Après plusieurs heures d’avion, je vais passer d’Ouest en Est, sur le continent africain. J’atteins une destination dont j’ai toujours rêvé de fouler le sol. Ce pays possède une nature impossible à dompter. Il est connu pour son époustouflante beauté qui nous renvoie aux sources de la vie, aux origines de l’homme! Ces paysages de montagnes et de volcans jaillis des entrailles de la terre, d’immenses espaces cuits par le soleil, des savanes à l’infini, où sont parsemés des acacias et des baobabs, de grands lacs, des animaux sauvages et libres, en font un lieu d’exception, sur un territoire presque deux fois plus grand que la France. Certains possèdent, peut-être, déjà une idée concernant le pays dont je veux parler? Des chiffres plus terre à terre, sûrement plus proches de la réalité du peuple y vivant, pourront sinon vous donner des informations complémentaires précieuses. Il y a environ 48 millions d’habitants. Le taux de fécondité est de 4,5 enfants par femme. L’espérance de vie est de 58,9 ans (alors qu’il est de plus de 80 ans en France). Le taux d’analphabétisme est estimé à 27% et l’indice de développement humain est de 0,476 (soit le 152ième rang mondial sur 187). Les langues couramment parlés sont le kiswahili et l’Anglais. Pour information, le kiswahili est né au début du Xe siècle, d’un mélange entre la langue bantoue, dont il a gardé la structure et de nombreux mots arabes, pratiqués par les navigateurs et négociants. Ces derniers l’ont aussi propagé à l’intérieur des terres en faisant une des langues les plus parlés en Afrique. Mais ce pays, comme beaucoup de ces voisins, possède de multiples dialectes, de langues couramment encore parlées et spécifiques à différentes régions.
Si vous n’avez toujours aucune idée concernant cette destination, il n’y a pas grand-chose que je puisse faire, si ce n’est directement vous révélez la réponse. Allez, un dernier petit indice, j’atterris dans la capitale économique, dénommée Dar-Es-Salam. Non, toujours aucune idée? Aucune suggestion que vous pourriez me faire à l’oreille, alors que les camarades planchent encore sur la question?
En effet, il s’agit de la Tanzanie dont la réputation n’est plus à faire. Je désire expérimenter personnellement ce pays de diverses façons. Après avoir atterris, obtenu mon visa, je décide de passer la nuit à l’aéroport, en attendant ma prochaine connexion pour un endroit unique en son genre… Après avoir regardé les résumés des matches de la coupe du monde sur un écran plat, je m’allonge sur mon matelas en mousse derrière un comptoir. Je dors pendant plus de 5h00. Je me réveille alors que l’aéroport commence à redevenir fortement fréquenté. Je vais passer mon temps entre discussions avec des voyageurs et travaille sur mon ordinateur. Je ne pars qu’un début d’après-midi. Mais comme très souvent, je ne vois pas le temps qui passe. Je n’ai pas eu l’occasion de faire un dixième de ce que j’aurais voulu.Je ne reste pas sur la partie continentale de ce pays. Mais je m’envole pour une île qui a toujours eu pour moi une connotation de paradis terrestre, mêlant plages de rêves mais pas seulement. Elle est aussi parfumée aux épices et tournée vers la culture orientale. L’archipel de Zanzibar comprend plus de 50 îles, nichant dans les eaux tropicales de l’océan indien, à 36km à l’est des côtes africaines et 6 degrés sud de l’équateur. Les îles majeures sont Pemba, Tumbatu et Unguja, cette dernière étant communément appelé Zanzibar. J’atterris donc à Zanzibar, après un vol de 45 minutes m’ayant permis d’admirer de magnifiques côtes de petits îlots, les récifs coralliens les entourant et l’eau bleue turquoise. Cette île est un vrai petit bijoux à commencer par sa population de plus de 1,3 millions d’habitants mêlant africains, arabes, perses, indiens et quelques européens.
En effet, à travers les derniers centenaires, Zanzibar a été visité et occupé par des explorateurs, des commerçants et des personnes voulant se sédentariser. C’est pour cette raison que Zanzibar est devenu un vrai «melting-pot», mélangeant toutes ces populations, laissant certaines bases de leur culture, de leurs traditions, de leur nourriture. L’introduction de nouvelles plantations, le trafic d’esclaves a vu Zanzibar se développer pendant des années comme un centre stratégique d’échange entre l’Afrique et les autres continents. En Décembre 1963, Zanzibar devient une nation indépendante. Mais une révolution se forme le mois suivant et destitue le gouvernement. Le 26 Avril 1964, un accord de confédération est trouvé. La république unie de Tanzanie est créée. Elle réunit Tanganyika (partie continentale du pays) et l’archipel de Zanzibar. Le nom de la Tanzanie («Tanzania» en anglais), provient de la combinaison de ces 2 noms et du nom grec «Azania» qui désignait la côte Est africaine (TANganyika + ZANzibar + azanIA).
Je vais rester la plupart du temps à Stone Town qui est le plus gros centre urbain de l’île. J’y ai trouvé une personne pouvant m’accueillir en Couchsurfing. Il s’agit d’une femme, d’origine hongroise, vivant sur place depuis des mois. Anita est très active sur le site, elle a beaucoup d’amis. Je me dis que cela peut être alors très intéressant de partager l’expérience d’un expatrié européen dans ce pays. Arrivée dans le centre-ville, j’essaie de la contacter sur son téléphone portable comme nous l’avions convenu. Mais ce dernier n’est pas allumé. Je tombe directement sur son répondeur. Heureusement qu’elle m’a donné de nombreuses informations concernant son adresse et le lieu où elle pourrait se trouver dans la journée. Je vais finalement la trouver dans un ancien château fortifié, où se trouvent l’office de tourisme et une scène pour diverses manifestations. Je ne l’avais pas planifié mais j’arrive en plein milieu de la semaine du festival international du film de Zanzibar. Lors de cette dernière, il y a de nombreuses projections de film, principalement africain et de multiples autres manifestations culturelles autour de cet événement. Je vais en profiter à de nombreuses reprises, en commençant dès le soir même. En attendant, elle m’accompagne chez elle pour que j’y dépose mes affaires. Elle habite dans ce vrai labyrinthe de rue étroite du centre-ville qui fait partie de la réputation de Stone Town. Nous prenons un peu le temps de discuter. Je suis surpris par certains de ces points de vue et de sous-entendus qu’elle immisce dans la conversation. Mais je ne me permets pas de juger car ces propos ne sont pas clairs, je ne connais pas encore la personne.
