Nous nous apprêtons à partir dans le plus grand Salar du monde. Un endroit que je rêvais de visiter depuis des années.
Mais avant cela, nous allons tout de même passer plus de 36h00 dans la ville d’Uyuni afin d’effectuer des tâches nécessaires, quand on retrouve un peu «la civilisation moderne» et toutes ces commodités. Nous faisons les courses sur le marché, prenons notre douche dans la «spacieuse» salle de bain de «Gros Pépère», avant de remplir de nouveau les réservoirs à un robinet dans une station-service. Sylvie et Céline amènent plusieurs kilogrammes de linge dans une laverie. La connexion Wifi d’un hôtel, que nous captons depuis la rue, est importante! C’est surtout le cas pour l’Akilifamily qui veut se faire envoyer, depuis la France, des pièces de rechange pour le camping-car. Ils aimeraient aussi recevoir des affaires pour préparer leur voyage en sac-à-dos. Je l’avais un peu évoqué dans mon récit de notre aventure dans le Sud Lipez. Ils ont vendus le véhicule à une autre famille de voyageurs français, qui en prennent possession dans un peu plus de 2 mois. Cette vente leur permet de prolonger leur voyage avant normalement de se rendre au Canada, pour un visa vacance-travail après avoir effectué toutes les démarches pour l’obtenir. Ils doivent donc pour cela et, avant tout pour continuer un petit peu plus leur aventure, vendre un véhicule roulant et en bon état. De nombreux petits travaux et réparations s’imposent donc, afin d’être sûr, moralement parlant, de respecter l’engagement pris entre les deux parties.
Le deuxième jour, un camping-car de vieilles connaissances nous a rejoints. Ils finissent leur séjour dans le Salar qu’ils ont vraiment apprécié. Je vais passer une soirée agréable en bonne compagnie. Certaines discordances irréversibles se font sentir. Certaines problématiques d’adultes font surface. L’alcool aide encore un peu plus à l’inhibition et délie des langues. Il n’y a cependant rien que je ne peux ajouter personnellement. Je ne suis pas impliqué dans ces problèmes sous-jacents, présents même au sein du groupe très fermé des voyageurs au long cours.
Une chose dont je suis persuadé, le voyage ne doit pas être une échappatoire, une fuite par rapport à des soucis dans notre vie antérieure. Le voyage doit être un choix de vie pour un moment donné, le fait d’assouvir une soif de connaissances, de découvertes de l’autre, de notre monde, de cultures différentes, et un peu de soi… Le voyage permet de réaliser de nombreux projets, des rêves, de réaliser des choses qui pourraient nous paraître inaccessibles dans notre quotidien d’une vie bien rangée. Il doit nous permettre un détachement aussi grand que possible par rapport au matérialisme que la société capitaliste nous impose. Le voyage doit nous ouvrir les yeux sur la chance que nous avons de vivre dans un pays où nous sommes libres de faire ce que nous voulons, dans le respect des lois, de dire ce que nous pensons! Si le voyage peut permettre de temporairement trouver un équilibre, il peut être très instable si la fuite provoque un problème personnel non résolu. Au retour, il ne pourra que s’amplifier avec le dur retour à la réalité de la vie routinière, quittée il y a quelques années, où le travail occupe une place prépondérante, et n’est généralement pas que des activités pour le plaisir. A cet instant, ces questions ne me concernent pas!
Le retour est, et doit être, désiré! Cela me donnera la chance de construire, de vivre des moments forts avec des personnes que je connais très bien et qui ont une place primordiale à mes côtés.
Mais là n’est pas la question à ce moment. C’est avec de très bons amis que je m’apprête à découvrir un lieu sensationnel. Amis, certes rencontrés sur la route, mais qui sont devenus des personnes d’une grande importance à mes yeux, une famille d’adoption que je porterai à jamais dans mon cœur.
Le lendemain matin, mardi 17 Septembre, nous faisons les derniers achats au marché. Ensuite nous nous rendons dans une sorte de garage, à la sortie de la ville, pour y effectuer une fumigation. Il s’agit de laver le véhicule, tout spécialement sous le châssis, avant d’y appliquer un mélange fait d’huile, de pétrole, et d’autres substances qui permettent d’éviter que le sel vienne se coller, s’agglomérer, et créer des problèmes de corrosion! Le but est aussi d’éviter le blocage d’éléments principaux, tels que les freins, les roues, la direction… Après une vingtaine de minutes, nous sommes fin prêt pour le départ vers ce lieu décrit par beaucoup comme inoubliable et une des endroits les plus extraordinaires qu’ils n’aient jamais vus.
Nous entamons notre approche part 20 kilomètres de pistes menant à l’entrée à proprement dite du Salar de Uyuni. Nous voici finalement à rouler sur cette couche immaculée blanche de sel. Nous nous arrêtons après seulement quelques centaines de mètres auprès d’une des seules exploitations de sel du Salar. Cette dernière ne s’étend que sur quelques centaines de mètres carrés alors que le Salar en fait des centaines de milliers. Des millions de kilogrammes en sont pourtant extraits, chaque année, pour une utilisation industrielle, ou pour la cuisine de particuliers. Nous déjeunons sur place avant de se promener entres les tas de sel répartis géométriquement de façon ordonnée. Nous pouvons ensuite admirer la récolte du sel par des boliviens pelletant à un rythme régulier et rapide. Le reflet du soleil est fort sur cette surface claire. Il l’est encore plus lorsqu’une fine couche d’eau remplace le sel qui vient d’être récolté en surface.
