitivement le panneau pittoresque des transports en commun en Inde. En effet, la première image que je m’en suis faite quand je les ai vus correspond à des wagons de bestiaux où l’on intègre le plus de tête pour une meilleure rentabilité. Aux heures de pointe, les wagons sont archibondés. Les dernières personnes à pouvoir prendre le train se tiennent aux barres des portes d’entrées avec le corps à l’extérieur. Heureusement, il existe des wagons spéciaux pour les femmes et handicapés leur permettant de pouvoir prétendre à un peu plus de confort et de place.
Nos standards ne sont pas les mêmes en Europe et je vois difficilement comment certaines personnes de mon entourage seraient capable de subir un centième de ce que vivent les indiens au quotidien.La première vision de Bombay sera donc la gare de Chhatrapati Shivaji. Cette dernière est la plus fréquenté d’Asie! Je vous laisse donc imaginé la cohue quand j’effectue mes premiers pas dans ce bâtiment néogothique qui est cependant loin d’être dénué de charme. Bijoux architectural de l’Inde coloniale, il est même inscrit au patrimoine mondial de l’Unesco. Je marche pour me rendre dans le quartier de Colaba, épicentre touristique à Bombay, en raison de sa localisation géographique à la pointe sud de la péninsule et de son intérêt historique et culturelle. Je vais avoir un premier aperçu de l’aspect colonial, victoriens ou art déco des bâtiments. La similitude avec le style anglais est assez impressionnante.



La ville, ou du moins son centre historique, n’est pas du tout oppressant comme je pouvais l’imaginer ou comme je l’avais entendu dire. L’agitation est présente. La Mégalopole, et ces 17 millions d’habitants, est immense! La possibilité de se faire renverser à chaque seconde sur un passage piéton, de se faire arrêter par un vendeur ambulant, ou de vivre une expérience désagréable, sont fortes.
Mais les grandes avenues, la propreté dans le centre historique, les bords de mer et l’air frais qui s’en dégage, la sympathie d’une majorité de ces citadins, les côtés historique et culturels hauts en couleur permettent d’envisager un séjour serein et agréable. Je vais donc explorer la ville, passer un certains temps autour de l’Oval Maiden où les sportifs s’exercent au criquet et football en plein centre-ville, visiter les bâtiments qui l’entourent: la cour de justice, l’université, certains monuments de l’art déco.
Après avoir découvert «Ocean drive» (route de l’océan), j’y passerais toutes mes débuts de soirée pour y admirer le couché de soleil comme un grand nombre d’indiens.
La visite du Taj Mahal Hostel, de la porte de l’Inde et de nombreux musées et galeries d’art complétera un programme bien complet. Je ne peux pas omettre la visite «d’Elephanta Island», labyrinthe de sanctuaires monolithiques, en pleine roche basaltique et agrémentée de magnifiques sculptures dédiées à Shiva. Le trajet pour s’y rendre sera au moins aussi plaisant que la visite à proprement parlé. En effet, pour aller sur cette île, nous empruntons d’assez vieux bateaux à moteur. Plus de 4 mois que je ne me suis pas retrouvé face à la mer, et mieux encore, en pleine mer avec un grand soleil.
Le séjour dans cette ville prendra fin le premier janvier 2012. Le réveillon du jour de l’an aura été assez anecdotique mais sympathique. Partage d’une bière avec 3 étrangers et la tension à son comble (rires) pour les douze coups de minuit devant trois pétards et 5 fusées, qu’ils osent dénommer feux d’artifice à Bombay, en auront été les principales activités.
L’événement majeur lors de ma présence à Bombay sera la participation à un mariage indien, pendant trois jours, du 27 au 29 Décembre 2011. Je tiens tout d’abord à remercier chaleureusement Sarah, amie habitant New-York! C’est par son intermédiaire que je me suis fait inviter au mariage de son amie indienne Divya. Elle se marie avec un suédois qui se prénomme Marcus. Ce mariage se présentera tout de même dans les règles de l’art indien pour cet événement si particulier. Le déroulement sera donc le suivant: Trois jours de festivités non-stop où l’abondance et de rigueur et les superlatifs sont à utiliser sans sentiment d’exagération. Le premier soir est dédié aux chants traditionnels.
Je me laisse facilement bercer par la musique qui accompagne des chants mélodieux. Les deux familles et amis sont réunis, en tailleur, autour d’un groupe d’instruments traditionnels. Ce début de soirée sera suivi par un buffet gargantuesque où une multitude de plats, typiques indiens, sont présents. Je gouterais avec curiosité les vins du pays. Le vin rouge et le chardonnay blanc m’étonneront car ils se laisseront boire assez facilement et presque avec délectation. Mais le réel plaisir sera pour moi de remanger en quantité du poison et de la viande. Je vous passe le descriptif complet de ces buffets qui seront présents au cours des trois soirées. Fermez simplement les yeux et imaginez les meilleurs mets indiens tous réunis en quantité infini dégageant une odeur qui mettrait en appétit même la plus repue des personnes. Vous avez alors une bonne idée de ce que pouvaient être ces buffets et leurs présentations.