La nuit est tombée. Les projections de films vont commencer dans moins d’une heure. Nous allons avant nous rendre dans le jardin public de Forodhani, une des places principales de la ville, avec vue sur mer, où chaque soir prend place un marché de nuit. De nombreux stands, proposant différents plats typiques de l’île, étalent leurs mets. Il y a, par exemple, les barbecues avec quelques viandes et surtout des fruits de mer comme les langoustes, crevettes et morceaux de poissons. D’autres locaux proposent un jus de sucre de canne ou autres fruits frais, des samossas et autres spécialités fris à base de farine. Pour cette première soirée, Anita veut me faire découvrir la soupe locale, qui est un bouillon, dans laquelle ils incorporent des légumes, de l’œuf, des morceaux de viande et de petits morceaux fris croquant (que l’on pourrait assimiler à nos croûtons en France). Cette soupe est intéressante et, quoi qu’il en soit, elle est très complète nutritivement parlant. Nous assistons ensuite à des projections de courts et longs métrages très intéressants, concernant la vie en Afrique. Le cadre est aussi très sympa car il s’agit d’un théâtre à ciel ouvert dans l’enceinte de l’ancien fort. La soirée ne va pas se terminer sur ces visionnages. Il y a en effet ensuite des représentations théâtrales, et un concert avec plusieurs groupes de musique locale et des pays voisins. Cet événement me permet d’avoir un très bel aperçu de la culture du pays… L’introduction à la vie en Tanzanie n’aurait pas pu être meilleure. Après une nuit très courte dans l’aéroport, un trajet très long, et une journée interminable, je m’écroule de fatigue dans mon lit. Je m’endors en moins de temps qu’il me faut pour l’écrire, ou même le dire!
Le lendemain matin, je fais la connaissance d’Alexandra, dit Allie, américaine. Elle vient de finir un stage, de 6 mois, en Afrique du Sud et elle a décidé de visiter quelques autres pays de ce continent. Anita est aussi son hôte depuis quelques jours. Nous nous entendons tout de suite très bien. Nous décidons d’aller explorer ensemble la ville. La visite de Stone Town de ces ruelles, de ces marchés va me permettre de me plonger rapidement dans ce mixte de cultures à travers les vêtements, l’architecture, les traditions, la musique, la cuisine. Stone Town étant la plus importante base de ce genre avec ces bâtiments en pierre de corail, ces portes en bois au design magnifique, elle a été désignée comme un site d’héritage mondial par l’UNESCO. Nous nous promenons sans itinéraire précis, suivant les ruelles tortueuses débouchant parfois sur une grande place, un marché ou autre attraction de cette ville. Après plus de 2h00 de marche, nous nous arrêtons dans un café pour siroter un jus de fruits frais. Allie a ensuite quelques obligations. Nous décidons donc de nous séparer avant de nous retrouver au milieu de l’après-midi. Pour ma part, j’ai envie de continuer à explorer la ville. Je prends le temps devant les splendides portes en bois finement sculptées. Je vais passer aussi à côtés de quelques-unes des 50 mosquées, de ces deux cathédrales et de quelques temples indiens. Quand je peux, je pénètre dans ces derniers pour y admirer les éléments de décoration d’intérieur totalement différents d’un lieu religieux à un autre. Je visite aussi un musée et découvrir quelques splendides demeures…
En milieu d’après-midi, comme prévu je retrouve Allie. Un de ces amis, qu’elle a rencontré quelques jours auparavant; Saïd se joint à nous! Il vit à Oman mais il est originaire de Pemba. Il est donc venu avec sa famille passé quelques jours sur ces îles natales. Le séjour en famille est sympathique, mais je crois comprendre très vite, qu’il a envie de faire la fête et passer un bon moment sur ces îles. Enfin, une troisième personne nous rejoints. Il s’agit de Tim, un Sud-Africain blanc, qui vit depuis son enfance à Dar-Es-Salaam. Il est pilote pour une compagnie aérienne de petits avions faisant le trajet entre la capitale économique et Zanzibar. Allie l’a rencontré lors de son arrivée sur place. Nous formons un groupe multiculturel très intéressant. Nous décidons d’aller boire un verre dans un des hôtels chics de la ville avec vue sur la mer. Nous voulions ensuite trouver une petite plage tranquille à proximité de Stone Town. Tim nous dit que nous devrions trouver notre bonheur près de l’hôtel où il est descendu lors de son séjour. Nous y passons un super début de soirée, entre plage de sable blanc, tranquillité, car nous sommes les seuls sur place, piscine débordante et magnifique coucher de soleil! Nous allons boire une quantité de bières impressionnantes et dévorer plusieurs pizzas; repas que je n’ai pas eu l’occasion de manger depuis longtemps. La nuit tombe très vite. Nous assistons, lors des dernières lueurs du jour, à un spectacle impressionnant. Des centaines et centaines de chauves-souris viennent dans notre direction, depuis une petite île au large de Zanzibar. Elles se suivent et forment une voie aérienne continue. Elles viennent, pour la nuit, chasser à Zanzibar où les insectes sont en plus grands nombres avant de regagner leur havre de paix pour une prochaine journée de farniente, la tête à l’envers dans de grands arbres. Nous aussi, en cette soirée, nous allons être des animaux nocturnes. Ils ont tous envie de faire la fête. Nous retournons donc en ville et essayons de trouver un lieu animé. En cette soirée, rien d’exceptionnel n’a lieu. Après avoir fait la tournée de quelques bars, nous terminerons donc la soirée avec les concerts du festival international du film. Nous avons passé quelques bons moments. Cela est appréciable car très rare dans mon cas. Et je ne recherche définitivement pas à ce que ce genre de soirée se produise tous les jours.