Nous ne tardons pas à reprendre la route, que dis-je, un semblant de piste qui s’est créée avec le temps. Il existe un tracé, dessiné en noir, en raison des nombreux 4x4 qui roulent sur le Salar en cette période sèche de l’année. La gomme des pneus et des pots d’échappements ont inscrits de façon indélébile ces marques sur cette surface sinon parfaitement blanche. Il est fortement déconseillé de s’éloigner de la route empruntée par tous, aux risques de s’enfoncer. Il n’est alors pas improbable de passer à travers la fine couche de sel peu solide qui existe par endroits. Nous prenons de la vitesse sur cette surface quasi-plane sur laquelle se dessinent des formes géométriques hexagonales. Elles sont très reconnaissables et donnent un semblant de relief au décor. Il nous faudra seulement un peu plus d’une heure pour couvrir les 80 kilomètres qui nous séparaient de l’île la plus touristique du Salar. J’ai bien évoqué le mot «Île»! Premièrement car cet espace blanc ressemble à un lac gelé dans sa forme actuelle. Qui plus est, à la saison des pluies, une fine couche d’eau recouvre le sel et forme une sorte de grand lac avec un effet miroir magique sur lequel les 4x4 jouent avec engouement. Finalement, il y a quelques milliers d’années, ce lieu était un lac permanent.
Nous atteignions donc cette île qui ressemble à un oasis. Des dizaines de 4x4 sont présents à notre arrivée. Les touristes restent concentrés au même endroit. Nous décidons alors de faire le tour de l’île à pied! Nous nous retrouvons très vite totalement isolé et seul dans ce lieu unique. Je ne peux alors pas m’empêcher de grimper sur ces roches très spécifiques. En effet, ceux sont comme des coraux que nous pouvons trouver normalement dans les fonds-marins, à proximité des rivages de tous les océans et mers. Je grimpe sur ces derniers vers le sommet de cette île de quelques dizaines de mètres de hauteur. Des cactus y ont poussés par centaines. Ils recouvrent une très grande partie de la surface. Cela sera un vrai terrain de jeu pour l’enfant que je suis resté mais aussi pour Fabrice et Sébastien, venus prendre des photos.
Revenant aux camions, qui se comportent parfaitement sur le sel, nous décidons de dormir de l’autre côté de l’île. Nous nous y garons après avoir rallumés les moteurs seulement pour quelques centaines de mètres afin de pouvoir admirer le coucher du soleil. Ce dernier est magnifique. Nous avons des ombres interminables qui s’étendent sur des dizaines et dizaines de mètres devant nous. Le ciel prend des couleurs qui semblent à peine réelles.
Nous allons donc nous déplacer et nous rendre à une deuxième île, indiquée par d’autres voyageurs et qui selon leurs dires serait déserté par les tours organisés, qui n’ont pas le temps de s’y rendre. Elle n’est pourtant éloignée que d’une vingtaine de kilomètres du lieu où nous nous trouvons. Encore une fois, je prends conscience de la chance que j’aie de visiter ces lieux avec un véhicule indépendant, et non comme la majorité des touristes. Voyager avec l’Akilifamily, dans leur camping-car, nous permet de rester le temps que nous désirons et d’organiser notre propre circuit.
Nous allons monter une nouvelle fois sur le toit du camion «Cfoussa», comme la veille, pour y admirer, depuis sa hauteur, le paysage somptueux. Nous allons aussi réaliser de très belles vidéos depuis les véhicules mais aussi depuis le sol, avec la Gopro de Sébastien. Il va la placer dans différentes positions pendant que les véhicules la surplomberont, lors de plusieurs passages. Nous prendrons part au spectacle en faisant de grandes salutations depuis le toit, ou sur la carrosserie qui surplombe les roues avant. Encore de très bons moments de passés dans cette immensité pure.
Arrivés aux abords de cette deuxième île, nous sommes définitivement seul au monde! Enfin presque! Vous allez vite comprendre pourquoi. Quoi qu’il en soit, nous installons le campement provisoire à quelques encablures de ces terres. Nous voulons éviter les derniers mètres de la circonférence proches des îles très propices aux enlisements des véhicules.
Nous partons nous promener avec Mathéo et Eliott, en vélo et en courant, pour découvrir une toute petite île. Elle se trouve seulement à quelques kilomètres de là où nous venons de nous stationner. Arrivés au sommet du petit îlot, nous apercevons le premier et seul véhicule de l’après-midi, autre que les nôtres, qui se dirige vers «Gros Pépère» et «Cfoussa». Revenant vers le campement, nous faisons la connaissance d’un couple franco-italien de retraités qui sont heureux de rencontrer d’autres voyageurs! Ils semblent en pleine forme, principalement la mamie, hyperactive et joyeuse. En sa compagnie, l’ambiance risque de ne pas être triste…
Avec Mathéo et Eliott, nous nous n’attardons pourtant pas trop à cette heure. Nous voulons ramener du bois de cactus mort pour enflammer la nuit, avec un magnifique feu dans ces paysages grandioses. Nous partons donc avec 2 machettes. Nous trouverons assez rapidement notre pactole pour la soirée. En effet, plusieurs cactus sont en train de mourir et sont totalement desséchés en bas du mont qui forme l’île. Nous attaquons alors un travail de forçat avec des outils plus ou moins appropriés. Au final, nous allons faire tomber tellement de troncs, que nous allons demander de l’aide grâce à l’intermédiaire des talkies walkies appartenant aux Syséléma. Fabrice nous rejoints prudemment au bord de l’île avec le camping-car. Nous effectuons alors le transport, sur les deux kilomètres qui nous séparent du campement, en entreposant le bois dans le véhicule.
La nuit tombe encore très vite. Le coucher de soleil révélera des couleurs similaires à la veille, flamboyantes! Nous prolongeons le spectacle par un feu de bois crépitant qui embrase la nuit noire. Le bois brûle parfaitement. Les appels d’air, dus aux trous spécifiques du bois de cactus, créent des effets vortex majestueux. La lune, presque pleine, qui c’était levée juste avant le coucher du soleil, complète un tableau idyllique. Alors que le feu consume les dernières braises, le froid de la nuit de l’altiplano et le vent, qui s’est levé, sont saisissants. Nous rentrons pour nous mettre à l’abri.
Pour parfaire ces instants inoubliables proposaient par la nature, nous allons passer une soirée où l’aspect humain, l’échange et la communication dans la bonne humeur, embelliront encore un peu plus une journée au paradis. Nous avons décidés que cette soirée serait une «crêpes-party»! Nous nous réunissons tous dans le camping-car de l’Akilifamily. La soirée sera animée et bien arrosée. Nous accompagnons la dégustation de crêpes avec de la Kachacha à la cannelle (alcool brésilien), du rhum et du vin rouge. L’ambiance est bonne-enfant, les discussions peuvent être sérieuses mais elles virent souvent au fou-rire! Chacun ira se coucher avec un degré d’alcool différent. Mais tous, nous avons le sentiment d’avoir passés de très bons moments.