Le deuxième jour est d’abord consacré au tatouage à l'henné de toutes les femmes le désirant. La soirée sera comparable à une soirée d’un mariage typique français. L’ensemble des proches est présent, de nombreuses activités sont proposées par différents participants, un bon repas est partagé et une fin de soirée sur la piste de danse, pour se déhancher sur des rythmes endiablés, est organisée. Ce mariage multiculturel est très intéressant. Les traditions restent très ancrées. Ce sont les parents de la mariée qui avaient particulièrement à cœur de procéder à un mariage typique, en Inde, auprès de toute la famille. Cela n’empêche pas que nous ferons des rencontres très variées et que l’ambiance aura aussi tout de même des touches très modernes de par le style de musique, les individus présents, les fins de soirées très arrosées.
La troisième soirée est la plus spectaculaire, la plus chic et la plus typique indienne. Il s’agit de la présentation des vœux aux nouveaux mariés pour toutes les connaissances plus ou moins éloignées de la famille. Pour faire simple, toutes personnes connaissant de proches ou de loin la mariée mais aussi sa famille complète sont invitées. S’ils avaient habité un petit village de campagne, l’ensemble des personnes du village auraient été invitées mais aussi celles des villages voisins.
Les vœux entre Divya et Marcus ont été échangés à Stockholm quelques mois plus tôt. Mais habituellement, cette cérémonie se déroule en début de soirée du troisième jour. Le lieu où se déroule cette soirée est énorme, les décors somptueux, toutes les personnes sont sur leur trente et un. Les femmes ont toutes revêtis le Sari (habit traditionnel) et leur plus beaux bijoux, Les hommes arborent de magnifiques costumes, un groupe d’artiste accueille les invités, tout un process est respecté pour approcher les mariées et leur présenter, tous, tour à tour, nos vœux. Cette soirée se finira calmement marquant la fin d’un espace-temps particulier lors de ce voyage.
Encore une fois, je vais effectuer quelque chose que je n’aurais même pas imaginé quelques mois auparavant. Je me cacherais presque, à cet instant, de peur de rougir. Mais je suis en mode backpacker donc je m’y suis rendu assez décontracté dirons-nous. J’ai tout de même enfilé mon plus bel accoutrement. J’y suis donc allé en pantalon de randonnée, en polo mais surtout en chaussures de randonnée. Heureusement, aucune remarque ou regard n’auront mis mal à l’aise et j’ai pu profiter de l’expérience à son maximum…



L’espace de quelques instants je me suis plongé dans un univers spécifique. J’ai eu le sentiment d’être part d’un groupe vivant une expérience très spéciale et cela spécifiquement pour les acteurs principaux de ce mariage. Je repars donc les batteries totalement rechargées vers une nouvelle destination. Je prends la direction du sud de l’Inde et m’apprête à découvrir une nouvelle partie de ce pays totalement différente.

 

2 commentaires:

  1. comment ne pas être saisi tout d'abord par ta grande mésaventure qui aurait pu vraiment mal se terminer!!!cela me donne des frayeurs
    mais aussi par ces moments de narration sur la crémation dans ce pays
    heureusement tu finis par cette invitation au mariage indien ce qui fut certainement un heureux événement à vivre
    bonne continuation de voyage nous t’embrassons très forts tes parents

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  2. comme quoi ; même un costard a l'autre bout du monde peut être utile ^^ bizzz mat

    Marco

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