Zanzibar est réputé pour ces images de belles plages de sable blanc se jetant dans une eau turquoise limpide de l’océan indien! Nungwi, à la pointe nord de l’île est réputé pour fournir à ces visiteurs cette vision paradisiaque. Le lendemain matin, avec Allie, nous retrouvons donc Saïd. Nous avons prévus de nous rendre sur place. Ce dernier a, néanmoins, un standard de voyage un peu plus élevé que le mien. Il ne se voit pas prendre un Dala Dala, moyen de transport en commun en Tanzanie. Après qu’il est négocié le prix en Swahili, nous montons donc en taxi. Nous nous arrêtons à Mkokotoni, pour observer la vie dans un village et parcourir le marché aux poissons, réputé sur l’île. Nous en profitons aussi pour admirer quelques villages locaux de pêcheurs et les traditionnelles embarcations en bois appelées «Dhow». Un peu plus d’1h00 après avoir quitté, la ville nous voilà arrivé à Nungwi. Ne sachant pas si nous allons rester dormir pour la nuit ou non, nous voyageons très léger.Nous marchons le long de la côte. Nous admirons ces belles plages et l’eau turquoise dans lesquelles elles plongent. J’aime immédiatement cet endroit. C’est très intéressant de voir que de petites auberges pour touristes à budget serré, cohabitent avec de grands hôtels luxueux, mais aussi plusieurs villages traditionnels locaux de pêcheurs. D’ailleurs nous allons pouvoir les admirer dans leurs tâches quotidiennes: pêches avec filets en bord de plage, réparation des embarcations en bois et des filets, préparation pour partir à la pêche en haute-mer, vente de produits alimentaires sur un petit marché local, préparation de plats locaux dans un petit restaurant local. D’ailleurs avec Allie, nous étions plutôt motivés pour manger dans ce dernier. Mais les conditions sanitaires des cuisines et la nourriture proposée rebute directement Saïd. Nous allons donc nous tourner vers un restaurant pour touristes en bord de plage. Les prix sont incomparables mais la qualité et la présentation aussi. Pendant le reste de la journée, nous profitons des lieux en nous promenant le long de la côte. J’ai décidé que je resterais sur place, même s’ils décident eux de rentrer, même si je dois dormir à la belle étoile. Ils vont finalement m’emboîter le pas. Après que j’ai trouvé un petit lodge avec 3 chambres, Saïd va négocier les prix en Swahili. Cela facilite très nettement la transaction, surtout que la nuit est déjà tombée et que cette personne n’a pas de clients. Nous allons obtenir un prix imbattable convenant à tout le monde. Nous partageons une seule chambre. Elle est très belle, grande, et avec un confort irréprochable. Le propriétaire nous rajoute même un matelas au sol.
Le lendemain matin, je suis le seul à me réveiller de bonne heure. Je pars admirer le lever de soleil en bord de mer. Je vis un moment exquis. Les plages sont désertes à cette heure matinale et elles le resteront, pour ainsi dire, toute la journée. En effet en cette fin de mois de juin, la saison touristique n’a pas encore commencée. Plus de la moitié des grands hôtels de luxe sont encore fermés à la clientèle. Ils n’ouvriront pour certains qu’à la mi-juillet. Des employées, aux différents coins de l’île, remettent ces hôtels en l’état et préparent l’arrivée massive de touristes. Beaucoup d’entre-eux sont italiens. En effet, de nombreux établissements sont tenus par ces derniers. Ils existent des vols directs entre l’Italie et Zanzibar. C’est pourquoi, dans certains endroits, les locaux, qui sont employés dans ces structures, parlent mieux l’italien que l’anglais. Cette donnée me permettra aussi pour la première fois dans le voyage de trouver un pot de Nutella, au même prix qu’en Europe, alors qu’ils sont souvent 2 ou 3 fois plus chers sur le reste de la planète. C’est un petit détail infime mais agréable quand tu n’as pas eu le plaisir de déguster un tel produit depuis des mois… Quoi qu’il en soit, après presque 2h00, je rejoins Allie et Saïd à la chambre. Nous allons prendre un petit-déjeuner avec vu sur l’océan, avant qu’ils ne reprennent la route vers Stone Town.
De mon côté, je veux profiter un peu plus des lieux et de leurs quiétudes en cette fin du mois de juin. J’y reste donc 2 jours de plus. Je profite de la tranquillité et la beauté des lieux. Je prends part à un tour en bateau pour plonger avec masque et tuba autour de l’île de Mnemba et sa zone protégée. Une fois encore, je me retrouve dans un vrai aquarium naturel avec de magnifiques coraux et des centaines de poissons tropicaux très colorés. Je profite aussi de la présence de tortues, que je trouve toujours aussi magnifiques, de barracudas et des dauphins, que nous observerons depuis le bateau. Je marche beaucoup le long de la côte. Je découvre Nungwi en long et en large ainsi que de Kendwa, un peu plus au Sud-Ouest, et qui n’est qu’une suite d’hôtel de luxe. Même si je ne suis pas client, je profite des équipements des grands hôtels déjà ouverts, tels que les magnifiques piscines débordantes avec vue sur mer. Le moment sur place est exquis. Je fais quelques rencontres sympathiques avec des touristes et des locaux… Voici tout de même venu le temps de regagner Stone Town. J’y retourne avec un Dala Dala, moyen de transport collectif. Je ne passe pas beaucoup plus de temps sur la route, qu’à l’allée et suis avec des locaux très intrigués mais aussi passionnants.
L’avantage de cette île est qu’elle ne possède pas seulement des plages paradisiaques mais aussi de nombreuses autres activités liées à sa diversité naturelle et à la richesse culturelle. Les jours à venir seront donc riches en découvertes diverses. Après avoir hésité longuement, je décide de rester chez Anita. Je vis l’expérience la plus étrange en Couchsurfing que je n’ai jamais expérimenté. Cette hongroise, de plus de 40 ans, c’est mariée avec un tout jeune tanzanien, tout juste la vingtaine. J’assiste donc à ce que l’on appelle les «lady boy». Cela consiste en un jeune africain, qui se met avec une européenne âgée, pour satisfaire les envies de ces dames, mais aussi et principalement pour l’aspect financier et tout ce que cela pourrait leur apporter. Cela ne me dérangerait pas plus que cela s’ils étaient tous les deux heureux. Mais c’est loin d’être le cas. Son mari est jeune. Depuis qu’il est marié, il n’en fait qu’à sa tête, découche tous les soirs et ne passe pas de temps avec elle. Tandis qu’Anita est devenu totalement raciste. Elle met tous les tanzaniens dans le même panier. Elle ne leur trouve que des défauts… Je ne serais pas resté si une autre personne, une australienne ne serait pas présente dans la maison. De plus, nous n’allons quasiment pas la voir, n’allons donc quasiment pas interagir avec elle. Je serais la plupart du temps hors de la maison. Elle n’y sera quasiment pas non plus car elle prépare son retour en Hongrie, avec son mari. Elle a décidé de tout quitter sur un coup de tête. Elle doit donc revendre le plus d’affaires et trouver un locateur pour reprendre son bail. Une vraie histoire de dingue! Je ne vois pas comment leur histoire marchera car ils n’ont rien en commun, mais cela les concerne, pas moi! Pour ma part, je n’ai jamais vécu une expérience de Couchsurfing comme celle-là. J’aime normalement passer du temps avec mes hôtes et expérimenter leur vie. Ça ne sera pas le cas cette fois-ci où je vais essayer le plus possible de l’éviter et de ne pas interagir avec elle. Nous ne pouvons pas nous entendre avec tout le monde, surtout quand nous n’avons pas du tout les mêmes valeurs et principes en commun…
Cela ne m’empêche pas de profiter des merveilles de Zanzibar, de faire abstraction de ces personnes pas bien du tout dans leur peau… Lors des jours suivant, j’enchaîne les activités intéressantes et les moments de vie spéciaux.