Le lendemain, je pars, seul, escalader le sommet de cette île que nous jouxtons. Je vais m’élever à plus de 300 mètres au-dessus du niveau du Salar. J’ai alors une vue splendide, le surplombant, et révélant plus que jamais l’aspect d’une mer blanche, parsemée de quelques îles. Je vais rester de longues minutes, assis, à admirer la vue qui s’étend à l’infini. Encore une fois, prendre de la hauteur me permet d’aborder les lieux avec un autre point de vue. C’est d’ailleurs depuis ces hauteurs que je vais voir que 2 autres véhicules viennent se joindre à notre attroupement. Il s’agit de David, Orlane, et leurs 3 enfants, des «Expéditions 5», et d’un couple de canadiens avec 2 enfants. Nous agrandissons alors encore un peu plus le cercle de la tribu des voyageurs vivant temporairement dans le Salar.
Le déjeuner sera festif. 18 personnes partagent un repas sur des tables de pique-niques au beau milieu de cet espace blanc infini. Au programme; barbecue, petites pommes de terre revenues à la poêle, pain, fromages, gâteaux cuits au four, thé et café. C’est vraiment du grand luxe, me concernant, en pleine nature, d’avoir accès à toutes ces denrées, toutes ces façons de cuisiner, mais aussi de posséder réfrigérateur pour conserver tous les aliments. Je prends tous les jours conscience du confort extrême qu’apporte un véhicule équipé pour voyager.
L’après-midi va passer très rapidement. David me prêtera son «Kyte» (cerf-volant très rapide qui possède la forme d’une voile de Kyte-surf mais avec une voilure beaucoup plus petite). Le vent s’étant levé à plus de 30 nœuds, je vais pouvoir m’amuser comme un fou et retrouver les sensations que j’apprécie grandement avec cette sorte d’engin, en pratiquant une activité physique exigeante en raison d’une force de traction énorme.
Le coucher de soleil sera pour la troisième soirée de suite incroyable. Le lever de lune, une fois la nuit tombée, restera comme un des plus beaux que je n’ai jamais vu de toute ma vie. La lune énorme et orangée apparaît à l’horizon avant de s’élancer vers son zénith! Elle brillera quasiment toute la nuit dans le ciel.
Nous regagnons ensuite nos véhicules respectifs pour y passer une soirée au calme. Après un film, regardé à 5, en dégustant de bons beignets de pommes de terre préparé par Céline, je sortirai prendre un peu l’air avant d’aller me coucher. La sensation est étrange. J’y vois presque comme en plein jour. Cela me rappelle certaines nuits en bateau, ou en montagne quand la réflexion de la mer ou de la neige participait à cette même clarté. Mais il se dégage ici quelque chose d’encore un peu plus surnaturel.
Ayant bien avancés sur la route en cette journée, nous arrivons finalement à Potosi avant la tombée de la nuit. Fabrice aurait voulu visiter ces mines et découvrir l’envers d’un décor pas toujours glorieux. Mais au vu de l’état de son camping-car, il préfère avancer autant que possible et passer cet obstacle. Nous décidons donc de franchir Potosi dans la foulée. Cela ne va pas être de tout repos. Fabrice reste concentré sur le GPS, pour éviter le moindre écart par rapport à la route, la meilleure possible, pour éviter les pièges en pente que peut réserver la ville. Nous passons finalement sans que le moteur chauffe. Nous nous ferons tout de même deux ou trois belles frayeurs dans des montées. C’est le cas, principalement une fois, quand un véhicule nous bloque dans notre élan. Fabrice devra si prendre à plusieurs fois, en première, s’aidant du frein à main, pour pousser le camping-car, et réussir à ce qui ne cale pas et reparte vers le haut. Nous allons finalement vaincre les sortilèges de cette ville maudite pour les véhicules non préparés. Nous sommes sortis du piège, nous franchissons le panneau de sortie de ville en poussant un grand soupir de soulagement.
Nous trouverons un campement un peu plus loin, dans un petit village en bord de route. Au réveil, en ce dimanche matin, je vais pouvoir observer, les femmes qui font leurs linges au lavoir communal. J’aurais pu admirer ce spectacle en France, il y a plus de 60 ans mais j’aurais du mal à encore trouver ce mode traditionnel pour laver le linge!
Les bonnes nouvelles s’enchainent. Le «bloqueo» (paralysie de la route part des manifestants), organisé sur cette route depuis plusieurs semaines, est bien levé pour le week-end. Nous pouvons donc passer par la route habituelle, sans devoir contourner ce blocage par un long détour sur une route à peine carrossable. L’espoir d’atteindre la ville de Sucré, sans encombre, est maintenant grand! Une montée interminable prise à l’allée par l’Akilifamily se transforme en une descente beaucoup plus abordable. Vers 15h00, nous atteignons la ville de Sucré. Nous rejoignons le garage, où ils s’apprêtent à faire les réparations et remise en l’état du véhicule. Le propriétaire et gérant n’est pas là pour quelques jours. Mais un de ces employés va venir nous ouvrir la porte et nous remettre la clé pour que nous puissions rentrer et sortir à notre guise.