L’île est réputée pour ces épices. Je ne désirerais pas prendre part à un tour organisé. Mais je vais me rendre à Kidimni. Je marche dans les fermes alentours pour découvrir leurs plantations, les différentes plantes et arbres produisant ces denrées rares, et les processus de fabrication. Le lendemain, avec un local, nous partons, en bateau, pour visiter «Prison Island». En 1893, la construction d’une prison a en effet été entreprise. Lors de la même année, une épidémie sévère de choléra va sévir en Egypte, puis en Inde. Or, à cette époque, Zanzibar est le port principal d’Afrique de l’Est. Il est finalement décidé que cette prison, tout juste finie, servira de centre de quarantaine pour tous les bateaux arrivant d’orient. Cette île et son bâtiment principal ne serviront donc jamais de prison mais de centre sanitaire. Aujourd’hui cette île a un autre attrait majeur. La présence d’une colonie des tortues terrestres géantes d’Aldabra. Ceux sont les deuxièmes plus grosses au monde, après celle des Galápagos. Elles sont une espèce menacée de disparition. Avant le 17ième siècle, elles vivaient en grande nombre dans les différentes îles de l’ouest de l’océan indien. Mais après, l’arrivée des explorateurs, elles ont été déplacées, leur territoire détruit, ou elles ont été tuées. Elles sont passés très près de l’extinction après qu’elles n’aient survécu que sur une seule île des Seychelles; Aldabra. Cette colonie présente à Zanzibar est précieuse encore aujourd’hui car elle constitue un pourcentage important des derniers représentants de cette espèce. Elles ont été données par l’état des Seychelles comme cadeau, il y plus de 50 ans. Elles sont maintenant une des attractions majeures de l’île. Un mâle a une carapace pouvant atteindre 122 centimètres de long (90 cm pour la femelle). Il peut peser jusqu’à 250 kg (160 kg pour la femelle), et ils peuvent vivre jusqu’à plus de 100 ans (sachant que la moyenne est au environ de 95 ans). Je vais passer un très bon moment à leur côté, les voyant se déplacer lentement, manger, et copuler. Nous regagnerons ensuite le bateau, avant que je plonge avec masque et tuba pour admirer les fonds marins coralliens, aux abords de l’île.
La journée suivante, je me rends dans la forêt de Jozani, qui se trouve vers le sud-est de l’île. Cette forêt primitive et originelle est splendide. Avec un guide je marche sur ces sentiers nature. Nous pouvons voir divers plantes et animaux. J’y découvre aussi, un peu plus tard, la mangrove, en marchant sur une longue passerelle en bois de plus d’un kilomètre. Mais les stars de cet endroit sont les singes Colobus rouge. Ces derniers ont longtemps été chassés par l’être humain. Ils sont maintenant protégés depuis des années. Un programme de cohabitation a été trouvé entre eux, les locaux et leurs impératifs pour leurs cultures agricoles. Le guide nous dit qu’il y a encore 15 ans, ces derniers étaient très craintifs. Ils ne se laissaient pas approcher. Puis une relation de confiance à pu naître. Ils ne sont maintenant plus farouches du tout. Nous allons pouvoir les approcher de très près, de tel façon que nous pourrions les toucher si nous voulons (cela ne se fait pas pour des raisons de transmission possible de maladies, pour conserver leur indépendance et le fait qu’ils restent à l’état sauvage). J’admire, de très près, nombre d’entre-eux, dont des mères avec leur bébé. Je vais aussi me rendre, le même jour, sur les très belles plages du Sud-est de l’île, près Paje, Bwejuu et Michamvi. Elles sont plus isolées que leur homonyme au Nord. Les découvrant sous un ciel grisâtre, le rendu visuel sera un peu différent. Je marche pendant des heures sur ces plages de sable blanc, séparant une mer d’un bleu intense et la forêt avec des cocotiers. A certains endroits, j’ai le sentiment d’être sur une île déserte.
Lors des deux derniers jours à Zanzibar, la situation est un peu incroyable, extravagante. En effet, Anita a déjà quitté l’île pour repartir en Hongrie, tournant une page sûrement très spéciale de sa vie. Elle m’a pourtant laissé les clés et quelques simples instructions pour quand je quitterais les lieux. J’ai donc la maison pour moi tout seul, avant que le nouveau loueur investisse les lieux. Cela n’est pas pour me déplaire, bien au contraire, mais c’est inimaginable pour une expérience en Couchsurfing... Je passerais alors des moments encore plus sereins, avant que mon heure vienne aussi de quitter cette île, qui m’aurait permis de passer un très bon moment. J’ai envie de découvrir d’autres endroits de la Tanzanie. Je vais aussi échapper, à quelques jours près, au Ramadan, sur cette île à très grande majorité musulmane. C’est toujours un peu compliqué de se trouver dans un tel lieu, pendant une telle période quand tu n’es pas pratiquant. Encore, si j’avais pu vivre l’expérience avec une famille musulmane, depuis l’intérieur pourquoi pas, mais ça n’aurait pas été le cas. Je prends donc le ferry pour regagner la partie continentale du pays. Le trajet est vraiment splendide. Nous passons à côté de petits îlots de sable fin blanc. L’arrivée sur Dar-Es-Salaam est aussi magique. De grands et modernes bâtiments bordent une mer bleue azur tandis que de vieux bateaux en bois de pêche naviguent près de la côte.
Je ne désire pas rester très longtemps dans cette ville. J’ai trouvé une personne pouvant me loger grâce au site Couchsurfing. Elle s’appelle Chenda. Elle est coiffeuse. Je ne la verrais finalement pas sur Dar-Es-Salaam mais un peu plus tard. Elle est, en effet, en déplacement dans les terres. Mais son frère; Mona, et sa belle-sœur; Amina, sont ravis de m’accueillir dans la maison familiale. Je vais, en premier lieu, me rendre à l’ambassade du Kenya pour y faire mon visa. J’aurais pu le faire à la frontière mais je préfère assurer l’obtention de ce dernier. Ici, je peux l’obtenir en moins de 24h00, en remplissant une simple feuille d’information et en payant 50$US. Je rejoins ensuite le quartier où vie la famille de Chenda. Il s’agit d’une banlieue assez défavorisée de la capitale économique. Les maisons sont parfois rudimentaires. Il est facile de voir la pauvreté, qui sévit dans cet endroit, et la vie basique de la majorité des habitants. Amina m’accueille à l’arrêt de bus sur un des axes principaux, près de la maison. Cette dernière est d’un standard assez élevé pour le quartier. Il y a plusieurs pièces: une salle à manger, un salon et 3 chambres… Ce qui est presqu’un luxe ici même si la maison reste très rudimentaire! Nous faisons connaissance les uns des autres et nous passons un bon moment ensemble. Mona aime le football. Il sait que la France joue son premier match en soirée. Nous allons donc nous rendre chez un de ces amis. Non seulement, j’ai la chance de voir le match, d’être en bonne compagnie mais, en plus, nous allons avoir le droit à un très bon repas, consistant à un plat de pâtes avec légumes et viande. La France gagne son match d’ouverture contre l’Equateur: 3-0! Cela est de bons augures pour la suite. Nous rentrons à plus de 1h00 du matin chez mes hôtes…
Le lendemain, je veux me rendre dans le centre-ville, avec plusieurs objectifs en tête. Je pars tôt le matin, alors que le soleil vient à peine de se lever et que la nuit fut courte. Je désire découvrir un des plus grands marchés de poissons de l’Afrique de l’Est, voire du continent. Au terminus du Dala Dala, quelqu’un m’indique le chemin de ce marché et m’accompagne un peu! Au vu de la fréquentation, je pense directement à mettre mon sac-à-dos en position ventral. Mais je suis déjà dans le bain de foule et je n’ai pas pris le temps, ni penser à vider les poches de mon pantalon… Je suis sur place, seulement depuis quelques minutes, qu’un pickpocket est déjà passé en action. Il vient d’ouvrir la poche, avec fermeture éclair, qui se trouve au-dessus de mon genou de ma jambe droite. Il vient d’en retirer mon porte cartes, que j’utilise pour mettre mon argent du quotidien et ma carte périmée qui me sert de lueur, si besoin. Je n’ai donc rien perdu de grave, ni d’importants mais cela me frustre tout de même. Je suis, quoi qu’il en soit, heureux d’avoir ma ceinture ventrale avec tous mes documents importants qui sont mon passeport, mes cartes de crédit, et la plus grosse part des sommes en liquide. Je vais sans le savoir avoir la bonne réaction. Je m’approche tout de suite de personnes, des hommes qui sont proches de moi. Je leur dis ce qu’il vient de m’arriver. Ils ne réagissent pas en premier lieu. Je fais donc un petit tour rapide pour réfléchir, prendre un tout petit peu de distance, avant de revenir sur les lieux. Ma surprise est totale. Par terre, dans la terre et l’eau gît mon porte carte. L’intégralité de ce qu’il contenait est présent, même l’argent liquide, exception faite d’un billet de 5000 shilling tanzanien, ce qui correspond à un peu plus de 2 euros seulement. Les personnes, avec qui j’avais interagie, quelques secondes auparavant, tiennent à me dire qu’il n’y a pas de voleurs ici, que tout cela s’est passé dans le mouvement de foule! Tout le monde sait que ceux ne sont que des mensonges mais peu importe. Je n’ai rien perdu. Je pourrais continuer à utiliser ce porte-cartes bien utile dans ce genre de situation par exemple. Je mets tout dans mon sac et le ferme méticuleusement.
Je vais ensuite passer beaucoup de temps à observer tout ce qui se passe sur ce marché. C’est impressionnant le nombre de personne qui se trouve dans ces lieux. Au bord de l’eau, les bateaux de pêche en bois arrivent en continue, déversant dans de grands sots diverses variétés de poissons. Une ou des personnes se chargent ensuite de les emmener sur les étals. Certains vendeurs vendent leurs poissons au kilo. D’autres types de poisson sont mis aux enchères. Des dizaines de personnes se trouvent autour de grandes tables, où sont présentées les pêches du jour. Le plus offrant emporte le lot et cela se produit en continu. C’est fascinant de voir comment cela se passe et la fréquentation que cela peut générer. Ce regroupement de personnes est très coloré, principalement en raison des habits et voiles des femmes. Il est vraiment possible de trouver une telle quantité impressionnante de poissons. Ils vont du tout petit, pour faire de la friture, jusqu’à des poissons de plusieurs dizaines de kilogramme. Il y a aussi des crevettes, des langoustes, des raies, des murènes et tous autres fruits de mer qui peuvent se manger. Après la mauvaise expérience du début, je fais de très belles rencontres, des personnes qui sont intéressées de savoir d’où je viens, qui veulent me donner plus d’informations sur leur métier. Je profite alors de cet échange alors qu’il pleut des cordes pendant de longues minutes. Etre au sec sous ces grands préaux n’est pas un luxe... Lors de la première accalmie, je sors de ce marché et je continue ma visite de la ville. Je vais me rendre dans le centre-ville, arpenter les rues et ruelles, découvrir de petits endroits et finalement trouver un restaurant local pour y déguster un plat de riz avec poisson et légumes. Je ne vois pas passer le temps…