A peine arrivée, nous décidons de ressortir pour profiter des joies de cette ville, déjà très appréciée par les Akili! Ils me montreront un des endroits qu’ils préfèrent de la ville. Ce dernier est très vivant et reflète sûrement le mieux la vie des habitants. Il s’agit du marché Campesino, qui s’étale en réalité sur tout un quartier. Il comporte des magasins en tout genre, des commerçants ambulants et des personnes qui déploient leur stand quotidiennement. On y trouve de tout; des denrées alimentaires, des plats cuisinés à emporter, ou à déguster dans de petites gargotes, des vêtements, des ustensiles de cuisine, des outils mécaniques, électroniques, des stands de réparations… Nous allons effectuer un parcours qui nous mène tout d’abord aux magasins de vêtements. Les enfants, Fabrice et moi-même, nous nous lassons très vite. Nous observerons donc ce qui se passe à un croisement de rue, les comportements des personnes avant de nous offrir un premier jus d’orange pressé auprès d’une marchande ambulante. Nous continuons un peu notre chemin avant d’acheter des pop-corn. Continuant de descendre les rues, nous arrivons finalement sur la place principale du marché couvert. L’activité dans les rues est intense. Nous allons faire quelques achats de fruits et légumes avant de reprendre un jus de fruit frais au niveau d’un stand qui donne très envie. Des dizaines de fruits décorent le stand, le choix de jus de fruit frais à l’eau ou au lait, ainsi que les salades de fruits, est multiple… Ayant marché plus d’une heure, nous décidons ensuite, après ce nouveau moment de détente et de gourmandise, de faire marche arrière pour regagner le garage. Nous y passons une soirée en toute simplicité.
Nous ne possédons aucun programme précis pour les jours suivants à Sucré. Ils seront finalement bien chargés. Fabrice va passer beaucoup de temps avec les mécaniciens. Ils entament les réparations sur son véhicule; redresser le triangle de direction, réparé les câbles pour les feux de signalement, changer la pièce pour le store, réinstaller l’alarme qui vient de recevoir de France, refaire le bac de douche,… De mon côté, pour éviter une rupture brutale avec la suite des événements, je vais recommencer à passer pas mal de temps seul. Je vais explorer les ruelles de la ville, pénétrer dans plusieurs églises, visiter un ou deux musées. Je vais retourner de nombreuses fois dans les deux marchés principaux, que sont le marché central et celui du Campesino. C’est dans une ruelle de ce dernier que je vais trouver un magasin pouvant réparer, ou plutôt échanger l’écran de mon ordinateur portable quasi-neuf. En effet, il y a de cela deux mois, j’avais du racheter un ordinateur après que le premier, mon fidèle compagnon de voyage, est rendu l’âme. Celui-ci avait pourtant résisté à de nombreuses situations peu propice à son maintien en bonne condition: grand froid, fortes chaleurs, dans des véhicules entre autre, poussières, très fort taux d’humidité, chocs dans les transports… M’en servant quotidiennement pour pouvoir communiquer facilement avec les proches, trier les photos, écrire, et mettre à jour mon blog, j’avais décidé de le remplacer illico presto. Muni d’un tout nouvel ordinateur portable, je vais faire un mauvais geste au retour de la boucle Sud de Salta. Au camping municipal de la ville, j’ai voulu utilisé, autant que possible, le réseau internet sans fil, en Wifi, qui était proposé. Tardivement dans la nuit, je me suis assoupi, près de mon ordinateur, en attendant la fin du téléchargement de photos. Je me suis même totalement endormi. Probablement lors de cauchemars, j’ai bougé de nombreuses fois brusquement, venant à deux reprises donner des coups violents sur l’écran LCD très fragile. Il n’a pas tenu le coup. Impossible de lire ou de voir quelque chose sur cet écran. Le fait de pouvoir le remplacer, malgré le coût exorbitant pour le niveau de vie du pays, est important pour moi. Cela devrait pouvoir me sauver la mise pour conserver cette communication indispensable avec les personnes chères au court des prochains mois. Trois jours après avoir trouvé le réparateur, temps de livraison inclus de l’écran LCD, depuis le Chili, je vais récupérer un ordinateur fonctionnel!
Pendant ce temps, je vais vaquer à d’autres activités. Je vais par exemple me rendre, seulement avec Eliott, dans une fabrique de chapeaux. Le port en est une vraie institution en Bolivie. Ils ont tous des caractéristiques précises, des significations apportées par la façon de les porter qui peut entre-autre vous donner le statut marital de la personne. En pénétrant dans les locaux, en tôle, de cette fabrique, j’ai l’impression d’être propulsé 100 ans en arrière. J’ai la sensation d’être un figurant d’un film en noir et blanc avec des anciennes machines vétustes, des procédés de fabrication digne d’un temps révolu, des personnes en tenues totalement dépassées de mode, et chiffonnées. D’ailleurs c’est un point très intéressant de ce pays. C’est ce qui fait qu’il est totalement dépaysant de le visiter. La modernité arrive à grands pas mais les anciennes traditions sont encore très visibles dans la vie de tous les jours, dans les rues de chaque ville, même les plus grandes du pays. Les femmes portent des jupes amples, les chaussettes remontés et le chapeau sur la tête. Ces mêmes femmes vielles, ou parfois très jeunes, continuent de porter des nattes tressées très longues, accompagnées en bout de petits pompons. Elles portent en bandoulière leur enfant, ou toutes sortes de marchandises, dans un tissu très coloré accroché autour de leur cou. Avec Eliott, nous passerons donc un moment très complice dans cette usine. Nous nous amusons à prendre des photos originales, et à jouer avec des chapeaux de toute sorte. Comme dans toute relation, il est parfois agréable d’avoir un peu d’exclusivité pour approfondir un échange à deux et profiter obligatoirement différemment. J’aime beaucoup ce partage avec un enfant, où le jeu est un art de base.
Sortant des locaux de la fabrique, nous nous retrouvons de nouveau projetés dans notre monde moderne actuel. En effet, ici, le pays est longtemps resté en retrait par rapport à la vie moderne dans un style occidental. Mais la Bolivie rattrape rapidement son retard. Les traditions persistent mais, comme partout, chaque jeune veut son téléphone portable, les habits sont de plus en plus stéréotypés et la technologie électronique a envahie la rue. Les boliviens sont très calés en matière d’hygiène, principalement corporel et vestimentaire. Malheureusement ce n’est pas encore vraiment le cas pour la qualité de l’eau et la conservation des produits alimentaires, où ils ne sont pas irréprochables. En mangeant local, il y a toujours un risque qu’une bactérie soit présente dans la nourriture. Elle provient souvent de l’eau avec laquelle est préparée la nourriture et nettoyé la vaisselle. Elle peut alors facilement affectée notre organisme peu habitué. Cela peut très vite se transformer en diahrée, voir en «tourista»!