Après avoir récupéré mon passeport et réservé mon billet de bus pour le lendemain pour continuer ma route, je rentre chez Mona. Nous allons passer une très bonne soirée ensemble avec les enfants et Amina. Cette dernière cuisinera pour nous la nourriture de base dans le pays. Il s’agit d’Ugali, qui est une sorte de pâte, assez solide, obtenue à partir de poudre de maïs, mélangé avec de l’eau. Une grande majorité des tanzaniens mangent ce plat, au moins une fois par jour, en l’accompagnant de légumes verts ou viandes…
J’aurais pu rester un peu plus longtemps car ces personnes sont vraiment sympathiques. Mais j’étouffe, en ce moment, dans des grandes villes. Après avoir passé plusieurs semaines à Lomé, j’ai été tellement heureux de repartir sur les routes et de retourner dans la nature. Je suis donc prêt à rejoindre Chenda près de Moshi.Mona m’accompagne à la station de bus avant 6h00 du matin. Il va y délivré un téléphone à un client. Il m’aide aussi à facilement trouver mon bus dans ce massif parking, où des centaines de véhicules sont prêts à partir dans les prochaines minutes, dans toutes les directions. Pour rejoindre Moshi, le trajet va durer plus de 10h00. Nous allons passer à travers de très beaux paysages, plus ou moins arides, plus ou moins peuplés, avec certaines cultures agricoles typiques de ces milieux comme l’aloevera. Je vais aussi pouvoir observer, lors de quelques arrêts, des Masaïs, fameuse tribu de cette partie du monde. Ils semblent beaucoup plus authentiques que ceux que j’avais pu voir à Zanzibar, qui semblaient continuer cette tradition plus pour le folklore et le plaisir des touristes. Ils sont originaires du nord de la Tanzanie, où je me rends. Ils pérennisent ici leur mode de vie, leur mode vestimentaire, leurs accoutrements et leurs traditions. Ceux sont des peuples nomades qui vivent avec leur cheptel, majoritairement de vaches. Ils se déplacent au grès des saisons et de la nourriture disponible pour leurs animaux. Ils ont un mode vestimentaire reconnaissable parmi tous. Leur ornement et bijoux sont aussi très particuliers, par exemple au niveau de leurs oreilles, dont ils ont volontairement agrandi le lobe et qu’ils ont percé. Les femmes possèdent de nombreux bijoux au cou. Les hommes revêtent une coiffure unique, avec des cheveux très longs au centre mais rasé sur les côtés… Leur corpulence filiforme est aussi un signe de reconnaissance des Masaï qui entretiennent leur légende.
Il est 16h00 quand j’arrive à Moshi. J’y retrouve facilement Chenda à l’arrêt de bus. Immédiatement, nous prenons un Dala Dala pour nous rendre dans le village où elle réside depuis plusieurs semaines. Je n’avais pas compris que nous allions si loin. Nous avons encore presque 2 heures de routes à faire. Je savais qu’elle ne vivait pas actuellement en ville, que je m’apprêtais à vivre une vie simple de villageois, vivant avec peu de choses, mais je ne m’attendais pas à ce que nous nous rendions si loin, après qu’elle m’ait dit qu’elle se trouver près de Moshi! Qui plus est, je ne suis pas au bout de mes surprises! Après avoir pris un des axes principaux, nous allons changer de route pour prendre tout d’abord une route sinueuse de montagne. Je vais pouvoir admirer des paysages changeants drastiquement entre les alentours de Moshi très secs et une nature devenant de plus en plus fleurissantes lors de l’avancée de notre périple. Après avoir passé un énième village, nous prenons finalement un chemin non goudronné, qui va nous mener jusqu’au village. Nous arrivons sur la place de l’église alors que la nuit tombe. Nous allons encore devoir marcher pendant plus d’une demi-heure pour atteindre la maison où je vais passer les prochaines semaines (même si je ne connais pas encore la durée à cet instant T).
Après plusieurs années à Dar-Es-Salaam, 2 ans à Arusha à travailler dans une agence de voyage, Chenda a habitée Moshi où elle a travaillée pendant 1 an. Elle vient de quitter son travail et elle est venue s’installer chez des membres de sa famille dans ce village. Je ne réalise pas encore à ce moment où je me trouve, j’en ai d’ailleurs aucune idée, si ce n’est que je me trouve dans la région de Moshi. Je vais habiter dans la maison de Maria et Aloyce, des parents que je ne verrais que ponctuellement. Ils ne seront pas souvent présents chez eux. Je côtoierais un peu plus Maria qui sera souvent là en matinée. Mais Aloyce qui tient une petite boutique passe son temps sur place. Ils dorment tous les deux dans le magasin pour en assurer la surveillance et la sécurité. Ils ont 4 enfants. L’aînée fait ces études à Arusha. Je n’aurais pas la chance de le rencontrer. Glorie vient d’arrêter ces études car elle est enceinte, avec un futur père totalement absent. Elle s’occupe des tâches ménagères et de la cuisine. Elle est aussi en charge sa petite sœur Sia, et son petit frère Abba. Avec les 3 derniers de la famille, nous allons passer de très bons moments. Sia et Abba dorment dans l’ancienne maison de la famille en bois. Glorie dort dans la nouvelle maison en dure, faite de briques, de ciment et d’un toit en tôle. Dans cette dernière, il y a aussi un salon et une chambre occupée par Chenda, où je vais dormir aussi. Nous commencerons, après notre arrivée, à nous installer autour du feu, dans la «cuisine». Cette dernière consiste en un petit cabanon en bois avec un coin pour le feu, pour cuire les aliments entourés de trois grosses pierres, servant de trépieds, pour y déposer les marmites. Après un délicieux repas, nous allons rapidement rejoindre nos lits, tous pris par la fatigue.
Le lendemain, je prends conscience un peu plus, et petit à petit, du lieu où je me trouve. Le petit-déjeuner sera du Chai (thé au lait sucré) préparé avec le lait de la vache leur appartenant, et qui est gardé précieusement dans l’étable qui jouxte l’ancienne maison. Ils ont aussi des chèvres, des poules et des lapins. Leur maison se trouve en pleine nature. Elle est entourée de plantations de bananes, de café, et autres légumes plantés sur divers terrains. Avec Glorie, nous allons sur le marché du village qui a lieu un peu plus bas. Tous les produits de la région, et seulement ces derniers, sont vendus sur place. Nous achetons un peu de viande de bœuf, des légumes et des bananes plantains vertes, plus de 5 kilogrammes de ces dernières. Nous faisons quelques rencontres sympathiques mais surtout tout le monde est surpris de ma présence sur place. Les enfants m’appellent, ou plus souvent crient «Mzungo», qui signifie Homme blanc en Swahili. Ils sont très surpris de me voir dans leur village et ils n’ont pas l’habitude de voir des étrangers ici…
Il n’y a pas d’eau qui coule du robinet présent dans la cour. Avec de grands seaux d’eau, nous devons donc aller chercher de l’eau disponible chez un autre voisin. Je vais faire la connaissance des enfants du voisinage, dont Glorie, une petite fille d’à peine 3 ans, assez timide. Je vais tout de suite avoir un coup de cœur. Je passe vraiment de très bons moments avec ces personnes simples, où les enfants parlent un anglais, de plus en plus maîtrisé, lorsqu’ils sont d’un niveau avancé dans leur étude. En effet, depuis leur naissance, à la maison et avec les locaux, ils parlent le dialecte du coin. Avec les autres personnes du pays, ils parlent Kiswahili. Mais la langue de l’éducation est l’anglais. Ils commencent donc vers l’âge de 5 ans à l’apprendre et la pratiquer. Avec les années d’études, le niveau s’améliore au fur et à mesure des années.
Je découvre ensuite ce que l’on peut faire avec des bananes plantains non mûres. J’aide Glorie à éplucher ces dernières avant de les mettre dans une grande marmite. Elle les accompagne de tomates, carotte, oignons, poivrons, et un peu d’huile. Elle fait ensuite bouillir le tout dans une grande quantité d’eau. Elle fait cuire en même temps des pommes de terre avec certains légumes verts que nous ne trouvons pas en France. Plus d’1h30 après le début de cuisson, nous obtenons une soupe dense et des gros morceaux de bananes, en raison des caractéristiques de ces dernières. Le déjeuner est bon. Je suis heureux de pouvoir déjà essayer une des spécialités de la région. La vie va se résumer à de petites choses. Le confort est sommaire mais c’est autre chose que je recherche dans ce type d’expérience. Je suis comblé de pouvoir vivre la vie d’une majorité de tanzanien. Le simple trou dans le sol, entouré par 4 murs en bois, pour les toilettes, ou la douche qui ne consiste qu’en 4 bout de tissu, tendus le long d’une structure en bois, peuvent dégoûter certaines personnes. Cela ne me concerne pas. Peu importe si je dois me laver avec une simple bassine et un gobelet, mettre les pieds à même le sol, qui est devenu boueux, j’ai tout de même ce qu’il faut pour passer un instant magique: bonne compagnie, expérience culturelle, de quoi être propre, boire et manger… des basiques de la vie qui me suffisent amplement lors de cette expérience.
Chenda pratique ces talents de coiffeuses sur des clients venus à domicile. Encore une fois, c’est impressionnant de constater le temps qu’il faut à une coiffeuse pour terminer un travail sur une de ces clientes. En effet toutes les africaines ont les cheveux courts, frisés et crépus. Les femmes, qui en ont les moyens, se paient des rajouts. Il faut pour cela tresser le peu de cheveux qu’elles ont. Puis commencer ensuite un vrai travail de couturière, pour coudre, sur les cheveux existant, ces rajouts de forme, de couleurs, et de longueur de toutes sortes. Très souvent, la coiffeuse passe une journée complète avec une cliente. Je trouve intéressant de regarder comment cela se déroule mais je n’ai pas envie de rester à les observer toute la journée… Philibert, un voisin, est venu prendre le déjeuner avec nous. Alors que nous discutons de divers sujets, ils me font comprendre que l’on peut voir des montagnes d’ici et qu’il y a de très beaux points de vue, non loin de la maison. En ce début d’après-midi, le soleil perce les nuages et les éclaircies sont de plus en plus nombreuses. Depuis le jardin, je peux alors voir un sommet. Je demande s’il est possible que je me promène dans les environs. Chenda demande à Philibert de m’accompagner. Ce dernier accepte avec plaisir.
Nous nous promenons dans le village. Je peux observer les habitants dans leurs tâches quotidiennes tels que la préparation des terrains pour l’agriculture, la découpe de bois, la construction de maison, la cuisine… Toutes les personnes sont très surprises de me voir. Elles me saluent, veulent me serrer la main. Les enfants, dès qu’ils m’aperçoivent, crient «Mzungo». Puis ils accourent même s’ils se trouvent à plus d’une centaine de mètres. Impossible de passer incognito, ou de me promener dans ce village sans que tout le voisinage soit au courant. Encore une fois, j’ai l’impression de vivre ce qu’une star internationale peut vivre au quotidien. Je trouve cela marrant, excitant pendant quelques minutes, mais je préfère largement ma vie d’anonyme! Le fait que je peux faire ce que je veux quand je veux, sans avoir toute l’attention porter sur moi… Pour moi la star de la journée va m’apparaître quelques minutes plus tard. Sortant d’une zone de végétation plus dense et avec de grands arbres, je peux admirer depuis le chemin, au-dessus de bananiers, le sommet du Mont Kilimandjaro… Nous continuons à marcher et prendre un peu de hauteur. Puis nous atteignons la frontière entre le village et le parc national, qui englobe l’ensemble du massif du sommet le plus haut d’Afrique. J’ai alors une vue imprenable sur Mawenzi, deuxième sommet le plus haut, avec une silhouette très déchirée. Je vois aussi très bien le cratère de Kibo, dont le sommet d’Uhuru, à 5895 mètres; le toit de l’Afrique! Ce fameux point, que tout randonneur un peu chevronné et encore plus les montagnards, voudraient atteindre un jour. Je réalise alors que je suis sur un des versants du Mont Kilimandjaro et que je vais vivre une expérience unique. Alors que la plupart des touristes, venant ici, ne voient que les sentiers menant au sommet, je vais vivre auparavant plusieurs jours avec des villageois. Ils vivent au quotidien sur ce massif volcanique. Ils ne sont pourtant pas du tout concernés par cette ferveur touristique pour leur montagne!
Après avoir pleinement profité du point de vue dégagé, nous retournons tranquillement vers la maison. Avant de partir en ballade, Philibert avait attrapé un petit rongeur. Je vais assister à une scène très particulière, qui aurait pu faire tourner de l’œil, à de nombreuses personnes. Philibert attrape ce dernier. Il lui transperce l’abdomen à l’aide d’un grand couteau. Il y retire le cœur encore palpitant. Puis il le donne à Chenda, qui va le dévorer tel quel. Les croyances dans la région disent que c’est un très bon remède contre de nombreuses maladies, en particulier l’asthme dont Chenda est atteinte… Les us et coutumes sont vraiment différents selon les cultures. Chenda veut alors remercier Philibert. Elle lui donne un billet pour qu’il se paie un verre de la bière locale. Philibert veut partager cette dernière avec moi.