Je ne sais pas exactement ce qui va atteindre l’Akilifamily et si cela à un rapport ou non avec une indigestion alimentaire. Eliott sera le premier toucher. Il sera suivi de Mayline, et surtout de Fabrice qui va rester cloué au lit pendant plus de 24h00. Il sera sans forces, tout pâle, ayant mal partout et n’ayant pas pu garder ce qu’il ingurgitera. Il a hésité à me demander de prendre une chambre d’hôtel. Il n’est en effet jamais facile d’accueillir quelqu’un chez soi quand on se retrouve dans de telles situations. On n’a pas vraiment envie que les autres nous voient comme cela… Mais ce voyage se devait d’être une intégration totale dans la famille, dans leur environnement habituel avec tout ce que cela implique. Pour le meilleur… et pour le «pire»!
Nous venons de vivre une expérience très forte remplie d’émotions, de moments de vie intenses, sans artifice. Je dois pourtant reprendre ma route, partir à la découverte de contrées que j’ai toujours voulu découvrir, avec un mode de voyage différent mais que j’affectionne aussi tout particulièrement; le sac-à-dos!
En ce vendredi 27 Septembre, j’achète donc mon billet en direction de La Paz. Les derniers moments avec l’Akilifamily seront du même acabit que ceux passés pendant les derniers 40 jours; très agréables et en toute simplicité! Nous passerons la fin d’après-midi à jouer avec Mayline et Eliott dans un petit parc sur une place en ville. Céline est alors elle aussi proche d’être malade ayant un mal de ventre qui la harcèle depuis plusieurs jours. Mais cela va finalement passer.
Je ne sais pas si c’est que mes antis-corps lutter contre le mal qui venait de ronger toute la famille mais je vais me sentir un peu faible, avec un ballonnement au ventre. Mais il s’agit, sûrement et plutôt, d’un gros pincement au cœur qui s’exprime de façon inhabituelle. En effet, cela me fait une drôle d’impression de les quitter après cette expérience inoubliable ensemble.
Ils me conduisent à la gare routière en fin d’après-midi. Les accolades avec toute la famille mêleront beaucoup d’émotions, de mélancolie, et un mélange étrange de sentiments qui se battent dans mon esprit. Céline a son tempérament, mais elle est aussi une femme d’un grand cœur et très sensible. Elle sera la plus démonstrative lors de ces aux-revoir. L’émotion devient alors encore plus forte pour ma part aussi.
Je rentre seul dans l’enceinte de la gare routière qui n’est pas accessible aux accompagnants. Quand ils me font de grands signes, au loin, derrière un grillage, alors que je m’apprête à monter dans le bus, les larmes coulent sur mon visage. C’est un mélange de joie, de partage, de tristesse, d’échanges intenses et de liens forts créés à jamais. Je reprends les routes seules! Mais je sais que nos chemins se recroiseront avec l’Akilifamily. En tout cas le souhait que cela se réalise est total! Il ne reste plus qu’à savoir quand? Au vu de nos parcours prévisionnels respectifs, ça ne sera pas pour demain…
Mais avant cela, nous allons tout de même passer plus de 36h00 dans la ville d’Uyuni afin d’effectuer des tâches nécessaires, quand on retrouve un peu «la civilisation moderne» et toutes ces commodités. Nous faisons les courses sur le marché, prenons notre douche dans la «spacieuse» salle de bain de «Gros Pépère», avant de remplir de nouveau les réservoirs à un robinet dans une station-service. Sylvie et Céline amènent plusieurs kilogrammes de linge dans une laverie. La connexion Wifi d’un hôtel, que nous captons depuis la rue, est importante! C’est surtout le cas pour l’Akilifamily qui veut se faire envoyer, depuis la France, des pièces de rechange pour le camping-car. Ils aimeraient aussi recevoir des affaires pour préparer leur voyage en sac-à-dos. Je l’avais un peu évoqué dans mon récit de notre aventure dans le Sud Lipez. Ils ont vendus le véhicule à une autre famille de voyageurs français, qui en prennent possession dans un peu plus de 2 mois. Cette vente leur permet de prolonger leur voyage avant normalement de se rendre au Canada, pour un visa vacance-travail après avoir effectué toutes les démarches pour l’obtenir. Ils doivent donc pour cela et, avant tout pour continuer un petit peu plus leur aventure, vendre un véhicule roulant et en bon état. De nombreux petits travaux et réparations s’imposent donc, afin d’être sûr, moralement parlant, de respecter l’engagement pris entre les deux parties.
Le deuxième jour, un camping-car de vieilles connaissances nous a rejoints. Ils finissent leur séjour dans le Salar qu’ils ont vraiment apprécié. Je vais passer une soirée agréable en bonne compagnie. Certaines discordances irréversibles se font sentir. Certaines problématiques d’adultes font surface. L’alcool aide encore un peu plus à l’inhibition et délie des langues. Il n’y a cependant rien que je ne peux ajouter personnellement. Je ne suis pas impliqué dans ces problèmes sous-jacents, présents même au sein du groupe très fermé des voyageurs au long cours.
Une chose dont je suis persuadé, le voyage ne doit pas être une échappatoire, une fuite par rapport à des soucis dans notre vie antérieure. Le voyage doit être un choix de vie pour un moment donné, le fait d’assouvir une soif de connaissances, de découvertes de l’autre, de notre monde, de cultures différentes, et un peu de soi… Le voyage permet de réaliser de nombreux projets, des rêves, de réaliser des choses qui pourraient nous paraître inaccessibles dans notre quotidien d’une vie bien rangée. Il doit nous permettre un détachement aussi grand que possible par rapport au matérialisme que la société capitaliste nous impose. Le voyage doit nous ouvrir les yeux sur la chance que nous avons de vivre dans un pays où nous sommes libres de faire ce que nous voulons, dans le respect des lois, de dire ce que nous pensons! Si le voyage peut permettre de temporairement trouver un équilibre, il peut être très instable si la fuite provoque un problème personnel non résolu. Au retour, il ne pourra que s’amplifier avec le dur retour à la réalité de la vie routinière, quittée il y a quelques années, où le travail occupe une place prépondérante, et n’est généralement pas que des activités pour le plaisir. A cet instant, ces questions ne me concernent pas!
Le retour est, et doit être, désiré! Cela me donnera la chance de construire, de vivre des moments forts avec des personnes que je connais très bien et qui ont une place primordiale à mes côtés.
Mais là n’est pas la question à ce moment. C’est avec de très bons amis que je m’apprête à découvrir un lieu sensationnel. Amis, certes rencontrés sur la route, mais qui sont devenus des personnes d’une grande importance à mes yeux, une famille d’adoption que je porterai à jamais dans mon cœur.
Le lendemain matin, mardi 17 Septembre, nous faisons les derniers achats au marché. Ensuite nous nous rendons dans une sorte de garage, à la sortie de la ville, pour y effectuer une fumigation. Il s’agit de laver le véhicule, tout spécialement sous le châssis, avant d’y appliquer un mélange fait d’huile, de pétrole, et d’autres substances qui permettent d’éviter que le sel vienne se coller, s’agglomérer, et créer des problèmes de corrosion! Le but est aussi d’éviter le blocage d’éléments principaux, tels que les freins, les roues, la direction… Après une vingtaine de minutes, nous sommes fin prêt pour le départ vers ce lieu décrit par beaucoup comme inoubliable et une des endroits les plus extraordinaires qu’ils n’aient jamais vus.
Nous entamons notre approche part 20 kilomètres de pistes menant à l’entrée à proprement dite du Salar de Uyuni. Nous voici finalement à rouler sur cette couche immaculée blanche de sel. Nous nous arrêtons après seulement quelques centaines de mètres auprès d’une des seules exploitations de sel du Salar. Cette dernière ne s’étend que sur quelques centaines de mètres carrés alors que le Salar en fait des centaines de milliers. Des millions de kilogrammes en sont pourtant extraits, chaque année, pour une utilisation industrielle, ou pour la cuisine de particuliers. Nous déjeunons sur place avant de se promener entres les tas de sel répartis géométriquement de façon ordonnée. Nous pouvons ensuite admirer la récolte du sel par des boliviens pelletant à un rythme régulier et rapide. Le reflet du soleil est fort sur cette surface claire. Il l’est encore plus lorsqu’une fine couche d’eau remplace le sel qui vient d’être récolté en surface.
Revenant aux camions, qui se comportent parfaitement sur le sel, nous décidons de dormir de l’autre côté de l’île. Nous nous y garons après avoir rallumés les moteurs seulement pour quelques centaines de mètres afin de pouvoir admirer le coucher du soleil. Ce dernier est magnifique. Nous avons des ombres interminables qui s’étendent sur des dizaines et dizaines de mètres devant nous. Le ciel prend des couleurs qui semblent à peine réelles.
Le lendemain, pendant que les enfants font leurs devoirs, je vais m’amuser à écrire avec de la terre sur ce tableau parfaitement blanc. L’effet est sympa! Je demande à Fabrice et Sébastien d’immortaliser ce moment malgré la présence d’un contre-jour assez fort! Ensuite, nous tentons de réaliser des photos originales avec un effet d’optique que l’on peut ici pousser à son extrême. Nous allons bien rigoler du fait que certaines photos ne pourront qu’être censurées et restées dans un cercle très privé. Nous allons passer plus de 2h00 à jouer avec tout ce que nous avons à notre disposition. Il n’est pourtant pas simple de réaliser physiquement ce que nous avions imaginé sur le papier. Nous allons être plus ou moins satisfaits des résultats finaux. Mais nous n’avons pas dit notre dernier mot.
A peine avons-nous finis de déjeuner que le gardien de l’île vient nous rendre visite. Il nous demande de quitter les lieux car nous semblons gêner la vue des touristes qui sont venus se plaindre. Malgré un peu de réticence, nous comprenons le point de vue de tous. Nous ne savions pas si nous voulions bouger dès aujourd’hui, ou non! D’autres personnes ont, cette fois-ci, pris la décision à notre place.
Nous allons monter une nouvelle fois sur le toit du camion «Cfoussa», comme la veille, pour y admirer, depuis sa hauteur, le paysage somptueux. Nous allons aussi réaliser de très belles vidéos depuis les véhicules mais aussi depuis le sol, avec la Gopro de Sébastien. Il va la placer dans différentes positions pendant que les véhicules la surplomberont, lors de plusieurs passages. Nous prendrons part au spectacle en faisant de grandes salutations depuis le toit, ou sur la carrosserie qui surplombe les roues avant. Encore de très bons moments de passés dans cette immensité pure.
Arrivés aux abords de cette deuxième île, nous sommes définitivement seul au monde! Enfin presque! Vous allez vite comprendre pourquoi. Quoi qu’il en soit, nous installons le campement provisoire à quelques encablures de ces terres. Nous voulons éviter les derniers mètres de la circonférence proches des îles très propices aux enlisements des véhicules.
Nous partons nous promener avec Mathéo et Eliott, en vélo et en courant, pour découvrir une toute petite île. Elle se trouve seulement à quelques kilomètres de là où nous venons de nous stationner. Arrivés au sommet du petit îlot, nous apercevons le premier et seul véhicule de l’après-midi, autre que les nôtres, qui se dirige vers «Gros Pépère» et «Cfoussa». Revenant vers le campement, nous faisons la connaissance d’un couple franco-italien de retraités qui sont heureux de rencontrer d’autres voyageurs! Ils semblent en pleine forme, principalement la mamie, hyperactive et joyeuse. En sa compagnie, l’ambiance risque de ne pas être triste…
Avec Mathéo et Eliott, nous nous n’attardons pourtant pas trop à cette heure. Nous voulons ramener du bois de cactus mort pour enflammer la nuit, avec un magnifique feu dans ces paysages grandioses. Nous partons donc avec 2 machettes. Nous trouverons assez rapidement notre pactole pour la soirée. En effet, plusieurs cactus sont en train de mourir et sont totalement desséchés en bas du mont qui forme l’île. Nous attaquons alors un travail de forçat avec des outils plus ou moins appropriés. Au final, nous allons faire tomber tellement de troncs, que nous allons demander de l’aide grâce à l’intermédiaire des talkies walkies appartenant aux Syséléma. Fabrice nous rejoints prudemment au bord de l’île avec le camping-car. Nous effectuons alors le transport, sur les deux kilomètres qui nous séparent du campement, en entreposant le bois dans le véhicule.