Me voilà donc reparti avec lui sur ces chemins en terre qui desservent toutes les fermes du village. Nous nous rendons dans une petite échoppe en bois vendant le Bégé. Il s’agit donc de bananes plantains, qu’ils font fermentés. Le goût est très spécial, assez fort, même si le pourcentage d’alcool reste faible. Il y a aussi beaucoup de tous petits morceaux de bananes qui rendent ce breuvage encore plus particulier. Je vais en boire un peu même si je n’en raffole pas vraiment. Maria, la maman, va alors faire son apparition. Je lui offre donc un verre. Ensuite, en rentrant, Philibert me conduit dans le petit magasin d’Aloyce. Je vais très vite comprendre qu’il voudrait que je paie ma tournée de bières. Je lui dis que je n’en ai pas besoin et envie, que je préfère rentrer à la maison. Le problème d’alcool chez les hommes, même très jeunes, est un vrai fléau dans ces endroits. Ils dépensent souvent tout l’argent qu’ils peuvent gagner dans ces boissons alcoolisés, négligeant même parfois l’apport de nourriture pour la famille. Je ne veux définitivement pas participer à cela. Je ne veux pas que Philibert, à peine la vingtaine commence à suivre le même chemin que ces voisins plus âgés, et en plus qu’il croit qu’un «Mzungo» doit tout payer! En plus, je n’en ai vraiment pas envie… (Ça aurait été du rhum ou du bon vin, pourquoi pas, nous aurions pu être totalement saoul et j’aurais payé de nombreuses tournées… Je plaisante bien entendu! Je préfère en rire car malheureusement il n’y a pas grand-chose que je puisse faire. Chacun fait ces choix. Etant de passage, je n’ai aucun pouvoir de dissuasion même si je peux dire ce que j’en pense. D’ailleurs, malheureusement, je vais constater à plusieurs reprises que l’alcool est omniprésent et crée des situations malsaines).
Alors que nous rentrons pendant que la nuit tombe, le ciel c’est totalement dégagé. Je peux admirer, maintenant, clairement le pic de Mawenzi et le cratère de Kibo. Les couleurs sont belles lors de ce coucher de soleil.
Les jours suivant vont ainsi se passer dans la plus grande simplicité d’une vie locale. Nous cuisinons au feu de bois, mangeant en majorité ce qu’ils produisent et achetons quelques denrées au marché. C’est un vrai plaisir d’avoir du lait frais, de boire du Chai, tous les matins, de pouvoir goûter au yaourt qu’ils produisent avec leur propre lait. Nous allons aussi faire des chappattis que nous dégusterons avec des haricots rouges et une sauce à la tomate très relevée. Sûrement mon plat préféré dans la région! J’aime aussi les Samossas ou l’omelette améliorée que nous allons cuisiner avec Chenda.
Après 1h30 de ballade, avec Chenda, le lendemain, nous arrivons au point de départ de la route de Marangu pour atteindre le sommet du Kilimandjaro. C’est aussi d’ici que partent des visites journalières, pour les personnes n’entreprenant pas l’ascension. Après nous être baladé dans les villages locaux, le contraste est flagrant. Rien ne rapproche la vie simple de ces habitants, qui ne croisent que très rarement un étranger, et ce départ très fréquenté, ultra touristique de ballade pour le sommet du Kilimandjaro. Il est tout de même intéressant, pour moi, de me rendre sur place, de pouvoir demander des informations à la source concernant l’ascension. J’ai maintenant une certitude concernant des prix exorbitant, qu’il est obligatoire de partir avec guide, cuisinier et porteurs, et qu’il faut passer par une agence. J’ai donc obtenu des informations précieuses mais j’en resterais là pour la journée. Nous allons ensuite regagner, avec Chenda, le village et retrouver la quiétude, je pourrais presque dire la torpeur, de ce lieu en montagne, qui se dénomme Komela. Je suis ravi de retourner dans ce lieu unique pour moi, sortant totalement de l’ordinaire d’un touriste lambda.
Les jours suivants, je continue d’apprendre et vivre la vie des locaux. Je m’amuse beaucoup avec les enfants des voisins. Je fais pas mal d’activités avec Abba, comme aller chercher le foin pour le bétail, couper le bois pour le feu. J’aide Glorie à préparer à manger. Nous avons de longues discussions avec Chenda. Avec Philibert, nous allons faire d’autres promenades pour découvrir les environs, les cours et chutes d’eau, les fleurs et animaux présents à proximité. Je passe un moment exquis. J’apprends jour après jour un peu plus de Swahili. D’ailleurs, je vais trouver cela fascinant quand j’apprends comment dire liberté dans cette langue. Je vais comprendre pendant longtemps que cela se dit «Armani»! Je pense alors que cela se prononce comme une de mes marques de vêtements préférés. En effet, j’ai toujours aimé le design de leurs collections. Le fait que le logo consiste en un aigle, mon animal préféré, pèse lourd dans la balance. Je trouve alors drôle la connexion entre cette langue, cette marque de vêtement, mon expérience sur place et la sensation ultime de liberté, que j’ai lors de mon Vol Libre autour du monde. J’apprendrais finalement que cela se prononce «Amani»! Peu importe, l’image est belle et cela ne change rien…
D’ailleurs en parlant de liberté, de choix et de rêves à réaliser, mon séjour sur place va me permettre d’en réaliser un nouveau. Non, par chance, mais par choix! J’ai aussi fait tout ce qu’il fallait pour me retrouver dans cette situation. Tout ce chemin parcouru, depuis la maison, depuis mon pays natal, n’est pas vain, bien au contraire! J’en prends conscience chaque jour et j’en profite chaque jour. Je vis la vie que je souhaite pour le moment, je suis là où je veux être. Je ne changerais pour rien au monde ma place contre celle d’un autre…
Encore un magnifique pays et une expérience de vie formidable au plus près des habitants.
RépondreSupprimerNous avons hâte de grimper le Kilimandjaro avec toi.
Bisous et bon vol. Prends soin de toi. Papa
que d’expériences multiples et variées!!!!
RépondreSupprimerbonne continuation
bisous maman