La nuit tombe encore très vite. Le coucher de soleil révélera des couleurs similaires à la veille, flamboyantes! Nous prolongeons le spectacle par un feu de bois crépitant qui embrase la nuit noire. Le bois brûle parfaitement. Les appels d’air, dus aux trous spécifiques du bois de cactus, créent des effets vortex majestueux. La lune, presque pleine, qui c’était levée juste avant le coucher du soleil, complète un tableau idyllique. Alors que le feu consume les dernières braises, le froid de la nuit de l’altiplano et le vent, qui s’est levé, sont saisissants. Nous rentrons pour nous mettre à l’abri.
Pour parfaire ces instants inoubliables proposaient par la nature, nous allons passer une soirée où l’aspect humain, l’échange et la communication dans la bonne humeur, embelliront encore un peu plus une journée au paradis. Nous avons décidés que cette soirée serait une «crêpes-party»! Nous nous réunissons tous dans le camping-car de l’Akilifamily. La soirée sera animée et bien arrosée. Nous accompagnons la dégustation de crêpes avec de la Kachacha à la cannelle (alcool brésilien), du rhum et du vin rouge. L’ambiance est bonne-enfant, les discussions peuvent être sérieuses mais elles virent souvent au fou-rire! Chacun ira se coucher avec un degré d’alcool différent. Mais tous, nous avons le sentiment d’avoir passés de très bons moments.
Le coucher de soleil sera pour la troisième soirée de suite incroyable. Le lever de lune, une fois la nuit tombée, restera comme un des plus beaux que je n’ai jamais vu de toute ma vie. La lune énorme et orangée apparaît à l’horizon avant de s’élancer vers son zénith! Elle brillera quasiment toute la nuit dans le ciel.
Le lendemain matin, le soleil est de nouveau au rendez-vous. Tout le monde est en pleine forme. Très vite jaillit l’idée de partager un moment sportif ensemble. Nous organisons donc un match de football entre les adultes et les enfants. En tant qu’ «adolescent un peu attardé», selon les dires de certains de mes compères, ou d’adulte ayant gardé son âme d’enfants, je rejoins les rangs des jeunes. Le résultat final était évident, nous gagnions! Mais là n’est pas l’essentiel. Ce dernier réside une nouvelle fois dans la prise de plaisir.
L’effet de groupe prendra fin sur cette belle touche sportive. Chacun va alors reprendre sa route. Nous restons seuls avec les Syséléma. Après un nouveau bon déjeuner partagé, nous allons refaire des prises de photos sympas. Le mode effet d’optique, poussé à son extrême, peut jouer des tours à n’importe qui. C’est le cas car nous regarderons ensuite une photo ne possédant que seulement deux dimensions, et non trois, ou quatre (avec l’espace temporel).
Ça sera malheureusement, les derniers instants tous ensemble après presque un mois de voyage très fort, passé en commun. Nous nous n’étions pas vraiment préparés à ces aux-revoir. La bonne ambiance, le partage, l’entre-aide, des doutes énormes, des remises en causes en raison de problèmes mécaniques, ont ponctués ce périple aux nombreux rebondissements. Ceux sont devenus de vrais amis. L’émotion qui va s’emparer de nos sentiments s’en ressent aux moments des dernières accolades. La sensibilité de chacun s’exprime différemment.
Ils restent un peu plus dans le Salar tandis que nous allons regagner la ville d’Uyuni.
Avec Mayline, Eliott, et Fabrice, nous allons passer un très bon moment dans le cimetière des trains à la périphérie de la ville. Pour les enfants, c’est mieux que Disneyland! Ils vont s’amuser comme des fous dans les wagons, sur les locomotives, dans ces vestiges d’un autre temps. Les tas de ferrailles que nous pouvons observer au début, avec seulement de vieux wagons vétustes, vont se transformer en de superbes reliques. Des vielles locomotives se tiennent bout à bout, créant ainsi un vrai musée à ciel ouvert. La couleur rouille prédominante dans ce cimetière ferroviaire prendra toute sa splendeur avec le soleil couchant. Ce dernier va enflammer un ciel contenant quelques nuages qui rougiront devant la beauté de cet astre majeur, centre de notre univers.
Le lendemain, nous retournons faire nettoyer le véhicule après ce passage dans le Salar! Puis nous prenons la route. Fabrice est toujours un peu sous-tension. Il n’a, en effet, pas un bon souvenir de la route qui rejoint Potosi, et surtout de ces ruelles incroyablement pentues. «Gros Pépère» ayant été touché durement, étant toujours en période de convalescence, il a peur de lui en demander un peu trop. Il a peur que ce dernier ne puisse pas soutenir les efforts qui lui seront demandés. Au contraire de prévisions pessimistes, tout va se passer à merveille. La route est parsemée de beaux sites principalement naturels. Nous ne ferons que les admirer depuis la fenêtre du véhicule sauf pour certains où nous y ferons un arrêt. Nous allons, par exemple, visiter le village de Pucalayo, pour y découvrir sa mine et normalement son centre de tissage de laine d’Alpaga. Nous sommes le week-end. La ville est quasi-déserte, tout est fermé. Mais pénétrer dans ce village semblant d’un autre temps restera tout de même un bon souvenir et une belle petite hâte sur les routes menant à Potosi. Les bonnes nouvelles s’enchainent. Le «bloqueo» (paralysie de la route part des manifestants), organisé sur cette route depuis plusieurs semaines, est bien levé pour le week-end. Nous pouvons donc passer par la route habituelle, sans devoir contourner ce blocage par un long détour sur une route à peine carrossable. L’espoir d’atteindre la ville de Sucré, sans encombre, est maintenant grand! Une montée interminable prise à l’allée par l’Akilifamily se transforme en une descente beaucoup plus abordable. Vers 15h00, nous atteignons la ville de Sucré. Nous rejoignons le garage, où ils s’apprêtent à faire les réparations et remise en l’état du véhicule. Le propriétaire et gérant n’est pas là pour quelques jours. Mais un de ces employés va venir nous ouvrir la porte et nous remettre la clé pour que nous puissions rentrer et sortir à notre guise.
Pendant ce temps, je vais vaquer à d’autres activités. Je vais par exemple me rendre, seulement avec Eliott, dans une fabrique de chapeaux. Le port en est une vraie institution en Bolivie. Ils ont tous des caractéristiques précises, des significations apportées par la façon de les porter qui peut entre-autre vous donner le statut marital de la personne. En pénétrant dans les locaux, en tôle, de cette fabrique, j’ai l’impression d’être propulsé 100 ans en arrière. J’ai la sensation d’être un figurant d’un film en noir et blanc avec des anciennes machines vétustes, des procédés de fabrication digne d’un temps révolu, des personnes en tenues totalement dépassées de mode, et chiffonnées. D’ailleurs c’est un point très intéressant de ce pays. C’est ce qui fait qu’il est totalement dépaysant de le visiter. La modernité arrive à grands pas mais les anciennes traditions sont encore très visibles dans la vie de tous les jours, dans les rues de chaque ville, même les plus grandes du pays. Les femmes portent des jupes amples, les chaussettes remontés et le chapeau sur la tête. Ces mêmes femmes vielles, ou parfois très jeunes, continuent de porter des nattes tressées très longues, accompagnées en bout de petits pompons. Elles portent en bandoulière leur enfant, ou toutes sortes de marchandises, dans un tissu très coloré accroché autour de leur cou. Avec Eliott, nous passerons donc un moment très complice dans cette usine. Nous nous amusons à prendre des photos originales, et à jouer avec des chapeaux de toute sorte. Comme dans toute relation, il est parfois agréable d’avoir un peu d’exclusivité pour approfondir un échange à deux et profiter obligatoirement différemment. J’aime beaucoup ce partage avec un enfant, où le jeu est un art de base.
Sortant des locaux de la fabrique, nous nous retrouvons de nouveau projetés dans notre monde moderne actuel. En effet, ici, le pays est longtemps resté en retrait par rapport à la vie moderne dans un style occidental. Mais la Bolivie rattrape rapidement son retard. Les traditions persistent mais, comme partout, chaque jeune veut son téléphone portable, les habits sont de plus en plus stéréotypés et la technologie électronique a envahie la rue. Les boliviens sont très calés en matière d’hygiène, principalement corporel et vestimentaire. Malheureusement ce n’est pas encore vraiment le cas pour la qualité de l’eau et la conservation des produits alimentaires, où ils ne sont pas irréprochables. En mangeant local, il y a toujours un risque qu’une bactérie soit présente dans la nourriture. Elle provient souvent de l’eau avec laquelle est préparée la nourriture et nettoyé la vaisselle. Elle peut alors facilement affectée notre organisme peu habitué. Cela peut très vite se transformer en diahrée, voir en «tourista»!
Je ne sais pas exactement ce qui va atteindre l’Akilifamily et si cela à un rapport ou non avec une indigestion alimentaire. Eliott sera le premier toucher. Il sera suivi de Mayline, et surtout de Fabrice qui va rester cloué au lit pendant plus de 24h00. Il sera sans forces, tout pâle, ayant mal partout et n’ayant pas pu garder ce qu’il ingurgitera. Il a hésité à me demander de prendre une chambre d’hôtel. Il n’est en effet jamais facile d’accueillir quelqu’un chez soi quand on se retrouve dans de telles situations. On n’a pas vraiment envie que les autres nous voient comme cela… Mais ce voyage se devait d’être une intégration totale dans la famille, dans leur environnement habituel avec tout ce que cela implique. Pour le meilleur… et pour le «pire»!
Nous venons de vivre une expérience très forte remplie d’émotions, de moments de vie intenses, sans artifice. Je dois pourtant reprendre ma route, partir à la découverte de contrées que j’ai toujours voulu découvrir, avec un mode de voyage différent mais que j’affectionne aussi tout particulièrement; le sac-à-dos!
En ce vendredi 27 Septembre, j’achète donc mon billet en direction de La Paz. Les derniers moments avec l’Akilifamily seront du même acabit que ceux passés pendant les derniers 40 jours; très agréables et en toute simplicité! Nous passerons la fin d’après-midi à jouer avec Mayline et Eliott dans un petit parc sur une place en ville. Céline est alors elle aussi proche d’être malade ayant un mal de ventre qui la harcèle depuis plusieurs jours. Mais cela va finalement passer.
Je ne sais pas si c’est que mes antis-corps lutter contre le mal qui venait de ronger toute la famille mais je vais me sentir un peu faible, avec un ballonnement au ventre. Mais il s’agit, sûrement et plutôt, d’un gros pincement au cœur qui s’exprime de façon inhabituelle. En effet, cela me fait une drôle d’impression de les quitter après cette expérience inoubliable ensemble.
Ils me conduisent à la gare routière en fin d’après-midi. Les accolades avec toute la famille mêleront beaucoup d’émotions, de mélancolie, et un mélange étrange de sentiments qui se battent dans mon esprit. Céline a son tempérament, mais elle est aussi une femme d’un grand cœur et très sensible. Elle sera la plus démonstrative lors de ces aux-revoir. L’émotion devient alors encore plus forte pour ma part aussi.
Je rentre seul dans l’enceinte de la gare routière qui n’est pas accessible aux accompagnants. Quand ils me font de grands signes, au loin, derrière un grillage, alors que je m’apprête à monter dans le bus, les larmes coulent sur mon visage. C’est un mélange de joie, de partage, de tristesse, d’échanges intenses et de liens forts créés à jamais. Je reprends les routes seules! Mais je sais que nos chemins se recroiseront avec l’Akilifamily. En tout cas le souhait que cela se réalise est total! Il ne reste plus qu’à savoir quand? Au vu de nos parcours prévisionnels respectifs, ça ne sera pas pour demain…